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La Formation agricole et rurale dans la vallée du fleuve Sénégal : appui à la mise en place d'un cadre de pilotage régional

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par Xavier MALON
Université de Toulouse 1 Sciences sociales - Master 2 Pro Ingénierie de formation et des systèmes d'emploi 2007
  

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II. 1.5- QUALITE DE LA FORMATION

Selon la définition qu'en donne le site du Centre-Inffo, « la qualité en formation, c'est « l'ensemble des caractéristiques d'une entité qui lui confère l'aptitude à satisfaire des besoins exprimés ou implicites ;. Les normes, labels et certifications permettent d'organiser la mise en place d'une démarche qualité. »

En formation professionnelle, les démarches qualité sont apparues au début des années 1980 ; elles s'appuient sur les caractéristiques spécifiques des services proposés, regroupées sous la forme de référentiels que l'on appelle des normes, qui garantissent une qualité constante des services proposés. Appliquées au domaine de la formation continue, les normes les plus usitées sont la norme ISO 9001 et les normes AFNOR.

A l'instar d'un label, basé sur un acte « déclaratif »45 (du professionnalisme, des compétences, de l'expérience de l'organismes de formation), qui renseigne le consommateur sur les niveaux des performances annoncés, la norme internationale ISO 9001 46_ applicable à la formation mais non spécifique à celle-ci_ ne garantit pas le résultat, mais le respect rigoureux d'un processus préalablement et entièrement formalisé.

La norme ISO 9001 version 2000 « approche processus » insiste sur l'importance :

· Des exigences, qu'il faut comprendre et satisfaire ;

· Des processus, à considérer en terme de valeur ajoutée et dont il faut mesurer l'efficacité et les performances, pour améliorer continuellement celles-ci sur la base de mesures objectives.

Les normes de l'Association Française de Normalisation (AFNOR) ci dessous ont été en revanche spécifiquement conçues pour le secteur de la formation professionnelle, dans l'objectif d'améliorer au moyen d'un langage commun et d'une compréhension commune les relations entre les demandeurs et les prestataires de formation.

Le CARIF / OREF des pays de Loire répertorie ainsi six normes :

Les normes AFNOR NFX50-749 « Formation professionnelle - Démarche de normalisation » et NFX50- 750 « Formation professionnelle - Terminologie », complétée par le fascicule de documentation FDX50-751 « Formation professionnelle - Terminologie - Fascicule explicatif » s'appliquent à l'ensemble des acteurs. Elles explicitent près de 140 termes couramment employés dans le domaine de la formation, précisent les concepts et garantissent des acceptions identiques.

Pour les entreprises, (afin d'expliciter la demande de formation)

La norme outil AFNOR NFX50-755 « Formation professionnelle - Demande de formation - Méthode d'élaboration de projets de formation » vise à faciliter pour les entreprises l'élaboration d'un projet de formation et son déroulement. Elle aide, en définissant l'étape d'analyse des besoins, à la construction du cahier des charges.

La norme outil AFNOR NFX50-756 « Formation Professionnelle - Demande de formation - Cahier des Charges de La Demande » aide les entreprises à formaliser leur demande de formation aux prestataires.

Pour les organismes de formation :

La marque NF Service Formation est composée de deux gammes : formation professionnelle continue et formation par apprentissage :

45 A l'image du label délivré par l'Office Professionnel de Qualification des Organismes de Formation : OPQCF

46 ISO 9001 version 2000 « Systèmes de management de la qualité - exigences », applicable depuis le 15/12/2000.

- Les normes outils AFNOR NFX50-760 « Formation professionnelle - Organismes de formation - Informations relatives à l'offre » et NFX50-761 « Formation professionnelle - Organismes de formation - Service et prestation de service : spécification» donnent des orientations en matière d'élaboration de l'offre. Elles garantissent la lisibilité des informations. (caractéristiques du service fourni, moyens nécessaires et mis en oeuvre pour réaliser ce service). - La norme NF214 permet aux CFA, depuis mars 2002, de bénéficier d'une certification qualité de services

La certification NF peut être obtenue sur demande par l'organisme qui en accomplit la démarche, mais elle impose par la suite un audit de suivi régulier pour en conserver le bénéfice.

Pour utiles qu'elles soient, ces normes développées au service de la qualité ne s'intéressent qu'aux seuls organismes de formation, c'est à dire aux organisations dont la formation constitue l'activité principale voire unique. C'est faire peu de cas de la pluralité des catégories d'acteurs qui se positionnent, au Sénégal, sur « l'offre de formation rurale » : ONG, associations, bureaux d'études, consultants, organisations professionnelles et chambres consulaires, services d'appuiconseil et/ou d'encadrement des producteurs qui, pour la plupart, ne font pas de la formation leur principale activité.

L'offre de formation est évidemment plurielle, elle peut recouvrir en partie l'enseignement dispensé au sein du système scolaire (formation professionnelle initiale), et s'étend depuis l'alphabétisation fonctionnelle des adultes jusqu'au fameux Capacity Building, que traduit fort mal l'expression francophone quelque peu galvaudée : Renforcement de capacités.

Plus encore, la formation se définit généralement comme un processus d'acquisition de connaissances, de compétences et de qualification, qui se déroule dans le temps avec des moments situés dans un espace social déterminé.

Or, cette définition n'est qu'un pis aller, dans la mesure où l'on s'accorde généralement à considérer qu'une compétence se construit plutôt qu'elle s'acquiert d'une part, et que d'autre part la mise en situation professionnelle au quotidien, en forgeant l'expérience face aux multiples situations imprévues, est en elle-même la première source d'apprentissage, donc de formation.

La demande de formation

L'AFNOR précise que « la demande de formation est l'expression d'un souhait ou de résultats attendus, exprimés par des personnes salariées ou non, des responsables hiérarchiques, des entreprises ou institutions ». Il est généralement admis qu'une demande de formation, s'il y est donné suite, va enclencher un processus d'ingénierie de formation devant nécessairement conduire à la définition de besoins de formation.

Dans l'économie « formelle », les processus sont parfaitement normalisés ; ainsi, la norme AFNOR NF X 50- 756 définit elle les informations à communiquer par une entreprise (client) à ses prestataires potentiels, pour l'aider à clarifier sa demande afin d'obtenir une prestation de service correspondant à ses besoins.

Or, bien souvent il n'existe pas une, mais des demandes, qui peuvent être contradictoires en fonction des points de vue respectifs des différents acteurs d'un secteur donné. De même, au sein d'une même organisation, il est important de savoir qui porte la demande, s'il en est à l'origine ou non, quels sont les réseaux informels internes, pour mieux relativiser l'importance des fonctions officielles détentrices de pouvoir dans l'organigramme.

Mais surtout, on ne peut considérer comme un manque ce qu'on ignore ; pourtant, dans la majorité des cas, on sollicite la formation (lorsqu'elle n'est pas suscitée par le prestataire !) dans l'espoir inconscient qu'elle soit la réponse la mieux adaptée au problème plus ou moins exploré du moment, ce qui est tout sauf évident.

Souvent aussi, la formulation d'une demande de formation s'apparente dans le milieu de l'entreprise à un moyen de satisfaire à bon compte les revendications des partenaires sociaux.

Si l'on tente de recontextualiser ces différentes données à prendre en considération, pour les utiliser dans le secteur du développement rural au Sénégal, on s'aperçoit assez rapidement que leur niveau de sophistication les rend impropre à un usage tel quel (copier-coller). Cette inadaptation tient pour l'essentiel aux caractéristiques suivantes du contexte d'intervention :

· Secteur économique informel à plus de 90 %,

· Public potentiel très majoritairement analphabète,

· Faible organisation des filières, des branches,

· Pouvoir d'achat très limité (au Sénégal, la pauvreté est rurale à plus de 75 %), qui annihile en partie la capacité décisionnelle du demandeur, contraint de se plier aux exigences du bailleur de fonds.

A notre sens, la demande de formation est ainsi une notion qui, souvent, est mise en avant trop tôt : parler de demande de formation dès la phase de l'expression d'une demande d'appui revient à considérer à priori que la réponse-formation va de soi.

Il ne faut pas oublier également que cette demande peut avoir été exprimée formellement (courrier adressé à un prestataire), qu'elle peut avoir été suscitée dans le cas du démarrage d'un nouveau projet, ou encore reposer sur un rapide recueil de « doléances », à l'occasion d'une tournée d'animateurs de terrain. Dans ces conditions, on ne s'étonnera pas que le consultant, ou pire le formateur appelé à la rescousse pour établir un diagnostic préalable (et souvent rapide), se fasse un devoir de proposer une liste plus ou moins longue de besoins de formation à satisfaire.

Approche par la demande (de formation ?)

Après plusieurs décennies durant lesquelles chacun en était arrivé à estimer que la compétence d'un prestataire de formation se mesurait à la qualité de son catalogue de produits, une inversion de tendance s'est amorcée depuis quelques années, en partie liée au fait que de nombreux organismes, qu'ils soient publics ou privés, se sont contentés de gérer une rente en renouvelant peu leur offre.

Ce constat, largement partagé par les clients habituels, s'est traduit d'abord par une désaffection puis un rejet de l'offre-catalogue (les tentatives de mesurer l'impact réel des formations dispensées sur l'amélioration des performances des bénéficiaires, organisations et individus, n'y sont pas non plus étrangères).

La demande s'est alors largement réorientée vers l'attente de services « sur mesure », individualisés, pour tenter de réduire le gap constaté entre les apports trop abstraits, trop généraux, de la formation, au regard de la complexité et de la spécificité des réalités du terrain.

Bon gré mal gré, les offreurs de formation ont donc été contraints de se réajuster, dans un contexte de concurrence de plus en plus vive. C'est la raison pour laquelle aujourd'hui, tous les opérateurs de formation se réclament d'une démarche d'approche par la demande de formation.

Dans la région de Kaolack (bassin arachidier), une quarantaine d'entretiens conduits et initiés par le Bureau de la Formation Professionnelle Agricole (Ministère de l'Agriculture) auprès d'acteurs situés sur l'offre, sur la demande, et pour certains sur les deux volets, a mis en évidence que tous revendiquent une approche guidée par la demande de formation, qui recouvre selon les cas des modalités, des postures et des compétences très diverses et parfois assez éloignées.47

47 Dossier de capitalisation des expériences de formation dans la région de Kaolack -BFPA disponible sur le net.

Dans certains cas rencontrés, l'expression des besoins a lieu annuellement, à l'occasion d'une assemblée générale villageoise ; parfois, elle constitue une étape, au démarrage du projet. En règle générale, les outils généralement mis en oeuvre sont peu nombreux : diagnostic rapide, étude- filière, entretiens préalables, bibliographie existante sur le sujet.

Force est de constater cependant qu'un biais considérable est introduit au début même du processus ; ce biais se situe à un double niveau :

Au niveau du demandeur, conscient que l'outil formation est généralement le moins coûteux et le plus facilement accepté par le bailleur de fonds sollicité, le problème initialement identifié va plus ou moins consciemment orienter l'intéressé vers une recherche de solution axée sur la formation, couplée avec la pré-identification de personnes ou structures ressources dont les compétences sont reconnues sur ce domaine d'intervention.

Au niveau de l'offreur, qui a donc été approché sur la base de ses compétences en formation, le souhait d'aller dans le sens du demandeur est évidemment légitime, tout au moins commercialement parlant. De plus, c'est un formateur qui va se charger « d'analyser la demande » reçue ; dès lors, on peut mettre en doute sa capacité de recul pour aborder dans une approche systémique le contexte de la future intervention à définir, d'une part parce qu'il ne possède pas nécessairement les outils adaptés, et d'autre part parce qu'il est humain, devant une situation méconnue, de se raccrocher à ce qu'on sait faire.

On constate donc que cette nouvelle approche, proclamée comme une révolution dans le monde de la formation, a peu modifié les pratiques, et n'a que modérément permis d'atteindre les effets escomptés, à savoir une plus grande satisfaction du demandeur, et un impact plus visible sur les pratiques des formés.

Tout au plus peut-on mettre à son actif l'instauration d'un dialogue moins superficiel entre l'offreur et le demandeur, lequel accède ipso facto au statut d'interlocuteur crédible ; il s'agit bel et bien d'une avancée, toutefois l'atteinte des résultats espérés bute encore sur l'absence ou la maîtrise limitée d' outils spécifiques.

Au Sénégal, le diagnostic sur l'offre et la demande de formation agricole et rurale réalisé en 2004, avec l'appui du CNEARC de Montpellier, a permis de mettre en évidence l'intérêt et d'appliquer le concept de construction sociale de la demande de formation. Ce souhait reposait au départ sur la volonté de mettre en pratique les principes issus de l'atelier de 1999 qui a abouti à la définition de la stratégie nationale FAR :

· Passer d'une logique de projet d'assistance classique à une logique d'accompagnement où l'initiative est laissée aux acteurs ruraux.

· Impliquer les acteurs ruraux dans l'identification et la formulation de leurs propres besoins de formation.

· Créer des cadres de concertation entre ruraux et formateurs'

Dans le cadre de l'agriculture familiale, les mêmes interlocuteurs expriment à la fois une demande sociale et une demande économique. Dès lors, les services techniques d'appui au développement, rural comme local, doivent s'adapter pour remplir efficacement leur rôle d'accompagnement des acteurs locaux dans un environnement complexe et fluctuant. Des responsables d'organisations professionnelles agricoles, d'associations de développement féminines, le disent à leur façon :

- « L'environnement de la production est plus important que la production elle-même ».

-« Le travail sur la demande, trop parcellaire, aboutit encore souvent à « des demandes passéistes, éventées », par méconnaissance des opportunités potentielles que pourrait offrir l'environnement global.48

Dans l'approche mise en oeuvre au cours de ce diagnostic dans la région de Ziguinchor49, nous avons considéré que :

1) Tout changement technique ou organisationnel durable résulte d'un processus social de construction de problèmes et de recherche de solutions, menés par les professionnels, face à une situation qu'ils jugent difficile,

2) Ces processus de dialogue, réflexion, expérimentation produisent de la connaissance,

3) La formation est un levier, parmi d'autres, d'accompagnement des acteurs dans le changement.

Dans ce cadre, la demande est donc l'expression par les professionnels de leurs préoccupations, dans un cadre qui permet de les transformer en problèmes traitables. Il s'agit donc en réalité d'une demande d'aide à la recherche de solutions, la solution pouvant éventuellement être de la formation.

On parle donc de construction de la demande : une demande ne s'identifie ni ne se recueille, elle n'est jamais donnée, mais construite, grâce à un processus interactif de réflexion. On parle de construction sociale, car l'ensemble des acteurs concernés sont impliqués dans l'analyse et le dialogue.

A la démarche traditionnelle identification, recensement des besoins de formation, nous privilégions désormais l'appui à la formulation d'un problème et la recherche d'une solution (la formation pouvant en être une). Ce passage s'appuie sur les travaux de Jean-Pierre DARRE50, docteur en ethnologie et fondateur du GERDAL (Groupe d'expérimentation et de recherche développement et actions localisées) ainsi que sur les travaux du CNEARC51 de Montpellier qui s'en est inspiré. Cette démarche guide depuis 2003 les interventions du Bureau Formation Professionnelle Agricole du ministère de l'agriculture du Sénégal.

Les besoins de formation recensés posent comme évidente la logique du « problème », que sous-tend la demande initiale ; une expression courante traduit parfaitement cette façon de procéder : « recueillir les besoins de formation » ; on serait tenté de forcer le trait en parlant de « cueillette des besoins de formation ».

La réalité est somme toute plus complexe dans la majorité des cas ; un problème s'apparente davantage à une construction intellectuelle qu'à un fruit que l'on cueille, et la recherche de solutions peut commencer quand le problème est formulé. Dans cette perspective, la demande est le point de départ de l'appui, mais : qu'entend-on par demande ? Comment la faire exprimer ?

Le point de départ
une situation, vécue comme non satisfaisante

48 Atelier sur l'approche par la demande - Kaolack 06/2006. (propos tenus par la présidente d'une fédération féminine de la région de Kaolack, l'APROFES).

49 Dossier 1 - restitution finale, in Diagnostic de l'offre et de la demande de FAR 05/2004 (CNEARC-CESAG)

50 Auteur de La production de connaissances pour l'action. Arguments contre le racisme de l'intelligence, Paris, Maison des

sciences de l'Homme, 1999

51 Equipe BROCHET M.- TOUZARD I.-BOUSSOU V. (CNEARC Montpellier)

la demande initiale
un point de vue, une préoccupation (pour l'acteur concerné)
point de vue lui même résultant d'une position sociale et d'une pratique professionnelle

l'appui à la construction sociale de la demande
1- transformation en problème traitable
Aide à l'exploration, à l'extension de la surface du problème

2- formulation d'un problème :
comment faire pour .... ?

3- recherche co-active de solutions
(agriculteurs, élus, agents de développement, formateurs)

Dans ce schéma, les principaux intéressés à l'origine de la demande sont acteurs du processus ; ils participent à la réflexion, à l'analyse de la situation, apportent leur connaissance de l'environnement social, environnemental, économique. La recherche de solution conduite avec eux rend possible leur prise d'initiative et rend plus improbable la perspective de solutions inapplicables car trop éloignées des contraintes qu'impose le contexte : nous sommes très loin d'un besoin de formation au sens d'une situation subie, au sens d'un besoin physiologique.

C'est pourquoi nous serons tenté de conclure ce paragraphe en considérant qu'il est plus prudent de parler d'approche par la demande, par opposition à l'approche par la demande...de formation.

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"I don't believe we shall ever have a good money again before we take the thing out of the hand of governments. We can't take it violently, out of the hands of governments, all we can do is by some sly roundabout way introduce something that they can't stop ..."   Friedrich Hayek (1899-1992) en 1984