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Les chemins de fer touristiques entre nostalgie et innovation (1957-2007)

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par Jean-Jacques MARCHI
Université Bordeaux IV Montesquieu - Master Sciences économiques, option Histoire économique 2007
  

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Introduction générale

Les chemins de fer touristiques,

une énigme ?

Introduction générale - Les chemins de fer touristiques, une énigme ?

A l'heure où les TGV sillonnent la France à 300 Km/h, symboles d'une modernité qui se veut triomphante, il peut sembler étrange de consacrer un travail de recherche à des chemins de fer touristiques qui semblent aller à contre-courant du « toujours plus vite, toujours plus loin ». En effet, alors que les TGV rétractent l'espace et le temps, les trains touristiques se plaisent à musarder dans nos campagnes, se faisant un jeu de dilater l'espace comme de remonter dans le temps.

Le choix d'un sujet de mémoire, notamment lorsqu'il paraît exotique, est quelque part l'expression d'une sensibilité personnelle. Ayant passé mes vingt premières années dans une contrée à la fois montagneuse et rurale, j'ai longtemps voyagé à bord de tortillards dans lesquels le passager se laissait gagner par la sensation de la « grande vitesse » dès les 80 Km/h. Je me rappelle ces périples où après avoir emprunté un autorail cahotant sur des voies de l'ancien Paris-Orléans, je changeais de train pour une automotrice électrique qui, elle, arpentait une ligne de l'ex-Midi, à un rythme guère plus pressé. Pourtant, passer du vacarme de la traction diesel au ronronnement de la « fée électricité » avait pour l'enfant que j'étais quelque chose de rassurant et de magique.

Autre souvenir : la gare de correspondance, née du chemin de fer un siècle plus tôt. Son buffet animé où je dégustais, entre deux trains, chocolats chauds et croissants dans des odeurs de café et de tabac. Cette « grande » gare est quasi-déserte maintenant. Le buffet est fermé. Le trafic a diminué, plombé par les nouvelles routes toujours plus droites, par la fermeture d'une des lignes qui partait de ce noeud ferroviaire à l'assaut des montagnes et peut-être aussi par une indifférence quasi - générale. Cette ligne à l'abandon, je l'ai parcourue au milieu des années 1980, sentant bien qu'elle vivait ses derniers instants. C'était à mon avis l'une des plus belles de France.

Mais depuis les choses ont changé : une association d'amateurs a repris en mains une partie de ce tracé à la beauté sauvage pour y faire rouler un autorail. Ainsi une ligne sans intérêt du point de vue du transporteur s'est métamorphosée en ligne à potentiel touristique. Sans vouloir déflorer la suite, c'est là un des paradoxes des chemins de fer touristiques. Au fur et à mesure que la SNCF se débarrasse de lignes non rentables selon ses critères, des exploitants touristiques s'en emparent, avec des fortunes diverses.

Pour un non-initié, un chemin de fer touristique ressemble à une énigme. Voici une voie ferrée où poussent les herbes folles. Encore une voie ferrée désaffectée, une de plus. Et puis soudain, les rails grincent, un coup de sifflet retentit, et dans un bruit de tonnerre apparaît comme jaillie des temps anciens une locomotive à vapeur tirant quelques voitures aux peintures rafraîchies. Des fenêtres sortent des têtes ravies: enfants, parents, grands-parents, toutes générations confondues. La joyeuse bande s'éloigne dans une odeur de fumée très particulière. Rencontre à première vue singulière, mais les trains touristiques sont pluriels.

Les chemins de fer touristiques français, sous leur forme contemporaine, apparaissent dans les années 1960, à l'initiative de passionnés attristés par la fermeture de lignes d'intérêt local. Attachés sentimentalement à un patrimoine technique représentatif de la première révolution industrielle, les ferroviphiles font de leur mieux pour sauvegarder ce qui peut l'être : locomotives, matériels roulants, infrastructures, gares...parfois avec le soutien d'élus qui ont du mal à se résigner devant la disparition de voies ferrées acquises de haute lutte pour désenclaver leur localité. La maintenance, la rénovation du matériel et des équipements nécessitent des fonds importants. Aussi, profitant de la venue de curieux, nos amateurs organisent des circulations payantes, histoire de financer (au moins un peu) leurs ambitions. Les chemins de fer touristiques sont nés.

Un demi-siècle plus tard, les membres fondateurs ne sont plus de la première jeunesse. La relève, qu'ils appellent de leurs voeux, se fait attendre. Les visiteurs eux aussi ont mûri ; ils ne se contentent plus d'un simple tour en « petit train ». L'offre touristique désormais large crée une forte concurrence. Parallèlement, la réglementation se durcit, tandis que les matériels vieillissent : des investissements de sécurité s'imposent. Enfin, les pouvoirs publics relèvent leur niveau d'exigence face à des trains touristiques qui vivotent alors qu'ils pourraient faire mieux. La professionnalisation du secteur est en cours. Les exploitants touristiques s'organisent ; déjà des entreprises privées issues de grands groupes exploitent plusieurs « petits trains ». Faire du nouveau avec de l'ancien : tel est l'enjeu.

La question de notre recherche sera la suivante : dans quelle mesure les chemins de fer touristiques peuvent-ils concilier l'expression d'une nostalgie et les caractères d'une innovation ?

Nous proposons la démarche suivante :

-tout d'abord nous définirons précisément de ce que l'on doit entendre par chemin de fer touristique. Ce qui nous permettra de lever les ambiguïtés et de distinguer ce qui résulte de logiques différentes. Ce sera l'objet de la première partie.

-ensuite, comme les chemins de fer touristiques sont aussi des chemins de fer historiques, nous remonterons le temps, d'abord à l'époque de la naissance des « grands trains » puis à celle des « petits trains » (deuxième partie).

-les chemins de fer touristiques sont d'abord des trains. Ils en subissent les contraintes, aussi on ne peut les aborder intelligemment sans être au fait de certaines réalités. Nous nous attarderons donc quelques pages sur le cadre de l'activité ferroviaire (troisième partie)

-après ces préliminaires, nous entrerons dans le coeur de notre sujet, la naissance et le développement des chemins de fer touristiques, en privilégiant une approche dynamique (quatrième partie)

-nous proposerons ensuite une typologie des chemins de fer touristiques, après avoir tenté différentes approches complémentaires (cinquième partie)

-nous nous intéresserons aux activités qui rassemblent les chemins de fer touristiques : recherche, préservation, entretien et réparation des matériels ferroviaires, édition et médias spécialisés, relations avec le « septième art » (sixième partie)

-notre voyage se poursuivra en abordant les enjeux touristiques (septième partie), puis ce que nos « petits trains » véhiculent : relations avec l'environnement, le patrimoine et la société (huitième partie)

-nous nous poserons la question de la professionnalisation du secteur des chemins de fer touristiques (neuvième partie),

-enfin, nous terminerons en tentant de peser ce micro-secteur (dizième partie) avant de conclure.

Les chemins de fer touristiques sont à notre avis plus complexes qu'il n'y paraît. Pour saisir cette complexité, nous nous attacherons, chaque fois que ce sera possible, à comparer les points de vue des amateurs ferroviaires, des professionnels du tourisme et des universitaires. La gestion de ces trois dimensions ne va pas sans risque. Il faudra en effet nous contenter de conclusions parfois équivoques, car les points de vue de chacun divergent autant qu'ils convergent.

Première parti

Sur /a voie d'une définition

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