WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Potentiel des friches industrielles des secteurs de gare pour un développement urbain durable

( Télécharger le fichier original )
par Marianne Thomann
Université de Lausanne - Licence ès Lettres 2005
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

2.2 Débat sur la forme urbaine

S'il existe un débat autour de la ville compacte, c'est qu'aucune certitude n'existe
concernant la forme de ville la plus durable. Comme le relève Theys (conférence, mars

2005), on sait ce qui n'est pas durable, mais on ne sait pas ce qui est durable. En
l'occurrence, on sait que le développement actuel des villes, selon le mode de l'étalement,

n'est pas durable. Mais l'on manque de certitudes quant à savoir si une forme plus
compacte, résultant de la densification des zones déjà bâties, permettrait réellement

d'atteindre de meilleurs résultats.

Le débat sur la forme idéale de la ville n'est pas nouveau; tout au long du 20ème siècle,
« centrists » et « decentrists » selon la terminologie anglo-saxonne (Breheny, 1996; Frey,
1999) se sont affrontés sur la forme urbaine qui permettrait une meilleure qualité de vie, à

l'écart des nuisances de la ville industrielle. L'imagination des pionniers du débat qui, au
problème urbain, proposaient des big and total solutions (Breheny, 1996: 22) telles que la

cité-jardin de Howard (decentrist) ou la cité radieuse du Corbusier (centrist), s'efface devant le scepticisme des années 1970.

By the 1970s planners had lost faith in the one thing that united all three [E. Howard, L. Wright, Le Corbusier]: a belief that a solution to the urban problem can be found. Planners had become more pragmatists, either no longer interested in « big » ideas or convinced that the big idea is that there should be no such idea (Breheny, 1996: 20, se référant à Fishmann1).

Il fallut alors attendre quelques années pour qu'émerge une nouvelle cause commune
capable de ressusciter le débat et de rallumer la foi en l'existence d'une solution au
problème urbain: l'apparition du concept de développement durable à la fin des années

1980. Si le premier débat était de nature essentiellement idéologique, le nouveau débat
cherche avant tout des preuves scientifiques à l'appui des modèles défendus: opinion still

matters, but the quest for hard evidence dominates (Breheny, 1996: 21). Au vu de l'importance d'un développement urbain durable à l'échelle de la planète, choisir seulement par conviction ne semble plus suffire.

Un nouveau débat sur la ville compacte est donc né avec le développement durable.
Comme le concept lui-même, il s'est d'abord limité à la dimension environnementale. La

préoccupation dominante au début des années 1990, suite au sommet de Rio, était le
réchauffement climatique; les enjeux du débats se concentraient alors sur les liens entre

forme urbaine et consommation énergétique. Si cette problématique reste au coeur du
débat, d'autres considérations sont cependant (ré)apparues, telles la consommation de

terres agricoles par l'étalement urbain, les spécialisations fonctionnelle et sociale des territoires qui en résultent, la qualité de vie ainsi que la viabilité économique des différentes formes urbaines.

Le débat opposant ville compacte et ville étalée, tel qu'il apparaît chez Breheny (1996) et

Frey (1999), oppose les tenants d'un discours « centrist » à ceux d'un discours
« decentrist ». Camagni et al. (2002) parlent de l'approche « néo- libéraliste », qui porte

un jugement optimiste sur la dispersion urbaine et prône la non-interférence
planificatrice, et de l'approche néo-réfo rmiste, interventionniste et s'élevant contre les

coûts actuels et futurs de la ville diffuse. Le courant dominant (depuis l'émergence du
concept de développement durable), centriste ou néo-réformiste, considère que la menace

du réchauffement climatique, principalement dû aux émissions de CO2, doit nous faire
réduire notre mobilité, puisque celle-ci est en grande part motorisée. Pour cela, il faut

avant tout réduire les besoins en mobilité en favorisant le développement de nos villes
vers plus de densité et de mixité: une ville des trajets courts. Le deuxième argument

centriste découle du constat de l'emprise de l'urbain sur les terres agricoles; en
construisant la ville sur elle-même (densification, « urban infill »), on préserve ainsi les

bonnes terres agricoles, la biodiversité et le paysage. Un troisième argument est celui de
la qualité de vie; une ville dense permet une plus grande proximité et mixité sociale et le

renouement du lien social grâce à l'abolition du «tout voiture » pour une ville à échelle
humaine, c'est-à-dire où le piéton a sa place. A ce dernier argument, les détracteurs de la

ville compacte émettent de sérieuses réserves. On reproche aux centristes une vision trop
romantique et passéiste de la ville compacte: the vision of the compact city has been

dominated by the model of the densely developed core of many historic European cities (Jenks et al., 1996: 5), autrement dit par le modèle de la ville médiévale.

D'autres reprochent aux tenants de la ville compacte ce manque de réalisme. Frey rappelle que:

We are generally confronted not with the task of planning and designing new towns and cities but, rather, that of replanning and redesigning existing cities, towns and settlements to make them more readily sustainable. Further more, the question whether the transformation of an existing city into a compact city is economically and socially viable is largely ignored by those promoting that concept. (1999: 26)

Thomas et Cousins accusent quant à eux les tenants de la ville compacte de ne prendre en compte que les désavantages de la ville étalée: the overriding problem with the compact city is that it requires us to ignore the causes and effects of decentralisation, and the

benefits that it might bring (1996: 56). Les démérites de la ville étalée et les mérites de la ville compacte sont remis en question par ces différents auteurs devant le manque de

connaissances des liens entre forme urbaine et durabilité. Le débat est complexe car les
relations causales entre aménagement du territoire et usage qui en est fait ne sont jamais

directes, et que les conséquences sont souvent multiples: any improvement of one aspect of the city must be weighted against other benefits or losses (Frey, 1999: 26).

A la lecture des auteurs prenant position dans le débat sur la ville compacte (Jenks et al. 1996, Breheny 1992, Camagni et al. 2002, Certu 2000), on constate pourtant que « la ville compacte » n'a pas la même signification ni pour ses défenseurs, ni pour ses détracteurs. Thomas et Cousin déplorent d'ailleurs que few of the supporters of the compact city describe it in ways which are explicite (1996: 55). La même remarque s'adresse à ceux qui la remettent en question. La ville compacte vue comme une ville qui se construit sur elle-même sans jamais déborder de ses limites est un modèle contre lequel Breheny émet de sérieuses réserves (Thomas and Cousins, 1996), et sur lequel Fouchier (1997) s'interroge. En effet, une fois les friches et derniers espaces libres densifiés, il sera nécessaire de construire à l'extérieur des limites actuelles; il serait donc plus judicieux de chercher à canaliser ces développement périphériques inévitables plutôt que de les combattre.

Un modèle de « décentralisation concentrée » (Fouchier, 1997) ou de « decentralised concentration » de l'urbanisation, en pôles plus ou moins autonomes (Thomas and Cousins, 1996, Scoffham and Vale, 1996), est alors proposé comme compromis. Le débat a donc évolué dans sa substance au cours des dernières années: d'une opposition entre deux modèles extrêmes, la ville compacte et la ville étalée, les réflexions se sont déplacées sur des modèles alternatifs. Les titres des deux ouvrages consacrés à ce débat par Jenks, Burton and Williams sont d'ailleurs révélateurs: « the compact city: a sustainable urban form ? » en 1996 sera suivi, en 2002, par « Achieving sustainable urban form » qui ne fait plus d'allusion directe à la ville compacte. Les conclusions du premier ouvrage laissent entrevoir ce changement de perspective: des arguments solides ayant été présentés par les différentes contributions tant en faveur de la centralisation que de la dispersion, il ressort qu'aucun consensus n'existe sur l'une ou l'autre de ces deux formes (Jenks et al., 1996).

Il semble cependant qu'un consensus puisse émerger en faveur d'alternatives qui officient en compromis, tels des modèles de décentralisation concentrée, autrement dit en faveur d'approches plus équilibrées et appropriées à chaque contexte local donné (ibid.). Le second ouvrage, dont le titre affirmatif exprime une certitude qu'il existe une ou des formes urbaines plus durables que les modèles actuels, mais sans opter pour une de ces formes en particulier, ouvre le débat à d'autres critères que celui de la compacité, indiquant que cet élément ne suffit plus, et qu'il faut réfléchir à la morphologie urbaine dans toutes ses composantes - taille, mixité, structure des quartiers (Williams et al., 2000). Les auteurs, dans leurs conclusions, rappellent la nécessité d'adopter des formes urbaines adaptées aux contextes locaux, flexibles et évolutives, et optent pour des modèles dont les caractéristiques communes sont la compacité, la mixité des fonctions, des réseaux de rues desservis par des transports publics attractifs, des contrôles environnementaux ainsi que des standards éle vés de management urbain, en insistant sur le fait que ces caractéristiques de base laissent la place à une grande marge de manoeuvre.

L'adoption de modèles moins extrêmes que ceux défendus par les approches centristes ou décentristes, procédant à une densification différenciée du territoire, semble en effet faire l'objet d'un certain consensus dans la littérature. La déconcentration concentrée, ou

modèle polycentrique en réseau (Gibelli, 1997: 33) [semble être] l'option la mieux partagée par les chercheurs et dans les expériences les plus récentes de densification (ibid.) Cette forme présente les mêmes caractéristiques que la ville compacte - densité, mixité - tout en permettant de nouveaux développements en périphérie, le tout relié par des réseaux de transports publics performants. Pour Camagni, ce modèle est le plus efficace: En dehors de toute exagération polémique, comme celle de Breheny (1992) qui parle d' « obsession », et si le mot d'ordre de compacité n'est pas pris dans un sens qui le banalise à l'extrême, on parvient à un consensus autour des formes de « décentralisation concentrée » qui représentent un méta-modèle territorial de référence efficace (1997: 17), et de citer les planifications danoise et hollandaise en exemple.

Cette évolution du débat de la recherche de la forme urbaine la plus durable à celle de solutions flexibles et adaptées à chaque situation est sans aucun doute bénéfique. Pour certaines villes, la densification « intra-muros » ou « urban infill » constitue un potentiel de développement suffisant. Pour d'autres, le potentiel de densification, s'il existe, ne permet pas d'absorber la demande et exige la création de nouveaux développements en périphérie.

Nous restons convaincus, à la lecture de ces différentes contributions, qu'une densification du tissu urbain est souhaitable sous certaines conditions que nous allons présenter. Concrètement, cette densification est un processus à long terme qui se réalise d'une part par le biais de la régénération urbaine, c'est-à-dire le renouvellement du tissu urbain par l'utilisation du potentiel existant en zone à bâtir soit sous forme de friches ou de terrains non construits2, d'autre part par la densification des terrains déjà construits.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"I don't believe we shall ever have a good money again before we take the thing out of the hand of governments. We can't take it violently, out of the hands of governments, all we can do is by some sly roundabout way introduce something that they can't stop ..."   Friedrich Hayek (1899-1992) en 1984