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La question de la protection des droits de l'homme dans les rapports euro-méditerranéens

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par Marine GOUVERS
Faculté de droit de Poitiers - Master de recherche droit public fondamental 2008
  

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II. La stratégie bilatérale de protection des droits de l'homme ou les clauses de conditionnalité

La stratégie bilatérale de protection des droits de l'homme de la Communauté est sensiblement différente de sa stratégie régionale dans la mesure où elle s'opère par le biais de relations exclusives entre un seul Etat méditerranéen et la Communauté. Ces relations sont fondées sur des instruments conventionnels, soumis au droit international qui créent des obligations juridiques pour les parties contractantes. Alors qu'il est difficile au niveau régional d'imposer le respect des droits de l'homme, du fait de la nature même des relations instaurées qui se fondent avant tout sur le renforcement du dialogue entre les partenaires et du manque d'instruments juridiques contraignants, les relations bilatérales offrent un cadre légal dans lequel la question du respect des droits de l'homme a été explicitement intégrée.

Cela renvoie à la question de savoir quelle est la stratégie développée par la Communauté afin de promouvoir les droits de l'homme dans la région et quelles sont les obligations juridiques qui en découlent.

La Communauté européenne a eu recours à un instrument capital dans les accords bilatéraux qui la lient à ses partenaires méditerranéens: il s'agit de l'introduction d'une clause relative au respect des droits de l'homme76 (A). Cette clause insérée dans les accords créant

76 Les notions de clause relative aux droits de l'homme, clause droit de l'homme et clause de conditionnalité seront utilises ici sans distinction.

des obligations pour les parties est accompagnée de mécanismes de sanctions visant à garantir leur respect (B).

A. L'introduction de clause de conditionnalité dans les accords bilatéraux du partenariat

La conditionnalité est une des méthodes disponibles pour atteindre des résultats prédéterminés dans le cadre d'une coopération financière. Sa fonction première est d'établir un lien explicite entre la distribution d'aide financière ou technique et la réalisation de réformes prédéterminées. La conditionnalité peut se concentrer sur des objectifs économiques, institutionnels ou bien purement politiques77. Cette conditionnalité a été mise en place au sein des accords bilatéraux par l'intermédiaire d'une clause dite droits de l'homme.

Il est essentiel de rappeler les origines de cette clause afin de comprendre les modalités de son application (1), avant de se pencher sur la différence de typologie des articles 2 des accords et les conséquences qui en résultent (2).

1. Les origines de «la clause droits de l'homme»

La Communauté européenne dût faire face dans les années 1970 à des violations systémiques des droits de l'homme en Ouganda, en République Centrafricaine, en Guinée équatoriale et au Libéria. Refusant toute discussion, les dirigeants africains avancèrent l'argument selon lequel les droits de l'homme relèvent du domaine de la politique intérieure, enjoignant ainsi l'Union de garder ses distances. Cela suscita de vives réactions de la part de l'opinion publique européenne: aider les Etats responsables de violations des droits de l'homme revenait à les accréditer et poursuivre la politique d'aide financière faisait courir le risque de ce que cette aide soit utilisée à des fins répressives. Cependant, ni les traités fondateurs de la Communauté, ni la convention de Lomé de 1975 réglementant les rapports entre la CE et les pays ACP (d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique), ne se référaient au respect des droits fondamentaux comme condition à l'attribution de l'aide communautaire78 et aucun mécanisme adéquat n'était à sa disposition pour exercer des pressions sur les

77 Dorothée Schmid, «Interlinkages within the Euro-Mediterranean partnership, linking economic, institutional and political reform: conditionality within the Euro-Mediterranean partnership», diffusé par EuroMesco, p. 10 article n° 27, décembre 2003.

78 Karin Arts « Implementing the Right to Development ? An Analyze of European Community Development and Human Rights Policies», In Human Rights in Developing Countries, Nordic human rights publication, Kluwer Law International, Year Book 1996 ,p. 50.

gouvernements79. En réponse à une question parlementaire l'interrogeant sur sa volonté
d'initier la suspension de l'aide communautaire80, le Conseil déclara qu'il acceptait d'intervenir
dans le cadre de ses relations établies par la convention de Lomé pour s'assurer qu'aucune
assistance attribuée par la Communauté à l'Ouganda n'aurait comme effet le renforcement ou
la prolongation du déni des droits fondamentaux de son peuple81. Fidèle au principe pacta
sunt servanda,
selon lequel les traités doivent être exécutés de bonne foi et réticente à
l'application du principe clausula rebus sics standibus82 à la demande du Parlement européen,
la Commission décida de ne suspendre que partiellement l'aide communautaire en Ouganda83.
Du fait des dissensions entre les membres de la Communauté et des réserves émises
par les Etats ACP, il ne s'est d'abord agit que de références dans le préambule de la
Convention Lomé II de 1979. Etant donnée l'attitude de la Communauté vis-à-vis du régime
d'apartheid en Afrique du Sud84, l'engagement de respecter les droits fondamentaux ne put
être qu'introduit dans le préambule de la convention de Lomé III (1984). Du fait de l'élection
au suffrage universel du Parlement européen en 1979, l'insistance sur le respect des droits de
l'homme se fit grandissante85. L'Acte Unique européen ayant donné les compétences au
Parlement pour approuver les accords bilatéraux conclus par la CE, lors des négociations de la
convention de Lomé IV, il fut clair que son approbation dépendrait de la place donnée aux
droits de l'homme dans ces accords. En 1989, l'article 5 de la convention de Lomé IV
rappelait clairement le lien entre le développement et les droits de l'homme et fixait leur
respect comme objectif de l'accord. Cependant, aucune clause suspensive n'y fut associée86.

79 Peter Hilpold, « Human rights clauses in the EU-Association Agreements», in External Economic Relations and Foreign Policy in the European Union, Eds. Stefan Griller, Birgit Weidel, p. 361.

80 Question écrite n° 941/76 de M. Van der Hek au Conseil de la Communauté européenne "sur la situation des droits de l'homme en Ouganda" JO C 214 du 9 septembre 1977.

81 Déclaration du Conseil, Bull. CE du 21 juin 1977 aussi appelée lignes directrices de l'Ouganda.

82 Voir article 62.1 de la Convention de Vienne sur le droit des traités de 1969 selon lequel un traité peut être dénoncé en cas de changement fondamental des circonstances depuis la conclusion de l'accord si ces circonstances étaient essentielles au consentement initial des parties.

83 Amy Young-Anawaty, «Human rights and the ACP-EEC Lomé II Convention», New York University Journal of International law and Politics, No.1, Vol. 13, 1980, p. 73.

84 Malgré les dénonciations du régime d'apartheid par la CE et la rédaction d'un code de conduite à destination des entreprises qui y été implantées, elle poursuivit ses relations commerciales avec l'Afrique du Sud, cf. ALSTON Philip, Linking trade and human rights, German Year Book of international law, vol. 23, 1980, p. 128.

85 Elena Fierro, « The EU's approach to human rights conditionality in practice», International studies in human rights, vol. 76, Kluwer law international, 2003, p. 59-63.

86 Eeckhout Piet, « External Relations of the European Union Legal and Constitutional Foundations», Oxford EC law library, 2004, p. 476.

Cette convention établit un précédent et la volonté de la Communauté fut réaffirmée dans la déclaration sur les droits de l'homme adoptée lors du Conseil européen de Luxembourg de juin 199187. De fait, une clause droits de l'homme ayant la qualité d'élément essentiel fut insérée dans plus de 50 accords conclus par la Communauté et concerne aujourd'hui plus de 120 Etats du Centre et de l'Est de l'Europe, d'Amérique latine, d'Asie et de la Méditerranée88.

La politique européenne de voisinage poursuit cet élan via les plans d'action conclus avec les pays voisins de l'Union. Ces plans comportent un chapitre politique portant sur un large éventail de questions relatives aux droits de l'homme, à la gouvernance et à la démocratisation, en fonction du degré d'engagement dont fait preuve chaque pays partenaire. Les parties s'engagent à effectuer des réformes importantes en matière de démocratisation (concernant les lois électorales, la décentralisation, le renforcement des capacités administratives), d'État de droit (via la réforme du code pénal et du code civil, du code d'instruction criminelle, le renforcement de l'efficacité des administrations judiciaires, l'élaboration de stratégies dans la lutte contre la corruption), de droits de l'homme (par l'adoption d'une législation protégeant les droits de l'homme et les libertés fondamentales, l'application des conventions internationales sur les droits de l'homme, la lutte contre la haine raciale et la xénophobie, la formation aux droits de l'homme, l'application des conventions internationales relatives aux droits fondamentaux du travail).

L'introduction des clauses relatives aux droits de l'homme dans les accords conclus avec les partenaires méditerranéens s'inscrit dans un mouvement consacré et constitue une pratique acceptée et désormais systématique de la part de la Communauté89. Néanmoins la typologie des clauses peut varier d'un accord à l'autre.

87 "A travers leur politique de coopération et par l'inscription de clauses relatives aux Droits de l'Homme dans des accords économiques et de coopération avec des pays tiers, la Communauté et ses Etats membres poursuivent activement la promotion des Droits de l'Homme et la participation sans discrimination de tous les individus ou groupes à la vie de la société, en tenant compte en particulier du rôle des femmes", Conseil européen de Luxembourg, juin 1991, Annexe V, §10.

88 Communication de la Commission au Conseil et au Parlement européens sur "Le rôle de l'Union européenne dans la promotion des droits de l'homme et de la démocratisation dans les pays tiers", COM (2001), 252 final, 8 mai 2001, p. 9. Et Résolution du Parlement européen sur la clause relative aux droits de l'homme et à la démocratie dans les accords de l'Union européenne (2005/2057(INI)).

89 Stelios Stavridis, op. cit.p. 294.

2. Typologie et contenu de la clause droits de l'homme dans les accords bilatéraux

La CE a recours à deux types de clause conditionnalité dans les accords bilatéraux: d'une part, la clause dite <<basique>> se référant au respect des droits de l'homme comme base des relations intérieures et extérieures des parties et d'autre part, la clause intégrant le respect des droits de l'homme comme <<élément essentiel» d'un accord.

L'article 2 de chacun des accords bilatéraux du partenariat euro-méditerranéen est une clause droits de l'homme imposant le respect des droits de l'homme comme élément essentiel de l'accord. Il en existe deux sortes: celles qui ne se réfèrent pas à la Déclaration des droits de l'homme de 1948 (c'est le cas des accords bilatéraux conclus avec la Tunisie et Israël) et celles qui s'y réfèrent (accords conclus avec l'Egypte, l'Autorité Palestinienne, le Liban, la Jordanie, le Maroc et l'Algérie). Dans le premier cas l'article 2 dispose:

<<Les relations entre les parties, de même que les dispositions de l'accord lui-même, se fondent sur le respect des droits de l'homme et des principes démocratiques qui inspirent leurs politiques internes et internationales et constitue un élément essentiel du présent accord>>.

Et dans le second:

<<Les relations entre les parties, de même que toutes les dispositions du présent accord, se fondent sur le respect des principes démocratiques et des droits fondamentaux de l'homme tels qu'énoncés dans la déclaration universelle des droits de l'homme, qui inspire leurs politiques internes et internationales et constitue un élément essentiel du présent accord>>.

La première formule renvoie à la volonté de la Commission d'uniformiser les références dans différents accords qu'elle exprima dans sa décision du 26 janvier 1993 90. Aucune référence à la DUDH n'était encore imposée, c'est la raison pour laquelle il n'en est pas question dans les accords conclus avec la Tunisie et Israël en 1995. En mai de la même année, la Commission manifesta sa volonté d'inclure une référence aux instruments internationaux de protection des droits de l'homme dans sa communication relative à <<la prise en compte du respect des principes démocratiques et des droits de l'homme dans les accords entre la Communauté et les pays tiers>>91. Selon Eeckhout, le choix d'introduire une référence à la DUDH s'explique par le fait que ce texte peut être considéré comme faisant partie du jus

90 PV (93) 1137, point XIV.

91 Com (95) 216 final, 23 mai 1995.

cogens évitant les débats sur la compétence de la Communauté à édicter des règles normatives dans la sphère des droits de l'homme92.

La différence de formulation de ces clauses a-t-elle des conséquences juridiques? En effet, la question se pose de savoir si la valeur normative des clauses varie s'il est fait ou non référence à la DUDH. Les termes «droits de l'homme» ont-ils le même sens dans l'accord tunisien que dans l'accord libanais?

Selon Meijers et Nollkaemper, inclure la DUDH a pour intérêt de rendre toutes ses clauses contraignantes pour les parties: la notion de «droits de l'homme» doit être comprise comme intégrant chacun des droits contenus dans la déclaration de 194893. Si l'on suit ce raisonnement, les droits qui ne sont pas dans la déclaration ne seraient alors pas contraignants. Cet argumentaire ne tient pas compte de la façon avec laquelle l'article 2 de certains accords renvoie à la déclaration universelle: il ne dispose pas que «les relations entre les parties, de même que toutes les dispositions de l'accord se fondent sur le respect de la déclaration universelle», mais sur «le respect des principes démocratiques et des droits fondamentaux de l'homme tels qu'énoncés» dans la DUDH. Selon Mielle Bulterman, cette référence tend davantage à préciser la notion de droits de l'homme plutôt que d'intégrer chacune des clauses de la Déclaration dans les relations bilatérales des parties contractantes94. Ceci étaye la thèse défendant que cette clause droits de l'homme ne crée pas de nouvelles obligations pour les parties mais incorpore dans les accords les obligations relatives aux droits fondamentaux existant en droit international. En effet, l'article 2 a une valeur déclaratoire et non constitutive95. Malgré cela, si la DUDH n'a pas de valeur juridiquement contraignante, il semble être accepté qu'elle consacre des principes généraux du droit international96 s'appliquant à tous les Etats. Selon Elena Fierro, cette référence ne doit pas être interprétée de manière limitative: d'autres instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme peuvent

92 Piet Eeckout, op. cit. p. 473.

93 Herman Meijers et André Nollkaemper, « The universal declaration of human rights now contains binding treaty law», Nederlands Juristenblad, vol. 72, 1997, p. 1113-1115.

94 Mielle Bultermann, «Human rights in the treaty relations of the European community. Real Virtues or Virtual reality? » in School of Human Rights Research Series, Volume 7. Intersentia Hart, 2001 p. 169.

94 Idem.

96 Idem, et Elena Fierro, op. cit. p. 239.

être également contraignants dans le cadre des accords97. Barbara Brandtner et Allan Rosas soutiennent que la déclaration universelle permet d'établir un standard minimum98 au-delà duquel il est possible d'évoluer.

Si l'on conclu que les accords comprenant une référence à la DUDH permettent d'établir un standard minimum de protection, une question persiste: que dire alors des accords qui imposent le respect des droits de l'homme mais qui ne renvoient pas à la DUDH?

Deux thèses ici s'opposent: la première défend que la DUDH établit un standard minimum de protection des droits humains, son absence dans les accords tunisien et israélien laisse la possibilité d'une plus large interprétation: «les relations entre les parties, de même que les dispositions de l'accord lui-même, se fondent sur le respect des droits de l'homme et des principes démocratiques», aucune définition n'étant donnée des termes droits de l'homme, s'agit-il de ceux reconnus par les instruments auxquels les deux parties contractantes ont adhéré, ou bien auxquels l'une ou l'autre des parties a adhéré? Sachant que le nombre de traités relatifs aux droits de l'homme signés par la Tunisie et Israël et par les membres de la Communauté diffère sensiblement, cette question est importante. La référence à la DUDH met en avant l'universalité des droits de l'homme, ainsi son absence n'empêche pas toute approche relativiste, mettant par exemple l'accent sur les droits économiques ou collectifs au détriment des droits politiques ou individuels. Il semble que le Parlement européen ait pris conscience de ce déséquilibre en adoptant une recommandation de 1996, dans laquelle il estimait «qu'il convient d'utiliser, dans tous les accords, la forme la plus évoluée de clause relative aux droits de l'homme»99, s'en est suivi l'introduction de la DUDH dans chacun des articles 2 des nouveaux accords bilatéraux adoptés avec les partenaires méditerranéens.

A cette première thèse s'oppose celle que défend Mielle Bulterman consistant à dire que l'argument visant à nier que cette clause renverrait aux droits fondamentaux protégés par la déclaration universelle irait à l'encontre de l'universalité des droits de l'homme si chère à la Communauté européenne. Ainsi, selon elle, qu'il y ait ou non une référence à la DUDH dans l'article 2 des accords ne changerait pas son contenu normatif. Cet argument peut être renforcé par la considération de ce que la déclaration de Barcelone se réfère expressément à la DUDH.

97 Elena Fierro, op.cit, p. 237.

98 Barbara Brandtner et Allan Rosas, «Trade preferences and human rights, in The UE and human rights», Alston ed. Oxford University Press, 1999, p.707.

99 Résolution sur la communication de la Commission sur la prise en compte du respect des principes démocratiques et des droits de l'homme dans les accords entre la Communauté et les pays tiers, point 4. (COM(95)0216 - C4-0197/95) JO n° C 320 du 28 mais 1996 p.261.

Sa valeur déclaration ne lui retire pas sa qualité de que référence interprétative: les accords bilatéraux qui en découlent doivent être interprétés à la lumière de son préambule. Ainsi, même en l'absence de référence explicite à la DUDH dans les articles 2 des accords tunisiens et israéliens, la notion de droits de l'homme devrait être comprise telle qu'énoncée dans la DUDH.

L'insertion d'une telle clause permet «d'inscrire les droits de l'homme comme sujet d'intérêt commun, élément du dialogue et instruments pour réaliser diverses actions positives au même titre que les autres clauses essentielles>> des accords100. Il s'agit d'inciter à adhérer et à ratifier des traités internationaux relatifs aux droits de l'homme. Elle crée d'une part une obligation positive pour l'Union d'imposer le respect de cette clause; en effet, selon le Parlement européen, «il est de la responsabilité de l'Union, lorsqu'elle signe un accord international avec un pays tiers comprenant une clause relative aux droits de l'homme et à la démocratie, de veiller à ce que le pays tiers en question respecte les normes internationales en matière de droits de l'homme lors de la signature de cet accord>> 101, et d'autre part, les Etats parties se doivent de respecter les droits de l'homme et les principes démocratiques qui constituent un «élément essentiel>> de l'accord. Cette disposition a pour objectif la création d'une base légale à d'éventuelles mesures restrictives en cas de violation des droits de l'homme conformément à l'article 60.3 de la convention de Vienne sur le droit des traités102. Dans le respect des conditions de procédure prévues par l'article 65 de la convention de Vienne, «elle habilite les parties à considérer comme violation substantielle de l'accord, toute violation grave et persistante des droits de l'homme ou toute interruption sérieuse du processus démocratique et de ce fait comme motif pour mettre fin à l'accord ou suspendre son application en totalité ou en partie>>103. L'article 65 impose le respect d'un délai de trois mois au moins «sauf en cas d'urgence particulière entre la notification et la suspension proprement dite ainsi que d'un délai supplémentaire en cas de recherche d'une solution amiable>>. Cette

100 Communication de la Commission, la prise en compte du respect des principes démocratiques dans les accords entre la Communauté et les pays tiers, COM (1995) 216 final, 23 mai 1995.

101 Résolution du Parlement européen sur la clause relative aux droits de l'homme et à la démocratie dans les accords de l'Union européenne (2005/2057(INI)).

102 "aux fins du présent article, une violation substantielle d'un traité est constituée par a) un rejet du traité non autorisé par la présente convention; ou b) la violation d'une disposition essentielle pour la réalisation de l'objet ou du but du traité".

103 Communication de la Commission, la prise en compte du respect des principes démocratiques dans les accords entre la Communauté et les pays tiers, COM (1995) 216 final, 23 mai 1995.

clause est renforcée par une clause de non-exécution prévue dans les accords bilatéraux et des mécanismes de sanctions dont dispose l'Union européenne.

B. La valeur des mécanismes de sanction liés à l'article 2

En complément de l'article relatif à la définition des éléments essentiels de l'accord, une clause relative à la non-exécution de ses obligations a été insérée en disposition finale des conventions. Elle est elle-même précisée par une déclaration interprétative introduite à la fin de certains des accords. Il convient dans un premier temps de déterminer quelles sont les conséquences d'une violation de la clause droit de l'homme et quels sont les instruments de sanction dont dispose l'Union (1), puis dans un second temps, d'étudier dans quelle mesure ces sanctions sont légales (2).

1. La clause générale de non-exécution (ou clause complémentaire)

Les clauses droits de l'homme peuvent être associées soit à une clause suspensive (dite clause balte) permettant la suspension avec effet immédiat de l'application de l'accord dans sa totalité ou partiellement en cas d'atteinte grave aux dispositions essentielles104; soit à une clause générale de non-exécution (dite clause bulgare) permettant de reconsidérer les obligations naissant de l'accord en cas de violation d'un élément essentiel105.

Les accords du partenariat euro-méditerranéen sont tous dotés d'une clause bulgare formulée de cette façon:

1. Les parties prennent toute mesure générale ou particulière nécessaire à l'accomplissement de leurs obligations en vertu du présent accord. Elles veillent à ce que les objectifs fixés par le présent accord soient atteints.

2. Si une partie considère que l'autre partie n'a pas rempli l'une des obligations que lui impose le présent accord, elle peut prendre des mesures appropriées. Auparavant elle doit, sauf cas d'urgence spéciale, fournir au Conseil d'association toutes les informations pertinentes nécessaires à un examen approfondi de la situation en vue de rechercher une solution acceptable par les parties. Le choix doit porter par priorité sur les mesures qui

104 Du fait de leur introduction initiale dans les accords conclus aves les Etats baltes; cette clause n'a pas été utilisée très longtemps et fut remplacée par la clause Bulgare prévoyant des réactions moins brutales en cas de non respect des accords.

105 Communication de la Commission sur "la prise en compte du respect des principes démocratiques et des droits de l'homme dans les accords entre la Communauté et les pays tiers", COM (95) 216 final, 23 mai 1995.

perturbent le moins le fonctionnement du présent accord. Ces mesures sont notifiées immédiatement au Conseil d'association et font l'objet de consultations au sein de celui-ci à la demande de l'autre partie.

Nulle référence n'est faite au respect des droits de l'homme dans cette clause, et pour cause, elle n'avait à l'origine aucun rapport avec la clause droits de l'homme. Elle se trouve effectivement dans différents types d'accords n'ayant aucune disposition concernant les droits fondamentaux et fut utilisée dans ce cadre là106.

Cette clause n'est pas aussi stricte que la clause balte qui prévoit la suspension immédiate de l'accord. Ici une procédure de consultation est établie afin de convenir d'une solution entre les parties, de plus, il n'est pas question de suspension systématique de l'accord mais de l'adoption de mesures appropriées. Toutefois, les cas d'urgence spéciale sont possibles, il s'agit de résurgences des clauses baltes.

Mielle Bulterman souligne qu'il y a une certaine ambigüité à préférer des mesures affectant le moins le fonctionnement de l'accord dans une clause dont le but est de prévoir les dispositions visant à réagir à une violation de l'accord en question. Elle ajoute que cette tournure reste très diplomate et suggère qu'elle n'est pas faite pour être mise en pratique107.

Afin de préciser les dispositions de cet article, une déclaration commune a été intégrée à la fin de certains des accords de partenariat. Cette déclaration établit un lien entre la clause droits de l'homme et la clause de non exécution et clarifie le sens des termes «cas d'urgence spéciale» et «mesures appropriées». Ces clarifications seront abordées successivement.

Précision de la notion de cas d'urgence spéciale

Dès lors qu'un cas d'urgence spéciale est déclaré, la procédure de consultation n'est plus imposée, il était donc important de préciser les conditions dans lesquelles pareille situation peut se présenter:

1. Les parties conviennent, aux fins de l'interprétation et de l'application pratique de l'accord, que les cas d'urgence spéciale visés [par la clause de non exécution] de l'accord signifient les cas de violation substantielle de l'accord par l'une des deux parties. Une violation substantielle de l'accord consiste dans:

-- le rejet de l'accord non autorisé par les règles générales du droit international,

106 Bultermann (M), op. cit.p. 205.

107 Ibid, p. 232.

-- la violation des éléments essentiels de l'accord visés à l'article 2.

La déclaration reprend le modèle de l'article 60.3 de la convention de Vienne de 1969 définissant une violation substantielle d'un accord, toutefois ici, les cas de violation substantielle correspondent aux cas d'urgence spéciale.

Cette disposition renforce l'importance de l'article 2 et inscrit véritablement la clause de non exécution dans cette perspective: si cette dernière ne faisait pas expressément référence au respect des droits de l'homme, cette déclaration y remédie en insistant sur leur caractère essentiel. De plus, la nature affirmative de cette disposition dénuée de tout conditionnel «pourrait constituer>> ne laisse pas de place à l'ambigüité: le non respect des droits de l'homme et/ou des principes démocratiques, éléments essentiels de l'accord, constitue un cas d'urgence spéciale dispensant toute consultation préalable à l'adoption de mesures appropriées. Selon Elena Fierro, c'est dans cette mesure que la notion d'urgence est quelque peu dénaturée puisque toute violation des droits de l'homme pourrait constituer une situation d'urgence. Elle ajoute que dans ce cas, la Communauté n'a pas à prouver la réalité de l'urgence mais simplement l'existence d'une violation des droits de l'homme108.

Ainsi, si les cas d'urgence peuvent se présenter relativement fréquemment, il est important de se pencher sur la notion de «mesures appropriées>>.

Précision de la notion de mesures appropriées

La seconde clause de la déclaration interprétative dispose que «les parties conviennent que les «mesures appropriées>> mentionnées [dans la clause de non exécution] de l'accord constituent des mesures prises conformément au droit international>>.

Cette clause ne définit pas la notion de mesures appropriées mais précise qu'elles doivent être adoptées en conformité avec le droit international. Les parties n'ont donc pas carte blanche dans le choix et le mode d'application des mesures.

Le droit international fixe certaines des limites à l'adoption de contre-mesures. L'article 50 du projet d'articles sur la responsabilité de l'Etat pour fait internationalement illicite énumère certaines de ces limites. Ainsi l'obligation de ne pas recourir à la menace ou à l'emploi de la force telle qu'énoncée dans la Charte des Nations Unies, les obligations relatives à la protection des droits fondamentaux de l'homme et celles ayant un caractère

108 Fierro (E), op. cit. p.241.

humanitaires excluant les représailles, doivent être impérativement respectées109. Selon l'article 51, les contre-mesures doivent être proportionnelles au préjudice subi compte tenu de la gravité du fait internationalement illicite et des droits en cause.

Le droit international fixe des limites mais n'établit pas la liste des mesures qu'un Etat peut adopter en cas de violation substantielle d'un accord. Une communication de la Commission européenne de 1995 établissait «un catalogue non exhaustif des mesures envisageables en cas de violation grave des droits de l'homme et/ou d'interruption sérieuse du processus démocratique». Ces mesures pouvaient consister en la modification du contenu des programmes de coopération ou des canaux utilisés, la réduction des programmes de coopération culturelle, scientifique et technique, le report de la tenue d'une commission mixte, la suspension des contacts bilatéraux à haut niveau, l'ajournement de nouveaux projets, le refus de donner suite à des initiatives du partenaire, des embargos commerciaux, la suspension des ventes d'armes, l'interruption de la coopération militaire et enfin la suspension de la coopération110.

Cette même communication précisait que les actions restrictives de la Communauté devaient être proportionnées à la gravité du cas d'espèce, être considérées dans une approche positive en étant fondées sur des critères objectifs, équitables et adaptées à la diversité des situations rencontrées avec le souci de maintenir le dialogue ouvert.

Les conditions de la levée des mesures n'étant pas précisées par les accords bilatéraux, le Parlement européen soulignait en 2006 dans sa résolution sur la clause relative aux droits de l'homme et à démocratie dans les accords de l'Union «qu'aucune mesure ne peut être levée tant que subsistent les raisons qui ont présidé à son application et [demandait] l'introduction de mesures complémentaires si les mesures existantes ne produisent pas de résultat après un délai important»111.

Enfin, la déclaration interprétative de la clause de non-exécution prévoit également que «si une partie prend une mesure en cas d'urgence spéciale [...] l'autre partie peut invoquer la procédure relative au règlement des différends». L'absence de consultation préalable en cas d'urgence prévue par la clause de non-exécution est pondérée par la possibilité d'avoir recours

109 Projet d'articles sur la responsabilité de l'Etat pour fait internationalement illicite, in l'Annuaire de la Commission du droit international, 2001, vol. II(2). Ce projet n'a pas de valeur juridique contraignante mais consacre certains principes généraux du droit international auxquels les Etats sont soumis, l'article 50 en fait partie. Cf. Harris (DJ). Cases and materials on International law, 6ème édition, Sweet & Maxwell, 2004, p. 63.

110 Annexe 2, COM (1995) 216 final.

111 Résolution du Parlement européen sur la clause relative aux droits de l'homme et à la démocratie dans les accords de l'Union européenne, point 16. (2005/2057(INI)).

a posteriori à la procédure de règlement des différends. Néanmoins, la suspension des mesures appropriées si une telle procédure est initiée n'est pas prévue.

La clause de non-exécution est un instrument d'une importance considérable pour mener à bien la politique européenne de promotion des droits de l'homme parce qu'elle inscrit le respect des droits de l'homme dans un cadre juridique complet. Partant de l'imposition de leur respect comme condition essentiel des accords bilatéraux jusqu'à l'adoption possible de mesures appropriées visant à «sanctionner» leur violation. Afin d'insister sur l'importance de cet instrument, il est nécessaire de se pencher sur sa légalité.

2. Légalité des clauses de conditionnalité dans l'ordre juridique communautaire

La légalité de la clause droits de l'homme fut mise en cause par trois évènements majeurs indépendants du partenariat euro-méditerranéen qui se présentèrent au cours de l'année 1996.

Il s'agit premièrement de l'opinion 2/94 relative à l'adhésion de la Communauté à la convention européenne des droits de l'homme rendue par la Cour de justice des Communautés européennes (CJCE). La cour y concluait qu'«aucune disposition du traité ne confère aux institutions communautaires, de manière générale, le pouvoir d'édicter des règles en matière de droits de l'homme ou de conclure des conventions internationales dans ce domaine»112.

Selon le Conseil et la Commission, la clause droits de l'homme ne serait pas créatrice de nouvelles obligations pour deux raisons: elle n'institue pas de nouveaux standards mais renvoie à des normes coutumières largement acceptées auxquelles la Communauté est ellemême soumise sans y avoir adhéré. Ensuite, cette clause ne transforme pas la nature des accords et ne fait que contribuer à réaffirmer des valeurs et des principes partagés par les parties conditionnant toute coopération économique et commerciale113.

Opposée à ces arguments, l'Australie, suivie de la Nouvelle Zélande, refusèrent l'insertion des clauses droits de l'homme et de non exécution corrélatives, dans les accords de coopération qu'elles envisageaient de conclure avec la Communauté. Les arguments de ce refus relevés par Elena Fierro consistaient à dire d'une part qu'il est plus approprié de traiter de la question des droits de l'homme au niveau multilatéral, d'autant plus que les instruments

112 Avis 2/94 du 28 mars 1996, para.27. Adhésion de la Communauté à la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Recueil de jurisprudence 1996 page I-01759.

113 Brandtner et Rosas, op. cit. p. 709 et Fierro, op.cit. p.246-8.

de référence ont été établis dans ce cadre. Ensuite, les droits de l'homme et le commerce appartiennent à deux sphères différentes qui doivent rester indépendantes l'une de l'autre. Enfin, une telle clause n'est guère pertinente lorsqu'elle est imposée à des Etats qui n'ont plus à faire leur preuve.

La réticence de l'Australie et de la Nouvelle Zélande trahissait en vérité leur crainte de l'instrumentalisation des droits de l'homme à des fins politiques. Elles persistèrent à contester mais en vain: la Communauté ne céda pas sur les conditions imposées comme sine qua non à toute coopération l'engageant et les accords ne furent pas signés. Ceci souligne le sérieux des exigences de la CE liées aux droits de l'homme.

Parallèlement à ces difficultés, le Portugal contesta la compétence de la Communauté à intégrer une clause droits de l'homme dans un accord de coopération entre la CE et linde sur la base de l'article 177 du TCE. Il soutenait que cet article permet d'introduire les droits de l'homme comme objectif des accords de coopération mais ne justifie pas que leur respect en constitue un élément essentiel. Dans l'arrêt Portugal c. Conseil114, la CJCE jugea que «le libellé même de cette dernière disposition démontre l'importance qu'il convient d'accorder au respect des droits de l'homme et des principes démocratiques»115. La cour ajoutait: «il y a lieu de constater, en premier lieu, que l'adaptation de la politique de coopération au respect des droits de l'homme implique nécessairement l'établissement d'un certain lien de subordination entre eux»116. Cet arrêt permettait de déduire que la clause droits de l'homme et de la clause de non-exécution des accords de coopération au développement sont légales117.

Toutefois, ces conclusions peuvent-elles être appliquées de la même façon aux accords d'association? Selon Alan Dashwood et Elena Fierro, le respect des droits de l'homme est déjà imposé dans les politiques extérieures de coopération au développement de la Communauté, ils peuvent ainsi être légitimement imposés dans les accords d'association. En effet, l'article 177.2 du TCE dispose que la politique de développement de la Communauté doit contribuer à l'objectif général de développement des droits de l'homme et des principes démocratiques. Il peut donc être déduit que cette disposition, de par sa généralité s'applique

114 CJCE 3 décembre 1996, Portugal c. Conseil, aff. C-268/94, Rec., 1996, p. I.6177.

115 Idem, para. 24.

116 Ibid, para 26.

117 Quand bien même l'accord indien ne comportait pas de clause de non exécution, la cour fit ses conclusions en se référant à "l'élément essentiel" impliquant la possibilité de suspendre l'accord en cas de violation des droits de l'homme et des principes démocratiques.

aux accords d'association dès lors qu'ils poursuivent un but de développement118, ce qui est le cas des accords de partenariat euro-méditerranéens. Peter Hilpold et Mielle Bulterman argumentent dans le même sens en se fondant sur les dispositions de l'article 181 A du TCE en vertu duquel les actions de coopération économique, financière et technique de la Communauté doivent être menées sans porter préjudice aux dispositions de l'article 177 du traité et doivent être cohérente avec ses politiques de développement119. On peut ainsi conclure que la clause droits de l'homme des accords d'association est conforme à l'ordre juridique communautaire.

La clause de non-exécution est le corollaire de la clause droits de l'homme. Selon la CJCE, dans l'arrêt Portugal c. Conseil, la clause relative aux droits de l'homme de l'accord indien «peut être, notamment, un facteur important pour exercer le droit d'obtenir, en vertu du droit international, la suspension ou la cessation d'un accord de coopération au développement lorsque le pays tiers n'a pas respecté les droits de l'homme»120. L'un des intérêts même de la clause droit de l'homme revient à mettre en place un droit et un mécanisme de sanction121. Ainsi, la Communauté a-t-elle la compétence pour adopter des mesures en réaction à des violations des droits de l'homme dès lors qu'elles sont respectueuses des normes internationales.

118 Fierro, op. cit.p. 255, et DASHWOOD Alan, The human rights opinion of the ECJ and its constitutional
implications, University of Cambridge, Centre for Legal Studies, CELS Occasional paper n°1, 1996, p. 26.

119 Peter Hilpold, op. cit. p. 374, et Bultermann, op. cit. p.92

120CJCE 3 décembre 1996, Portugal c. Conseil, aff. C-268/94, Rec., 1996, p. I.6177, Para. 27.

121 ROSAS Allan, Mixed Union, mixed agreements, in International law aspects of the European Union, éd.M. Koskeniemi, Kluwer law international, 1998, p.145.

PARTIE II: UN PROCESSUS LACUNAIRE SUR LE TERRAIN DES DROITS DE
L'HOMME

Si la déclaration de Barcelone, les instruments financiers du partenariat et les clauses de conditionnalité des accords permettaient de fixer un niveau élevé d'attentes dans le domaine des droits de l'homme, la pratique du partenariat s'est révélée lacunaire et loin d'être à la hauteur. Il convient d'étudier dans un premier temps dans quelle mesure les termes du partenariat n'ont pas été respectés (chapitre I) avant d'étudier les aménagements possibles (chapitre II).

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