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La recevabilité des requêtes devant la cour de justice de la CEMAC

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par Apollin KOAGNE ZOUAPET
Institut des Relations Internationales du Cameroun (IRIC) - Master en Relations Internationales, option Contentieux International 2010
  

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B- Les conditions relatives à l'objet du recours

Il s'agit ici des règles de recevabilité qui portent sur le but poursuivi par le recours, la finalité de la requête. A une approche transversale permettant d'examiner les actes attaquables et les auteurs des actes, nous opterons pour une approche thématique centrée sur les principales voies de droit ouvertes devant la CJC. Les professeurs Jean Boulouis et Marco Darmon proposent une classification selon que l'action vise à faire sanctionner par le juge le respect de la légalité par une institution communautaire (1) ou qu'elle vise à faire sanctionner le respect par un Etat membre de ses obligations (2). Nous nous attarderons également de façon spécifique sur quelques procédures urgentes et particulières (3).

1- Les voies de droit visant les institutions communautaires.

Il s'agit principalement ici parmi les voies de droit énumérées dans la Convention régissant la Cour de justice communautaire, des recours en carence, en annulation, en responsabilité contractuelle de la communauté, en contentieux de la fonction publique communautaire et l'exception d'illégalité. Nous n'envisagerons toutefois ici que celles qui ont des règles spécifiques liées à leur objet, à l'exclusion du contentieux de la fonction publique communautaire et des recours contre les sanctions prononcées par les organismes à fonction juridictionnelle.

Le recours en annulation a pour objet de faire annuler un acte émanant d'une institution communautaire et constitue l'une des principales garanties de la légalité communautaire. Il consolide de ce fait les assises du système normatif et développe son aptitude à être légitimement accepté. Il traduit selon le docteur Jean Kenfack, « le souci de marquer l'emprise du droit dans l'ordre juridique communautaire ou d'intégration. C'est donc une garantie fondamentale du respect de la légalité dans la mise en oeuvre du droit communautaire, de l'intégration économique et juridique99(*) ». Quelle que soit l'institution qui en est l'auteur, seuls sont attaquables les actes qui produisent des effets de droit en modifiant la situation juridique d'une personne. En principe, il s'agit suivant l'article 41 du traité révisé de la CEMAC des décisions c'est-à-dire des actes des institutions et organes communautaires faisant grief100(*). La CJCE a adopté une interprétation extensive, que devrait suivre la CJC, de façon à donner la plus grande efficacité au contrôle de légalité.

Indifférente à la forme, peu importe qu'il s'agisse par exemple d'une simple lettre101(*), la CJCE recherche si l'acte entrepris constitue matériellement une décision, c'est-à-dire une manifestation définitive de volonté destinée à produire des effets de droit102(*). D'autre part, un acte peut ne pas apparaître en la forme comme de nature communautaire mais être considéré comme tel s'il est intervenu dans un domaine de compétence communautaire et faire l'objet d'un recours en annulation103(*). S'agissant des accords internationaux, ils sont certes imputables à la Communauté mais aussi dans certains cas aux Etats. Le juge communautaire, CJC ou CJCE, ne peut donc pas exercer une compétence d'annulation sur l'accord en tant que tel. En revanche, s'il est établi qu'un accord est contraire à la légalité communautaire, elle peut en empêcher l'application pour ce qui concerne la communauté en annulant la décision de conclusion104(*) ou des décisions d'application105(*). Dans tous les cas, la responsabilité internationale de la Communauté vis-à-vis de ses cocontractants est susceptible d'être engagée. Il convient enfin de signaler qu'un acte imputable à un Etat ne peut être déféré pour annulation à la Cour comme l'a affirmé la Chambre judiciaire dans l'affaire société anonyme des Brasseries du Cameroun106(*). Pour le professeur Manin, pareil acte ne peut pas être déféré même s'il constitue un élément d'une procédure communautaire107(*).

Si le recours en annulation a pour objet de sanctionner l'illégalité d'actes communautaires, le recours en carence a pour objet de sanctionner des abstentions illégales d'institutions de la Communauté. Dans un sens étroit, il n'est que le complément du recours en annulation car il permet d'attaquer ce qui n'est pas attaquable par la voie de celui-ci, à savoir toute attitude d'une institution communautaire qui ne se traduit pas par un acte juridique express. Dans un sens plus large, le recours en carence permet de mettre en cause l'attitude d'une institution qui s'est abstenue de prendre un ensemble de mesures108(*). Cela vise non seulement le défaut d'adopter un règlement, une directive ou une décision, mais aussi tous les autres actes ayant une portée obligatoire109(*). Devant la CJCE, les traités de Rome limitent l'action de toute personne physique ou morale au grief d'avoir manqué de lui adresser un acte « autre qu'une recommandation ou un avis ». La formule apparemment large, ne visant que les actes de la nomenclature insusceptibles d'effet contraignant, ne peut cependant pas faire illusion selon le professeur Boulouis si l'on se souvient que de telles personnes ne peuvent être destinataires ni d'un règlement, ni d'une directive110(*).

Le principe de la responsabilité extracontractuelle111(*) de la Communauté est posé par l'article 20 de la Convention CJC. Ce recours permet à ceux qui s'estiment victimes d'un dommage causé par la communauté, la mise en cause de sa responsabilité extracontractuelle, la responsabilité contractuelle étant régie par la loi du contrat. Ce recours tend à établir l'existence d'un dommage et à démontrer l'existence d'un lien de causalité entre la faute commise par les institutions communautaires ou leurs agents dans l'exercice de leurs fonctions et le dommage causé. Il participe accessoirement du contrôle de la légalité, la faute invoquée pouvant être l'illégalité de l'acte prétendument à l'origine du dommage. Alors que la CJCE, bien qu'admettant que l'obligation de réparer incombe à la Communauté, affirme que seules les institutions de celle-ci peuvent être parties défenderesses à un recours en indemnité112(*), le juge de la CEMAC adopte le raisonnement contraire en affirmant que du fait de sa personnalité juridique, la Communauté « absorbe » la responsabilité des institutions et de ses agents et est donc seule défenderesse à l'action en responsabilité113(*). Cette position du juge communautaire de N'djamena114(*) nous semble contestable à la lecture de l'article 28 du Traité révisé, il devrait épouser le raisonnement du juge de Luxembourg qui tout en préservant l'unité de la personnalité juridique de la Communauté permet une action plus efficace des individus qui ne connaissent pas toujours le rattachement d'une institution à la CEMAC. Quoi qu'il en soit, le recours en indemnité ne devrait pas être ouvert contre les actes dont le requérant avait la possibilité de demander l'annulation ; ce qui constituerait un détournement de voies de droit115(*).

* 99 J. Kenfack Les actes juridiques des communautés et organisations d'intégration en Afrique centrale et orientale, Thèse de doctorat, Yaoundé, Université de Yaoundé II, 2003, p.297.

* 100 Ibid. pp.105-113,207.

* 101 CJCE, 10 décembre 1957, Usines à tubes de la Sarre, aff. 1/57 ; 29 juin 1994, Fiskano, aff. C-135/92.

* 102 CJCE, 5 décembre 1963, société E. Henricot, aff. 23/63.

* 103 CJCE, 31 mai 1971, Commission c/ Conseil, aff. 22/70.

* 104 CJCE, 9 août 1994 ; France c/ Commission, aff. C-327/91 ; 10 mars 1998, RFA c/ Conseil, aff. C122-9/95.

* 105 CJCE, 14 novembre 1989, Grèce c/ Commission, aff. 30/88.

* 106 CJ/CJ CEMAC, arrêt N° 0001/CJ/CEMAC/CJ/07 du 1er février 2007, Société anonyme des Brasseries du Cameroun c/ La République du Tchad.

* 107 Manin Op. Cit. p.373. Sur le recours en annulation, voir Manin Op. Cit. pp 372-381 ; Rideau Op. Cit. pp.103-104 ; Mouton et Soulard Op. Cit. pp.30-31 ; Cerexhe Op. Cit. pp.199 ; 316-317 ; Boulouis, Darmon Op. Cit. pp 169-224 ; Isaac Op. Cit. pp 169-224 ; R. Kovar « Recommandations », R. Kovar, Poillot-Peruzzeto (dir.), Répertoire de droit communautaire, Paris, Dalloz, Encyclopédie juridique, vol. II, 2003, paragraphe 59 ; A. Rainaud « CJCE, arrêt du 3 septembre 2002, Yassin Abdullam Kadi et Al Barakaat International foundation c/ Conseil et Commission », P. Weckel (dir.) « Chronique de jurisprudence internationale », RGDIP, Paris, Pedone, Tome CXII-2008, pp928-940.

* 108 Manin Op. Cit. p.389.

* 109 Kovar Op. Cit. paragraphe 60.

* 110 Boulouis Op. Cit. p.360 ; voir également sur le recours en carence Manin Op. Cit. pp.389-391 ; Mouton et Soulard Op. Cit. pp.37-38 ; Isaac Op. Cit. pp.239-240, 250 ; R. Kovar « Le droit des personnes privées à obtenir devant la Cour des communautés le respect du droit communautaire par les Etats membres », AFDI, Paris, pp. 513-515.

* 111 La juridiction compétente pour les litiges contractuels est celle désignée par les parties dans le contrat.

* 112 CJCE, 13 novembre 1973, Werhahn c/ Conseil, aff. Jointes 63 à 69/72.

* 113 CJ/CJ CEMAC, arrêt N° 001/CJ/CEMAC/CJ/05 du 07 avril 2005, Tasha Loweh Lawrence c/ CEMAC représentée par son Secrétaire exécutif.

* 114 Elle rejoint la position du docteur Kenfack qui pense que l'action doit être intentée contre la Communauté à condition que le dommage allégué soit le fait d'un de ses organes ou de ses agents dans l'exercice de ses fonctions. Kenfack Op. Cit. p.300.

* 115 M. Waelbroeck et O. Speltdoorn « Responsabilité de la Communauté », Répertoire de droit communautaire 0p. Cit. p.4.

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