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Les comportements sexuels et reproductifs des femmes vivant sous antirétroviraux au Cameroun

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par Moustapha Mohammed Nsangou Mbouemboue
Université Yaoundé I - Master en sociologie 2010
  

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I.2. Lors d'un épisode de maladie ou du développement des pathologies opportunistes

La sérologie positive est un état de santé caractérisé par la diminution des anticorps et d'autres éléments de protection de l'organisme. Cette diminution des anticorps rend l'organisme faible et vulnérable face aux maladies ou aux infections. Il devient ainsi le siège des maladies ou infections dites opportunistes à l'instar de la tuberculose, la diarrhée, les dermatoses, de l'hépatite virale.

La personne séropositive devient de temps en temps malade. Ces pathologies font parfois l'objet des hospitalisations du patient ou de la patiente sans succès. C'est ainsi que parfois à l'issu de certains examens (d'urine, de selles, et de sang), le personnel soignant ne parvient pas véritablement à déterminer avec exactitude ce dont souffre le/la malade.

Au cours de nos enquêtes, 5 femmes interrogées ont affirmé avoir découvert leur statut sérologique suite à la persistance de certaines pathologies qui, pour certaines, ne trouvaient pas toujours de succès malgré des soins intenses et pluriels92(*) qu'elles subissaient.

Certaines d'entre elles, déçues par la médecine moderne ont du recourir à la médecine traditionnelle mais sans succès comme nous a affirmé Mme 0044/0893(*), élève institutrice que nous avons rencontré à l'UPEC du CMPY en ces termes :

Il y a de cela plusieurs mois que j'ai été secouée par une longue maladie. J'ai été transférée à l'hôpital général de Yaoundé où j'ai passé environ trois mois. Mon état de maladie s'aggravait de plus en plus. Mon oncle maternel m'a emmené chez un tradi-praticien car il estimait que d'après ses recherches il s'agissait d'un poison de nuit qui m'avait été donné par l'ex-épouse de mon ami. Nous avons fait un mois chez un tradi-praticien à Mendong. Mais jusque là sans succès. On m'a ramenée à la maison pour ruptures des moyens financiers. Je n'attendais plus que la mort. Une semaine après, un conseil de famille a été organisé à mon intention. Comme décision, ma famille a décidé de me ramener à l'hôpital. Mais cette fois c'était à l'hôpital central de Yaoundé. Y étant le premier examen prescrit était celui du VIH. Examen à l'issu duquel j'ai été déclarée séropositive. Un autre examen de bilan a été prescrit pour permettre de déterminer mon taux de CD4 et me mettre sous traitement. J'étais à 200 de CD4. Mais heureusement après quelques jours de traitement j'étais soulagée malgré les effets secondaires des ARV.94(*)

Le cas de cette dame n'est pas unique. Car, plusieurs d'entre elles ont découvert leur séropositivité à la suite des pathologies diverses. Cette découverte met encore en exergue le caractère de la séro-ignorance des Camerounais. Ces personnes ont fait leur test par contrainte alors que selon la déclaration universelle sur la bioéthique et les droits de l'homme à l'article 6 alinéa 1:

Toute intervention médicale de caractère préventif, diagnostique ou thérapeutique ne doit être mise en oeuvre qu'avec le consentement préalable, libre et éclairé de la personne concernée, fondée sur des informations suffisantes. Le cas échéant, le consentement devrait être exprès et la personne concernée peut le retirer à tout moment et pour toute raison sans qu'il en résulte pour elle aucun désavantage ni préjudice.95(*)

Chez d'autres personnes, l'infection VIH se manifeste par des infections opportunistes telles que la tuberculose. C'est le cas de Mme 0073/08 ,28 ans, ex-hôtelière qui a d'ailleurs perdu son emploi suite à son infection découverte après une longue et intense saison de tuberculose. Cette situation l'a amenée à retourner dans son village Ebolowa où elle réside jusqu'à l'heure actuelle entraînant chez elle une mobilité thérapeutique et toutes les dépenses que ça comporte (transport, nutrition,...). Lors de la rencontre que nous avons eue à l'UPEC du CMPY elle nous a affirmé :

Je découvre mon statut sérologique à la suite d'une intense tuberculose que je traitais sans suite. C'est à l'issu d'un test de dépistage que le médecin m'en a informé. Mon mari s'est précipité, puisque je l' avais informé, de me mettre à la porte et d'aller publier à mon lieu de service. Ce qui a valu mon renvoi. Abandonnée à moi même j'ai pris la résolution d'aller mourir auprès de mes parents. Y étant j'ai informé ma famille mais l'entourage savait juste que j'avais la tuberculose. Au début, j'étais isolée c'est lorsque j'ai repris la forme avec le traitement que certaines personnes m'approchent.96(*)

Les propos de cette dame témoignent une fois de plus la séro-ignorance qui caractérise plusieurs Camerounais en général. De même sa répudiation par son partenaire est une preuve que la maladie constitue encore un sérieux problème chez les Camerounais. Puisqu'il n'a pas cherché à connaître lui-même son statut sérologique .De même son renvoi de son lieu de service et son isolement au village témoignent de la persistance de la discrimination et de la stigmatisation que vivent les PVVIH.

Une autre catégorie de personnes découvre leur sérologie positive à la suite des dermatoses. Car, certaines répondantes ont affirmé que c'est à la suite d'un Zona répété avec traitement sans succès que le personnel soignant leur recommande un test de dépistage qui s'avère positif. C'est dans ce cadre que Madame QD7177/03, 34 ans, coiffeuse que nous avons rencontrée à l'HDJ a affirmé que : 

C'est après une succession de Zona que je suis allée à chez un tradi-praticien pour aller vérifier ce qu'il se passait parce que dans ma vie je n'avais jamais eu des choses comme ça. Il m'a donné des poudres que je devais utiliser pour me laver et a dit que c'était une de mes tantes avec qui je m'étais disputée il y a quelques jours qui m'avait lancé ce sort. J'ai commencé le traitement et au bout de quelques jours ça avait l'air d'aller. Peu de temps c'est revenu plus qu'avant. C'est une de mes copines qui m'a conseillé d'aller faire mon test car elle avait une soeur séropositive qui avait les mêmes symptômes. Au début j'ai eu peur. C'est au cours d'un passage à l'hôpital que je vois des gens faire leur test. Moi-même, je les ai suivies et j'ai fait le mien. C'est à l'issu de ce test que j'ai constaté que j'étais séropositive. Je suis allée refaire cela au centre pasteur pour avoir la confirmation et effectivement ce n'était pas une erreur. Le médecin m'a recommandé des examens à faire pour me placer sous antirétroviraux. Depuis que je prends mes médicaments il ne reste que les cicatrices de ce Zona.97(*) 

Mme 022/07, 43 ans, tristement, relevait  qu'elle découvre sa sérologie après une intense maladie accompagnée d'un comma de 7 jours. Maladie durant laquelle elle avait été abandonnée par son mari et sa famille. Nous a-t-elle expliqué. Ce sont les soeurs de la mission catholique qui se sont occupées et continuent encore à s'occuper d'elle. Car elle est une fervente religieuse pratiquante.

A coté de ces cas d'autres femmes ont déclaré avoir connu leur statut à la suite du décès de leur partenaire ou de la succession de décès de leurs progénitures.

* 92 J. BENOIST (dir), Se soigner au pluriel. Essai sur le pluralisme thérapeutique, Paris, Karthala, 1996.

* 93 Pour besoin de confidentialité, certaines femmes ont émis le souhait de ne pas voir leurs noms apparaitre, c'est pour cette raison que nous les appelons par leur numéro de dossier de prise en charge. Cette initiative rentre toujours dans le cadre du respect de la stricte confidentialité et de la vie privée des patientes.

* 94 Entretien, septembre 2009.

* 95 « Déclaration universelle sur la bioéthique et les droits de l'homme » in Revue internationale des sciences sociales : le VIH/SIDA vu par les sciences sociales, UNESCO/ères, n°186, pp.811-819

* 96 Entretien, Août 2009

* 97 Entretien, novembre 2009.

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"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault