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Décentralisation et gestion durable des ressources forestières au Cameroun

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par Fernande Abanda Ngono
Université de Yaoundé2-Soa/Cameroun - Diplome d'études approfondies 2009
  

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Chapitre I : LA TERRITORIALISATION58(*) DU POUVOIR DE GESTION DE LA FORET.

La territorialisation du pouvoir renvoi au processus de dévolution, à proximité de compétences administratives et financières, au profit du local. Il s'agit d'un procédé par lequel, « l'Etat exerce sa mission en utilisant le territoire comme instrument d'aménagement du pouvoir publique59(*) ». On voit bien, à travers ces définitions, qu'il existe un lien opératoire entre la territorialisation et la décentralisation. C'est que, la territorialisation construit le mécanisme d'implémentation de la décentralisation ; en ce sens, le village, la commune et la région deviennent en quelques sortes « les supports matériels de l'autorité60(*) ». La construction de la décentralisation forestière au Cameroun s'inspire largement de ce mécanisme : le territoire national, que représentait le domaine forestier national, devient par le truchement du transfert de compétence, le territoire local. La mise en place d'un tel pôle de gouvernance fait montre de l'ambition d'apposer le sceau de la durabilité à la gestion forestière. Le Professeur Alexandre KISS estime d'ailleurs à cet effet que « la délégation de compétences environnementales en faveur d'autorités locales constitue une voie consacrée de la pérennité économique et écologique des ressources naturelles61(*) ». La territorialisation du pouvoir de gestion de la forêt renvoi alors au retrait de l'Etat des espaces sociaux sur lesquels il exerçait son pouvoir, et la mise en place de mécanismes institutionnels (section I) et opérationnels (section II) qui cèdent la gestion de ces espaces à de nouveaux acteurs.

Section I : LES MECANISMES INSTITUTIONNELS DU TRANSFERT DE POUVOIR DE GESTION DES FORETS AU CAMEROUN.

Conscient de la nécessité de mettre un terme au monopole de l'Etat sur les forêts dans l'intérêt même de celles-ci, le législateur s'est engagé à promouvoir une gestion intégrée, au profit de nouveaux acteurs ayant en partage la forêt dans sa proximité et son intégrité62(*). L'intervention directe des services publics centraux et déconcentrés n'a généralement pas suffi à mettre en oeuvre des politiques de gestion rationnelle des forêts ; il s'est donc imposé un changement dans le schéma institutionnel traditionnel fondé sur le centralisme Etatique. Les mécanismes institutionnels de la territorialisation traduisent l'objectif de cohésion assigné à la gestion décentralisée des forêts, il s'agit d'une construction décroissante qui va d'une reformulation du rôle de l'Etat (paragraphe I) à la promotion d'un cadre institutionnel participatif (paragraphe II).

Paragraphe I : LA REFORMULATION DU ROLE DE L'ETAT.

« Décentraliser c'est opérer un mouvement contraire à la centralisation, il s'agit d'une démarche forte supposant une centralisation préalable en quelque sorte initiale qu'il faut contrecarrer 63(*)». Jacques BAGUENNARD montre à travers cette définition que, l'élément moteur de la décentralisation est la reformulation du rôle de l'Etat. En fait par la gestion décentralisée des forêts, l'Etat forestier64(*) se veut plus soucieux des questions locales. Par conséquent, tout en rationnalisant son pouvoir et le confinant à ses excroissances (A), il conserve certaines prérogatives (B) qui paraissent plus importantes sous la décentralisation.

A) Le rôle principal des ministères en charge des questions forestières.

Jusqu'en 1992, la gestion des ressources forestières était caractérisée par une dispersion des centres de décision. La gestion de la forêt relevait du Ministère de l'Agriculture alors que celle de la faune dépendait de la Délégation du Tourisme. En 1992, la création d'un Ministère de l'environnement et des Forêts avait régularisé cette situation en confirmant ce dernier comme le principal centre de décisions pour les problèmes forestiers. Vers la fin de 2004, la gestion des aires protégées fut assignée à un nouveau département ministériel : le Ministère de l'Environnement et de la Protection de la Nature ; cette décision sera toutefois révoquée par un décret Présidentiel de décembre 200565(*). Aujourd'hui, les diverses institutions qui s'occupent de forêts, qu'elles soient publiques ou privées, centrales, locales ou coutumière, sont fédérées autour de deux ministères résultant de la réforme de l'ancien Ministère de l'Environnement des Eaux et forêts (MINEF) : un Ministère des Forêts et de la Faune (MINFOF) et un Ministère de l'Environnement et de la Protection de la Nature (MINEP).

1- Les attributions spéciales du MINFOF66(*)

Le ministère des forêts et de la faune est le principal département ministériel en charge de mettre en oeuvre la politique forestière nationale. Cette mutation témoigne d'une importance certaine accordée à la gestion des forêts au Cameroun et consacre véritablement le rôle de l'Etat, qui consiste à mettre en place un cadre propice pour élaborer et appliquer les lois et les réglementations intégrées et efficaces, que l'on puisse faire respecter ; et qui, s'appuieraient sur les bons principes sociaux, écologiques, économiques et scientifiques67(*). Le rôle du MINFOF dans la gestion des forêts consiste à réguler l'action des nouveaux acteurs dans le sens de la politique forestière nationale. Pour ce faire, il contrôle les actes posés par les autres acteurs. L'article 8 de la loi des forêts précise à cet effet que, « le ministère en charge des forêts peut pour cause d'utilité publique et en concert avec les populations concernées suspendre temporairement ou définitivement l'exercice d'un droit d'usage ». Le MINFOF dispose comme la plupart des ministères, de services centraux installés à Yaoundé chargés de manière globale de la coordination et du suivi de l'exécution de la gestion du patrimoine forestier ; et de services extérieurs, placés sous l'autorité des premiers, qui assurent à l'échelle des régions et départements la coordination et le suivi de l'ensemble des activités du ministère.

L'environnement étant une donnée abstraite dont la principale caractéristique est l'interférence entre ses différentes composantes, on retrouve nécessairement à coté d'un ministère en charge de la forêt, un département ministériel ayant une compétence générale de protection.

2- La compétence générale du MINEP68(*).

Le Ministère de l'environnement et de la protection de la nature joue a coté du MINFOF un rôle résiduel mais tout de même important dans la gestion forestière, c'est en effet ce département ministériel qui est chargé de mettre en oeuvre la politique nationale de gestion de l'environnement. A cet effet, le Décret N°2005/117 du 14 avril 2005 portant organisation du MINEP, stipule en son article 1 que le Ministère de l'Environnement et de la Protection de la Nature est chargé de l'élaboration, de la mise en oeuvre et de l'évaluation de la politique du gouvernement en matière d'environnement, dans ce sens, il est chargé de la définition des mesures de gestion rationnelle des ressources naturelles, en liaison avec les Ministères et organismes spécialisés concernés. Il dispose d'une sous direction du développement durable et de l'encadrement, chargé de l'élaboration et du suivi de la mise en oeuvre du programme de lutte contre la désertification. Le projet de lutte contre la désertification a pour objectif de mettre en place, et de coordonner des politiques de reboisement pour contrer l'avancement du désert en zone sahélienne ; et assurer l'efficacité de la régénération dans les zones forestières proprement dites.

Les autorités déconcentrées sont également des acteurs important, à travers la tutelle, ils exercent sur les collectivités locales des pouvoirs dont l'impact demeure très important.

B) La tutelle des autorités déconcentrées.

Les lois de Décentralisation de 2004 stipule clairement que, « l'Etat assure la tutelle sur les collectivités territoriales (....) les pouvoirs de tutelle sur les collectivités sont exercés sous l'autorité du Président de la république, par le ministre chargé des collectivités décentralisées et par le représentant de l'Etat dans les collectivités territoriales 69(*) ».

1- Les autorités déconcentrées.

La loi sur les forêts prévoit l'intervention d'autorités déconcentrées territorialement compétentes. Il peut donc s'agir du gouverneur ou du préfet qui sont statutairement les représentants du Président de la République dans leur circonscription administrative70(*). Leur action dans la gestion décentralisée des forêts concerne autant l'accompagnement que la tutelle. Le décret fixant les attributions des chefs de circonscriptions administratives et portant organisation et fonctionnement de leurs services du 12 novembre 200871(*) leur confère encore plus de pouvoir. Le gouverneur, à travers le pouvoir de veiller à l'exécution des lois, règlements et décisions du gouvernement qui lui est octroyé doit veiller à la mise en oeuvre du plan et du programme de développement économique et social de sa région72(*) ; Il en est de même du préfet dans sa sphère territoriale. Ces autorités ont la charge de veiller sur les intérêts nationaux dans leurs lieux de compétences. Il leur revient donc d'y assurer, le respect des lois, règlements et le maintien de l'ordre public. Par conséquent, en tant que délégué de l'Etat, le gouverneur peut par exemple, prendre des mesures nécessaires au respect de la légalité administrative ; pour ce faire, ils pourraient le cas échéant, prendre des actes réglementaires ou individuels pour assurer la cohérence de l'ordre juridique.

Les autorités déconcentrées ont ainsi des compétences clés dans la mise en oeuvre de la décentralisation. À la lecture de la loi sur les forêts, et des lois de décentralisation, on se rend bien compte qu'elles interviennent à tous les niveaux de la gestion décentralisée des forêts.

2- L'étendue de la tutelle.

Les autorités déconcentrées disposent de pouvoirs consistants dans la gestion des forêts. En tant que représentant du Président de République, elles sont impliquées dans tout ce qui concerne la gestion des forêts, à cet effet elles président les comités et commissions qui supervisent la gestion des forêts. La tutelle qu'elles exercent s'identifie à un contrôle exercé par l'Etat sur les collectivités décentralisées en vue de la sauvegarde de l'intérêt général et de la légalité. Ceci étant, les préfets réglementent les feux de brousses et la date de leur allumage73(*). L'autorité administrative est par ailleurs chargée de donner les autorisations d'allumage de feux précoces ou tardifs dans les zones de pâturages. L'on retrouve donc, la mission d'administration du risque conférée à l'autorité déconcentrée à travers la menace que représente un incendie pour l'intégrité nationale. Par ailleurs, le préfet préside la plupart des commissions, c'est le cas de la commission chargée d'apprécier les modalités de déclassements ou de classement74(*). De même qu'il est chargé, dans sa fonction générale d'ampliation, de signer les conventions de gestion75(*).

* 58 Il s'agit d'un concept doctrinal, issu de la théorie juridique française du territoire.

* 59 FOURNIE (François), Recherches sur la décentralisation dans l'oeuvre de Maurice HAURIOU ; LGDJ, Paris 2005, P. 112

* 60 BURDEAU(G), Traité de science politique, 3e éd., LGDJ, Tome II, 1980. Cité par FOURNIE F op.cit. P 113

* 61 KISS (A) et SHELTON (D) : Cours 10, évolution et principales tendances du droit international de l'environnement. Genève, Suisse UNITAR, 2001. P 43

* 62 MBAIRAMADJI (J), Gestion éco systémique des forêts basées sur les dynamiques acteurs usagers au Cameroun. Thèse de Doctorat en Science de l'Environnement. Université de QUEBEC à Montréal, 2006. P103.

* 63 BAGUENARD (J), La décentralisation, éditions « Que sais-je », PUF, 1996, P6.

* 64 KARTSENTY (A), « le retournement de l'Etat forestier » in Politique Africaine N°159. P 150.

* 65 Décret n° 2005/099 du 6 avril 2005, complété par le Décret n° 2005/495 du 31 décembre 2005 portant organisation du MINFOF.

* 66 Ministère de la Forêt et de la Faune.

* 67 ULIESCU (M),« les institutions nationales de gestion des forêts » (sous la direction de) DOUMBE BILLE et PRIEUR MICHEL. op.cit p311.

* 68 Ministère de l'Environnement et de la Protection de la Nature.

* 69 Article 66 lois N°2004/017 du 22 juillet 2004 portant orientation de la décentralisation.

* 70 Article 67alinéa 3 de la loi 2004/017 du 22 juillet 2004.

* 71 Décret N° 2008/377 du 12 novembre 2008

* 72 Art 4 idem

* 73 Article 6 alinéa 2 et 3, décret du 23 aout 1994 fixant les modalités d'application de la loi portant régime des forêts.

* 74 Article 20 aliné1 du décret du 23 aout 1994, op.cit.

* 75 Article 27 alinéa 3, idem.

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"Le doute est le commencement de la sagesse"   Aristote