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L'accès aux médicaments et le droit des brevets

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par Magloire AKOGBETO
Université Jean Moulin Lyon 3 - Master droit et management des structures sanitaires et sociales  2005
  

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INTRODUCTION

L'accès aux soins est un aspect fondamental du droit à la santé. Il peut se définir comme la facilité à utiliser en temps utile les services de santé par les individus de façon à atteindre le meilleur résultat possible en terme de santé.1 Il suppose donc une prise en charge effective des individus en matière de prévention et de soins efficaces .Ainsi, le premier droit de la personne malade est de pouvoir accéder aux soins que son état nécessite, quels que soient ses revenus.

Le droit d'accès aux soins nécessaires et à leur prise en charge financière est garanti par la Constitution française2, ainsi que par diverses Conventions internationales (notamment : Pacte de l'ONU, Convention sur les droits de l'enfant, Convention sur les droits de l'homme et la biomédecine etc.) dont la portée est toutefois variable. « Toute personne a le droit d'accéder à la prévention en matière de santé et de bénéficier de soins médicaux dans les conditions établies par les législations et pratiques nationales »3 proclame justement, à l'article 35, la Charte des droits fondamentaux adoptée à Nice en 2000.

Le droit à la protection de la santé reconnu par le Préambule de la Constitution de 1946 est fondé sur des principes d'égal accès aux soins et de libre accès aux soins garantis aux usagers par le système de protection sociale mis en place en 1945 et fondé sur la solidarité. Tous les acteurs de santé - les professionnels, les établissements et réseaux de santé, les organismes de prévention ou de soins, les autorités sanitaires - doivent employer tous les moyens à leur disposition pour le mettre en oeuvre au bénéfice de toute personne.

Le droit d'accès aux soins nécessaires est au surplus garanti par les législations sanitaires françaises, qui imposent aux établissements assurant le service public hospitalier d'être en mesure d'accueillir les patients de jour et de nuit, éventuellement en urgence, ou d'assurer leur admission dans un autre établissement de santé. La loi du 4 mars 2002 a inscrit ce droit dans un chapitre préliminaire du Code de la santé publique.

Ces dispositions légales donnent donc à chacun le droit d'obtenir les soins qu'exige son état de santé. Les contours précis de la notion de " soins nécessaires " sont toutefois

1 Cf.GRANDJEAN (H.)..., les inégalités sociales de santé, éd. La découverte et syros, Paris, 2000, p. 403.

2 Cf. Préambule de la constitution du 27 octobre 1946, puis de la constitution du 4 octobre 1958.

3 Charte des droits fondamentaux de l'Union Européenne, JOCE C 364/01 du 18.12.2000, Chap. IV, art. 35.

difficiles à fixer ; elle inclut en principe tous les soins propres à éviter une atteinte à la vie ou une atteinte grave à l'intégrité physique ou psychique de la personne.

La prise en charge financière des soins nécessaires est assurée par la législation française sur l'assurance-maladie, dans le cadre de l'assurance obligatoire des soins. Celle-ci soumet le remboursement à la triple condition que les prestations soient " efficaces, appropriées et économiques ". Le catalogue des prestations remboursées est constamment mis à jour pour tenir compte des progrès médicaux.

Toutefois, la possibilité d'améliorer et de prolonger la vie est compromise par les coûts toujours croissants des produits pharmaceutiques. Ces coûts constituent une importante barrière aux soins, notamment pour les personnes n'ayant pas (ou peu) d'assurance. De fait, la montée vertigineuse des prix menace l'accès de tout le monde aux médicaments parce ce qu'elle risque d'inciter les assureurs publics et privés à vouloir limiter leur responsabilité en refusant de couvrir certains médicaments ou en augmentant leurs frais d'utilisation.

Mais quelles sont les raisons qui peuvent expliquer le coût élevé des produits pharmaceutiques ayant du coup une incidence sur l'accès aux soins de santé ?

En effet, le marché pharmaceutique dépend essentiellement de nos jours, pour la recherche et la production, de firmes privées. Dans l'économie mondiale, le médicament est considéré comme un produit commercial comme les autres. Il fait l'objet de la protection par brevet et se retrouve soumis aux lois de l'offre et de la demande. Dans ces conditions, le marché pharmaceutique est guidé par les intérêts financiers de l'industrie et non pas ceux des malades. Les firmes pharmaceutiques choisissent de développer ou non un médicament, en fonction des bénéfices escomptés sur sa vente. Du coup, en dépit des progrès spectaculaires de ces dernières décennies en matière de thérapie, l'accès à certains traitements et méthodes diagnostiques posent problème et des dizaines de millions de personnes souffrent et meurent encore chaque année de maladies parfaitement curables faute d'accès aux traitements. Et pourtant, comme nous le disions précédemment, le droit à la santé et au meilleur choix de santé possible est un droit humain essentiel, inscrit dans la déclaration universelle des droits de l'homme, dans la charte des nations unies de l'organisation mondiale de la santé.

L'indisponibilité et ou le coût trop élevé des nouveaux traitements dus à la protection par brevet, préjudiciable à la prise en charge de certaines maladies, soulève donc le problème de l'accès aux soins, notamment l'accès financier aux thérapies, et la question de la propriété intellectuelle.

Si la finalité de l'industrie pharmaceutique est de tenter d'apporter des réponses thérapeutiques optimales aux maladies dont souffrent les patients, la mise au point d'un traitement ou d'une méthode diagnostique a-t-elle un sens si les patients n'y ont pas accès ? Aujourd'hui pourtant, certains traitements sont à l'origine d'inégalités sociales puisqu'ils demeurent inaccessibles pour certaines catégories de populations car ils restent beaucoup trop chers et hors de portée.

Le renforcement au plan international du système des brevets, censés financer la recherche pharmaceutique, aboutit de fait à interdire dans une certaine mesure l'accès aux traitements, notamment des pauvres, ceux qui en ont le plus besoin.

De ce fait on s'interroge sur la légitimité du droit des brevets dans le champ de l'accès aux soins de santé. Le droit d'accès aux soins et le droit de la propriété intellectuelle sont-ils compatibles ? Comment s'assurer que la protection par brevet des produits pharmaceutiques n'entrave pas l'accès aux médicaments des personnes vivant dans une situation de précarité, tout en préservant le rôle joué par le système des brevets pour stimuler la recherche-développement concernant les nouveaux médicaments? Tel est l'énoncé d'un problème qui est apparu récemment et qui fera l'objet d'un débat majeur sur l'évolution du droit des brevets pour les prochaines décennies.

Pour notre part, nous essayerons d'aborder quelques-unes de ces préoccupations à travers le thème : « L'accès aux médicaments et le droit des brevets »

Mais on peut d'ores et déjà s'interroger sur le lien qu'il pourrait y avoir entre les brevets et l'accès aux soins?

En fait, l'accès aux produits pharmaceutiques est un aspect essentiel de l'accès aux soins de santé dans la mesure où les médicaments sont au centre des méthodes de diagnostic et de traitement.

Selon les lois nationales sur les brevets des différents pays, les conditions du marché qui sont créées favoriseront plus ou moins de concurrence entre les fabricants de médicaments brevetés et ceux de médicaments génériques. Une concurrence accrue mène à une baisse

4 On désigne par cette expression, les baisses volontaires de prix ou des dons de médicaments de la part des industries pharmaceutiques

des prix des produits pharmaceutiques, laquelle contribue à améliorer l'accès aux médicaments et donc l'accès aux soins. Bien que l'accès dépende de nombreux facteurs, le prix élevé des médicaments constitue un obstacle majeur. Pour assurer un accès complet et durable aux médicaments, il est nécessaire de vaincre cet obstacle. Cela ne peut être accompli par le seul biais du financement de l'assurance maladie par l'Etat et de la charité des sociétés pharmaceutiques4. Les politiques publiques des gouvernements doivent aussi promouvoir l'accès aux traitements. Dans cette perspective, le développement des génériques représente un enjeu important pour la maîtrise des dépenses de santé, s'agissant d'un secteur (le médicament) dont le coût augmente de façon importante (+8% en moyenne par an sur les cinq dernières années).

De surcroît, ces coûts s'annoncent plus prohibitifs pour les prochaines décennies, notamment en raison de l'avancée spectaculaire que connaît depuis quelques années le domaine de la biotechnologie. Avec l'arrivée prochaine sur le marché de nouvelles thérapies biotechnologiques et génétiques extrêmement coûteuses, il est capital de pouvoir garantir qu'il sera possible de gérer les budgets alloués aux soins de santé, c'est-à-dire d'affecter les moyens financiers limités aux médicaments les plus efficaces et les plus économiques au prix le plus intéressant.

La protection des produits pharmaceutiques par le droit des brevets est donc aujourd'hui un sujet brûlant et mérite de notre part une réflexion.

Nous essayerons d'aborder les diverses préoccupations évoquées ci-dessus à travers la législation française en matière de brevet et d'accès aux soins de santé. Notre objectif principal est de voir comment le système français prend en compte dans le droit la spécificité de la santé (les produits pharmaceutiques) et la place qu'occupe chacun des droits en question (brevet et santé) dans le système.

Notre analyse pourra commencer dans une première partie par un état des lieux suivi d'une critique des solutions apportées en droit au problème que posent les brevets pharmaceutiques, puis dans une seconde partie nous allons confronter le droit à la réalité à travers l'hypothèse des génériques

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"Les esprits médiocres condamnent d'ordinaire tout ce qui passe leur portée"   François de la Rochefoucauld