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La traduction des constructions interrogatives

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par El Mostafa FTOUH
Université Moulay Slimane - Master langues, informatique et traduction 2010
  

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C. Complément prépositionnel :

(44) a. Avec quoi est-ce qu'il l'a ouverte ?

b. Il l'a ouverte avec un couteau.

c. Avec quoi l'a-t-il ouverte?

Lorsque le sujet n'est ni un pronom personnel ni ?on?, il est placé après le verbe si le temps est simple (cf. (46)), après le participe passé si le temps est composé (cf. (47)), ou l'inversion complexe (cf. (45)).

(45) Avec quoi Pierre l'a-t-il ouverte ?

(46) Avec quoi l'ouvre Pierre ?

(47) Avec quoi l'a ouverte Pierre ?

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Lorsque l'interrogation porte sur la qualité i.e l'identité, le rang, la mesure... de l'un des constituants de la phrase, les particules interrogatives employés sont soit les adjectifs quel /quelle / quels / quelles, soit les pronoms lequel / laquelle / lesquels / lesquelles.

a. Attribut

Si le sujet n'est ni un pronom personnel ni ?on?, celui-ci se place avant le verbe (cf (48)).

(48) Quel homme est-ce monsieur ? / Lequel est-cet enfant?/ Quelle est ta pointure?

. Sujet

(49)a. Quelle chemise te va le mieux?

b. C'est la rouge qui me va le mieux.

(50)a. Laquelle te va le mieux?

b. C'est la verte qui me va le mieux.

. Complément d'objet direct

Lorsque l'élément sur lequel porte la question est un C.O.D, l'introducteur interrogatif peut être un pronom interrogatif (cf. (51) et (52)).

(51)a. Quelle chemise as-tu choisie? / Quelle chemise est-ce que tu as choisie?

b. J'ai choisi la rouge.

(52) a. Laquelle as-tu choisie? / Laquelle est-ce que tu as choisie? b. J'ai choisi la verte.

Les contractions des pronoms avec les prépositions à et de deviennent auquel / auxquels / auxquelles / duquel /desquels / desquelles (cf (53), (54), (55) et (56)).

(53) Auquel pensais-tu?

(54)

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Auquel est-ce que tu pensais? Je pensais à celui-ci.

(55) Duquel te souviens-tu? /

(56) Duquel est-ce que tu te souviens?

Je me souviens de celui-ci.

Lorsque l'interrogation porte sur les modalités de l'action, les adverbes de temps (cf. (57)), de lieu (cf. (58)), de manière (cf. (59)), de cause (cf. (60)) ou de quantité (cf. (61)) sont d'usage.

(57) a. Quand pars-tu? / Quand est-ce que tu pars? b. Je pars demain.

(58) a. pars-tu? / est-ce que tu pars? b. Je pars à Paris.

(59) a. Comment pars-tu? / Comment est-ce que tu pars? b. Je pars en stop.

(60) a. Pourquoi pars-tu? / Pourquoi est-ce que tu pars? b. Je pars parce que je suis fatigué

(61) a. Combien en as-tu pris? / Combien est-ce que tu en as pris?

b. J'en ai pris deux.

Si le sujet n'est ni un pronom personnel ni ·on·, soit on fait l'inversion complexe (cf. (62 a, b, c, d)), soit on place le sujet après le verbe si le temps est simple, ou après le participe passé si le temps est composé (cf. (63 a, b, c, d)).

(62).a. Quand le train part-il ? / b. Comment ta soeur va-t-elle ? /

C .le train va-t-il ? / d. Combien ceci a-t-il valu?
(63).a. Quand part le train ? / b. Comment va ta soeur ?

c. va le train ? / d. Combien a valu ceci ?
L'inversion complexe devient obligatoire si le verbe est accompagné d'un complément d'objet direct (cf. (64)), ou si le verbe est

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accompagné d'un attribut (cf. (65)) et avec pourquoi (cf. (66)). Mais l'inversion complexe est en principe impossible si combien compose le sujet (cf. (67)).

(64) Pierre a-t-il caché la bague ?

(65) Quand Pierre est-il devenu avocat ?

(66) Pourquoi Pierre part-il ?

(67) * Combien de clients ont-ils protesté ?

On oppose généralement les interrogations partielles, qui portent

sur un constituant de la phrase, et les interrogations totales qui portent sur l'ensemble de l'énoncé. Cependant, cette distinction peut être égarante, car une interrogation comme «es-tu là pour me voir ? » peut sembler «partielle » dans la mesure où la question porte sur le motif de la venue lorsque la réponse peut être par exemple «je suis venu récupérer mon argent ». Elle peut être dite totale quand la réponse est censée être oui/non. En revanche, la question: « Qui vient ? » permet de parcourir mentalement l'ensemble des individus susceptibles de venir et exige de l'allocutaire de sélectionner un parmi tous les possibles.

I. 1. 3 L'interrogation directe et indirecte

J. Dubois estime «qu'il existe en français deux types principaux de phrases interrogatives »12 : il s'agit des interrogations directe et indirecte. Les deux phrases qui suivent sont des interrogations directes.

(68) Serais-tu ivre, Seigneur ?

(69) Qui es-tu donc ?

12 Dubois, J., Dubois-Charlier, F., 1970, Eléments de linguistique française, Syntaxe, p. 208.

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En outre, la phrase interrogative se définit par deux structures : celle qui constitue la demande et celle qui constitue la réponse. Dans le cas de la phrase (68) la réponse serait (oui/non), dans le cas de la phrase (69) la réponse est un syntagme nominal correspondant à celui qui est formé avec la forme « qui ». J. Dubois distingue deux catégories pour ces deux types de phrases : le premier type est un type ?oui/non? et le second est l'interrogation ·que·.

Les deux phrases (68) et (69) sont des interrogatives directes. Cependant elles peuvent être enchâssées dans des phrases de base comprenant le verbe ?demander?:

(68) a. Je demande si tu serais ivre, seigneur ?

(69) b. Je demande qui es-tu donc?

Ainsi, l'interrogation directe peut porter soit sur la totalité de la phrase, soit sur un constituant particulier. Comme pour l'interrogation totale, l'interrogation partielle se termine par un point d'interrogation. Elle est caractérisée par une intonation descendante, avec une note élevée sur le mot interrogatif placé en tête de la phrase.

Cependant, dans les interrogatives indirectes, la notion d'interrogation est lexicalisée dans un verbe d'interrogation (demander, s'enquérir, etc.) ou de recherche d'information (ne pas dire, ne pas savoir, etc.), qui constitue le support de la principale. L'énoncé sur lequel porte l'interrogation intervient sous la forme d'une proposition subordonnée, complément d'objet direct du verbe de la principale. Elle s'appelle ainsi, parce que la question est formulée dans un style indirect. Elle est contenue dans une subordonnée qui dépend d'un verbe

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introducteur. Cette partie qui contient la question indirecte s'appelle la proposition subordonnée interrogative. Elle n'admet l'utilisation ni de «est-ce que », ni de l'inversion du sujet, ni du point d'interrogation, et peut être aussi bien totale que partielle. Elle est dite totale lorsque la subordonnée est introduite par la conjonction ?si? (cf. (70)).

(70). Je me demande si elle reviendra.

Alors qu'elle est partielle lorsqu'elle est introduite par un déterminant interrogatif (cf. (71.a)), par un pronom interrogatif (cf. (71.b)) ou par un adverbe interrogatif (cf. (71.c)). L'interrogation indirecte est, par sa fonction, une complétive même si elle n'est pas introduite par une conjonction mais par un pronom ou un adverbe interrogatif, elle est généralement introduite par les mêmes mots que l'interrogation directe. Des particularités sont pourtant à signaler.

(71).a Je me demande quelle heure il est.

(71) .b Je ne sais pas qui est venu.

(71).c Elle a demandé comment on obtenait une note
supérieure à huit.

Une dégradation rapide de la syntaxe de l'interrogation indirecte peut être signalée dans la langue contemporaine, comme le signale F.DELOFFRE : « il y a certainement longtemps que l'on entend dans la langue populaire des phrases comme : dis-moi est ce que tu veux venir, dis-moi ce que tu veux. C'est-à-dire que ce type de langage généralise dans l'interrogation indirecte des outils interrogatifs de l'interrogation directe13. »

13 Deloffre, F., 1979, La phrase française, (7° édition), Paris, Cedes, P. 74.

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Il peut y avoir une interrogation indirecte incluse dans une interrogation directe: « Sais-tu si Marie est venue ? ». Certains verbes introducteurs ont un sens interrogatif (demander, se demander, s'enquérir), d'autres non (savoir, chercher, regarder...). Dans une phrase comme « Je sais s'il est là », c'est donc la présence de ?si? qui permet de savoir que l'on a affaire à une interrogative et non à une complétive. Dans l'interrogation indirecte, la forme ?est-ce que? n'est jamais employée. Si le sujet est un pronom personnel ou ?on? ou ?ce?, il n'y a jamais d'inversion de sujet. Si le sujet n'est pas l'un d'eux, celui-ci se place de préférence avant le verbe mais il peut aussi, dans certains cas, se placer après le verbe (cf.(72.a)), celui-ci se place toutefois après le verbe, avec les interrogatifs qui et quel attributs (cf.(72.b)):

72).a Je me demande ce train va. / Je me demande va ce

train.

72).b Je te demande qui est cet homme. / Je te demande quelle est ta pointure).

M. Grevisse14 remarque que l'interrogation directe introduite par

(ou si) peut faire confusion avec l'interrogation indirecte : « dans des phrases exprimant l'alternative dans l'interrogation directe, le second membre prend parfois la forme d'une interrogation indirecte introduite par (ou si), sans les phénomènes de l'inversion ou de reprise qui caractérisent l'interrogation directe 15».

-Etes-vous soufrant, ou si c'est un méchant caprice ? (Musset, chandelier, III,4.)

Les constructions avec « et si », confondues avec les interrogations du type : si nous allions nous promener. Ce type de modulation interrogative se caractérise par l'absence du point

14 Grevisse, M., 1991, Le bon usage, Paris, Duculot, P. 629.

15 Ibid.

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d'interrogation dans certains exemples, tel que le postule Grevisse16 exprime une invitation plutôt qu'une interrogation.

(73) Si vous retiriez votre chapeau ? (Gide, caves du Vat.,

I,3)

La proposition conditionnelle interrogative et exprimant une hypothèse sans expliciter le verbe principal introduite par (si) est considérée comme une subordonnée interrogative, c'est-à-dire qu'on a affaire à une interrogation indirecte.

(74) Et s'il mourait pour rien ? (A.Camus, justes,P1, P383)

L'interrogation n'est pas toujours liée à la demande d'information, elle est dite disjonctives lorsqu'elle énonce une alternative, puisque l'interlocuteur doit effectuer un choix sur lequel il doit décider (cf. (75)). Cette disjonction peut être explicitée aussi par ?oui? ou ?non? (cf. (76) et (77)). Une phrase interrogative peut ne pas commencer par un introducteur d'interrogation ni même par une proposition principale d'interrogation et coordonnée à une phrase non interrogative (cf. (78)).

(75)- Vous me rendez mon argent ou je m'adresse au tribunal ?

(76)- vous me rendez mon argent, oui ou non ?

(77)- vous prenez une décision oui ou non ?

(78)- Et son parcours millénaire, qui l'a interrompu, sinon

l'arrogance de mon siècle ? (Samarcande).

En revanche, elle est dite fictive lorsqu'elle n'appelle aucune réponse, elle correspond, quant au contenu de son message, à une

16 Ibid., P. 630.

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exclamation ou à une injonction, les exemples (78) et (79) en sont la parfaite illustration.

(78)-Comment des gens qui placent si haut les vertus de l'hospitalité peuvent ils se rendre capables de violences contre un visiteur comme toi ? (Samarcande)

(79)- Allez-vous bientôt vous taire ? Allez-vous payer ?

L'interrogation oratoire est une interrogation fictive puisqu'elle n'est pas dite afin d'avoir une réponse précise : la réponse contredisant la question est admise comme évidente. Lorsque l'interrogation partielle est oratoire, la réponse supposée est négative (non, personne, jamais, etc.) (cf (80)). L'interrogation délibérative est adressée à soit même au moment où l'on doit prendre une décision (cf (81)).

(80) .a. Me faudra-t-il attendre d'être vieux pour exprimer ce que je

pense ? (Samarcande)

(81) Pourtant que faire ? (Samarcande,)

Certaines phrases interrogatives commencent par des conjonctions de coordination sans que celles-ci soient liées effectivement à ce qui la précède (cf. (82)). Une phrase interrogative peut être insérée dans une phrase énonciative sans que cette interrogation implique une réponse. L'élément inséré joue le rôle d'une incidente comme le montre la ponctuation (cf. (83)). Il se peut que l'interlocuteur utilise une phrase incidente semblable à une phrase elliptique par laquelle il demande une information ou un éclaircissement (cf. (84)).

(82)-Et comment s'appelait ce maître, que je puisse au moins

raconter ses bienfaits? ( Samarcande).

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(83)-le coeur défaille en présence du nombre des oeuvres, que dis-

je ?du nombre des chefs-d'oeuvre ? (valéry) .

(84)-Il y a six mois de ça, j'avais cherché à vendre des couverts d'argenterie...Ah ! Qui venaient d'où ?

( J.Romain, cit. Gougenheim, dans Où en sont les études)

I. 2 Le point d'interrogation et l'intonation interrogative :

La production d'un énoncé est soumise à l'état psychologique et mental de l'interlocuteur, c'est pourquoi la prosodie de la phrase véhicule des informations extralinguistiques comme les émotions, l'état du locuteur ou la nature de la phrase (affirmative, interrogative ou exclamative). Une phrase interrogative est marquée à l'écrit par la présence d'un point d'interrogation et par une intonation montante à l'oral.

Le point d'interrogation peut être dans certains cas le seul indice qui permet de savoir que l'énoncé est une question (cf. (85)).

(85) Ma façon de prier. Ma façon de prier ? « Samarcande »

Pour renforcer l'interrogation, le point d'interrogation peut être répété (cf. (86)) ou combiné avec le point d'exclamation (cf. (87) et (88)). Dans le dialogue, le point d'interrogation peut être inséré dans une phrase non interrogative pour exprimer une interrogation explicitée par la physionomie du locuteur durant un silence qui coupe son discours (cf. (89). Dans une phrase énonciative, le point d'interrogation peut paraître à la fin des mots exprimant un doute, comme : peut être, je crois, je suppose, sans doute, etc. (cf. (90)).

(86)- Quelqu'un peut-il m'aider???

(87)-

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Qu'est-ce que vous me dites là?!

(88)- comment ?!

(89)-En tout cas, c'est un esprit bien placé. /-- ?../ - bien placé dans le monde des esprits. (Colette Sido, L.P., P53)

(90)-peut être qu'il a sommeil ?

Souvent l'exclamation utilise les mêmes moyens que l'interrogation, ce qui explique la présence d'un point d'interrogation à la fin d'une phrase exclamative avec une nuance interrogative comme le montre l'exemple (91):

(91)- Quelle drôle de chose ?

Quand les phrases interrogatives sont multiples et sont coordonnées par des conjonctions de coordination le point d'interrogation est mis à la fin de chaque phrase, et lorsque les phrases interrogatives se succèdent sans coordonnant celui-ci est mis à la fin de l'énoncé.

Le point d'interrogation est omis quand la phrase interrogative est une sous phrase, (citation - discours direct), surtout quand la sous phrase nécessite elle-même un point d'exclamation ou deux points (cf. (92)). De même l'omission du point interrogatif vient après des locutions qui perdent leur valeur interrogative, surtout après : à bouche que veux-tu, le qu'on dira-t-on, le qui-vive (cf. (93)). Dans certains cas, le point d'interrogation est omis après des interrogations fictives quand celles-ci expriment une hypothèse, une éventualité, ou dans l'expression figée (cf. (94)). Il est omis aussi quand l'interrogation fictive équivaut à une phrase exclamative (cf. (95)) ou à une phrase injonctive, surtout lorsque la phrase est terminée par un point d'exclamation, lorsque la phrase est énonciative, et aussi quand l'interrogation est délibérative, à laquelle l'auteur répond lui-même (cf. (96)).

(92)

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Qui sait, peut être n'y a-t-il qu'une amante, cette nuit à Samarcande, peut être n'y a-t-il qu'un amant.

(93) Ils s'embrassèrent à bouche que veux-tu. (Montherlant,
Pitié pour les femmes, p.79)17

(94) en-veux-tu, en voilà.

(95) Or quoi de pire au monde que de perdre son père. (Sartre, Idiot de la famille, t. p. 234).

(96)-Me laisser prendre et fouetter, jamais de la vie! (H. Bazin,
vipère au poing, XVIII ).

Pour marquer l'interrogation lorsque la phrase est longue, la montée se produit sur la partie proprement interrogative (cf. (97)).

(97)-qu'il faudrait attendre huit siècles avant que le monde ne découvre la sublime poésie d'Omar Khayyam, avant que ses Robaiyat ne soient vénérés comme l'une des oeuvres les plus originales de tous les temps avant que ne soit enfin connu l'étrange destin du manuscrit de

Samarcande ? (Samarcande)

Lorsqu'il y a d'autres marques qui explicitent l'interrogation, comme dans l'interrogation partielle : (inversion, reprise du sujet, morphème interrogatif), l'intonation n'est pas nécessairement montante. La note est marquée sur le mot interrogatif, et elle est plus haute que sur le début de l'énoncé déclaratif (cf. (98) et (99)).

(98)- Le cadi savait-il par ce geste, par ces paroles, il donnait naissance à l'un des secrets les mieux tenus de l'histoire des lettres ? « Samarcande »

(99)- se trouve cet hôte si généreux, que je puisse lui adresser mes

remerciements ? « Samarcande »

17 Grevisse, M., 1991, Le bon usage, Paris, Duculot, p.163.

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I. 3 Les introducteurs interrogatifs

L'interrogation peut être directe ou indirecte. Chacune est introduite par des introducteurs interrogatifs propres. Ainsi, l'interrogation directe est introduite par un déterminant, un pronom ou un adverbe interrogatif.

I. 3. 1. Les déterminants interrogatifs :

Les déterminants interrogatifs sont : quel, quels, quelle et quelles. Ils indiquent que la question porte sur l'identité ou la nature d'un être animé (cf. (100)) ou inanimé (cf. (101)). Toutefois, il ne peut être ni précédé ni suivi d'un article ou d'un déterminant démonstratif ou possessif comme l'illustrent les exemples qui suivent. L'adjectif interrogatif quel peut s'employer aussi comme attribut. Dans ce cas, il ne joue son rôle de déterminant que par rapport à un nom qui n'est pas exprimé (cf. (102) et (103)).

(100)-Quelle personne demandez-vous ?

(101)-Quel est votre médecin traitant ?

(102)-Quelles sont ses intensions ?

(103)-Quelles intensions sont ses intensions ?

On ne peut parler des déterminants interrogatifs sans évoquer les

déterminants exclamatifs et les déterminants relatifs, qui ont les mêmes formes. Le déterminant exclamatif s'emploie dans les phrases exclamatives qui expriment la surprise, l'admiration ou l'indignation, et porte sur le thème indiqué par le groupe du nom. La distinction entre les adjectifs exclamatifs et les adjectifs interrogatifs se fait au niveau de

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l'écrit par la marque de ponctuation qui termine la phrase (point d'interrogation ou point d'exclamation), et par l'intonation interrogative ou exclamative qui détermine la nature de l'adjectif et de la phrase avec, au niveau oral (cf. (104)).

(104)-Quel que soit son jeu, je le gagnerai.

I. 3. 2 Les pronoms interrogatifs.

Un pronom remplace le plus souvent un nom ou un groupe nominal, mais il peut aussi se substituer à un adjectif ou à une proposition entière. Le fait qu'il puisse remplacer autre chose qu'un nom explique que l'on utilise parfois le terme de « substitut » au lieu de terme « pronom ». Les pronoms interrogatifs permettent de questionner sur l'identité (cf. (105)) ou l'action d'un être ou d'un objet (cf. (106)).

(105) -De qui parle-t-on ?

(106) -De quoi s'agit-il ?

Le pronom interrogatif joue le rôle d'anticipant puisqu'il remplace un nom qui sera exprimé dans la réponse et se situe toujours en tête de la phrase interrogative, même quand le groupe de nom qu'il remplace devrait occuper une autre place comme le montre l'exemple suivant.

(107) a. Qui appelez-vous ?

b. J'appelle Jean.

Les pronoms interrogatifs peuvent être simples ou composés, comme ils peuvent être suivi de l élément est-ce que (interrogatif complément) (cf. (108)).

(108) Qui est ce qui est venu ?

Les formes simples des pronoms interrogatifs sont ?qui?,?que? et ?quoi? : « qui » s'emploie pour différentes fonctions grammaticales avec ou sans préposition comme substitut d'un groupe de noms désignant un humain. Ainsi, les formes composées de l'article définit et de l'adjectif

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interrogatif ?lequel?, ?laquelle?, ?lesquels?, ?lesquelles?, combinées avec les prépositions ?à? et ?de? deviennent : auquel, à laquelle, duquel, de laquelle, auxquels, desquels, etc.

De même, les formes des pronoms interrogatifs peuvent être suivis de l'élément est-ce que (interrogatif sujet) ou est-ce que (interrogatif complément). Ainsi, dans l'interrogation indirecte les formes du pronom interrogatif sont les mêmes que dans l'interrogation directe, sauf que les formes complexes des pronoms interrogatifs ne doivent pas être employés, où ?qu'est-ce qui? et ?qu'est-ce que? auxquelles les formes ?ce qui? et ?ce que? doivent être substituées respectivement18. (cf. (109) et (110)).

(109) a. Qu'est ce qui se passe ? -b. J'ignore ce qui se passe.

(110) a. Que fais-tu ?

-b. Dis-moi ce que tu fais.

I. 3. 3 Les adverbes interrogatifs

Nous pouvons distinguer cinq adverbes interrogatifs qui expriment le lieu (cf. (111)), la cause (112), le temps (113) et la manière (114):

(111) Le lieu : est-il allé ?

(112) La cause : Pourquoi la vie nous réserve souvent des surprises?

(113) Le temps : quand est-il parti ?

(114) La manière : comment avez-vous joué ?

18 Grevisse, M., 1993, Le Bon Usage, Paris, Duculot, P. 1390. § 940.

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I. 4 La transformation interrogative

Toute phrase interrogative est en principe une phrase déclarative, la transformation interrogative est l'ensemble des modifications apportées à la phrase déclarative pour qu'elle acquièrt la forme interrogative. Notons qu'une phrase déclarative peut avoir cette portée interrogative grâce à l'intonation particulière qui marque la fin de l'énoncé dans le cas de l'interrogation totale comme le montre la différence entre les énoncés (115. a et b).

(115).a. Ma façon de prier.

b. Ma façon de prier ?

L'interrogation totale ou partielle peut être marquée par l'insertion d'un pronom après le verbe ou l'auxiliaire qui correspond au nombre et au genre du sujet (cf. (116)), si le sujet est un pronom personnel, ce dernier disparaît, ce qui équivaut à une inversion de sujet (cf. (117)), et si le verbe se termine par un ·, il est prononcé un /t/ (cf. (118)). Ce type d'interrogation appartient surtout à la langue soutenue.

(116) Ces arbres donnent-ils beaucoup de fruits ?

(117) Il vient ? - *Il vient-il ? - Vient-il ?

(118) a. Qu'entend-il par ceci ?

b. /kãtãtil par s?si/ ?

La construction (Inter+v+sujet) n'est pas admise avec l'interrogatif pourquoi comme le montre l'exemple suivant, la phrase (119) n'est pas acceptable.

(119) * Pourquoi sont partis les enfants ?

(120) Pourquoi sont-ils partis les enfants?

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L'interrogation totale marquée en tête par l'emploi de la formule invariable ·est-ce que· exclue l'emploi du pronom personnel après le verbe, la phrase (122) est inacceptable.

(121) Est-ce qu'il ira demain ?

(122) * Est-ce qu'il ira-t-il demain ?

Selon J. Dubois19, il n'existe en français que deux types de phrases interrogatives i.e. directe et indirecte. La première (interrogation directe) est explicitée par l'intonation ascendante, par l'inversion de sujet, par le point d'interrogation ou par l'introducteur interrogatif. Elle implique en structure profonde comme en structure de surface une seule phrase de base qui peut être enchâssée dans une phrase de base comprenant un verbe de type ?demander? et qui devient une complétive (cf. (124), ce qui rend cette phrase une interrogative+complétive. Comme le montrent les exemples suivants :

(123) Qui viendra ?

(124) Je demande qui viendra.

La phrase interrogative directe correspond à la formule comme c'est le cas de l'exemple (123) :

- Inter+P (Interrogation + Noyau)

La règle de réécriture du constituant interrogatif est la suivante :

a- (SN inter)+ INTON inter -(première formule)

Inter???

b- (SN inter)+ SN que + (INTO inter) -(deuxième formule)

Les deux formules (a) et (b) correspondent aux deux structures interrogatives totale ; interrogation (oui/non) ou partielle ; interrogation (que).

19 Dubois, J. et Dubois-Charlier, F., 1970, Eléments de linguistique française, syntaxe, Paris, Larousse, P. 208- 210.

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Suivant J. Dubois et F. Dubois-Charlier, le choix se fait entre les deux formules suivantes :

« 1. Le constituant interrogatif peut être fait d'un SN inter (abréviation de syntagme nominal interrogatif) et d'un Inton inter (abréviation de intonation interrogative). Ces deux formules sont l'un obligatoire (Inton inter), l'autre facultatif (SN inter).

2. le constituant interrogatif peut être fait d'un SN que (syntagme nominal avec démonstratif que) constituant obligatoire et de deux constituants facultatifs qui sont ceux de la première formulation : SN inter (syntagme nominal interrogatif) et Inton inter (intonation interrogative20). »

I. 5 L'interprétation sémantique de l'interrogation

L'interrogation n'est pas toujours liée à la demande d'information, elle peut avoir d'autres fins et valeurs qui lui sont attribuées par inférence. La question est soumise à un certain nombre de conditions tant sémantiques que pragmatiques où les verbes énonciatifs ont un rôle dans l'orientation des questions vers des interprétations qui leur confèrent des valeurs indirectes qui sont soit des assertions soit des mandes21.

Sémantiquement, la question est liée à : ·En est-il ainsi ?· Et qu'elle a une valeur suspensive. Le couple question/réponse est lié à des situations particulières et codifiées telles que l'interview, l'enquête sociologique, le discours pédagogique, l'interrogatoire, l'instruction judicaire, etc. Ainsi, l'acte de questionner est réalisé dans différentes situations pragmatiques de communication, il est soumis à différentes conditions qui en assurent le fonctionnement. Sans oublier la présence de

20 Ibid

21 Le mande est u n énoncé directif à valeur illocutoire de prescription, lié à la désirabilité ; qu'il en soit ainsi. « la notion de prescription est entendu, ici, dans le sens général de faire faire quelque chose à quelqu'un »

Taifi, M., 2000, Sémantique linguistique : référence, prédication et modalité, publication de la faculté des Lettres et des Sciences Humaines, Fes, SFR, P. 189.

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deux interlocuteurs qui fondent la situation de communication qui est évidente.

I. 5. 1. Les conditions sémantiques pour le fonctionnement de la question

Pour obtenir une information, il faut satisfaire différentes conditions. En effet, le locuteur doit dans un premier temps être animé du désir d'obtenir une information pour mettre fin à son état d'incertitude ou de doute. Et pour que l'acte de questionner soit pertinent, il doit satisfaire une deuxième condition : il s'agit de sa présomption sur le savoir de l'énonciataire. En fait, l'énonciateur ne peut demander une information que s'il a une prémonition, une intuition ou tout autre état psychologique qui lui permet de présupposer que l'énonciataire peut fournir l'information demandée.

La troisième condition consiste en ce que l'énonciataire est capable et apte à fournir l'information. Or, dans certains cas, l'allocutaire peut ne pas fournir l'information même s'il en dispose.

La quatrième condition concerne la modalité de la question elle-même. La question doit être considérée comme une simple tentative

d'obtenir une information et non pas une cause produisant
automatiquement la réponse attendue. On s'accorde en général à percevoir une différence sémantique entre « Tu pars ? », « Pars-tu ? » et « Est-ce que tu pars ? ». En effet, « Tu pars ? », s'emploie plutôt pour un allocutaire qui semble agir en vue d'un départ, en revanche, « Est-ce que tu pars ? » ou « Pars-tu ? » préjugent moins de la réponse, laissent ouverte l'alternative. L'inversion du clitique sujet n'est nullement réservée à l'interrogation, on la trouve dans les incises, les hypothétiques, etc. Il

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semble qu'elle permet de suspendre l'assertion, ce qui est requis dans l'interrogation.22

Les interrogations partielles sont riches en présupposés, qui contribuent à enfermer l'allocutaire, à contraindre sa réponse; demander « Qui vient ? » ou «Pourquoi est-il en retard ? », c'est présupposer que quelqu'un est venu ou qu'il est en retard. Il arrive qu'un même énoncé supporte plus d'une interrogation partielle à la fois: « Qui est venu quand ? », « Qui a parlé à qui ? » Cette possibilité qu'a l'interrogation de porter sur l'ensemble de la phrase ou sur un seul constituant se retrouve dans la négation qui, elle aussi peut être partielle: «Je n'ai vu personne » ou totale: « Je n'ai pas vu Paul. »23

I. 5. 2 Les valeurs illocutoires relatives à l'interrogation

La question peut être liée à des fins pragmatiques et être investie pour d'autres valeurs illocutoires outre la demande de l'information. La question peut être utilisée pour instaurer une communication et accéder à autrui, pour éviter des regards, pour agir sur autrui (le séduire, le charmer, le compromettre, le blesser, etc.). Dans telles situations, le locuteur n'attend pas de réponses de la part de l'énonciataire et ce dernier n'est pas censé en fournir. Dans ce sens, la question revêt une fonction phatique qui en fait des moyens pragmatiques résidant dans les interactions verbales entres les interlocuteurs.

Les valeurs illocutoires de la question sont multiples. L'interrogation peut être une question de confirmation et d'assentiment. Elle est utilisée pour faire sortir le locuteur de son état d'incertitude ou de doute. La question d'examen fait un meilleur exemple, elle est utilisée

22 Maingueneau, D., 2001, Précis de grammaire pour les concours, (troisième édition), Paris, Nathan.

23 Ibid.

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pour évaluer les connaissances de l'étudiant et non pas pour recevoir une réponse recherchée.

L'assertion peut revêtir l'habit de l'interrogation. Elle est liée à la description d'un état de chose. La question à valeur assertive peut être une constatation d'un état de chose partagé entre le questionneur et le questionné ;(il fait beau, n'est-ce pas ?), et peut être aussi une véritable question rhétorique qui est soumise à un ensemble de contraintes tant grammaticales que lexicales, comme le montre l'exemple suivant.

(125) a. Ce n'est pas toi qui a fais ce travail ?
b. Non, ce n'est pas moi qui ai fait ce travail ?

La question peut être utilisée pour une fin qui est liée à la réaction du questionné, c'est-à-dire pour effectuer des actes directifs, c'est une valeur illocutoire de mande. Les verbes ?pouvoir? et ?vouloir? sont des verbes modaux souvent utilisés dans la question à interprétation de mande. Ils sont souvent utilisés dans des structures interrogatives de type : vouloir /pouvoir+sujet+P ? et qui sont susceptibles d'une lecture par inférence. On ne peut imaginer une situation où le locuteur demande à un passager : pouvez-vous m'indiquer le chemin de la municipalité ? où celui-ci se contente de lui répondre : oui je peux. De même pour une situation où un locuteur demande qu'on lui passe un stylo : voulez-vous me passez le stylo ? et le questionné se contente de lui répondre par oui sans aucune exécution d'action, (ici celle de lui passer un stylo). La situation serait plutôt drôle. La question rhétorique avec les verbes vouloir et pouvoir ne déclenchent pas des réponses mais des comportements. Face à la question voulez-vous P et pouvez-vous P, l'énonciataire est censé exécuter le contenu de P24.

24 Taifi, M., 2000, Sémantique linguistique, Références, prédication et modalité, Fes, SFR.

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I. 5. 3. Différentes interprétations de l'adverbe

interrogatif « comment »

Il est connu que l'adverbe d'interrogation "comment" est utilisé pour s'interroger sur la manière dont s'est produit un fait. H. Korzen25 a soulevé le cas de l'usage de "comment" pour s'interroger sur la cause, prenant alors le sens de "comment se fait-il que", comme l'illustrent les exemples suivants, où la réponse consiste en une proposition causale introduite par ·parce que·.

(126) a. Comment savais- tu qu'elle était justement ce soir là? b. Parce que je l'avais suivie (Simenon, indicateur, P 156)

(127) a. Comment le savez-vous?

b. parce qu'elle me l'a dit. (Simenon, Maigret se trompe, P 12-13)

Parfois l'usage de "comment" peut mener à une ambigüité d'interprétation : s'agit-il d'une interrogation qui porte sur la cause ou sur la manière ? Les exemples empruntés à B. De Cornulier26 en sont la parfaite illustration.

(128) a. Comment Jean a -t-il survécu? (manière)
b. En buvant du lait.

(129) a. Comment a survécu Jean? (manière)
b. En buvant du lait.

(130) a. Comment Jean a -t-il survécu? (cause)
b. C'est qu'il est résistant.

Dans l'exemple (128) et (129), l'interrogation porte sur la manière, en (130) la réponse correspond à une interrogation de cause. Nous avons la

25 Korzen, H., 1985, Pourquoi et l'inversion finale en français ?, Museum Tusculanum, presse universitaire de Copenhagen.

26 CORNULIER de B., 1974, « Pourquoi et l'inversion du sujet non clitique », in ROHRER C. et RUWET N. (éds), Actes du colloque franco-allemand I. Etudes de syntaxe, Tübingen, Niemeyer. P. 139-163.

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même phrase interrogative introduite par "comment" mais avec différentes interprétations : une de manière et une autre de cause. Dans ce cas là, c'est le contexte qui peut déterminer la finalité de l'introducteur "comment".

J.C.L. Anscombre et O.Ducrot abordent une autre finalité de l'adverbe "comment" : celle de la contestation. Lorsque le locuteur répond à un énoncé par une interrogation où il manifeste une attitude de surprise, d'indignation ou une innocence disculpante. C.Olivier (1985) considère que c'est à partir d'un usage particulier de la manifestation de la surprise, qu'on réalise la contestation à l'aide de "comment"27.

(131) a. ...Mme, Mille francs divisé en quatre titres de douze mille cinq cent chacun dont j'avais l'usufruit et les quatre enfants la nue propriété.

b. Comment les quatre enfants ? j'ai cinq enfants, nom d'une pipe! (G.Duhamel, Gecile parmi nous, 174)

La question explicitement exprimée serait:

c. comment pouvez-vous dire que j'ai quatre enfants alors que j'en ai cinq? (Qui se trouve derrière l'énoncé "comment+P)? entrainé dans la stratégie de la contestation28.

L'interrogation avec « comment » est aussi utilisée pour porter sur l'état (cf (132)), pour exprimer l'ironie (cf (133)) ou pour expliquer un fait (cf (134)).

(132) comment vas-tu ?

(133) comment tu as pu gaspiller tous ces cinq Euros ?

(134) comment veux-tu que je viens à temps avec tout cet embouteillage?

27Anscombre, J.C. et Ducrot, O., 1981, « Interrogation et argumentation », in Langue française, n°42, pp. 5-22.

28Olivier, C., 1985, « L'art et la manière: comment dans les stratégies discursives » in Langages. Université de Toulouse-le-Mirail.

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