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La politique chinoise de l'administration Bush après la répression place Tiananmen : l'interdépendance peut-elle apaiser les tensions politiques ? 1989-1993

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par Nicolas Le Guillou
Université Jean Moulin Lyon 3 - Master 1 Science Politique - Relations Internationales spécialité Sécurité & Défense 2014
  

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Chapitre 3 : Les conséquences directes de la répression chinoise

La répression place Tiananmen eut des répercussions à plusieurs niveaux de la relation sino-américaine. Compte tenu de l'importante présence médiatique au moment des événements, la crise affecta en priorité l'opinion américaine, relayée par le Congrès. Sur le plan intérieur, Tiananmen généra des divisions au sein du parti communiste chinois.

Section 1 : L'impact émotionnel de Tiananmen aux Etats-Unis

Nous l'évoquions en introduction, Tiananmen cristallisa les antagonismes sino-américains et dissolut les affinités. Pour Robert Suettinger, la crise de Tiananmen suscita en effet des interprétations parfaitement contradictoires dans les deux camps. Tandis que les Etats-Unis virent dans le printemps de Pékin les prémices d'une révolution démocratique exprimée par la jeunesse chinoise contre un Etat autoritaire dominé par un Parti communiste cynique, les leaders politiques chinois l'interprétèrent comme une tentative de coup d'Etat et de désordre mené par un groupuscule politique alimenté par des forces politiques extérieures prêtes à subvertir la RPC164. Quoi qu'il en soit, les images d'étudiants chinois en sang secourus ou emmenés à l'hôpital de manière improvisée sur des véhicules de fortune, horrifièrent l'Amérique165. L'effondrement de la « Déesse de la Liberté et de la Démocratie » (Goddess of Freedom and Democracy), cette statue réalisée par des étudiants de l'école nationale des beaux-arts de Pékin le 29 Mai 1989, ou la vidéo éminemment célèbre de l'étudiant chinois bloquant le passage de plusieurs tanks de l'APL eurent un impact émotionnel considérable aux Etats-Unis166. Cependant note Robert Suettinger, parce que l'accès des reporters étrangers aux différents sites stratégiques de Pékin fut particulièrement limité pendant cette période chaotique (compte tenu de la loi martiale), l'information retransmise aux Etats-Unis

161 U.S. EMBASSY IN CHINA, « TFCH01 SITREP No. 69, July 1, 1700 Local - 1st of July 1989 », Digital National Security Archive, China and the U.S., 8p.

162 MANN James, About Face: A History of America's Curious Relationship with China, From Nixon to Clinton, op. cit. p. 192.

163 HARDING Harry, A Fragile Relationship: The United States and China since 1972, Washington, D.C., op. cit. p. 222.

164 SUETTINGER Robert L., Beyond Tiananmen: the politics of US-China relations 1989-2000, op. cit. p. 13.

165 Ibid., p. 86.

166 HARDING Harry, A Fragile Relationship: The United States and China since 1972, op. cit. p. 223.

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fut souvent inexacte ou fondée sur des rumeurs imprécises167. Aucune caméra de télévision n'eut d'ailleurs accès à l'ouest de la place Tiananmen où le gros des exécutions de l'APL pris place. Ce caractère imparfait de l'information des journaux américains, associé au refus des autorités chinoises de divulguer des estimations crédibles et fongibles, contribua ainsi à diffuser une vision d'horreur et de massacre auprès du public américain. Loin de nous l'idée de sous-estimer l'ampleur insurrectionnelle de la crise Tiananmen, mais simplement d'alerter sur l'influence qu'ont pu exercer les médias américains sur la représentation collective de la répression du régime communiste.

Section 2 : Changement de regard sur le régime communiste chinois

Le public américain fut donc abreuvé d'images de l'étouffement du soulèvement par les autorités chinoises. En quelques jours, la sympathie, l'enthousiasme, la complaisance qu'avait suscitée la RPC depuis ses réformes, se dissipèrent de manière quasi-irrévocable au sein de l'opinion publique américaine168. Le revirement de celle-ci fut aussi brutal que la répression chinoise : alors qu'avant le 4 Juin 1989, 65 à 72% des américains interrogés étaient jugés favorables à la RPC, ils n'étaient plus que 16 à 34% après Tiananmen169. Tout au long des années 1980, les Américains avaient observé la Chine avec un oeil attentif et bienveillant, la considérant bien différente des autres régimes communistes. Selon les propres mots du Président Reagan, la RPC était un pays prétendument communiste (« a so-called communist country »)170. La répression place Tiananmen révéla donc aux yeux des Américains que la Chine n'était pas moins léniniste que les autres républiques populaires d'Europe et certainement pas moins brutale. La RPC de Deng Xiaoping qui avait été applaudie pendant la décennie 1980, apparut alors comme un Etat autoritaire et arbitraire171.

167 Un télégramme de l'ambassadeur américain en Chine James Lilley, relève les restrictions que la loi martiale chinoise impose aux journalistes étrangers : pas de reportage vidéo ou photographique sur la place Tiananmen, au palais de l'assemblée du peuple (the Great Hall of the People), ni d'interview dans les bureaux, hôtels ou propriété privée. De manière générale, les journalistes étrangers sont contraints de respecter toutes les interdictions imposées en termes de communication par la loi martiale chinoise U.S. EMBASSY IN CHINA, « From James Lilley to the U.S. Department of State, Reiteration of Press Restrictions Under Martial Law - 1st of June 1989 », Digital National Security Archive, China and the U.S., 3p.

168 MANN James, About Face: A History of America's Curious Relationship with China, From Nixon to Clinton, op. cit. p.192.

169 http://www.americans-world.org/digest/regional_issues/china/china1.cfm, consulté le 1 Février 2015: « Is your overall opinion of...China...very favorable, mostly favorable, mostly unfavorable, or very unfavorable?" In March 1989, a strong majority of 72% had a "very favorable" or "mostly favorable" impression of China. [...]By August 1989, another Gallup survey revealed that favorable responses had bounced back some, but to less than half of the pre-Tiananmen level (31%). »

170 MANN James, About Face: A History of America's Curious Relationship with China, From Nixon to Clinton, op. cit. p. 193.

171 KISSINGER Henry, De la Chine, op. cit. p. 401.

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Section 3 : Le Parti communiste chinois en proie aux divisions

Tiananmen eut aussi des répercussions aux plus hauts niveaux de l'Etat chinois. Une note de la section renseignement du département d'Etat rédigée le 9 Juin, rappelle ainsi qu'au coeur de la crise de Tiananmen résidait une lutte de succession entre réformateurs et conservateurs pour succéder à Deng Xiaoping172. Pour les conservateurs, Tiananmen constituaient l'accomplissement de leurs prédictions et le manque d'attention que les réformateurs prêtèrent à leurs avertissements173. La réforme selon eux était allée trop vite, il était donc urgent de rétablir le contrôle du gouvernement central sur les activités économiques174. Afin de mettre un terme aux rivalités factionnelles, le 24 Juin 1989 fut organisée la quatrième session du Comité centrale du parti, au cours de laquelle Zhao Ziyang et 3 de ses soutiens furent purgés sous le prétexte d'avoir commis des erreurs sérieuses et d'avoir soutenu le soulèvement populaire175. Jiang Zemin fut nommé secrétaire général du Parti, Li Peng, maintenu premier ministre176. Après une apparition publique le 9 Juin, Deng Xiaoping disparut pendant 3 mois, âge de 85 ans, fatigué des réunions, des décisions urgentes et des changements de pouvoir au sein du parti. Malgré tout, personne n'osa défier la position centrale de Deng dans le dispositif chinois. Celui-ci alerta aussi ses homologues sur la nécessité de ne pas se diviser en des temps aussi cruciaux pour l'avenir de la RPC. Deng mourut trois ans plus tard en 1992 après avoir continuer de dominer quelques débats politiques177.

Cependant que les conséquences de Tiananmen n'avaient pas produit encore tous leurs effets, l'administration américaine dut formuler dans le même temps ses premières réponses à la crise politique chinoise.

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"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault