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La politique chinoise de l'administration Bush après la répression place Tiananmen : l'interdépendance peut-elle apaiser les tensions politiques ? 1989-1993

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par Nicolas Le Guillou
Université Jean Moulin Lyon 3 - Master 1 Science Politique - Relations Internationales spécialité Sécurité & Défense 2014
  

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Chapitre 2 : George H. Bush et la Chine face à un contexte international bouleversé

Dans le cadre de ce chapitre, il sera question de l'influence des événements extérieurs sur la relation sino-américaine et son processus de redéfinition post-Tiananmen. Dans un premier temps, il apparaît nécessaire d'introduire quelques propositions concernant l'approche systémique.

Section 1: Définition de l'approche systémique

L'école systémique compte parmi ses soutiens, des réalistes tels que Robert Gilpin ou Kenneth Waltz. Pour autant, ce choix conceptuel n'est pas dépourvu de liens avec notre cadre théorique principal. En effet, l'approche systémique explique le phénomène d'interdépendance (notamment sur le plan économique) par l'analyse des liens de dépendance mutuelle et des politiques de coopération ou de protectionnisme qui peuvent en découler. Selon cette approche la « structure du système international, elle-même déterminée par une série d'éléments telle la nature de l'équilibre entre les puissances, détermine le champ d'action diplomatique des Etats. »252. Ce postulat émet donc l'idée que toute politique étrangère est soumise à des pressions politico-stratégiques et économiques. Dans le même temps, le processus décisionnel est lui, affecté par les modifications structurelles qui peuvent surgir dans le système international. Nous concernant, il s'agit ici d'évaluer l'impact des événements en Europe de l'Est et celui de la Guerre du Golfe sur le cadre stratégique de la relation sino-américaine.

Section 2 : Les événements en Europe de l'Est et leur impact sur la relation sino-américaine

Le socle de la relation qui avait été justifié en 1972 par la présence d'un ennemi commun, l'URSS, commença à s'écrouler avec les crises politiques en Europe de l'Est. La désintégration successive des Etats communistes au cours de l'année 1989 renforça l'antagonisme des perceptions sino-américaines. A Washington, les bouleversements marquants en République Démocratique Allemande (chute du mur de Berlin le 9 Novembre 1989), en Bulgarie et en Tchécoslovaquie annonçaient l'effondrement imminent de la RPC253. Du même coup, le caractère stratégique de la relation perdait de sa raison d'être à mesure que le bloc soviétique s'agitait. La nécessité de maintenir la RPC hors de portée de l'influence soviétique, apparaissait désormais de plus en plus

252 DAVID Charles-Philippe, Au sein de la Maison-Blanche, la formulation de la politique étrangère des Etats-Unis, op. cit. p. 14.

253 BUSH George, SCOWCROFT Brent, A la Maison-Blanche : 4 ans pour changer le monde, op. cit. p. 170.

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anachronique aux yeux de certains acteurs politiques américains254. Pour George Bush en revanche, rien ne changeait : l'empreinte stratégique de la relation sino-américaine à long terme lui paraissait toujours aussi pertinente. En bon réaliste cela créait même une situation d'interdépendance asymétrique en faveur des Américains qui triomphaient enfin. A Pékin le sentiment d'isolement devenait dangereusement effectif. La chute sanglante du dirigeant communiste de la Roumanie Ceausescu eut des effets encore plus importants sur le Parti communiste chinois255. D'un côté, les leaders se réjouirent de la disparition de l'adversaire soviétique et se confortèrent dans l'idée qu'ils ne devaient pas se compromettre avec des activistes pro-démocrates. La répression menée place Tiananmen leur apparaissait d'autant plus pertinente dorénavant. Dans un autre sens, la crainte était vive de voir se reproduire ces schémas dans leur pays. A cet égard, le débat entre les conservateurs et les réformateurs se réouvrit une nouvelle fois, auquel Deng mit fin assez vite : la Chine devait continuer sa construction économique, poursuivre ses réformes et sa politique de porte-ouverte256. Dans cette recherche d'un nouveau cadre stratégique, la Guerre du Golfe fit office de sursaut temporaire.

Section 3 : La guerre du Golfe : un partenariat stratégique ?

Effectivement, la Guerre du Golfe offrit aux Etats-Unis et à la Chine une occasion de coopérer stratégiquement sur une crise internationale d'envergure. Les deux pays avaient parfaitement conscience que leurs intérêts géopolitiques mutuels avaient, au cours de leur histoire, joué le rôle de facteur de rapprochement257. Par conséquent, aux mois d'Août et de Septembre 1990, la Chine vota toutes les résolutions du Conseil de Sécurité condamnant l'Iraq et appelant à son retrait immédiat du Koweït, la restauration du gouvernement koweïti et la mise en place de sanctions économiques contre Bagdad258. Mais en Novembre 1990, les USA, constatant l'inefficacité des sanctions économiques, cherchèrent à obtenir de l'ONU une autorisation pour recourir à la force armée. Dès lors, le droit de veto chinois au CSNU représenta un enjeu stratégique pour la diplomatie américaine259. Washington s'empressa d'envoyer son secrétaire d'Etat adjoint Richard Salomon à Pékin pour discuter de la crise260. Mais la dernière résolution adoptée en ce sens étant celle qui avait autorisée les Etats-Unis à intervenir pendant la Guerre de Corée, il était donc difficile pour Pékin de céder son vote. Ainsi, lors des rencontres avec le secrétaire d'Etat James

254 SUETTINGER Robert L., Beyond Tiananmen: the politics of US-China relations 1989-2000, op. cit. p. 103.

255 KISSINGER Henry, De la Chine, op. cit. p. 422.

256 SUETTINGER Robert L., Beyond Tiananmen: the politics of US-China relations 1989-2000, op. cit. p. 106.

257 HARDING Harry, A Fragile Relationship: The United States and China since 1972, op. cit. p. 269.

258 Ibid., p. 270.

259 Ibid.

260 U.S. DEPARTMENT OF STATE, « Question and Answer for A-S Solomon's Trip to Beijing - 4th of August 1990 », Digital National Security Archive, China and the U.S., 3p.

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Baker, d'abord au Caire, puis à New-York le 28 Novembre 1990261, le ministre des Affaires Etrangères chinois Qian Qichen laissa entendre qu'un vote affirmatif était possible en échange d'un abaissement des sanctions. Au Caire, Baker assura que les Américains n'oublieraient pas le soutien des Chinois, et pour être sûr que Pékin ne mette pas son veto, l'administration américaine proposa d'inviter Qian Qichen à Washington une fois la résolution votée. Finalement, la Chine s'abstint. L'accord n'était pas respecté mais malgré tout, le Président Bush accepta de recevoir Qichen262. Lors de cette rencontre, le ministre chinois demanda avec insistance aux Américains d'approfondir la relation et de renforcer le dialogue bilatéral. G. Bush accepta mais insista pour que la Chine s'engage dans deux domaines importants aux yeux des américains : les Droits de l'Homme et la non-prolifération des armes nucléaires et des armes conventionnelles263. Qian demanda à ce que les Américains adoptent une position plus souple au sein de la Banque mondiale, que G. Bush conditionna si les besoins humains fondamentaux étaient davantage respectés264. Au final, les Chinois remportèrent une grande partie des négociations : sans faire d'évidente concession ils s'étaient assurés d'un assouplissement des sanctions américaines. Baker lui-même questionna les résultats de la stratégie de l'administration américaine à ne faire que des concessions. Malgré tout, la fulgurante victoire américaine dans la guerre du Golfe fit craindre aux Chinois que la bipolarité céderait le pas à un monde unipolaire dominé par le leadership américain. Un sentiment anti-américain resurgit au sein de la classe dirigeante chinoise.

La crise du golfe eut donc des effets ambigus sur la relation sino-américaine. Retrouvant temporairement une dimension stratégique, très vite celle-ci fut rattrapée par ses antagonismes latents. Les premiers fondements de la relation sino-américaine se posèrent dans cette première période post-Tiananmen : la nécessité de traiter avec l'autre s'adjoignait d'une méfiance sous-jacente.

261 U.S. DEPARTMENT OF STATE, « [Announcement of Intention of China's Minister of Foreign Affairs to Attend U.N. Security Council Meeting and to Pay Official Visit to U.S.] - 27th of September 1990 », Digital National Security Archive, China and the U.S., 4p.

262 Pourtant la note du département d'Etat : U.S. DEPARTMENT OF STATE, « PRC FM Qian's Trip to New York and Washington - 25th of November 1990 », Digital National Security Archive, China and the U.S., 5p., conditionne clairement la programmation du voyage de Qian Qichen sur un vote de consensus autour de la résolution.

263 Toutes les notes du département d'Etat du mois de Novembre 1990 traitent effectivement de ses deux thématiques à plusieurs reprises.

264 U.S. DEPARTMENT OF STATE, « Meeting with Chinese Foreign Minister Qian, November 30, The Deputy Secretary's Conference Room, 11.00 a.m. - 29th of November 1990 », Digital National Security Archive, China and the U.S., 26p: l'intégralité des pourparlers et des reclamations chinoises sont compiles dans ce rapport du department d'Etat (pp 11-26).

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