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Le temps dans la justice pénale au Togo.


par Solim Aimée SONDOU
Institut des hautes études des relations internationales et stratégiques - Master II en Droit Privé Fondamental 2018
  

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§.2- Les inconvénients de la prescription des peines

La prescription des peines est une entorse à la réponse pénale (A). Le législateur a en outre gardé un mutisme sur certaines mesures qui accompagnent la peine (B).

A- La prescription des peines, une entorse à la réponse pénale

Tout procès pénal doit aboutir à une décision de justice. Cette décision doit être exécutée dans un délai prévue par la loi pénale. A défaut, elle s'éteint. Il s'agit de la prescription des peines qu`impose le droit pénal.

Prescrire une décision rendue par la justice pénale n'est pas sans conséquence. En effet, elle constitue une véritable entorse à la réponse pénale.

D'abord, la prescription des peines entraine l'inexécution de la réponse pénale, l'absence de répression. Il s'agit en conséquence de la privation de la fonction normative du droit pénal. On constate dans ce cas l'ineffectivité de la sanction pénale. Qu'est-ce que la sanction pénale ? Selon Stéphan SCIORTINO-BAYART c'est « la sanction qui ne peut être infligée que par un juge judiciaire, à la demande du ministère public garant des intérêts de la société»201.Elle permet d'attribuer la qualité d'infraction à l'ensemble qu'elle constitue avec l'incrimination202. Selon le vocabulaire juridique, la sanction est une « punition, (une) peine infligée par une autorité à l'auteur d'une infraction, (une) mesure répressive destinée à le punir »203.

Ensuite, la prescription des peines correspond à l'abandon de la justice pénale de son devoir qui consiste à sanctionner les infractions au Code pénal afin d'assurer la stabilité de la paix sociale. A cet effet, le législateur français distingue les objectifs des fonctions assignés à la peine en ces termes : « Afin d'assurer la protection de la société, de prévenir la commission de nouvelles infractions et de restaurer l'équilibre social, dans le respect des intérêts de la victime, la peine a pour fonctions : «1° De sanctionner le condamné» ; «2° De favoriser son amendement, son insertion ou sa réinsertion» »204. Cependant, en refusant d'appliquer la sanction pénale en raison de sa prescription, l'Etat qui est le seul détenteur de la « violence

201 SCIORTINO-BAYART (S.), Recherches sur le droit constitutionnel de la sanction pénale, thèse Université Paul Cézanne - Aix-Marseille III, 2000, p. 15.

202 BONIS-GARÇON (É.) et PELTIER (V.), Droit de la peine, Paris, Lexis Nexis, 2ème éd., 2015, p. 9.

203V°. « Sanction », in G. CORNU et Association Henri CAPITANT (sous la direction de), Vocabulaire juridique, Paris, PUF, 10ème éd., 2014, p. 941.

204 Article 130-1 du titre III du livre Ier du CPF

SONDOU Solim Aimée : « Le temps dans la justice pénale au Togo », 17-04-2019. Page 50

légitime »205 crée une double injustice : celle relative à l'infraction et celle portant sur l'inaction du détenteur du pouvoir de punir. « Le risque est alors que les cocontractants reprennent ce pouvoir qu'ils ont abandonné, pour l'exercer eux-mêmes. Or, le pouvoir exercé par les cocontractants de manière individuelle n'a pas la même finalité que celui qui est reconnu à l'autorité considérée comme légitime. Le pouvoir reconnu à l'autorité légitime transcende les intérêts individuels de chacun des cocontractants. Il n'est pas le résultat de l'addition de toutes les parts de liberté qui ont été abandonnées par les cocontractants. Il s'agit d'un pouvoir qui, détaché des intérêts particuliers, tend à maintenir la stabilité de la paix sociale et, partant, la préservation de la société par la recherche du bien commun »206.L'absence d'exécution de la sentence pénale ou de la réponse pénale par le juge togolais constitue un déni de justice. La prescription est alors perçue comme un abandon par la justice de ses devoirs, un signe d'indifférence, un déni de reconnaissance des victimes, un manquement à un devoir de mémoire et une prime à la délinquance.

Enfin, la prescription des peines tend à favoriser l'oubli d'autant plus que le législateur l'impose. Comment peut-on oublier une infraction dont l'existence a été connue par la justice et qui laisse très souvent une grande emprunte dans la mémoire non seulement de la victime mais aussi de la police. D'ailleurs, la doctrine a désapprouvé la prescription des peines. En effet d'une part, BECCARIA qui traitait de la prescription, s'était montré très hostile à l'institution lorsqu'elle permet à l'auteur de « crimes affreux dont les hommes gardent longtemps le souvenir » de rester impuni en considérant donc que la prescription avait pour tendance, lorsqu'elle était acquise, à favoriser le sentiment d'impunité du criminel et l'engageait à commettre de nouveaux méfaits207. D'autre part, Jérémie BENTHAM affirmait déjà en 1820 que l'injustice née de l'impunité d'un malfaiteur est un mal aussi fort pour la société que le méfait lui-même et qu'aux criminels ayant accomplis de tels méfaits « le glaive reste toujours suspendu sur leurs têtes »208.

Outre ces inconvénients précités, il faut relever le silence du législateur sur certaines mesures qui accompagnent la peine.

205 SUR (E.), « Violence et droit, Remarques sur la distinction entre la violence légitime et la violence pure », in Démocratie et liberté : tension, dialogue et confrontation, Mélanges en l'honneur de Slobodan Milacic, Bruxelles, Bruylant, 2008, p. 1041.

206 TZUTZUIANO (C.), L'effectivité de la sanction pénale, Thèse pour le doctorat en droit privé et sciences criminelles, Université de Toulon, 2 décembre 2015, p.9

207 BECCARIA (C.), Des délits et des peines (1764), GF Flammarion, 1991, §XXX, « Durée des procès et prescription », p.139 et s.

208 BENTHAM (J.), Traité de législation civile et pénale, trad. DUMONT (E.), Paris : Boissange, père et fils, Paris : Rey et Gravier, 1820, Tome II, « De la prescription en faits de peine », p. 149

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"En amour, en art, en politique, il faut nous arranger pour que notre légèreté pèse lourd dans la balance."   Sacha Guitry