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Le rapport des enseignants aux langues nationales, en tant que médiums et matières d’enseignement, dans l’éducation bilingue au Burkina Faso.


par Bouinemwende Wenceslas ZOUNGRANA
Université sciences humaines et sociales /Lille 3 - Master 2 Recherche 2014
  

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6.4.2 Conviction des enseignants pour l'éducation bilingue

Pour rendre compte de la conviction qu'ont les enseignants sur l'efficacité de l'éducation bilingue, il leur a été demandé de donner leur avis par rapport à l'opinion qui sous-tend que « la pédagogie bilingue serait le meilleur système éducatif pour le Burkina Faso ». La réponse à donner devait être partagée entre « très convaincu », « convaincu », « peu convaincu » et « pas du tout convaincu ». Au regard des résultats, on peut affirmer que la majeure partie des enseignants a une opinion favorable à l'éducation bilingue car 64% de l'échantillon se dit « convaincu » ou « très convaincu » contre 36% se déclarant « peu convaincu » ou « pas du tout convaincu ». Les discours tenus par les enseignants que nous avons interviewés confirment cette tendance. C'est l'avis de Manu, directeur d'école classique : « Par essence je crois que l'éducation bilingue c'est quelque chose de bien ; parce que partir de ce que l'enfant connaît le mieux pour l'aider à apprendre ce qu'il ne sait pas, partir des réalités propres à lui, sa langue maternelle pour lui apprendre une langue étrangère, y a rien de tel » ; ou encore Inno : « moi je suis un partisan du bilingue en ce sens que l'enfant utilise sa langue ; l'enfant se retrouve dans son milieu ; en famille il parle le mooré, arrivé à l'école il parle encore le mooré ; je trouve que y a pas meilleur moyen d'apprentissage que d'amener les enfants à parler leur propre langue en les initiant à une autre langue ».

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Toutefois, comme le montre le graphique suivant, les résultats varient lorsqu'on distingue les enseignants du bilingue de ceux du classique.

Graphique n° 8 : Niveau de conviction des enseignants par rapport à l'éducation bilingue selon le type d'enseignement.

Ce graphique montre clairement que les enseignants de l'éducation bilingue ont un accueil beaucoup plus favorable de ce système éducatif que ceux des écoles classiques. Alors que le pourcentage des enseignants se disant « convaincus » ou « très convaincus » culmine à 69% dans le bilingue, il n'est que de 44% au classique. En partant de l'avis de Babil, on pourrait expliquer cet écart par la méconnaissance qu'ont certains enseignants de la réalité de l'éducation bilingue : « Lorsqu'on n'est pas dans le système on peut de l'extérieur apprécier sans pour autant connaître le contenu de la chose, il faut être dans une école bilingue pour comprendre ; tel que conçue par les concepteurs, je peux dire que c'est le meilleur des systèmes ; mais le système présente des contraintes ».

Du point de vue des groupes linguistiques, on observe aussi quelques variations : ainsi, le premier constat que l'on peut faire, c'est que le dagara et le dioula sont les groupes linguistiques où le pourcentage de ceux qui se déclarent « convaincus » ou « très convaincus » est le plus élevé, soit 100% pour le premier et 91% pour le second. A l'opposé le bissa et le gourmantchema sont les seules langues nationales d'enseignement où la part de

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ceux qui affirment n'être « pas du tout convaincus » ou « peu convaincus » est la plus élevée, avec notamment 6 enseignants sur 10 de part et d'autre.

Tableau n°14 : Niveau de conviction des enseignants par rapport à l'éducation bilingue selon les groupes linguistiques en %.

Langues nat

pas conv

peu conv

convaincu

très conv

nr

Total %

Mooré

8

21

54

15

3

100% (39)

Dioula

 

9

36

55

 

100% (11)

Fulfuldé

 

25

67

8

 

100% (12)

Bissa

 

60

40

 
 

100% (5)

Nûni

 

40

60

 
 

100% (5)

Kassena

 

20

40

40

 

100% (5)

Lyèlé

 

25

75

 
 

100% (4)

Gourmanchema

10

50

30

10

 

100% (10)

Dagara

 
 

100

 
 

100% (8)

Total en%

4% (4)

24% (24)

55% (4)

16% (16)

1% (1)

100% (99)

 

Mais pour mieux apprécier la part de conviction des enseignants du bilingue, intéressons-nous à ce qui a motivé leur entrée dans ce système éducatif :

Tableau n° 15 : Récapitulatif de la position des enseignants par rapport aux opinions explicatives de leurs motivations à entrer dans l'éducation bilingue en %.

Opinions

Pas du
tout

Un
peu

Moye
nnemt

tout à
fait

nr

Total
en %

J'ai choisi l'éducation bilingue parce que je suis convaincu de sa pertinence.

23

12

22

28

15

100%

(98)

Je suis venu par hasard.

54

6

5

27

7

100 %

(98)

J'ai choisi l'éducation bilingue parce

que cela m'a été imposé.

55

6

9

12

 

100%

(98)

J'ai choisi l'éducation bilingue parce que je cherchais un métier.

73

2

2

5

18

100%

(98)

J'ai choisi l'éducation bilingue à cause de l'intérêt accordé à la langue nationale.

20

11

13

41

14

100%

(98)

 

86

La compilation des réponses des enseignants à l'énoncé des différentes opinions relatives à leur engagement comme éducateurs bilingues nous donne d'observer l'existence d'un courant défavorable pour les énoncés de la deuxième, troisième et quatrième opinion ; le cinquième énoncé, celui portant sur l'intérêt de la langue a pour sa part une opinion plus favorable ; quant au premier énoncé, il a deux courants opposés avec néanmoins une légère tendance vers l'accord. Nous pouvons donc en déduire que ce qui motive principalement la conviction des enseignants c'est leur intérêt pour les langues nationales, suivi de près par la pertinence du système éducatif bilingue, ce qui tend, à première vue, à confirmer la conviction qu'ils ont de l'efficacité du système éducatif bilingue.

Toutefois, les entretiens que nous avons effectués avec les enseignants nous invitent à la prudence ; en effet, les propos recueillis montrent que le plus souvent les enseignants sont intégrés dans l'éducation bilingue, non pas sur initiative personnelle mais sur incitation des autorités compétentes :

Babil : « je fais partie de ceux qui ont été de la première promotion à faire le test d'intégration après leur formation pour pouvoir être engagé dans la fonction publique ; et on a eu à faire le test et à l'issue du test on a été reçu ; maintenant, à la proclamation des résultats on a écrit devant nos noms enseignants bilingues11 ; ce qui veut dire qu'on devait n'importe comment se retrouver dans une école bilingue »

Inno : «En 2000 quand l'enseignement catholique avait des problèmes il s'est trouvé que moi aussi j'étais en chômage ; alors, lors d'un pèlerinage l'Evêque a demandé à tous ceux qui pouvaient aider de se manifester ; moi j'ai déposé mon dossier et on m'a affecté dans une école bilingue»

Alioud : « Bon, ce qui m'a amené, premièrement c'était par manque d'enseignants parce que ici, si un enseignant prend une classe, c'est lui-même qui doit terminer la classe jusqu'en cinquième année ; maintenant y a eu deux postes vacants et l'inspecteur nous a sollicités ; premièrement c'était pour ça mais avant de venir même on avait entendu parler de l'école bilingue et on était intéressés ; et comme il nous a appelés on n'a même pas refusé».

Il nous est donc donné de penser, comme le laisse entendre Alioud, que même si les enseignants sont intéressés au départ par le système éducatif bilingue, leur choix de devenir éducateur bilingue est assez souvent impulsé par leurs autorités hiérarchiques.

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"Un démenti, si pauvre qu'il soit, rassure les sots et déroute les incrédules"   Talleyrand