1.2.2 Les performances de l'éducation au
Burkina
- Situation d'ensemble
Le Burkina Faso a réalisé d'énormes
progrès depuis les engagements pris en faveur de l'Education Pour Tous
(EPT)4 et dans le cadre des Objectifs du Millénaire pour le
Développement5. Néanmoins, malgré ces
progrès, de grands défis restent encore à relever, tant au
niveau du formel que du non formel. Dans l'interview qu'elle a accordé
à l'attaché de
4 Le programme Education Pour Tous (EPT) a
été inauguré à la Conférence Mondiale sur
l'éducation de Jomtien (Thaïlande) en 1990 sous l'égide de
l'UNESCO ; il se donnait pour objectif principal et prioritaire d'offrir
à tous les enfants, garçons et filles, la possibilité
d'accéder à un cycle complet d'enseignement primaire en l'an
2000.
5 Les objectifs du millénaire pour le
développement constituent un plan de huit engagements approuvés
par tous les pays du monde et les institutions de développement parmi
lesquels figure l'engagement pour rendre l'éducation accessible à
tous.
10
presse de l'ambassade du Burkina aux Etats-Unis, lors de sa
visite de travail à Washington, la ministre en charge de l'enseignement
de base a énuméré un certain nombre de défis :
« faible qualité de l'enseignement et des
apprentissages, insuffisance du nombre de maîtres et de maîtresses,
surcharge de classes dans certaines régions et sous-utilisation des
infrastructures dans d'autres, inégalités filles/garçons,
taux de redoublement et d'abandon en cours de cycle élevés,
faible taux de transition entre enseignement primaire et enseignement
post-primaire, faible niveau de scolarisation en milieu rural, insuffisance de
passerelles entre éducation non formelle et éducation formelle,
coûts unitaires d'éducation élevés, faible
adéquation entre les acquis des apprentissages et les besoins du
marché de travail, faible capacité des acteurs et actrices, taux
de déperdition élevé des jeunes dans les centres,
inadéquation des curricula, etc. » (Burkina 24, lundi 10
février 2014).
Face à ces défis, l'objectif poursuivi par les
responsables en charge de l'éducation est
de faire en sorte qu'en 2015, au plus tard, 75% des enfants
de 12 ans achèvent l'école primaire et qu'en 2020 ils puissent
tous achever ce niveau d'éducation (Sources : MENA, Programme de
Développement Stratégique de l'Education de Base (PDSEB)
2010-2020, mars 2010). Mais en attentant, que peut-on dire des performances
l'éducation au Burkina ?
- Analyse de l'efficacité interne
« L'efficacité interne de l'éducation
s'intéresse aux relations entre les inputs éducatifs et les
résultats scolaires ou académiques, soit à
l'intérieur du système éducatif dans son ensemble, soit au
sein d'une institution scolaire déterminé. »
(Psacharopoulos, Woodhall, 1988, cités par Sall (1996 : 100). En
d'autres termes, c'est la capacité du système éducatif
à conduire les élèves, les étudiants et les divers
apprenants qui y entrent à terminer leur cursus avec succès dans
la limite de la période prescrite. Elle s'exprime entre autre par
l'analyse des taux de rendements scolaires, des taux de passage en classe
supérieure, de réussite aux examens, de redoublement ou
d'abandon.
Au regard de cette définition, il ressort,
d'après les statistiques, que le système éducatif
burkinabè souffre d'un problème d'efficacité à tous
les niveaux. Plus encore, cette question des mauvaises performances de
l'éducation ne semble pas dater d'aujourd'hui. Déjà Les
Etats Généraux de l'Education en 1994 faisaient remarquer ceci au
sujet du système éducatif burkinabè : « le
rendement interne du système est très faible, quel que soit
l'indicateur utilisé, car on note un faible taux de promotion et de
forts taux de redoublements, d'abandons,
11
d'exclusions aux différents niveaux du cycle »
(Etats généraux de l'éducation nationale, 1994,
p. 25).
- Le premier indice qui révèle la contre
performance du système éducatif au Burkina concerne les
évaluations nationales. Le MENA réalise des évaluations
scolaires visant à comparer l'évolution des résultats des
élèves burkinabé dans le temps. La première vague
d'évaluations a eu lieu entre 2005 et 2007 et a concerné toutes
les classes de l'enseignement primaire. L'extrait des résultats
présentés dans le tableau ci-dessous permet de se rendre compte
de la réalité.
Tableau n°1 : Résultats aux tests nationaux
d'évaluation
Année
|
Niveau
|
Disciplines (score sur 100)
|
|
Mathématiques
|
Sciences
|
2005
|
CP1
|
41,9
|
37,1
|
|
|
40,1
|
38,2
|
|
2006
|
CP2
|
50,5
|
46,4
|
|
|
45,3
|
43,9
|
49,9
|
2007
|
CE1
|
46,1
|
46,8
|
|
|
53,7
|
49,8
|
60,1
|
|
Sources : MENA (2008), Rapport sur
l'évaluation des acquis scolaires 2005-2007, DEP/MENA.
A l'observation de ce tableau, on remarque que les
résultats des trois premières évaluations
présentés ci-dessus indiquent qu'à l'exception des classes
de CP2 en 2006 et de CM2 en 2007 qui obtiennent des résultats
légèrement au-dessus de la moyenne en français et en
sciences, toutes les autres classes sont en-dessous de la moyenne.
12
- Ces résultats que l'on peut qualifier de «
catastrophiques » expliquent à leur tour le taux
d'achèvement moyen du cycle primaire ainsi que le faible taux de
promotion et le fort taux de redoublement et d'abandon dans l'enseignement
secondaire ci-dessous mentionnés.
Tableau n°2 : Evolution du taux d'achèvement
au primaire en %.
Elèves
|
1998
|
1999
|
2000
|
2001
|
2002
|
2003
|
2004
|
2005
|
2006
|
2007
|
garçons
|
27
|
25,7
|
27,3
|
28,4
|
28,4
|
29,5
|
31
|
32,7
|
34,1
|
36,9
|
filles
|
18,7
|
18,4
|
19,3
|
19,4
|
20
|
21,6
|
23,1
|
24,7
|
26,6
|
28,7
|
Total
|
23,0
|
22,1
|
23,4
|
24,3
|
24,0
|
25,6
|
27,1
|
28,7
|
30,4
|
32,8
|
|
Sources : DEP/ MENA /synthèse
2005-2006
Le tableau représentatif du taux d'achèvement
du cycle primaire montre que sur 100 écoliers entrés au CP1,
seulement 22 ont la chance de parvenir au CM2 en 1999 contre 33 en 2007. Les
déperditions sont provoquées essentiellement par les
redoublements, les exclusions pour insuffisances de résultats et les
abandons pour divers motifs.
- L'examen du tableau du flux moyen de l'enseignement
secondaire général de 2004/2005 à 2007/2008 pour sa part,
montre que les taux de promotion varient entre 58,5 et 72%, avec une baisse
considérable dans les classes d'examens (troisième : 38,3% ;
terminale : 32,4%) ; pour ce qui concerne les taux de redoublement, ils vont de
19 à 27% tandis que les taux d'abandon s'élèvent de 2
à 15%.
Cette étude menée par le Ministère des
Enseignements Secondaire, Supérieur et de la Recherche Scientifique
révèle que sur un nombre total de 1000 élèves
entrés au post-primaire, seuls 126 parviendront en classe de Terminale
avec ou sans redoublement au nombre desquels 52 seulement auront une forte
probabilité de réussir au Bac.
13
Tableau n°3 : Taux de flux moyens de l'Enseignement
secondaire général de 2004/2005 à 2007/2008
Années d'études
|
Taux de promotion
|
Taux de redoublement
|
Taux d'abandons
|
Sixième
|
58,5
|
26,0
|
15,5
|
Cinquième
|
65,4
|
24,5
|
10,1
|
Quatrième
|
70,4
|
26,9
|
2,6
|
Troisième
|
38,3
|
45,6
|
16,1
|
Seconde
|
64,3
|
20,9
|
14,8
|
Première
|
72,7
|
19,9
|
7,4
|
Terminale
|
32,4
|
39,7
|
28,0
|
|
Source : Politique sous-sectorielle des ESSRS:
Document de diagnostic, 2009
Comme le montrent les tableaux ci-dessus, l'examen attentif
des résultats scolaires, indiquant le taux d'achèvement du cycle
primaire ainsi que les taux de promotion, de redoublement et d'abandon dans
l'enseignement secondaire nous donnent de constater que le rendement interne du
système d'éducation de base formelle classique est très
faible, quel que soit l'indicateur utilisé. Mais qu'est-ce qui explique
cela ? Plusieurs hypothèses sont avancées pour justifier les
mauvaises performances du système éducatif burkinabè.
|
|