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Les employés de maison dans le droit social.


par IBRA NDOYE
Ecole Nationale d'Administration Sénégal Dakar - Brevet de l'ENA 2009
  

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Chapitre II Le cadre juridique des

employés de maison

Le cadre juridique des employés de maison est constitué d'un ensemble de textes pris au niveau international et national qui réaffirme les principes de base que l'OIT promeut depuis sa création en 1919, à savoir, essentiellement le respect par tous les états des droits économiques et sociaux en ce sens que le travail joue le double rôle de facteur d'intégration et de progrès social, donc de développement économique. Ce cadre est censé codifier les relations de travail, fixer pour les parties contractantes leurs obligations, leurs moyens juridiques d'intervention... Par conséquent, l'Etat, en sa qualité de pierre angulaire du tripartisme Etat-employeur-travailleur, doit jouer pleinement son rôle d'arbitre en contrôlant l'application de la législation sociale par tous, travailleurs et employeurs pour la réalisation de la justice sociale. Ce cadre juridique est constitué de sources d'origine externes et internes.

I. Les sources externes

A. Les conventions internationales

Le Sénégal est devenu membre de l'OIT depuis 1960 ; à ce titre, il a ratifié les conventions les plus essentielles (prioritaires et fondamentales). Celles-ci de par leur portée et leurs caractéristiques tendent à devenir une législation sociale internationale. A cet égard, elles édictent des seuils minimaux en matière sociale qui s'érigent en référence ou en une source d'inspiration pour les législations nationales. Rappelons que les conventions de l'OIT signées, ratifiées et publiées par le Sénégal entrent dans l'ordonnancement juridique et l'engagement pris de manière formelle doit se matérialiser sur le terrain glissant des relations de travail.

En ce qui concerne les employés de maison, au niveau international, aucune convention ni recommandation de l'OIT ne les vise expressément. Cette omission qu'il ne faudrait pas interpréter comme un désintérêt à l'égard de ces travailleurs est contrebalancée par les nombreuses prises de position de l'organisation en leur faveur. C'est ainsi que tous les rapports globaux du BIT concernant les quatre catégories de droits fondamentaux, à savoir le droit de grève et de négociation9, la lutte contre le travail forcé10, la lutte contre le travail des

9 BIT : votre voix au travail, Genève 2000, pp 33-34

enfants11, l'absence de discrimination12, présentent les travailleurs domestiques comme un des groupes qui souffrent nettement d'un déficit de droits. Ces droits sont doublement bafoués pour les employés de maison migrants qui souffrent le martyr dans beaucoup de pays dans le monde. Cette main-d'oeuvre, dont le lot quotidien reste le travail forcé, l'absence de dispositions relatives à leurs droits dans de nombreux pays, voire même l'esclavage est à l'origine de la Convention n° 97 sur les travailleurs migrants de 1949 révisée et complétée par la Convention n° 143 sur les travailleurs migrants de 1975. En réalité, même le Sénégal n'est pas épargné par le phénomène des domestiques migrants, le journal Walf Quotidien13 relayait une affaire de trafic d'employées de maison sénégalaises vers le Liban déjouée par la Division des Investigations Criminelles (DIC) et ayant fait l'objet d'un rapport de la Direction de la Sûreté du Territoire (DST) transmis à la Présidence. L'affaire consistait en un recrutement de « bonnes » sénégalaises devant être placées dans des foyers au Liban moyennant 300 à 400 000 FCFA de leur part. Heureusement pour elles que l'affaire a échoué, car le plus dur les attendait au bout du voyage.

Pourtant dans un article de Anne-Marie El Hage du 10 Avril 2008 repris par le même journal et paru dans le site all africa.com, la journaliste est revenue largement sur la situation difficile des plus de 100 000 femmes étrangères employées de maison au Liban dont 34 322 seraient des Africaines, d'après les chiffres officiels. Parmi elles, on note des Ethiopiennes, de loin la plus importante communauté, des Malgaches, des Camerounaises, des Togolaises, des Nigérianes, des Ivoiriennes et aussi des Sénégalaises qui seraient au nombre de 47. Mais qu'est-ce qui pousse ces Africaines à s'expatrier au pays du Cèdre ?

Parmi les raisons avancées, on évoque bien sûr la pauvreté, le besoin de bien gagner leur vie, en tout cas mieux qu'elles ne le feraient dans leurs pays, pour les Africaines francophones on note l'absence de barrières linguistiques et enfin les chrétiennes y peuvent librement pratiquer leur religion.

Malgré tous ces atouts qui rendent attractifs la « destination » Liban pour ces vaillantes dames, tout n'y est pas rose, comme l'atteste un document du Fonds des Nations Unies pour la population de 2006 à propos de l'exploitation des employées domestiques ; les réseaux qui

10 BIT : halte au travail forcé, Genève 2001, pp 31-32

11 BIT : un avenir sans travail des enfants 2002, pp 32-34

12 BIT : l'heure de l'égalité au travail 2003, pp 21-22

13 Walf Quotidien, vendredi 19 Décembre 2008, p 3

Les employés de maison dans le droit social présenté par Ibra Ndoye

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Les employés de maison dans le droit social présenté par Ibra Ndoye

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l'alimentent dit-il, ne font ni plus ni moins que de vendre l'espoir et voler les rêves, ce qui malheureusement n'a pas fait tarir ce « fleuve puissant mais silencieux » que représente la migration des femmes.

Certes, la signature d'un contrat de travail en langue arabe, le seul valable, se fait devant le notaire. Il fixe le salaire mensuel à 135 $ et évoque la nécessité pour l'employée de bénéficier d'une chambre individuelle. Cependant dans la réalité, les horaires de travail, la qualité et la quantité des tâches, les jours de congés, les contacts avec la famille du pays d'origine et avec les compatriotes sont laissés à la discrétion de l'employeur. C'est juste pour dire que pour beaucoup le rêve se transforme rapidement en cauchemar. En effet, certaines d'entre elles se plaignent d'être payées en retard voire pas du tout, d'autres d'une surcharge de travail qui n'est ponctuée par aucune pause même pas le repos hebdomadaire. Les moins chanceuses ne dorment pas assez, sont maltraitées physiquement ou verbalement et sont enfermées par leurs patrons de peur qu'elles ne s'enfuient. D'ailleurs, l'article évoque la situation de six bonnes Sénégalaises emprisonnées, car dans ce pays, les domestiques dont les papiers ne sont pas en règle ou qui y entrent illégalement sont détenues. C'est ainsi que outre les Sénégalaises, 380 Ethiopiennes, 4 Nigérianes et 2 Camerounaises croulent en prison pour l'une ou l'autre des raisons mentionnées plus haut.

Pourtant on sent que dans ce pays aussi les choses commencent à bouger grâce à l'action de la presse locale et étrangère qui ne cessent de dénoncer les conditions de travail des employées de maison. C'est sous ce rapport qu'un responsable de Caritas Liban, Najla Chahda estime que : « les cas de maltraitance semblent en nette diminution 14». Notons également que l'OIT s'est beaucoup investie dans ce pays pour de meilleures conditions de travail pour les employées de maison migrantes. Elle a poussé le gouvernement libanais à mettre en place un comité chargé de rédiger un projet de loi visant entre autres l'unification des contrats de travail, l'établissement de fiches de paie uniformisées et légalisées par l'administration libanaise. Mais comme le pense la journaliste, les avancées sont très lentes à cause de la crise que traverse le pays.

Nous avons crû devoir insister sur la situation des employées de maison migrantes en général, Africaines en particulier, pour montrer comme l'affirmait le rapport global de l'OIT, le déficit de droits dont elles sont victimes ici et ailleurs et que l'OIT n'a jamais cessé de se soucier du sort

14 Site web all africa. com, les fortunes diverses des employées de maison Africaines, 10 Avril 2008

des employées de maison, pas celles migrantes seulement. Néanmoins la question d'une convention de l'OIT sur le travail domestique « reste un besoin urgent »15. Ce besoin est non seulement pressant à cause des 100 millions d'actifs qu'il compte de par le monde, mais aussi que l'idée d'un instrument spécial pour réglementer les conditions d'emploi de la main-d'oeuvre domestique, en à croire le bulletin du Fonds de Solidarité pour les luttes de libération sociale dans le tiers monde, a été soulevée pour la première fois en 1936. Depuis lors le nombre de travailleurs et travailleuses a crû de manière exponentielle avec la privatisation des services publics qui a généré une importante demande de main-d'oeuvre domestique à l'échelle mondiale. Cette idée émise depuis 1936 ne s'est pas encore concrétisée car d'après Mme Budin : « Il n'aurait pas fallu attendre 72 ans pour voir le Conseil d'administration de l'OIT envisager de mettre les travailleurs et travailleuses à l'ordre du jour de la CIT si les hommes avaient représenté la majorité des domestiques ». Elle concluait en disant que l'un des principaux enjeux de cette question reste en soi, la dimension genre.

En attendant la prise d'un instrument formel, spécifique aux travailleurs domestiques, par l'OIT, on peut tout de même citer une brassée de conventions qui leurs sont applicables, même si elles ne les concernent que de manière incidente. Nous avons notamment :

? La Convention n° 87 sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical (1948), ? La Convention n° 98 sur le droit d'organisation et de négociation collective (1949),

? La convention n°138 sur l'âge minimum d'admission à l'emploi (1973), qui doit être au moins égal à quinze ans correspondant à celui de la fin de la scolarité obligatoire.

Le respect de cette convention est l'un des plus grands défis de l'Etat Sénégalais en ce sens que rien que dans le secteur du travail domestique le programme IPEC avait recensé

en 2005, 53 731 jeunes filles âgées de -18 ans dont 20% étaient âgées de 6 à 14ans.

? La Convention n°111 concernant la discrimination en matière d'emploi et de profession (1958),

? La Convention n°29 sur le travail forcé (1930). Cette convention vise à lutter contre le travail forcé quelque soit ses oripeaux actuels car il n'y a qu'un pas entre lui et l'esclavage. Comme on a eu à le voir plus haut les employées de maison migrantes en son souvent victimes.

15 Barbara Budin (UIAT), SOLIFONDS, Bulletin d'information n° 57 Avril 2008

Les employés de maison dans le droit social présenté par Ibra Ndoye

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? La Convention n°102 sur les normes minima en matière de sécurité sociale (1952). Elle consacre le principe de la solidarité et la justice sociale dans le monde du travail par l'instauration de prestations pour faire face aux risques encourus par les travailleurs et leurs familles.

? La Convention n°81 sur l'inspection du travail dans l'industrie et le commerce de 1947 qui constitue l'une des pièces-maitresses de tout ce dispositif. Elle insiste sur la nécessité de lui octroyer des moyens humains, matériels et juridiques suffisants pour mener à bien ses missions, sans quoi elle sera confinée dans un rôle purement statique voire attentiste dans des relations de travail où l'abus et l'arbitraire sont monnaie courante.

Naturellement, l'esprit de ces importantes conventions applicables aux employés de maison transparaît de manière plus explicite dans la législation sénégalaise.

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