WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Le travail précaire des aides à  domicile. Quel accompagnement pour les personnes àgées ?


par InàƒÂ¨s Lafkir
Université de Bordeaux - Licence de sociologie 2020
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

B) Isolement professionnel

L'auxiliaire de vie sociale exerçant ses tâches dans la sphère privée de chacun de ses différents bénéficiaires, celle-ci se retrouve fortement isolée professionnellement. En effet, elle effectue ses prestations de domicile en domicile sans avoir de contacts réguliers avec ses collègues. Sur les 6 AVS interrogées, aucune n'a le numéro de téléphone de ses collègues. Pourtant, l'accompagnement d'un usager se réalise souvent avec l'intervention de plusieurs auxiliaires d'une même structure. Le cahier de liaison reste l'unique support journalier pour laisser une trace écrite des tâches réalisées et des éventuelles recommandations pour la prochaine intervenante. Quant aux contacts avec les responsables des structures tout au long de la semaine, 4 auxiliaires de vie sociale déplorent qu'ils ne se limitent qu'à la communication d'information des changements de planning.

« Fin c'est très courtois et professionnel, ils (les chefs de secteurs) nous donnent les missions. [...] En général ils demandent surtout aux personnes chez qui on intervient comment ça s'est passé plutôt qu'aux auxiliaires. On ne me demande pas à moi comment je le ressens. »

(AVS, 24, ADHAP)

« Ce n'est pas très fréquent que l'on se parle... Ils (les chefs de secteurs) m'appellent que lorsqu'ils ont des gens à proposer et ça s'arrête là. »

(AVS, 21 ans, APF)

« J'ai souvent la directrice au téléphone l'été parce qu'il y a beaucoup de remplacements à faire. Mais on ne la voit pas. Et puis parfois on te change le planning sans te téléphoner. On t'appelle pas pour savoir si ça se passe bien. [...] Parce qu'ils (la direction) font comme ils veulent. Nous on l'appelle « la folle » la directrice ! (rires) [...] Elle n'est pas franche. »

(AVS, 54 ans, CCAS de Lormont)

« Je peux avoir un coup de téléphone de l'asso, disons 5 à 6 fois par mois... En septembre j'ai eu 3 coups de téléphone de l'association pour me proposer 3 personnes différentes. C'est tout après tu fais ton travail. »

(AVS, 26 ans, APF)

Pour lutter contre cet isolement professionnel, les structures mettent en place des réunions d'équipe. Ces dernières peuvent se mettre en place, une fois par semaine comme au

20

CCAS de Lormont ou une fois par mois comme dans l'association de l'aide à domicile du Haut Médoc. Les responsables des différentes structures organisent la fréquence de ces réunions. Sur les 5 structures qui emploient les AVS interrogées, 2 ont intégré la présence d'un psychologue dans les réunions collectives. En effet, les auxiliaires de vie sociale sont confrontées à des risques psycho-sociaux spécifiques : « le turn-over y est très élevé: beaucoup de femmes ne tiennent pas ! »16 assure Loïc Trabut, chercheur à l'Ined et auteur d'une étude sur les aides à domicile. Elles doivent faire face à la souffrance et à la mort des personnes qu'elles accompagnent parfois durant des années. L'accompagnement à domicile est avant tout une relation sociale entre deux individus. C'est pourquoi des relations affectives peuvent naître entre employée/bénéficiaire car ce sont des métiers humains. Selon la psychologue clinicienne Maria Ouazzani17, la difficulté dans la relation aidant/aidé est de trouver la meilleure distance qui permet de préserver le lien humain, le plaisir et la convivialité, tout en respectant l'individualité de chacun. De plus, ces salariées qui côtoient la fin de vie, peuvent éventuellement être renvoyées à des souvenirs ou des expériences difficiles avec des proches. Ainsi, la possibilité de s'exprimer en réunion sur son quotidien professionnel est une nécessité.

Cependant, sur les 6 AVS interrogées, il n'y en a que 2 qui se rendent aux réunions de manière assidue. Les 4 autres témoignent de leurs difficultés d'y participer en raison de leur état physique et/ou de leurs obligations familiales. En effet, la présence aux réunions collectives n'étant pas obligatoires dans toutes les structures, les auxiliaires de vie sociale préfèrent prendre du temps pour faire une pause dans leur semaine très chargée.

« Je vais en réunion quand je ne suis pas trop fatiguée. [...] Pour l'instant je n'ai assisté qu'à une seule réunion, et je reconnais que je ne vais pas toutes les réunions, car je profite de ces journées sans interventions pour me reposer. »

(AVS, 26 ans, APF)

« A vrai dire je n'y vais pas car je ne peux pas, le travail est assez fatiguant les matinées ou après-midi que j'ai de libre j'en profite pour mes loisirs. Et puis voilà tout le monde n'est pas forcément disponible aussi pour la réunion. Donc c'est un peu compliqué. »

(AVS, 24 ans, ADHAP)

16 Eychenne, Alexia. « Aide à domicile: la face cachée d'un "eldorado" », L'Express, décembre 2013.

17 Ouazzani Maria, « Accompagner les aidants : Interview de Mme Maria OUAZZANI, Psychologue Clinicienne, responsable du Pôle d'Accompagnement Psychologique et Social de PSYA », Capgeris, 8 avril 2013.

21

« Mais sinon on a quand même des réunions une fois par mois mais on parle des vacances ou de personnes aux pathologies très dures. Moi j'ai assisté aux réunions de novembre et décembre. Mais je n'y vais pas à toutes, je profite dès que j'ai du temps libre pour moi et mon copain. »

(AVS, 23 ans, ADHM)

« Oui maintenant c'est régulier, on a des réunions tous les un mois et demi. [...] Oui tout à fait, on parle de nos difficultés, des nouvelles personnes. On a des personnes très difficiles, qui ont des troubles mentaux donc si on ne peut pas discuter ça devient vite ingérable. J'essaye d'assister à toutes les réunions dans la mesure du possible. Il y'a des fois où je préfère garder mon petit-fils.»

(AVS, 54 ans, CCAS de Lormont)

Par conséquent, face aux difficultés d'assister aux réunions, une auxiliaire de vie sociale a fait le choix de consulter de son côté un psychologue pour établir des horaires de rendez-vous qui lui conviennent. Les 3 autres AVS ont fait part d'une étonnante révélation : elles ont fait le choix de confier certaines de leurs difficultés aux personnes âgées.

« Elles sont géniales certaines personnes âgée, certaines elles veulent faire le psy. Ça fait du bien de discuter de nos problèmes aussi avec elles. »

(AVS, 23 ans, ADHM)

« Mais même je me confie auprès d'autres personnes âgées avec qui je m'entends super bien. »

(AVS, 26 ans, APF)

« Quand j'en ai râle le bol du boulot, je râle au travail ça me fait du bien. Du coup avec une petite mamie on râle ensemble tous les mercredis (rires) »

(AVS, 24 ans, ADHAP)

Dans cette perspective, la relation d'aidant/aidé se transforme en une relation d'aide mutuelle. La personne âgée bien que dépendante joue un rôle d'écoute et participe au soutien moral de son auxiliaire de vie sociale.

22

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Piètre disciple, qui ne surpasse pas son maitre !"   Léonard de Vinci