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La main à  la pàte. Des théories naïves aux concepts scientifiques : un apport de l’inhibition ?


par Justine LefàƒÂ¨vre
Université de Paris - Master Psychologie cognitive et sociale de l'enfant et de l'adolescent 2016
  

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3) Discussion

Le but de ce mémoire était de démontrer l'importance d'insérer un module d'apprentissage à l'inhibition dans les apprentissages en sciences de l'association « La main à la pâte ». La littérature s'accorde pour dire que les préconceptions des enfants sont robustes face aux apprentissages (Asoko, 2002), comme démontré d'ailleurs chez les sujets experts qui ont toujours besoin d'inhiber leurs heuristiques (Masson & Foissy, 2012 ; Borst & al., 2015). Le passage d'une conception naïve aux faits scientifiques serait selon Posner et al. (1982) ; Hewson et Hewson (1984), facilité par la mise en évidence d'un conflit cognitif, et selon Lubin et al. (2009) et Cremin et al. (2015), par la mise en action des enfants. Houdé

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(2014) pense que l'apprentissage peut se faire par assimilation d'information (l'apprentissage classique), mais également par inhibition des informations. Les tâches utilisées dans ce mémoire engendraient toutes un conflit cognitif. Nous supposions, suite aux précédents résultats de Potvin et al. (2015) que cette tâche nécessitait de faire appel à des capacités inhibitrices pour être réussit.

Nos résultats sont bien en accord avec Potvin et al. (2015) chez les enfants de CM1/CM2 et chez les enfants de CE1 pour ce qui est des performances, mais pas pour les TR. Ces résultats peuvent s'expliquer par le fait que les enfants de CE1 à l'inverse des enfants de CM1 n'ont jamais dû avoir de cours sur la flottaison avant cette expérience, en effet, les cours de sciences sur Flotte/coule sont principalement au programme de CE1 et de CM1, on peut donc supposer que les enfants de CM1 ont des connaissances algorithmiques supérieures à ceux des CE1. De plus, ces derniers semblaient lors des passations ne pas avoir une connaissance suffisante des matériaux utilisés. Pour réussir la tâche flotte coule, il faut en effet avoir une connaissance de ce qu'est le polystyrène, le bois et le plomb. Or certains enfants semblent considérer que le polystyrène coule plus que le plomb ou que le bois, et ce, quel que soit la taille. Les résultats sur l'amorce des enfants de CE1 montrent d'ailleurs une tendance à répondre moins rapidement dans la situation contrôle, où les deux balles sont de mêmes tailles par rapport à la situation test (la situation de conflit). Cependant, les performances indiquent bien un effet d'AN, ainsi qu'une différence significative entre l'amorce test, où il faut inhiber pour répondre correctement, et l'amorce contrôle où il n'est pas nécessaire d'inhiber. Ce qui laisse envisager, comme nous le supposions que les enfants de CE1 ont bien besoin d'inhiber pour qu'un changement conceptuel s'opère. Ces résultats ont des implications au niveau pratique et laissent envisager qu'il serait essentiel de mettre en place une pédagogie métacognitive centrée sur la mise en évidence du conflit cognitif et la nécessité d'inhiber une heuristique.

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Pour ce qui concerne la tâche d'électricité, nos résultats ont montré que les enfants commettent un nombre d'erreurs important. En effet, les enfants de CE1 tombent beaucoup dans l'heuristique qu'un seul fil électrique suffit pour allumer une lampe. Cependant, le programme scolaire de CE1 n'inclut pas de cours sur l'électricité. Un effet d'AN est bien présent chez les enfants de CE1 sur les TR lors du pré test, cependant ce résultat est à relativiser en raison du pourcentage très faible de bonnes réponses sur lequel cet effet a pu être démontré. En l'absence de cours de science sur ce domaine, ces enfants ne pouvaient que tomber dans l'heuristique. Cependant, ils commettent également de nombreuses erreurs sur l'amorce et la cible contrôle, ce qui peut s'expliquer par une surcharge cognitive éventuelle. En effet, dans les situations de contrôle, les enfants devaient déplacer leur attention sur le fait que le fil soit coupé ou non. Dans cette situation, le temps pour vérifier que le fil est coupé a pu augmenter leur TR et leurs erreurs, s'ils se sont essentiellement centrés sur le fait que la lampe soit allumée ou non. Il est également possible que les résultats que nous avons obtenus soient dus au hasard. Le taux de bonnes réponses étant très faibles, il est possible que le fait d'inclure 2 types d'images ait été trop compliqué pour des enfants de CE1 et qu'ils aient répondu au hasard. Les enfants de CM1/CM2 tombent également massivement dans l'heuristique qu'un seul fil suffit à allumer une lampe électrique, en revanche ils semblaient connaître la règle qu'il est nécessaire d'avoir deux fils électriques pour allumer une lampe. En effet lors de l'entraînement, de nombreux enfants (certains de CE1 également) nous ont spécifié après s'être trompés que c'était parce qu'il fallait 2 fils pour allumer une lampe. Cependant avec l'entraînement et tout au long de la tâche, nous avons renforcé l'heuristique qu'un seul fil suffit à allumer une lampe lors de la présentation de la cible où un seul câble permet d'allumer une lampe de chantier. L'heuristique était ensuite trop fortement activée pour que le concept scientifique, que les enfants connaissent pourtant, soit inhibé. Nos résultats pour les CM1 sont tout de même en accord avec ceux de

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l'équipe de Masson, pour les performances. Nos résultats sont cependant limités, en raison du faible échantillon dont nous disposions, dû à un souci technique lors de la passation du pré test. Malgré tous, les résultats du pré test laissent envisager l'importance d'inclure un apprentissage métacognitif à l'inhibition chez les enfants.

Concernant les résultats attendus pour le transfert de l'effet de l'apprentissage à l'inhibition auquel nous nous attendons ; suite à l'analyse des résultats du pré test, il est dorénavant possible d'imaginer que ce transfert soit difficile à obtenir. Essentiellement, car les enfants n'ont pas tous eu un cours sur l'électricité. Or Matlen et Klahr (2013), ainsi que Potvin et al. (2013) ont montré l'importance de l'instruction pour que le passage d'une préconception à un concept scientifique s'opère. De même, les résultats seront à relativiser en raison du peu de données qui ont pu être analysées chez les enfants de CM2. Enfants, qui sont les seuls à avoir réussi majoritairement la tâche en pré test. Or, aucun cours sur l'électricité n'a été prévu entre le prétest et le post test afin de s'assurer que les résultats obtenus soient bien liés au transfert et non à l'instruction des enfants. Il est aussi probable que notre apprentissage à l'inhibition soit trop spécifique à la tâche flotte/coule pour qu'un transfert ait lieu. Un apprentissage à l'inhibition moins spécifique avec divers entrainements métacognitifs sur un plus long terme avec des tâches impliquant l'inhibition pourrait permettre des effets de transfert. C'est ce que laisserait envisager l'étude de Linzarini et al. (2015) ou les capacités au Stroop ont permis ensuite une meilleure inhibition dans une tâche logico-mathématique. Cependant, les travaux de Chase et Ericsson (1982) ont montré que le transfert est rarement possible d'une activité entrainée par apprentissage à une autre. En effet, dans leur étude l'étudiant SF avait appris à « augmenter» pendant 2 ans son empan mnésique de 7 à environ 80 pour des chiffres. Cependant SF n'était pas capable de transférer cette compétence pour des lettres. Si le transfert n'est pas possible pour l'apprentissage à l'inhibition d'un concept scientifique à un autre, cela implique que les enseignants passent

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systématiquement, pour chaque apprentissage par une pédagogie métacognitive à l'inhibition en spécifiant chaque fois que nécessaire de faire attention à l'heuristique à inhiber.

Notre étude présente également certaines limites dont il faudra tenir compte dans l'interprétation des résultats. Pour la tâche Flotte/coule, de nombreux enfants ne connaissaient pas les différents types de matière des balles. En l'absence de cette connaissance, le polystyrène a pu parfois être considéré comme plus dense que le bois ou le plomb, malgré un apprentissage rapide lors de l'entraînement. Il en est de même lors de nos apprentissages logique et métacognitif entre la brique, le métal et le verre. De plus, les apprentissages à l'inhibition et logique ont été passés par 3 expérimentateurs (deux étudiantes et moi-même) qui n'étaient pas aveugles des hypothèses. En effet, nous nous sommes assuré que seulement les enseignants soient aveugles afin que leur apprentissage LAMAP ne soit pas différent d'un groupe à un autre. Il reste pourtant possible que nous influencions toutes les trois les résultats. Une expérience en aveugle permettrait de limiter d'éventuels effets. De même, inclure un groupe contrôle qui ne suit pas la pédagogie LAMAP permettrait de tester l'apport d'un apprentissage métacognitif et celle de l'apprentissage LAMAP.

En conclusion, ce mémoire a des implications pour le terrain, car il laisse envisager l'importance de développer des apprentissages métacognitifs de manière systématique en classe, car les enfants ont certes besoin de manipuler, mais nos résultats montrent qu'ils ont également besoin d'inhiber. Ces apprentissages métacognitifs seraient à la fois bénéfiques pour les enfants en difficultés scolaires qui éprouvent les difficultés avec l'apprentissage logique, mais également pour les élèves « tous venants », pour qui l'apprentissage logique est sans doute utile, mais non suffisant, au vu du nombre d'adulte qui tombent encore dans le piège (Potvin et al. 2015).

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"Le doute est le commencement de la sagesse"   Aristote