WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

La main à  la pàte. Des théories naïves aux concepts scientifiques : un apport de l’inhibition ?


par Justine LefàƒÂ¨vre
Université de Paris - Master Psychologie cognitive et sociale de l'enfant et de l'adolescent 2016
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

5) L'inhibition : un rôle important dans les apprentissages scolaires.

5.1 Définition.

L'inhibition est souvent définie comme un processus général qui permet aux enfants et aux adultes de résister aux habitudes ou automatismes, aux tentations, distractions ou ingérence, et qui permet de s'adapter aux situations conflictuelles (Houdé & Borst, 2015). Pour tester cette capacité, les recherches en psychologie disposent de plusieurs tâches possibles, telles que le Stroop ou des paradigmes d'amorçages.

10

5.2 Effet Stroop.

Une des techniques utilisées pour montrer les capacités d'inhibition cognitive est d'utiliser une tâche de Stroop. La tâche de Stroop connaît plusieurs variantes, cependant la plus utilisée repose sur le fait que les participants doivent déterminer la couleur de l'encre d'un mot, qui est écrit dans une couleur différente ou dans la même couleur. Cette tâche constitue donc un effort cognitif important pour le sujet, car la lecture du mot, fortement automatisé, entre en conflit avec la couleur. Cette tâche est souvent utilisée pour démontrer les capacités d'inhibition des adultes et des enfants. Par exemple, Linzarini, Houdé et Borst (2015) ont montré que des enfants de 9 ans étaient plus performants pour inhiber l'heuristique « longueur égale nombre» de la tâche de conservation du nombre piagétienne lorsqu'ils avaient d'abord dû effectuer la condition conflit de la tâche de Stroop (donner la couleur de l'encre du mot bleu écrit en rouge, par exemple) que quand ils avaient d'abord effectué la condition sans conflit (donner la couleur de l'encre du mot rouge écrit en rouge). Cette étude a permis de démontrer que les capacités inhibitrices peuvent se transférer à d'autres tâches qui nécessitent également le contrôle inhibiteur. Outre les tâches de Stroop, une façon simple de tester l'inhibition consiste à utiliser l'amorçage négatif (AN).

5.3 Amorçage négatif :

L'amorçage négatif est à dissocier de l'amorçage positif. Dans l'amorçage positif, la présentation d'une amorce va faciliter le traitement d'une cible (activation). Dans l'amorçage négatif, à l'inverse la présentation de l'amorce va perturber le traitement de la cible, car le traitement de la cible nécessite de réactiver une représentation qu'il a fallu inhiber lors de la présentation antérieure de l'amorce (Tipper, 1985). L'AN permet donc de mettre en évidence les effets d'inhibition. Dans le domaine scolaire, L'AN a été utilisé notamment dans la lecture, les mathématiques et la physique.

11

Borst, Ahr, Roell et Houdé (2015) ont montré la nécessité d'inhiber la généralisation en miroir lors de la lecture chez des sujets adultes. L'une des nombreuses erreurs commises par les enfants lors de l'apprentissage de la lecture et de l'écriture concerne la confusion entre les lettres et leur équivalent en miroir (« d et b »). Lors de l'amorce de la condition test, les sujets devaient inhiber la généralisation en miroir de deux lettres pour juger de leur non-similarité. Puis lors de la présentation de la cible, une image d'immeubles ou d'animaux était présentée. La généralisation en miroir devait donc être activée pour juger de la similarité. Leurs résultats démontrent que les sujets mettent plus de temps pour décider que deux animaux en miroirs sont similaires (la cible) quand deux lettres en miroir leur ont été présentées dans une phase antérieure (l'amorce) que quand les lettres présentées n'étaient pas en miroir. En revanche, comme attendu par les chercheurs, aucun effet d'amorçage négatif n'a été mis en évidence pour le jugement de similarité sur les bâtiments. Ces résultats sont expliqués par le fait que l'aire cérébrale utilisée pour la généralisation en miroir des animaux est recyclée ensuite pour la reconnaissance des lettres. Cette étude a également montré que les lecteurs experts avaient toujours besoin d'inhiber, pour éviter de commettre des erreurs de généralisation lors de la lecture.

En mathématiques, Lubin, Vidal, Lanoë, Houdé et Borst (2013) ont démontré l'implication de l'inhibition lors de la présentation de problèmes arithmétiques à des enfants, des adolescents et des adultes. Dans une première phase test (l'amorce), les sujets étaient exposés au problème suivant : « Marie a 25 billes, elle en a 5 de plus que John. John a 20 billes. » Les participants devaient résister à l'heuristique : « Il y a le mot «plus» dans l'énoncé alors j'additionne » pour activer l'algorithme de soustraction. Puis dans une deuxième phase (la cible), les participants devaient activer cette heuristique pour résoudre le problème (« Marc a 25 balles, il en a 5 de plus que Jane. Marc a 30 balles ». Dans cette étude, l'amplitude de l'amorçage négatif ne différait pas en fonction de l'âge. Ce qui est en

12

désaccord avec les études en AN de Borst, Poirel, Pineau, Cassotti et Houdé (2013) et de Lanoë, Vidal, Lubin, Houdé et Borst (2016) dans des tâches d'inclusion de classe et d'orthographe, ces études ont en effet montré une amplitude de l'effet d'AN différent selon les âges. Les adultes présentent une amplitude moins importante que les enfants. Le niveau d'expertise influerait donc, sur les capacités inhibitrices. Cependant, les enfants, adolescents et adultes auraient tous besoin d'inhiber l'heuristique pour résoudre ce type de problème.

En Physique, Potvin, Masson, Lafortune et Cyr (2015) ont mesuré les temps de réaction d'élèves de 14-15 ans dans une tâche où les sujets devaient déterminer parmi deux balles (de trois masses et volumes différents) celles ayant le plus de chance de couler une fois placée dans un récipient d'eau. L'étude était constituée de 5 conditions différentes; intuitive et très intuitive (le conflit entre la masse et le volume de la balle n'interfère pas pour résoudre la tâche), contre-intuitive et très contre-intuitive (le conflit entre la masse et le volume interfère pour résoudre la tâche) et neutre (aucun conflit n'est présent entre la masse et le volume des deux balles). Leurs résultats montrent un effet d'amorçage négatif, en effet lorsque la condition intuitive est précédée par la condition contre-intuitive les temps de réaction sont plus longs que quand ils sont précédés par la condition neutre. Les adolescents qui répondent en général correctement aux questions de flottaison d'un corps ont donc toujours besoin d'inhiber la conception selon laquelle « plus la masse de l'objet est importante plus l'objet coule ».

L'inhibition est donc impliquée dans les apprentissages. Selon Houdé (2014), l'apprentissage se fait soit par automatisation, assimilation, résonance ou à l'inverse par inhibition. On doit pouvoir inhiber nos croyances erronées pour activer un raisonnement logique lors d'une situation de conflit. Cette conception est conforme à celle de Bachelard (1938, cité par Dantier, 2004) pour qui les étudiants arrivent en classe avec les connaissances

13

qu'ils ont construites sur le monde et il va leur falloir penser contre ses connaissances pour apprendre des concepts scientifiques. L'inhibition serait au coeur de l'apprentissage.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Un démenti, si pauvre qu'il soit, rassure les sots et déroute les incrédules"   Talleyrand