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Journalisme et fabrique sociolinguistique


par Gradi WILINA NSIMITi
Université Catholique du Congo  - Master en Journalisme, Information et Communication  2023
  

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IV.1.1. Déroulement des entretiens

Nous avons mené des interviews auprès de 5 journalistes congolais qui exercent dans la presse en ligne. Essentiellement, nous avons pris d'une manière aléatoire, les journalistes qui traitent des sujets de politique pour nous rapprocher de l'un des domaines dont il est question dans ce travail. Les journalistes interrogés ne sont pas nécessairement domiciliés aux deux pure players, en raison de la conservation de l'objectif.

Les entretiens se sont déroulés à Kinshasa, durant la deuxième moitié du Mai. Sous une forme d'entretien semi-directif, nous avons échangé autour de la pratique du journalisme, martelant sur l'information de fait politique. Les entretiens ont duré dans l'ensemble à 7 heures 48 minutes.

IV.1.2. Présentation de la grille d'analyse

Pour analyser les données récoltées au cours de nos entretiens, nous procédons de la manière suivante ;

- La Retranscription de données 

La retranscription de données est l'étape de la présentation des résultats de la recherche sur terrain. Ces résultats peuvent être bruts ou traités. C'est une opération qui sert transcrire la totalité de l'enregistrement de l'entretien, ou les capsules jugées significatives au vu des objectifs de la recherche107(*). Nous employons le terme de retranscription, car dans notre travail nous opérons une retranscription fidèle des données recueillies. Sous forme de tableau. Cependant, les extraits des répondants sont traités et mis en bloc. C'est-à-dire que nous avons rassemblé les réponses de chaque sujet interviewé pour en faire une réponse. Ceci fait, pour éviter l'effet du `déjà-dit'. Ces réponses collectives sont donc le matériau sur lequel se fonde notre analyse thématique qualitative.

- L'analyse thématique qualitative

Il s'agit d'une technique qui permet de présenter une forme de catégorisation en thèmes en vue de placer et confronter les éléments de réponses dans ceux-ci.

L'analyse thématique qualitative est une technique de l'analyse de contenu que nous utilisons dans notre grille d'analyse. Elle s'applique à un contenu de type verbal, dans notre cas textualisé108(*). Les thèmes d'analyse sont construits dès le moment de l'élaboration du guide d'entretien. Pour notre cas, nous avons choisi une démarche itérative. Les différents sont issus de réponses obtenues auprès des interviewés pour ainsi les élargir.

Il s'agit de faire la synthèse, de mettre ensemble, les éléments de réponse, et de mettre dans un thème qui facilitera l'interprétation en mettant en lumière les divers propos de journalistes.

- L'opération référentielle 

Il s'agit en de termes simples à l'interprétation de résultats de l'entretien et de leur confrontation à l'hypothèse de recherche et à l'approche théorique auxquelles ils se rapportent. Il sied également de noter que ce point prend en charge son interprétation de façon isolée. Une interprétation générale et les confronter aux hypothèses balisera les deux résultats de la recherche.

Mise en discours de l'information politique

Interviewé(e)s

Thèmes

Questions

Variables

Tous

Construction de l'information politique

Pouvez-vous nous parler de la construction de l'information politique?

La construction de l'information politique respecte la norme de la pratique journalistique et se démarque à certains niveaux. Car le fait politique implique une démarche différente pour atteindre l'objectif que poursuivent les journalistes.

Les faits politiques sont diversifiés, et les construire est également scindé selon le genre journalistique, objet de catégorisation de la production journalistique. S'agissant de genres journalistiques ;

- Le compte rendu ; l'information politique est construite dans un ordre de faits pertinents. L'immédiateté et l'amplitude du fait. Et ceci constitue l'angle d'attaque.

- Le reportage : ici la construction de l'information politique est fidèle aux normes du reportage, c'est-à-dire recourir aux témoignages de ceux qui s'inscrivent dans ce fait politique. C'est ainsi qu'ici la construction de l'information politique se réalise à travers l'assemblage et le traitement de discours rapportés (les témoignages, les commentaires, etc.

- Le genre d'opinion ; si le fait politique doit être analysé, commenté et ou s'il faut discuter sur les implications de celui-ci, l'information politique est construite par un travail de réactualisation, contextualisation et focalisation. C'est-à-dire que le journaliste récupère, dans la plupart de cas, un élément qui crée le fil d'actualité, le contextualise et le confronte dans une logique qui se veut dans cette situation.

Cependant, de façon générale, l'information politique se construit suivant le principe de l'écriture de l'information fondé sur les cinq questions de référence Qui ? Quoi ? où ? Quand ? Pourquoi ? et le comment ? (mettant l'accent sur le qui, le quoi, le pourquoi et le comment).

Étapes de la construction de l'information politique

Quelles en sont les étapes ?

pour construire l'information politique, il n'existe pas un protocole d'étapes, sinon quelques étapes apparaissent comme un crédo, car dans le traitement d'une information politique, le journaliste s'investigue à relever les équivoques, à décoder une idéologie, à contredire une fausseté, à apporter de la lumière sur la gestion de la chose publique.

Dans cet ordre, il y a premièrement la quête de l'information ou la collecte de l'information (soit par descente sur le terrain, soit par un fait provoqué). Deuxièmement, il y a la phase de traitement. Cependant, les données traitées sont sélectionnées selon leur pertinence. Il y a ensuite la mise en forme de l'information. Certainement l'étape la plus minutieuse. Pour que le produit informationnel possède la valeur recherchée, le journaliste use de techniques d'écriture propre à la rédaction d'une information politique, qui sont le titre interpellatif, accusatif ou démonstratif, le corps de l'article qui explique le problème ou l'événement, place les intrigues. Et une chute qui questionne.

Et enfin, la publication de l'article.

Critères de sélection

Quels en sont les critères de sélection ?

La sélection des faits s'effectue sur base des attentes du lecteur. Sachant qu'à l'ère du numérique, l'infobésité ne facilite pas la consommation d'une information, d'où la sélection est minutieuse. Les critères qui apparaissent sont de diverses natures ;

- L'amplitude du fait : ici, on prélève le fait avec le plus d'intensité, et qui reflète les réalités de la société. Aussi faudrait qu'ils soient circonstanciels, garder un caractère de permanence, sinon compétent de faire durer l'actualité et engendre d'autres angles d'écriture.

- Pertinence du fait : le choix sur ce qui est pertinent. La pertinence ici se traduit non seulement par la virtualité du fait d' intéresser le public, mais aussi par la sélection de mots qui influencent la société dans un terme précis, capable de donner force à un programme ou à une rubrique.

- L'intérêt du public : ce critère est le plus essentiel, car le devoir du journalisme est d'être au service du public et de servir la démocratie.

Cependant, à côté de ces trois critères quelques éléments qui influencent la sélection sont illustrés. Il s'agit notamment de :

- Du respect de la ligne éditoriale qui est parfois ambiguë, car elle n'est toujours pas liée à l'identité du média, mais à l'identité de celui qui fait vivre l'entité médiatique. Ceci donne lieu au deuxième élément.

- L'élément financier : le choix du fait à mettre en information dépend également de sa capacité à générer des revenus additionnels, non seulement basé sur la pertinence, mais sur la cohérence aux attentes de l'idéologie en souche.

- L'actualité qui s'applique à toute forme de journalisme.

observation

Cette grille de réponse nous permet de comprendre la fabrication d'une information politique sur un plan spécifique. Ceci dit, une information politique entretient sa propre ligne de conduite. Il garde tout de même de principes généraux à l'écriture journalistique, néanmoins l'importance du domaine dans lequel il émerge impose une autre façon de faire.

Avec une autre perception, nous comprenons que l'information politique est à un niveau considérable, une marchandise dont sa fabrication est purement pensée. Dans le cas du second critère de sélection, plusieurs autres pratiques découlent de ces derniers.

Cette grille nous permet d'ouvrir les prochaines observations. Elle était une porte d'entrée, en de termes humbles, ils questionnent le comment avant de passer à l'implication du journaliste lui-même.

Tableau 2 : au sujet de l'usage des éléments de langage de politique et de l'implication du journaliste

Usage des EDL et implication du journaliste

Interviewé(e)s

Thèmes

Questions

Variables

Tous

Réactions escomptées

Quelle réaction espérez-vous obtenir à la suite de la publication d'un article qui comporte un de ces termes ?

La première réaction qu'espère un journaliste à la suite de la publication de son article est la consommation de cette information. Néanmoins, il est utile d'ajouter que chaque journaliste entretient sa propre ambition.

L'utilisation de l'un de ces mots intervient lorsque le journaliste veut respecter l'heure du temps et inscrire sa présence dans l'évolution de la société. Dans ce cas, une réaction que l'on peut espérer est le souvenir.

À côté de ceux-ci, le journaliste espère créer le débat au sein de la société. Le débat favorise le retour de l'information et sa permanence e.

Il sied de noter qu'il n'existe pas une ambition mythique, fétiche. Ceci veut dire que le journaliste n'use de ces termes pour se créer une identité à des fins de popularités ou de vedettisme.

Intention du journaliste

Avez-vous l'ambition de marquer l'esprit du lecteur ?

L'ambition de marquer l'esprit du lecteur est quelquefois péjorative, car il peut se traduire par « faire la star » que la déontologie déconseille.

D'une part, il est presque impossible de supprimer cette ambition de marquer l'esprit parce que si l'on observe l'évolution de la société congolaise, plusieurs faits ou réalités marquent quotidiennement l'esprit de la population. L'impossibilité s'installe au niveau où le journaliste exerce un métier qui exige de faire connaître ses faits et ou de discuter autour de ceux-là.

Aussi, dans le cas de moments importants et décisifs, un contexte historique s'installe spontanément, et influence même l'imaginaire linguistique collective. Par exemple lors de la période électorale, le rassemblement, les marchés, etc.

Surtout cela, l'ambition de la pratique du métier, et dans le cadre de l'usage de ces termes est de rendre fidèlement les faits

Mode de récupération

Comment effectuez-vous la récupération de ces termes ?

Il est délicat de récupérer des termes produits en politique. Le premier problème qui se pose est celui de se retrouver collé à une idéologie politique et biaiser la neutralité journalistique. Il faut donc de formules de distance qui sont investies dans l'écriture journalistique. Ces formules sont donc ;

- Le guillemet : le journaliste met entre guillemet le mot qu'il a récupéré pour ne pas prendre position et aussi attirer l'attention du lecteur.

- la formule de responsabilité : le journaliste utilise une formule phraséologique pour faire montre au public qu'il n'est pas auteur d'un terme ou d'un terme. exemple : Félix Tshisekedi annonce le déboulonnage du système actuel, selon ses propres mots.

- L'emploi formel : l'emploi formel intervient lorsque le journaliste a la certitude que le mot ou terme et son contexte qu'il utilise sont ancrés dans la mémoire du lecteur. Cela devient alors un code formel qui cadre avec la réalité de la société. Il utilise alors pour recourir à l'effet que ce mot a déjà produit dans la société.

Utilisation et/ou réutilisation

Avez-vous connaissance de la réutilisation de ces termes dans la société congolaise ?

En règle générale, lorsqu'un terme est récupéré pour de buts soulevés ci-hauts, il est une évidence que l'impact de celui-ci sera apparent. D'où il y a une connaissance préalable de l'usage de ces termes au niveau de la société, car le journaliste lui-même étant citoyen, est en relation avec la communauté avec laquelle elle partage le même code.

Il y a tout de même une surprise. Celle de constater la reconfiguration du terme reçu après lecture d'un article de presse. C'est-à-dire que l'on constate un usage qui ne cadre pas toujours avec le contexte de création. Le sens est présent mais le contexte change. Exemple: Glissement.

Création littéraire, signification et contexte d'utilisation

Y a-t-il de termes que vous avez créés ?

Quels sont leurs significations et leur contexte d'utilisation ?

Oui et non.

Il existe dans la pratique du métier de journaliste, une compétence d'innovation en termes de mots. Cette création traduit un manque de terme efficace pour qualifier une réalité de la société congolaise, qui elle-même possède un talent d'innovation observée dans la société.

Au niveau de l'exercice il y a deux situations, soit l'innovation traite du métier lui-même (le cas de jargon journalistique congolais). Soit l'innovation vient d'un procédé d'adaptation dans ce même objectif de créer l'actualité.

- Oui : le cas du mot « Coupage », qui est né d'abord dans un contexte de conditionnement d'un traitement de l'information. Mais dont le contexte d'usage transgresse l'éthique et s'emploie pour désigner le dû obtenu à la suite d'un travail journalistique (appelé populairement le transport).

- Non : certains mots ne sont pas directement l'oeuvre du génie journalistique. Le contexte qui fait naître de l'innovation existe déjà, mais les journalistes trichent pour désigner un élément du monde. C'est l'exemple type du mot « Pangistans » venu du Kikongo Pangi signifiant frère. Le terme pangistan est utilisé pour désigner un partisan ou un militant politique du camp d'un candidat avec des origines kongo ou l'équivalent. Employé fréquemment pour désigner le candidat à la présidentielle 2018 Martin FAYULU MADIDI. Dans cet ordre, nous avons également de termes comme, « Kamerhisme «  qui désigne toute une idéologie politique spécifique inspirée des actions de l'acteur politique Vital Kamerhe.

Usage et exemple d'un nouveau lexique

Y a-t-il des expressions ou termes politiques à la manière de ceux-ci, que vous utilisez dans la pratique de votre métier ? Pensez-vous que l'intervention du travail journalistique est sine qua non pour leur dynamisme ?

Oui.

- Putschiste

- Penalty

- Coup sur coup

Tous ces mots sont l'oeuvre d'une partie de la société qui à l'heure actuelle, avec les nouvelles technologies de l'information et de la communication, peuvent directement toucher les publics et créer le même effet. Néanmoins, en qualité de leader d'opinion par exemple, le discours journaliste apporte plus de crédit.

Affirmation d'une variété du français

Observant la pratique de votre métier, pensez-vous qu'il soit temps de parler d'une variété du français congolais ?

Oui et non.

Les avis sont partagés. La variété du français congolais n'apparaît pas comme une évidence. Car notre code est tâté d'une déformation de la langue française. Le problème se posera à la conservation de qualité de cette langue et la perte de la valeur qu'elle a et accorde dans certains domaines comme le domaine éducatif.

Oui parce que l'évolution de la société congolaise fait montre de cette compétence de créativité. Il faudrait alors exposer les avantages et désavantages pour donner le rythme.

observation

Nous avons posé ces questions dans le but d'obtenir les avis de journalistes sur leurs travaux mais aussi le rôle qu'ils jouent dans la formation des identités culturelles en République Démocratique du Congo, en se focalisant sur l'usage du français dans la presse. Cela permet à notre interprétation d'être complète et de nous faire déboucher aux diverses perspectives.

* 107 J-J., QUINTIN, Cours d'Analyse de données qualitatives : outils de production de données qualitatives et méthode d'analyse, Lyon, Université Lyon 2. p44, (En ligne), URL : https://www.//apprendre.auf.org./wp-content/opera/13-BF-Refrences-et-biblio-RPT-2014/ consulté le 17 Juin 2O23 à 18 :19

* 108 J.-J., QUINTIN, Op.cit. pp 46.

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