IV.4.3. Le rôle
du journaliste et légitimité du français congolais
Au regard de ce qui a été dit, la
question du rôle du journaliste comme énonciateur s'illustre. En
effet, nous avons relevé au cours de nos entretiens, que les occurrences
qui constituent notre corpus sont toutes de créations extérieures
au discours journalistique. Elles résultent d'un travail de
récupération. Mais la part du journaliste est conséquente.
En vérité, le journaliste lui-même
ne se positionne pas en créateur, juste en transmetteur. Cette
conception est, à notre sens, erronée si l'on regarde le contenu
de points précédents. La compétence de son
écriture, cet instrument artistique lui permet indirectement
d'être compté parmi un acteur de cette dynamique du
français dit `congolais' en ce sens où, à travers les
tournures que l'on retrouve dans son discours, il construit de la finalisation
de cette variété. Finalisation qui se traduit jusqu'au moment
où les publics usent de ces innovations comme code normal et
idéal pour l'intercompréhension.
Il sied alors de le considérer comme un
co-créateur des innovations sociolinguistiques et un acteur de
légitimité. Cette co-création vient, timidement, couvrir
une place de créateur, s'il faut nous référer aux
résultats de l'analyse textuelle, nous verrons qu'il crée
à son niveau de nouvelles règles syntagmatiques. En guise
d'exemple, le mot maper, ne correspond pas exactement aux innovations
sociolinguistiques que l'on peut identifier dans glissement ou
béton qui sont des innovations au niveau sémantique. Il
est plutôt question d'un raccourci du langage, et une innovation au
niveau de la forme pour dire Placer sous mandat d'arrêt provisoire. Ce
qui est effectivement l'oeuvre du génie journalistique pour gagner
l'espace dans l'écriture ou dans son acte de parole.
Il y a également ce supposé rôle
de créateur en puisant dans le jargon journalistique. Il est difficile
de statuer sur une création, mais il est clair que nous sommes face
à un enrichissement de la langue.
Aussi, éclairer le rôle du journaliste
nous met face à une découverte. Il est co-créateur dans sa
pratique. car la démarche de son travail consiste à raconter ce
qu'il dit. Les innovations qu'il présente donc sont puisées dans
son réservoir d'expérience socioculturelle et historique et des
interactions autour de lui qui intéressent son métier. Et donc
au niveau de la pratique journalistique, la considération d'une
légitimité du français congolais est partagée et
non pas exclusive. La variété du français qui, au niveau
de leur conception, est encore ambiguë.
Pour notre part c'est en acceptant cette conception
d'ambiguïté que nous avons fait des nouvelles découvertes.
Celles-ci sont en lien avec les résultats de la première analyse
et celles que les entretiens nous ont permis d'obtenir.
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