b) L'esprit est une propriété d'une
substance
Le débat ne porte plus en effet sur la distinction
entre une substance physique et une substance mentale, et sur leur mode de
relation ; tout le monde ou presque semble s'accorder sur la thèse
selon laquelle il n'y a qu'une sorte de substance, la substance physique. Si
dualisme il y a, c'est un dualisme des propriétés. En bref,
à la question « peut-on réduire la substance mentale
à la substance physique ? », on vous répondra
oui ; et aux questions « peut-on réduire les
propriétés mentales à des propriétés
cérébrales ? », et « peut-on
réduire les propriétés mentales à des
propriétés physiques ? », certains
répondront oui et d'autres non.
Si l'on peut affirmer que la substance mentale n'est qu'une
substance physique, il est moins évident que l'on puisse dire que toute
la substance mentale n'est que la substance cérébrale, comme nous
le verrons.
c) Propriétés mentales,
propriétés sémantiques et substance
D'autres encore soutiennent que l'esprit et les
propriétés sémantiques peuvent s'attribuer à des
substances physiques autres que les cerveaux ou les personnes, à des
livres ou à des textes par exemple. Montesquieu n'a-t-il pas
parlé d'un « esprit des lois » ? On peut
néanmoins contester que les propriétés que nous attribuons
à ce type d'objets soient des propriétés mentales, bien
qu'on puisse peut-être dire qu'elles appartiennent au domaine de
l'esprit ; on parlera plutôt les concernant de
propriétés sémantiques. Mais les propriétés
sémantiques comme les propriétés mentales sont de toute
manière des propriétés d'une substance physique ; et
il s'agira de telles propriétés lorsque nous parlerons
d' « états mentaux ».
Nous n'attribuons pas les propriétés mentales
à des ordinateurs ou à des organismes dépourvus d'appareil
cérébral. Si la substance à laquelle nous les attribuons
n'est pas le cerveau, mais la personne, la présence d'un cerveau dans la
substance considérée semble néanmoins être une
condition nécessaire à l'attribution desdites
propriétés. Il nous paraît difficile d'attribuer des
propriétés mentales à une substance si elle n'est pas
dotée d'un appareil cérébral. Il y a néanmoins des
exceptions.
La première est l'animisme : il est courant dans
certaines sociétés d'attribuer une âme à certains
objets (à des arbres par exemple). La seconde est la stratégie
qui consiste à attribuer des propriétés intentionnelles
ou sémantiques à des objets, dans un premier temps et pour les
besoins de l'explication, quitte à réviser cette attribution par
la suite.
Il est en tout cas courant en philosophie de l'esprit de
soutenir que le cerveau a des propriétés mentales ; nous
verrons en quoi cette position est fondée, ainsi que les réserves
que nous pourrions émettre à ce sujet.
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