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L'assurance construction

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par Yatma NIANG
Université Cheikh Anta Diop de Dakar - Ma??trise en droit des affaires 2006
  

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1ère Partie les conditions d'assurabilité de la construction

En l'absence d'obligation légale posée par le Code Cima, droit commun des assurances, l'intérêt d'assurance pour les dommages liés aux ouvrages de bâtiment et de travaux publics obéit à des conditions objectives tenant à une construction exécutée dans les règles de l'art (Chapitre I). Il s'agira, dans le cadre de cette étude, d'apprécier cet intérêt d'assurance par des illustrations à la lumière du marché de l'immobilier. Quant aux conditions subjectives, elles tiennent aux règles relatives à la responsabilité des constructeurs dont l'assujettissement est prépondérant (Chapitre II).

CHAPITRE I. UNE CONSTRUCTION EXÉCUTÉE DANS LES RÈGLES DE L'ART

Construire suppose des moyens financiers pour supporter notamment le coût des matériaux et la main-d'oeuvre. Encore faudra-t-il respecter les règles d'urbanisme (Section 1) et construire l'ouvrage conformément à la police des constructions (Section 2).

Section 1. Le respect des règles d'urbanisme

La construction modifie l'espace de manière durable. Compte tenu de la pluralité des motivations des constructeurs, une exigence légale d'une propriété régulière sur le fond à construire sera-t-elle suffisante (Parag.I), ou faut-il se référer au degré de sinistralité du site à construire (Parag.II) ?

Parag. I La régularité de la propriété est-elle suffisante ?

La notion de régularité suffisante du droit de propriété pourrait amener à voir le mode de tenure foncière qui répond le mieux à l'intérêt d'assurance (A). L'acte administratif ou le titre matérialisant la tenure participe à l'octroi de l'autorisation de construire (B).

A. Le mode de tenure foncière favorable à l'assurance

Une pluralité des règles régissent la propriété immobilière et les droits portant sur celle-ci.

Mise à part les zones dites pionnières, le cours d'eau et les rivages qui relèvent d'une législation spécifique, la loi distingue deux modes de concessions des sols. Il s'agit de la propriété privée qui relève du régime de l'immatriculation foncière et des terres de l'Etat relevant du régime du domaine national et du domaine privé de l'Etat.

Les terres du domaine national peuvent accueillir des constructions lorsqu'elles sont immatriculées au nom de l'Etat et concédées par bail à un particulier. Cette immatriculation relève actuellement de la compétence déléguée des autorités territoriales notamment le maire dans la commune et le président de la communauté rurale pour les terres du domaine national de son ressort.

Les terres relevant du domaine privé de l'Etat peuvent être affectées à un service de l'Etat6(*) notamment les ministères ou autres démembrements de l'Etat, ou déclassées par l'autorité administrative. La loi autorise leur mise en vente à des personnes privées « dans le respect des plans d'urbanismes et de lotissement approuvés »7(*).

Mais quelque soit le propriétaire originaire, la propriété doit être matérialisée par un titre, notamment le titre foncier. Le titre foncier, comme le carte grise d'un véhicule, est l'acte de naissance de la parcelle à construire. Il confère à son titulaire « un droit réel et inattaquable dont l'étendue est déterminée juridiquement et matériellement par les énonciations du titre foncier8(*) ». Relève aussi du régime de l'immatriculation, les morcellements effectués sur un terrain inscrit au livre foncier.

Diverses autres modes de concessions des terres existent dont les plus remarquables sont :

- des titres de propriété résultant des délibérations du conseil des collectivités locales suite à un lotissement opéré sur une portion du domaine national ;

- des permis d'occupé délivrés par une autorité administrative.

Dans le cas de la copropriété, l'avis favorable du syndic9(*) est requis pour toute modification affectant les parties communes de la propriété indivise, alors qu'il revient à l'assemblée des copropriétaires de décider des élévations. La copropriété désigne une modalité d'appropriation collective des immeubles bâtis et divisés en appartements. Ainsi, y distingue-t-on les parties privatives susceptibles d'appropriation exclusive, et les parties communes appartenant indivisément à tous. La gestion de la copropriété est confiée à un syndic élu par l'assemblée des copropriétaires.

Par ailleurs lorsque la décision de construire émane du preneur d'un bail emphytéotique, celui-ci doit produire le contrat de bail, et sa durée, inscrit au livre foncier, qui lui confère l'usus et le fructus11(*). Cette même obligation pèse sur le titulaire de droit de superficie.

La tenure foncière favorable serait celle qui participe à l'octroi d'une autorisation de construire.

B. L'autorisation de construire et le permis de conformité

L'autorisation de construire a son siège à l'article 69 du Code de l'Urbanisme12(*) qui dispose que « nul ne peut entreprendre, sans autorisation administrative, une construction de quelque nature que ce soit, ou apporter des modifications à des constructions existantes sur le territoire des communes, ainsi que dans des agglomérations de plus de 5000 habitants et les autres agglomérations désignées par décret ou celles dont l'accroissement démographique, l'extension et les fonctions sont importantes. Cette obligation s'impose aux services publics et concessionnaires de service publics de l'Etat, aux départements et aux communes comme aux personnes privées. » C'est en ces mêmes termes et avec les mêmes mots que le projet de loi portant Code de la construction, loi non encore votée envisage cette obligation.

Sur le terrain à construire, l'autorisation qui est en principe valable pour deux ans, doit être affichée, et ceci pendant toute la durée du chantier, le chantier étant la période de conception matérielle de l'ouvrage. Le chantier est en même temps le lieu d'exécution du contrat d'entreprise ou cette exécution même.

L'autorisation administrative d'édifier un ouvrage public ou privé ne sanctionne que la régularité des actes préalables à toute opération de conception de bâtiment ou de travaux publics, c'est-à-dire les règles d'urbanisme13(*). Ainsi, les données d'urbanismes, notamment le Certificat d'urbanisme et les relevés topographiques de terrain et les éléments de la connaissance du sous-sol, doivent être fournies par le maître de l'ouvrage et communiquer à l'architecte. De même, doivent lui être communiqués, les renseignements relatifs aux limites séparatives, mitoyennetés et servitudes, aux baux et règlements de copropriété.

Le rôle de l'autorisation de construire n'est pas de protéger la propriété privée mais d'autoriser une modification de l'espace. Il appartient au seul maître de l'ouvrage de justifier à l'égard des tiers de son droit de propriété ; d'où l'admission de multiples titres justifiant l'emprise sur le fond à construire.

C'est aussi un engagement implicite d'exécuter un marché public ou un marché privé, suivant un procédé préfix le projet de construction. Ce projet étant soit un cahier de charges comme dans les marchés publics de travaux, soit un devis estimatif des travaux notamment dans les contrats d'entreprise. Cet engagement est sanctionné favorablement par la délivrance, après déclaration d'achèvement par le titulaire du permis de construire, d'un quitus, le certificat de conformité. En outre, des pondérations sur le plan fiscal, notamment l'exonération sur une durée de 10 à 15 ans de la contribution foncière sur les propriétés bâties pour les immeubles à usage d'usine ou d'habitation à compter de la réception de l'ouvrage sont accordées au propriétaire de la nouvelle construction.

Par ailleurs, lorsque la construction projetée est destinée à recevoir du public, une autorisation spécifique d'ouverture au public est requise, suite à la constatation de la conformité des installations et aménagements aux prescriptions relatives à la sécurité et à l'environnement14(*).

Les statistiques sur l'habitat urbain15(*) font rarement référence au nombre de délivrance de certificat de conformité, ce qui en fait un titre rare. Ce qui rend douteux dans une certaine mesure les conditions d'exécution des ouvrages.

Parag. II Le degré de sinistralité à prendre en compte

La régularité s'oppose à l'inexistence juridique dans le mode de tenure foncière. A côté de ces modes d'appropriation organisés par la loi, des particuliers peuvent s'emparer de terrain et y édifier des constructions pour se rapprocher d'avantage de leur lieu de travail et échapper à la location. Si la nature ne sanctionne pas des inondations, l'occupation de l'espace approuvée par les concessionnaires de service public, adduction d'eau, électrification et téléphonie sont gage de détention durable ; la politique dite du bulldozer relevant d'une autre époque. Des telles constructions ne peuvent faire l'objet d'autorisation administrative préalable à leur édification ; et en fait, elles existent, mais n'existent pas juridiquement.

L'instabilité de la propriété liée à l'occupation précaire s'oppose à la régularité juridique des sites instables.

A. L'instabilité de la propriété liée à l'occupation précaire

L'urbanisation sauvage ne date pas d'aujourd'hui16(*). L'instabilité de la propriété liée à l'occupation précaire est appréhendée par les pouvoirs publics à travers la politique dite de structuration de l'habitat spontané, nonobstant les textes qui prévoient des sanctions.

La restructuration de l'habitat spontané, lorsque l'occupation est durable ou électoralement favorable, consiste à doter un quartier en accessoires d'urbanisme qui n'ont pas été pris en compte par les populations au moment de leur établissement. Ces accessoires étant notamment l'eau, l'électricité, les réseaux d'égouts et de drainage des eaux pluviales et la construction de routes, d'écoles et de dispensaires, ainsi que la prise en charge de l'insalubrité.

Cette restructuration que la doctrine considère comme une légalisation des coutumes populaires urbaines17(*) s'accompagne de l'octroi de droit de superficie sur les parcelles occupées. Le droit de superficie est concédé suivant une procédure participative moyennant le paiement au service du cadastre de sommes déterminées en accord généralement avec les représentants des populations concernées18(*).

L'article 85 du Code de l'Urbanisme prévoit des sanctions aux personnes et des sanctions qui peuvent aller jusqu'à la suppression de ce qui a été construit irrégulièrement.

Ce texte dispose que « Toute personne qui réalise ou entreprend, fait réaliser ou fait entreprendre, modifie ou fait modifier des constructions ou installations sans autorisation administrative ou en violation des dispositions législatives ou réglementaires en vigueur, est punie d'une amende de 100.000 à 2.000.000 de francs.

Les architectes, entrepreneurs ou toute autre personne ayant concouru à l'exécution desdites constructions ou installations, sont punis des mêmes peines.

Lorsque les constructions ou installations ont été entreprises ou réalisées dans une zone non lotie, les peines sont une amende de 100.000 à 2.000.000 de francs et un emprisonnement de six mois à deux ans ou de l'une de ces deux peines seulement.

Le tribunal peut, sur la requête de l'administration, ou d'office, ordonner la démolition des constructions édifiées en contravention aux dispositions applicables et la remise en état des lieux, aux frais du condamné ».

L'occupation du domaine privé de l'Etat a naguère été sanctionnée par la politique dite du bulldozer qui consiste à démolir toute construction irrégulière, en infraction aux règles d'urbanisme. On se demande actuellement, nonobstant l'irrégularité, quelle a été la motivation d'une telle démarche des pouvoirs publics vu que l'ensemble des quartiers objets de ces mesures étant tous habités19(*). Les zones concernées restent exposées à des risques réels et permanents20(*).

Ces zones réputées techniquement inhabitables, mais en partie juridiquement régulières et toutes habitées doivent inciter à l'étude de l'adéquation entre mesures politiques et faisabilité technique. Le code du domaine de l'Etat dispose que « ne sont pas susceptibles d'appropriation privée21(*) », en raison de leur nature et de la destination qui leur est donnée, les terrains du domaine public de l'Etat. Le domaine public est composé notamment des ouvrages militaires de défense terrestre, maritime ou aérienne avec leurs dépenses et leurs zones de protection, ainsi que les servitudes établies pour la défense et la sécurité, par les plans d'urbanisme, dans l'intérêt et pour la sécurité de la navigation aérienne, maritime ou terrestre22(*).

D'ailleurs, observation d'un périmètre dit de sécurité ne fait plus partie du cadre de vie. Des camps militaires se sont vus rognés et transformés en cantines au nom d'une politique patenticide des communes d'arrondissements. De même, des terrains que le plan d'urbanisme destine à autre chose sont vendus et habités ; et « il est en effet pas rare de trouver dans nos quartiers résidentiels des espaces transformés en mosquée plusieurs années après que ces cités aient été habités »23(*).

Comment combattre l'irrégularité de l'occupation si la régularité est elle-même biaisée ?

B. La régularité juridique des sites instables

La régularité juridique des sites instables renvoie à l'occupation juridiquement régulière, mais comportant des risques d'origine industrielles, aux risques environnementaux, mais aussi à des titres conférant des droits précaires sur le sol.

La loi24(*) fait référence aux besoins et aspirations de la société sénégalaise conformément à son génie et à sa culture. La création architecturale conciliant et s'inspirant des valeurs de civilisation notamment celle soudano-sahélienne, avec les exigences de la modernité. Ces exigences de modernité ne doivent pas favoriser la flânerie dans l'habitat.

L'absence de distinction entre zone d'habitation et zone industrielle telle que préconisée par la Charte d'Athènes25(*), fait que certaines zones soient plus exposées à des risques d'origine industrielle que d'autres. Au nom de la pression foncière, les abords des raffineries, les zones réputées franches industrielles, ainsi que la proximité des rails exposée aux vibrations sismiques fréquentes, sont habités.

Quant aux risques environnementaux, ils sont soit liés au sol, soit à l'atmosphère. Le foisonnement du sol défini comme la capacité du sol à se gonfler lorsque sa teneur en eau augmente, et à se craqueler lorsqu'il est sec. Donc l'anatomie de la terre change de saison en saison et influence considérablement le bâti qui s'y implante. Ce sont généralement les sols argileux qui présentent ce type de défaut. Les cuvettes et vallées remblais, séyane en wolof, étant le lit de l'eau, présentent aussi des risques notoires lorsque le terrassement n'est pas la préoccupation des populations qui s'installent d'elles-mêmes. Quid des inondations qu'a connues Dakar en août septembre 2005 et qui sont fréquents à Saint-Louis.

L'érosion marine, par la rouille qu'elle accentue, est aussi une agression aux éléments notamment le fer qui entre dans la construction.

Par ailleurs, s'il est admis que le juge sanctionne la construction sur le terrain d'autrui26(*) encore faudrait-il avoir intérêt à agir, être titulaire de droit réel sur le fond litigieux, et que cet autrui ne soit pas l'Etat.

Le droit réel est matérialisé par acte administratif, notamment le titre foncier. Deux arrêts de la Cour de cassation vont permettre de rendre compte de cette notion de régularité juridique instable.

Dans le premier arrêt, une vente par acte sous-seing privé, sans date certaine, portant sur une portion d'un titre foncier régulier, n'avait pas été effectuée devant un notaire. Et l'acheteur construisit sur ce terrain. Par la suite, ce même terrain a fait l'objet d'un morcellement mais cette fois par acte de vente régulièrement inscrit au livre foncier. Ainsi, le premier acheteur pouvait-il se prévaloir de l'antériorité de titre de propriété sur celui dont la vente est faite devant l'officier public ? La Cour de cassation répond par la négative le terrain sur lequel la construction est établie faisant l'objet d'un titre foncier avant d'être morcelé, ne pouvait être acquis qui suivant les conditions subordonnant la validité de la vente à l'inscription au livre foncier27(*).

Par ailleurs, dans un autre arrêt28(*), la Cour d'appel avait ordonné l'expulsion d'un occupant titulaire d'une autorisation d'occupée sur une parcelle où il avait édifié des constructions depuis 1971. L'autorisation d'occuper était délivrée verbalement par le gouverneur pour le sieur Issa SARR. Face à ce dernier, Cheikh DIOP se prévalait d'un bail sur la parcelle, mais le titre lui conférant la régularité de ce droit n'avait pas encore était délivré par l'autorité administrative compétente ; seules des attestations lui étaient données le 5 janvier 1980 en vue de servir à compléter son dossier de demande de permis de construire.

Dès lors, il s'agissait pour la Cour de cassation de déterminer qui des deux titulaires de titres administratifs avait un droit régulier sur la parcelle. La Cour classe les titres invoqués par prévalence et considère que « l'autorisation d'occuper essentiellement provisoire et précaire ne peut prévaloir juridiquement sur le bail », « les attestations délivrées » tenaient lieu de titre du droit de bail. La Cour confirme ainsi la décision de la Cour d'appel qui d'ailleurs avait rappelait les conditions de validé de l'autorisation d'occuper : « cette autorisation est valable lorsque le terrain est situé dans une zone non encore dotée d'un plan d'urbanisme ou dont le plan d'urbanisme doit être révisés dans un délai rapproché »

L'intérêt est aussi de voir les règles qui régissent la construction compte tenue de l'insuffisance de l'application des règles d'urbanisme.

Section 2. La conformité de l'ouvrage à la police des constructions

La police est d'abord une institution, un corps d'agents investis par la loi de prérogatives de puissance publique avec plusieurs variantes notamment la police administrative qui veille à la prévention des troubles à l'ordre public sous toutes leurs formes, la police municipale qui veille au quotidien à l'insalubrité publique et la police judiciaire qui vise généralement la constatation des infractions à la loi.

La notion de police renvoie aussi à un ensemble de règles qui organisent notamment l'ordre public de protection en matière d'urbanisme.

Les règles d'urbanisme ont vocation d'organiser un développement cohérent d'un territoire donné par des instruments à portée juridiques que sont les schémas directeurs et le plan d'occupation des sols. Quant aux règles de la construction, elles ont pour vocation de régir les modifications de la parcelle par son propriétaire ou sous la direction d'un maître d'ouvrage.

Ces modifications tiennent d'une part au respect des règles du droit de la protection civile (Parag.I) et d'autre part à leur mise en oeuvre (Parag.II).

Parag. I Les règles du droit de la protection civile
applicable aux constructions

La police de la sécurité de la construction comporte des règles préventives de la sécurité des personnes dont il importe de voir le cas particulier de la prévention des risques dans les immeubles à grandes hauteurs, IGH (A), et la prise en compte de la destination finale de l'ouvrage (B).

A. la prévention des risques dans les IGH

La prévention des risques dans les IGH est régie par le Décret N°72-611 du 23 mai 1972 instituant les règles de sécurité pour la construction des immeubles de grande hauteur et leur protection contre les risques d'incendie et de panique. « Constitue un immeuble à grande hauteur, pour l'application du présent décret, tout corps de bâtiment dont le plancher bas du dernier niveau est situé à plus de 28 mètres, par rapport au niveau du sol le plus haut utilisable par les services publics de secours et de sécurité et de lutte contre l'incendie. 

L'ensemble des éléments porteur de l'immeuble, les sous-sols, les parties de l'immeuble inférieur en hauteur lorsqu'ils ne sont pas isolés du corps du bâtiment  ci-dessus ou de ses éléments porteur, font partie intégrante de l'immeuble à grande hauteur29(*) ».

Cette prévention s'articule autour de l'évacuation des personnes en cas de sinistre et du choix de matériaux entrant dans la conception du bâti.

L'évacuation des personnes tient d'abord aux conditions d'implantation de l'IGH par rapport au fonds voisins, à la densité de l'occupation de l'espace, une contrainte chiffrée à 10 m2 par personne, à l'aménagement de dépendance entre les différents compartiments ou appartements, l'un servant à secourir l'autre, et de prévoir un tableau pour l'affichage des consignes de sécurité.

Entre autres exigence de la loi, figurent les dimensions des chambres, la construction d'un escalier de secours et d'une porte d'entrée différente de celle réservée au public, un réservoir d'eau, un système d'alarme, et notamment différentes sources autonomes d'électricités30(*).

S'agissant des matériaux, c'est leur capacité à résister au feu qui est prépondérant pour la prévention de l'incendie. L'Arrêté interministériel n° 3222 M. précité retient le comportement des matériaux au feu comme critère de classification, et distingue entre les parties invisibles les Structures et les parties visibles constituées de façades, des couvertures, et des dégagements constitués notamment des couloirs et des escaliers, ainsi que les installations.

Ainsi, cet arrêté retient les normes de résistance au feu. Une telle classification vise à développer l'existence d'une pluralité de coupe feu entre les différentes composantes de l'immeuble.

Par exemple, les ascenseurs doivent pouvoir fonctionner en cas d'incendie avec un dispositif autonome. Ainsi, importe-t-il de voire les règles relatives à la destination de l'ouvrage.

B. l'adaptation de l'ouvrage à sa destination

Les règles qui régissent les immeubles à grande hauteur constituent le droit commun de la sécurité civile en matière de construction. La destination finale de l'ouvrage, son adaptation aux besoins des usagers renvoie aux diverses classes d'immeubles avec des règles spécifiques. Il s'agit des immeubles à usage d'habitation, des immeubles à usage d'hôtel, des immeubles à usage d'enseignement, des immeubles à usage de dépôts d'archives, des immeubles à usage de bureau, des immeubles à usage sanitaires, des immeubles à usages mixtes.

Les derniers plus nombreux sont multifonctionnels et peuvent s'y rencontrer commerce, bureau et habitation. Une autorisation spécifique d'ouverture au public est requise lorsque l'immeuble est destiné à recevoir du public ou nécessite un encadrement approprié ; cas des archives. Une telle autorisation intervient à plusieurs niveaux.

D'abord, comme condition préalable à la délivrance de l'autorisation de construire, l'autorité compétente en matière protection civile, différente de celle qui délivre cette dernière doit donner son agrément compte tenu des énonciations relatives à la destination finale de l'ouvrage portant marché de construction ou projet de construire.

Ensuite, au moment de la livraison, l'habitabilité est appréciée en fonction des critères de la destination finale retenue31(*). L'inobservation de cette règle d'autorisation est sévèrement sanctionnée.

L'art.85 alinéa 5 du Code de l'Urbanisme dispose : « Tout propriétaire ou exploitant d'établissement recevant du public qui exerce en contravention aux dispositions de sécurité prévues par le présent Code et ses décrets d'application, ou qui ouvre ou qui maintient, ouvert l'établissement sans autorisation administrative, ou qui accepte le public en dépassement de l'effectif fixé pour la catégorie à laquelle appartient l'établissement, est puni d'une amende de 100.000 à 2.000.000 de francs et d'un emprisonnement de six mois à deux ans ou de l'une de ces deux peines seulement ».

La prévention des risques et l'adaptation de l'ouvrage à sa destination doivent être prises en compte dès la conception du projet32(*) qui est mis en oeuvre durant le chantier.

Parag. II La mise en oeuvre des règles de protection civile
dans le chantier

L'acception règles de protection civile retenue ici ne renvoie pas nécessairement aux normes de sécurité des conditions de travail, mais aux composants qui sont de nature à l'ouvrage conforme à la réglementation des constructions. Ainsi, il s'agira de voir les normes techniques de construction (A) avant d'aborder les acteurs de leur mise en oeuvre (B).

A. les normes techniques de construction 

Les normes techniques ne renvoient pas à la technologie des bétons armés ou de la fabrication des mortiers qui ne relève pas des sciences juridiques, mais se rapportent aux règles relatives à la qualité des matériaux et à la partie de l'ouvrage dont ils sont destinés.

Pour les matériaux, il faut noter qu'il n'existe certes pas de ciment usager, pas plus que la peinture ne peut être réutilisée. Mais aux matériaux disponibles sur le marché de la construction au moment de la rédaction du Décret de 1972 exposant sur leurs caractéristiques, et avec la libéralisation des échanges, sont venus s'ajouter une nouvelle catégorie de matériaux de construction, venant d'Europe, de seconde main, très beaux, de véritables dame aux camélias de l'immobilier. Ce sont les portes, les fenêtres, les vitres, les tuyaux et les câbles incorporés dans certains bâtiments. Les modalités d'utilisation et d'importation de ces matériaux doivent interpeller les professionnels du milieu.

S'agissant des matériaux produits localement, les préfabriqués, maisons en pièces détachées, sont aussi de mise. Un responsable de SOSIF International33(*) me confie : « des personnes viennent acheter nos briques et les amènent pour les casser et les tester dans leur laboratoire. Nous n'avons pas encore de laboratoire interne, mais nos produits sont de qualité. Nous allons chercher une certification pour être plus compétitif ».

SOSIF partage le marché du précontraint avec PREBAT, HAMO, SENAC ETERNIT. Les entreprises notamment la CDE, la CSE et JLS qui ont des unités internes de fabrications de matériaux entrant dans le gros oeuvre.

La question de la normalisation, si elle n'est pas retenue dans les cahiers de charges d'un marché de construction, est laissée à la discrétion des entreprises malgré l'existence d'une réglementation en la matière. Il importe de faire la synopsie d'un bâtiment pour illustrer ses composants.

La loi sénégalaise classe les entreprises intervenant dans le secteur du bâtiment en distinguant d'une part celles qui sont spécialisées dans le gros oeuvre ; et d'autre part celles regroupées sous l'appellation tout corps d'état. Donc ce n'est qu'implicitement, qu'intervient la distinction gros oeuvre bon fonctionnement. Le gros oeuvre renvoie aux éléments d'équipement qui font indissociablement corps avec les ouvrages de viabilité, de fondation, d'ossature, de clos ou de couvert, l'ensemble participant à la solidité de l'ouvrage34(*).

C'est au niveau des EPERS que se pose le problème de la détermination, et du partage responsabilité des participants à l'édification des ouvrages.

Les EPERS sont définis comme éléments pouvant entrainer la responsabilité solidaire ; responsabilité solidaire du fabricant, importateur ou négociant avec l'entrepreneur qui aura utilisé ledit matériau dans une construction. L'article 1292-4 du Code civil pose des conditions cumulatives à la mise en oeuvre de cette responsabilité solidaire. Le produit doit être un EPERS et être fabriqué suivant les spécifications du destinataire ; peu importe que le produit soit importé ou fabriqué localement dans les ateliers du négociant. La tendance actuelle de la jurisprudence française est de considérer les EPERS comme des matériaux ou marchandise, et leur appliquer le droit commun de la vente mobilière35(*).

Toutefois cette jurisprudence des EPERS permet d'étendre la responsabilité des constructeurs à d'autres personnes qui n'interviennent pas directement dans la construction.

Par ailleurs, le propriétaire maître de l'ouvrage peut être amené à recruter des personnes qui vont sous sa surveillance exécuter les travaux ; se pose alors le conflit entre professionnels et artisans.

B. La distinction entre artisans et professionnels

Une construction exécutée dans les règles de l'art ne signifie pas une conception réalisée par un artisan.

Un ingénieur du BTP, directeur technique à la SAIEDB36(*)me confie: « Le personnel de chantier est composé d'ouvriers recrutés et classés en fonction de leur expérience professionnelle. Mais ce qui arrive souvent dans ce métier c'est que les maçons ou manoeuvres ne voient le technicien qui supervise le chantier qu'à des moments critiques, des phases où sa présence est nécessaire pour l'application de tel procédé plutôt qu'un autre. Ce que l'ouvrier ne peut percevoir à son niveau. Ce dernier n'hésitera pas à engager un chantier, nonobstant les subtilités sus invoquées, ayant à son actif plusieurs constructions qu'il a exécuté « seul » ».

L'expression « règle de l'art » renvoie à la maîtrise des caractéristiques techniques des constructions et des règles de leur mise en oeuvre. Ceci nécessite des connaissances scientifiques notamment la résistance des matériaux en fonction de leur teneur en eau, sable, ciment, gravier, fer ; et une formation spécifique.

L'artisan, c'est l'ouvrier citoyen lambda analphabète parfois, que le sort ou l'échec scolaire a imposé un métier appris difficilement en véritable nomade urbain. Il n'existe pas d'atelier d'apprentissage de maçon, de ferrailleur ou de manoeuvre du bâtiment à l'instar du menuisier ou du mécanicien.

L'apprentissage de fait est une formation empirique que les jeunes travailleurs acquièrent par le contact avec des travailleurs plus anciens37(*). C'est un apprentissage sur le tas, l'apprenti se déplace au gré des chantiers de son maître qui reçoit selon les entreprises qui l'emploient sa rémunération accompagnée d'une prime d'outillage et d'une prime pour l'apprenti. A défaut de rémunération le maître donne parfois quelque chose de ce qu'il gagne.

La convention collective des BTP38(*), qui date de la colonisation et toujours en vigueur, n'a rien prévu à cet effet ; un contrat d'apprentissage spécifique aux BTP n'a pas encore vu le jour.

Pour revenir à ceux qui sont réputés être des professionnels, des écoles et instituts encadrent leur formation. L'enseignement supérieur, public ou privé39(*), offre des formations de technicien du BTP (Bac +2), et des ingénieurs docteurs ou technologues (Bac +6).

Dans la formation professionnelle (niveau Brevet), le CNQP et ASAFIN40(*) et quelques centres orientés dans la réinsertion des jeunes offrent des formations en Dessins de bâtiment, Electricité d'équipement de BTP. Les sortants de ces écoles de formation peuvent servir comme commis d'architecte ou assistant dans les bureaux d'études et cabinets d'architectures, et comme techniciens employés dans l'industrie du bâtiment.

Dans le cadre de l'entreprise, l'école des TP sis avenue Front de terre propose des sessions foraines selon la demande des entreprises sous forme de séminaires, de formation modulaire en une technique déterminée de conception d'un type d'ouvrage, entre autre. Les cibles sont des ouvriers, des manoeuvres ou des techniciens relavant d'une entreprise.

Ces écoles citées n'ont nullement pour vocation de former des ouvriers ou manoeuvres wath-raxassou41(*). La création d'une telle école ouvrière s'avère une nécessité dans ce secteur.

L'intérêt de la distinction entre artisan et professionnel tient au partage du marché entre les artisans et les professionnels. Le nombre de Permis de construire délivré par rapport au volume des constructions réellement effectués42(*) montre bien l'étendue des manquements et leurs effets notamment sur la qualité des constructions et le respect des normes de sécurité dans les chantiers. Le constat est d'oeil : des quartiers nouveaux, notamment Diameguene et Diacsao sur la route nationale N°1 ont vieillis en une vingtaine d'année d'habitation.

Aux règles d'urbanisme et de construction qui s'attachent au site ou parcelle s'ajoutent celles qui intéressent les personnes, assurées potentielles, intervenant à la mise en oeuvre des ouvrages.

Chapitre II. UNE PERSONNE ASSUJETTIE À L'ASSURANCE CONSTRUCTION

Les intervenants à l'opération de construction dénommés « constructeurs » ou constructeurs exécutants, peuvent être regroupés en trois catégories43(*) :

- les consultants et maîtres d'oeuvre qui font principalement des prestations intellectuelles : les architectes et les cabinets d'architectes, les bureaux d'études et de contrôle, les topographes et géomètres ;

- les entreprises de constructions, tout corps d'état : les personnes physiques, les entreprises de BTP ;

- les maîtres d'ouvrage qui sont propriétaires ou représentants soit du destinataire final44(*) de l'ouvrage ou du bailleur de fond mécène du financement.

Les textes qui régissent les marchés publics contiennent des dispositions où l'assujettissement du constructeurs à l'assurance est soit facultative soit obligatoire selon qu'elle est imposée pour des motifs d'ordre public ou en l'absence d'alternative de l'intervenant. Donc c'est la finalité assignée à l'assurance45(*) qui confère un caractère obligatoire ou non à sa souscription par le cocontractant de l'administration.

Toutefois des dispositions d'ordre professionnel peuvent aménager des assurances obligatoires comme l'assurance professionnelle. Cette assurance professionnelle qui est recommandée46(*) ou imposée doit être distinguée de l'assurance construction (Section 1). La responsabilité des constructeurs fait aussi l'objet d'assurances spécifiques obligatoires (Section 2).

Section 1. Distinction entre assurance professionnelle obligatoire
et assurance construction

Les caractéristiques les plus significatives entre ces deux catégories tiennent au mobile de souscription spécifique à assurance professionnelle (Parag.I), ce qui ne manque pas d'intérêt (Parag.II).

Parag. I Le mobile de la souscription propre à
l'assurance professionnelle

Les critères de la distinction tiennent à l'exigence de la souscription d'une assurance comme condition d'exercice d'une profession (A), et au contrôle de cette souscription (B).

A. L'assurance professionnelle : une condition d'exercice d'une profession

Une police d'assurance de responsabilité civile professionnelle est requise pour l'exercice de certaines professions soumises à autorisation préalable notamment les prestations intellectuelles. C'est ainsi qu'il est recommandé aux professionnels relevant de l'Ordre des experts et évaluateurs agréés du Sénégal de souscrire une police d'assurance sur la vie et une police d'assurance « responsabilité professionnelle », le tout pour se garantir contre tout risque financier pouvant nuire à son indépendance ou à sa liberté d'expression47(*).

S'agissant de l'architecte, la loi N°78-44 du 6 juillet 1978, relative à l'exercice de la profession d'architecte et à l'ordre des architectes, dispose en son article premier que nul ne peut exercer la profession d'architectes s'il ne rempli pas les conditions notamment avoir contracté une assurance couvrant tous les risques résultant de sa responsabilité professionnelle dans les conditions qui sont fixées par décret et être inscrit au Tableau de l'Ordre.

Comme condition d'inscription au Tableau de l'Ordre des architectes, l'obligation de s'assurer s'étend aussi au commis d'architecte qui, même sil ne s'inscrit pas à l'Ordre, doit pour être agréé par le ministre chargé de l'urbanisme, prêter serment devant le tribunal de premier instance d'exercer son art avec conscience et probité48(*).

L'autorité administrative ne manque pas de contrôler la matérialité de la souscription.

B. le contrôle administratif de la souscription

L'ordre des architectes est une institution professionnelle, et non un syndicat d'architectes49(*). La loi50(*) institue un contrôle annuel de l'obligation d'assurance par un tiers au contrat d'assurance, très utile pour l'assureur, qui n'intervient pas dans les rapports assureur-assuré, ni ne réclame une indemnité. Ce tiers, le Conseil de l'Ordre des architectes reçoit chaque année de l'architecte ou du Cabinet d'architecture, une attestation de son organisme assureur établissant que les primes ont été réglées pour l'année en cours et que les mêmes garanties lui sont maintenues pour l'année à venir.

Cette obligation pèse sur tout architecte, qu'il soit salarié relevant d'un cabinet ou exerçant à titre de profession libérale, et peut consister en une déclaration collective pour l'ensemble des membres d'un Cabinet ou intervenants à une opération de construction déterminée.

Toutefois la loi n'établit pas de sanction en cas de non souscription de l'assurance professionnelle, mais la pratique ne manque pas de sanctionner.

Le pouvoir de sanction relève du mécanisme d'attribution des marchés. En effet, dans les appels d'offre, de marché public ou privé, qu'il s'agisse de marché de maîtrise d'oeuvre ou de travaux, le dossier d'un candidat ne comportant pas de références à l'assurance souscrite est généralement classer sans suite. Ce candidat pouvant être un architecte, une entreprise de BTP ou un bureau d'étude.

Le mobile de la souscription n'est pas sans laisser aux parties un pouvoir de modification de leur rapport contractuel au cours de l'exécution de celui-ci.

Parag. I Intérêt de la distinction

Les clauses contractuelles tenant à la durée (A), ou la volonté de mettre un terme à celui-ci (B) ne sont pas appréhendées de la même manière dans les deux types de contrats.

A. La distinction tenant à la durée du contrat

La référence à la durée dans le contrat d'assurance professionnelle tient à l'étendue de la garantie de l'assureur. Celui-ci couvre les sinistres résultant de l'activité professionnel de l'architecte, l'ensemble de ses interventions dans le processus de construction. Avant toute construction, l'architecte intervient comme consultant dans la préparation des cahier de charge, il dessine les plans, peut être engagé comme maître d'oeuvre, participer à l'octroi du permis de construire et notamment suivre l'exécution du marché de construction avec les autres constructeurs. Sa responsabilité est le fondement du droit commun de la responsabilité des constructeurs.

Même si le conseil de l'ordre des architectes exige à l'endroit de l'assureur le maintien des garanties pour l'année à venir, l'assurance professionnelle peut être conclue pour un an renouvelable. C'est une assurance de responsabilité civile conclue intuitu personae qui crée un rapport d'obligation, un droit personnel, entre l'assureur et l'assuré.

A la différence de l'assurance construction portant sur une chose, l'ouvrage, va faire naître un droit réel accessoire qui consiste en la réparation de l'immeuble sinistré. L'assuré, comme l'assureur, ne peuvent rompre le contrat qu'à des conditions exceptionnelles.

La durée du contrat dans l'assurance construction est d'ordre public51(*), donc ne relève pas de la volonté des parties. Ainsi celle de l'assurance responsabilité décennale est dix ans, la garantie de bon fonctionnement ou biennale de deux, et la garantie de parfait achèvement de un an. Ces délais courent à compter de la réception de l'ouvrage. La faculté de résiliation n'est en principe pas opératoire.

Ainsi, les conditions de résiliation de telles polices vont être recherchées dans la nature des dommages couverts et des modifications affectant les conditions de garanties, et non dans la volonté délibérée des parties de rompre leurs rapports juridiques.

B. La faculté de changement d'assureur du professionnel

L'assurance construction lie, une fois conclu, un seul assureur durant toute la durée que peut jouer la présomption de responsabilité du constructeur, soit dix ans au plus, avec le bénéficiaire de la garantie : le souscripteur ou les propriétaires successifs de l'ouvrage.

Pour l'assurance professionnelle, un contrat personnel conclu en considération de la personne pour les risques liés à une activité professionnelle, c'est la souscription d'une police d'assurance qui est obligatoire et fonde de ce fait la faculté de changement d'assureur ; la conclusion d'un autre contrat d'assurance avec une autre société d'assurance. Dans une telle hypothèse, quel sera le sort des dommages liés aux constructions exécutées sous l'empire des autres rapports juridiques rompus ?

Quel assureur va prendre en charge la réparation, celui du moment de la survenance du sinistre ou l'assureur antérieur qui avait couvert les risques professionnels au moment de l'exécution de l'ouvrage ? S'agit-il d'un conflit de conventions d'assurance, l'une régissant le passée, l'autre l'avenir ?

En droit français, le changement d'assureur par le professionnel met fin à la relation contractuelle, rapport assureur assuré, sans rendre caduque les garanties dues par l'assureur.

Ce principe trouve son fondement dans la prohibition des clauses dites de Claims Made52(*). De telles clauses, qui exigent que la réclamation soit faite à l'assureur durant la période de validité du contrat, ne sont pas admises pour une assurance obligatoire53(*), et rendent le contrat d'assurance dépourvu de cause54(*).

Pour la jurisprudence, « le versement des primes, pour la période qui se situe entre la prise d'effet du contrat et son expiration, a pour contrepartie la garantie des dommages trouvant leur origine dans un fait qui s'est produit pendant cette période »55(*).

Ainsi, l'assurance professionnelle joue le même rôle que l'assurance construction ; ce qui n'est pas le cas en droit sénégalais.

D'abord, le Code CIMA ne classe pas l'assurance professionnelle dans la catégorie des assurances obligatoires, et institue une limitation de la période de réclamation qui peut aller de deux à cinq ans. Quant au texte sénégalais, il limite la réparation due par l'assureur à concurrence du plafond de garantie56(*). Cette limitation de la période réclamation s'applique au contrat d'assurance non expiré et non suspendu. L'expiration fait produire au contrat ses effets jusqu'au terme fixé dans la police, alors que la résiliation procède de la volonté unilatérale d'une partie de rompre le lien contractuel. Quid de l'influence de ce rapport personnel sur les garanties, si l'assureur se réserve le droit d'opposer au bénéficiaire du contrat toutes les exceptions opposables au professionnel57(*).

Ce plafonnement de la garantie et l'imprécision des effets de la résiliation occultent l'insuffisance de l'assurance professionnelle à prendre en charge de manière effective la responsabilité des constructeurs qui fait intervenir d'autres types d'assurances.

Section 2. L'obligation légale d'assurance des constructeurs

La présomption de responsabilité des constructeurs établie par le COCC58(*) résulte de conditions cumulatives. Il doit s'agir :

- d'un marché à forfait ou à devis ;

- d'une intervention dans l'exécution du marché ;

- d'un préjudice, la destruction totale ou partielle de l'édifice résultant des vices du sol ou de la construction ;

L'action doit être intentée dans les délais légaux. Ce délai varie en fonction du caractère apparent ou caché des vices. Il est d'un an après la réception de l'ouvrage pour les vices apparents, et de dix ans pour les vices cachés. L'intérêt d'exiger un marché de devis ou un marché de forfait tient à la connaissance que les parties au contrat d'entreprise doivent avoir de l'étendue de leurs obligations avant l'exécution de celles-ci (Parag.I), toutefois cette responsabilité peut faire l'objet d'assurance (Parag.II).

Parag. I La responsabilité établie par l'article 449 alinéa 2 du COCC

Aux termes de l'art.449 alinéa 2, « l'architecte, chargé de veiller à l'exécution du plan, est solidairement responsable avec l'entrepreneur des fautes de celui-ci.» S'agissant de l'intervention sur l'exécution, celle-ci doit s'apprécier par rapport à l'architecte. Il s'agira de s'intéresser au domaine (A) et aux limites de cette responsabilité (B).

A. Le domaine de la responsabilité solidaire
des architectes et entrepreneurs

Les textes n'instituent pas une obligation de contracter avec le même architecte qui a conçu les plans, en tant que maître d'oeuvre, pour le suivi de l'exécution des énonciations du devis ou des cahiers de charges. En effet, pour la responsabilité de l'architecte, il faut distinguer selon qui intervient dans la conception ou dans l'exécution du projet.

Lorsqu'il dessine les plans, il agit seul, et le contrat qu'il exécute est de nature mobilière qu'en bien même sa responsabilité décennale pourrait être engagée. La responsabilité de l'architecte pouvant résulter du marché de prestation intellectuelle, lorsqu'il n'intervient pas dans l'exécution du plan par lui dessiné pourra être couverte par l'assurance professionnelle.

D'abord la conception des plans est un contrat de prestation intellectuelle qui est de nature mobilière et pouvant se solder par la non exécution, ou la reprise des dessins lorsque le propriétaire décide de faire autre chose que le type de plan retenu. De même dans les concours d'architecture, plusieurs types de plans sont proposés ; les plans non retenus n'en deviennent pas pour autant dépourvus d'intérêt, étant protéger par le droit d'auteur.

Lorsqu'il intervient comme maître d'oeuvre, il est sensé contrôler les modalités d'exécution du contrat par l'entrepreneur. Dans une telle situation, c'est le manquement à son devoir d'équité qui devait être sanctionné, et faire jouer sa responsabilité indépendamment de la nature des vices que la loi retient pour engager la responsabilité de l'entrepreneur, ceux-ci décelant celui-là.

S'agissant de l'entrepreneur, il va de soi que la présomption de responsabilité pèse sur lui pour les dommages liés aux vices de la construction, car effectuant les actes matériels de construction. La responsabilité solidaire ou collective retenue n'est pas dépourvue d'intérêt, car reposant sur la faute, mais une faute liée à l'exécution du plan. Une présomption de faute qui rend l'architecte et l'entrepreneur débiteur, envers le maître de l'ouvrage, d'une obligation de réparation. La faute étant la violation d'une obligation préexistante, le contrat générateur des obligations réciproques des parties renferme en elle même les limites de la responsabilité solidaire.

B. La portée de la responsabilité solidaire :
une responsabilité non assortie d'une obligation d'assurance

Les clauses limitatives de responsabilité sont prohibées ; l'architecte et les entrepreneurs, parties au contrat de maîtrise d'ouvrage ou de construction, ne peuvent compromettre sur l'étendue de leur responsabilité dans leur rapport avec le maître de l'ouvrage59(*). Ainsi, la notion la faute ne peut être retenue seule, l'article 452 du COCC, en excluant toute hypothèse de compromission sur l'étendue de la responsabilité des constructeurs, retient implicitement les dommages de toute nature, qui peuvent aller au-delà de l'exécution du plan.

L'architecte comme l'entrepreneur n'a de rapport juridique qu'avec le maître de l'ouvrage, et des relations techniques entre eux, n'étant liés par un contrat. La solidarité ne se présume pas. Elle existe de plein droit dans les cas prévus par la loi60(*).

L'option du bénéficiaire en cas de sinistre, de dommage à l'ouvrage. Ainsi, le maître de l'ouvrage ou le bénéficiaire pourra poursuivre l'un quelconque des débiteurs, soit le constructeur soit l'architecte, le plus solvable pour la totalité de la réparation ; ce dernier ne pouvant se prévaloir du bénéfice de division.

S'agissant la prise en compte de cette obligation in solidum, la loi retient pour l'architecte une obligation de souscrire une assurance professionnelle, l'entrepreneur n'est assujetti à l'assurance que pour satisfaire aux conditions d'octroi d'un marché qui l'y soumet, notamment pour la preuve de sa capacité financière61(*). Deux catégories d'assurance sensées garantir les vices d'une même construction et pouvant être concluent séparément avec des assureurs différents, donc deux contrats autonomes, notamment pour les clauses régissant la durée et le mobile de la souscription. Chacun des assureurs sera tenu en principe de l'intégralité de la réparation des dommages sans pouvoirs invoquer l'existence de la garantie de l'autre assureur62(*).

Les dommages peuvent survenir aussi bien durant la période de la collaboration commune des constructeurs et architecte ou après. Le législateur a réagit en instituant une assurance décennale unique.

Parag. II L'assurance décennale unique établie par la loi 78-44 du 6 juillet 1978

«L'architecte doit être titulaire d'une assurance individuelle de base couvrant ses responsabilités professionnelles à concurrence du plafond de garantie de cette assurance, telle que prévue à l'article premier de la loi du 6 juillet 197863(*). Dans l'attente des décrets d'application prévus par la loi, les risques professionnels de l'architecte sont couverts par l'assurance de garantie décennale et risques civils de chantier dite « police spéciale type 50 » que le maître de l'ouvrage s'engage à souscrire »64(*).

La police unique spéciale type 50 définie ici établit une distinction entre l'assurance des risques civils de chantier et l'assurance de garantie de dommages de nature décennale.

A. La notion de risques civils de chantier assurables

Le chantier correspond à la période d'exécution des actes matériels de construction, la mise en oeuvre du contrat de d'entreprise ou du marché de TP. Le chantier est aussi le site, lieu d'exécution ou d'édification de l'ouvrage. Les risques civils afférents à cette période portent sur la garantie des dommages aux personnes et aux biens autres que l'ouvrage en construction.

S'agissant des personnes, il faut distinguer entre le personnel salarié des entreprises intervenant dans le site et les tiers. Le personnel salarié suit le régime établi par le Code CIMA en matière d'accident de véhicule terrestre à moteur. En effet, l'article 226 du Code CIMA dispose que l'obligation d'assurance ne s'applique pas à la réparation des dommages subis le personnel conduisant le véhicule et pendant leur service, par les salariés ou préposés de l'assuré responsable des dommages ». Le personnel salarié relève, pour la réparation de leur préjudice corporel65(*), de la législation spécifique aux accidents de travail qui relève de la Caisse de Sécurité sociale.

Dans les rapports entre les différentes entreprises intervenants sur un site, des dommages peuvent être le fait de l'une d'elles ; il s'agira de déterminer les responsabilités et les modalités de la réparation.

Ainsi, qu'il s'agit d'un marché public de travaux ou de l'exécution d'un contrat d'entreprise, soit c'est une seule entreprise qui exécute tous les travaux, soit c'est une entreprise et des sous-traitants ou plusieurs entreprises prises séparément, le cas de l'allotissement.

La sous-traitance se distingue de l'allotissement par l'indépendance juridique des diverses entreprises titulaires de lots. Celles-ci traitent séparément avec le maître de l'ouvrage, et sont responsables personnellement de leurs fautes.

Dans la sous-traitance, le sous-traitant est soumis au contrôle de l'entreprise Titulaire qui est attributaire du marché conclu avec le propriétaire ou le représentant du maître de l'ouvrage. Il n'a d'action contre le maître de l'ouvrage qu'en cas de non paiement. L'entreprise Titulaire est responsable des manquements des sous-traitants aux stipulations des cahiers de charges ou devis de construction.

En principe, les faits des sous-traitants engagent la responsabilité de l'entreprise principale adjudicatrice, même s'il est fait obligation au sous-traitant de souscrire une assurance responsabilité civile66(*). Dans l'allotissement, chaque entreprise exécute son lieu indépendamment du personnel des autres entreprises qui sont des tiers par rapport au siens. Dans une telle situation, les praticiens recourent à « la responsabilité croisée » qui consiste pour la F.S.S.A. à faire couvrir par chaque assureur les tiers assurés de l'autre. La police d'assurance collective tout risque chantier permet aussi de prendre en compte cette pluralité d'intervenants.

Le cumul de l'assurance et de la prestation de la sécurité sociale peut être acquis aux conditions exclusives tenant à la différence de mise en oeuvre des deux institutions. La C.S.S. couvre les accidents du travail du seul fait de leur existence ; c'est-à-dire les accidents survenus par le fait et à l'occasion du travail. La prise en compte des accidents de travail par l'assurance est subordonnée à l'observation des consignes de sécurité liés à type d'activité notamment dans les chantiers au port de casque et de chaussures de sécurité, et la mise en oeuvre d'échafaudages adaptés au normes du secteurs des BTP. Toutefois, les énonciations de la police d'assurance relatives à de telles mesures doivent être mentionnées en caractères très apparents67(*). A défaut, les bénéficiaires ne peuvent être déchus de la prise en charge par l'assureur d'éventuels préjudices corporels.

Le sort des tiers, non intervenants à l'acte de construction, généralement les passants, relève en principe, selon qu'il s'agit de marché public de travaux ou de marché privé, soit de la responsabilité administrative ou de la responsabilité civile délictuelle. Toutefois, l'assurance est un contrat de nature privée et l'assureur peut être appelé en garantie par le gardien de la chose généralement l'entreprise adjudicatrice ou les entreprises titulaires de lots.

S'agissant des biens matériels, outillages et engins de chantier, leur gestion est variable. Lorsque l'Etat prête ou loue à une entreprise, dans le cadre de l'exécution d'un marché de travaux, celle-ci doit souscrire une assurance dommage garantissant « les matériels et outillages qui lui sont remis sans transfert de propriété 68(*)».

Les engins relevant de l'assurance obligatoire des véhicules terrestre à moteur, seuls le matériel appartenant aux entreprises et qui n'entre pas dans cette catégorie peut relever de l'assurance risque civil de chantier ; encore faudrait-il que son utilisation soit déclaré à l'assureur s'il est de nature à modifier les conditions initiales de garantie69(*).

Au delà de cette période dite de chantier, des vices peuvent être décelés alors qu'aucun rapport juridique ne lie plus les intervenants du chantier. L'assurance unique envisage aussi de garantir les vicissitudes de cette période.

B. L'assurance de garantie de dommages de nature décennale

Que recouvre cette notion de garantie décennale que le législateur oppose aux risques civils de chantier ? Est-ce pour marquer deux périodes successives dans la vie de l'ouvrage ; l'une pour le fabriquer, l'autre pour l'habiter. Si tel est le cas, l'assurance dite de garantie décennale va prêter à confusion.

D'abord, la décennale intéresse particulièrement deux types d'assurances. Il s'agit de l'assurance responsabilité civile décennale et de l'assurance dommage ouvrage décennale. Ces deux types d'assurances ont une assiette commune, ne pouvant être mise en oeuvre qu'en cas de dommage ayant leur origine dans un vice de la construction ou du sol. Des vices qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un des éléments constitutifs ou l'un des éléments d'équipement le rendent impropre à sa destination. De tels vices sont des vices propres à la chose assurée70(*), mais que la loi considère comme des risques dès lors qu'ils affectent la solidité de l'ouvrage.

Le créancier de l'indemnité de réparation dans ces types d'assurance est le bénéficiaire, c'est-à-dire le propriétaire de l'ouvrage au moment de la survenance du sinistre.

L'assurance dommage ouvrage décennale vise l'octroi d'une indemnisation en dehors de toute recherche des responsabilités, le paiement des travaux de réparation des dommages de la nature de ceux dont sont responsables les constructeurs au sens de l'article 1792-1 du Code civil, les fabricants et importateurs ou le contrôleur technique sur le fondement de l'article 1792 du même code71(*). L'assurance responsabilité civile décennale subordonne l'octroi de la réparation de l'assureur à l'établissement de la faute du constructeur, ce constructeur.

Ensuite, avant la mise en oeuvre des décennales, des assurances de courte durée peuvent intervenir notamment la garantie de bon fonctionnement qui couvre pour deux ans les éléments non pris en charge par la garantie dommage ouvrage décennale, c'est-à-dire ceux qui n'entre pas dans la définition du gros oeuvre.

La garantie de parfait achèvement d'une durée d'un an après la réception ou livraison s'étend à la réparation de tous les désordres signalés par le maître de l'ouvrage et qui sont portés dans les réserves qu'il a fait lors de cette réception.

L'ensemble des assurances énumérées ici constituent l'assurance construction. Ces assurances sont obligatoires en France depuis la réforme du droit de la construction de 1978. Au Sénégal, l'assurance construction n'est pas obligatoire. L'absence de souscription de telles assurances n'est pas sanctionnée, pas plus qu'il n'existe un fond de garantie couvrant l'assurance construction72(*).

C'est dans le contrat qui le lie à l'architecte que « le maître de l'ouvrage s'engage à souscrire » à la police d'assurance qui a pour vocation de couvrir la garantie décennale et les risques civils de chantiers, ainsi que la responsabilité de l'architecte qui, lorsqu'il participe à l'exécution de l'ouvrage partage celle-ci avec les entreprises solidairement responsable. Une seule police hybride qui couvre tout le processus du bâti, et reposant sur le seul engagement d'une partie à un contrat de nature privé, ne serait-elle pas une violation de la liberté individuelle et constitutive d'une rupture de l'égalité devant la loi73(*)?

L'intérêt d'assurance prééminent du maître de l'ouvrage est-il à même de lui faire supporter la garantie de la responsabilité des autres intervenants dans le processus de construction ? Ou bien, l'institution d'assurance professionnelle obligatoire dont sont assujetties les personnes et les entreprises autre que le maître de l'ouvrage est-elle suffisante pour faire peser sur ce dernier l'engagement de s'assurer ? Cet engagement n'intéressant pas l'assureur, car liant les seules parties au marché de construction, le recours au droit commun des assurances s'avère nécessaire pour l'analyse, à travers le régime juridique de l'assurance construction, de la nature juridique des différentes assurances qui la constituent.

2ÈME PARTIE LE RÉGIME JURIDIQUE DE L'ASSURANCE CONSTRUCTION

Le Code CIMA n'a pas pour vocation de régir les droits réels notamment la propriété des choses objets des contrats d'assurance.

Les règles qui régissent le droit foncier ne peuvent manquer de traduire des rapports contractuels portant sur des droits réels. Ainsi, l'hypothèque, pour être opposable aux tiers, doit faire l'objet d'une inscription au livre foncier ; c'est cette inscription qui lui confère un caractère définitif. Cette particularité ne se retrouve pas dans tous les droits ayant une assiette foncière, notamment l'assurance construction qui a un objet immobilier, car portant sur un ouvrage toujours fixé au sol.

Ainsi, bien que cette assurance soit soumise au Code CIMA, d'autres règles interviennent pour la rendre effective. Il s'agira de voir comment le Code CIMA prend en compte l'assurance construction (Chapitre 1), avant de cerner les insuffisances de la réglementation de l'assurance construction (Chapitre 2).

CHAPITRE I. LA PRISE EN COMPTE PAR LE CODE CIMA DE
L'ASSURANCE CONSTRUCTION

L'assurance construction ne produit pas ses effets une fois conclue. Une période non négligeable sépare sa conclusion (Section 1) de sa mise en oeuvre (Section 2).

Section 1. La conclusion du contrat d'assurance construction

Le moment de la conclusion (Parag.I) permet de circonscrire l'étendue de la garantie de l'assureur fondement du paiement des primes par l'assuré. De telles garanties amènent à s'intéresser au contenu du contrat (Parag.II).

Parag. I Le moment de la conclusion

L'assurance est un contrat aléatoire même si le risque qu'elle vise à couvrir et le montant des réparations peuvent être connus d'avance, le moment de sa réalisation reste aléatoire. Ainsi, comme toute assurance la conclusion de l'assurance construction doit être effective avant l'ouverture des travaux (1), ce qui entraîne une prohibition de principe de sa souscription postérieure à la fin des travaux de construction (2).

A. La conclusion avant l'ouverture du chantier

Les assurances dites « assurance construction » ont la particularité de produire leurs effets après une longue période suivant leur conclusion. Leur conclusion, en principe avant le début des travaux de construction, juste avant le début du chantier, se justifie à un double niveau.

D'abord, la mise en oeuvre des règles de la construction conditionne la validité du contrat d'assurance qui sanctionne ainsi positivement les actes matériels accomplis durant le chantier. Ces assurances ne vont commencer à produire leurs effets qu'à la fin des travaux.

Ensuite, l'assureur peut intervenir par l'intermédiaire des experts et bureaux de contrôle, durant la période de veille du contrat , et s'enquérir des conditions de la mise en oeuvre des règles de construction qui vont largement influencer l'application du contrat d'assurance, et se prémunir par des réserves sur l'étendue de sa garantie à la livraison, moment où il pourra être tenu de paiement.

Toutefois, la conclusion d'un contrat d'assurance avant toute pose de pierre n'est pas unanimement partagée par les praticiens de l'immobilier. D'abord, les coûts financiers vont augmenter ensuite comme le note un responsable de la SICAP : « on ne peut pas assurer ce qui n'existe pas encore. C'est après qu'on ait fini de construire et connu les coûts effectifs des logements qu'on souscrit une assurance de dommage ».

B. Le principe de la prohibition de la conclusion postérieure

L'admission d'une souscription postérieure déroge au principe de l'antériorité de la souscription sur la survenance du sinistre fondement du caractère aléatoire du contrat d'assurance.

Ainsi une conclusion postérieure affecte l'objet de certains contrats et tend à limiter l'assurance construction aux seules assurances décennales.

Les contrats affectés sont principalement la garantie de parfait achèvement et la garantie dite de bon fonctionnement. Ces types de garanties sont opératoires juste après la livraison. La durée de la garantie de bon fonctionnement est de deux ans nonobstant toute convention ayant pour objet de garantir les manquements qui s'y attachent. Par conséquent, seul le délai qui restera pour compléter cette durée sera pris en compte pour la mise en oeuvre de cette assurance. En cas de sinistre, l'étendue de la réparation sera définie en tenant compte des vices ayant leur origine dans la période de garantie.

S'agissant de la garantie de parfait achèvement, son objet est de constater les manquements des constructeurs affectant la livraison, et de couvrir les charges liées à la rectification de l'ouvrage. Ces manquements font généralement l'objet de réserves, et une assurance n'ayant pas un objet curatif et devient inopérante pour couvrir une impropriété patente à la destination d'un ouvrage. L'article 40 du Code CIMA dispose que le contrat d'assurance est nul lorsqu'au moment de sa conclusion la chose ne peut plus être exposée au risque. La livraison étant le moment de la constatation de l'aléa pouvant entrainer la garantie de l'assureur, toute assurance conclue à cette époque ne peut être que nulle.

Toutefois les assurances décennales ne manquent pas d'être heureuses.

L'intérêt d'assurance pour ces constructeurs qui sont l'architecte et les entrepreneurs se justifie par leur intervention sur le site aggravant ainsi les risques dont ils peuvent être débiteurs de la réparation. Comme les garanties précitées, les délais seront raccourcis ; toujours est-il que des pans entiers de dommages seront laissés en rade dès qu'ils ne trouvent pas leur origine dans l'intervention des constructions assujettis à l'assurance responsabilité civile décennale. Conclure une assurance au moment de la rupture du lien contractuel qui unit le constructeur avec le maître de l'ouvrage amenuise l'intérêt d'assurance. Ainsi la conclusion postérieure ne doit en principe être possible que pour l'assurance dommage ouvrage décennale.

L'intérêt de la conclusion postérieure pour le dommage ouvrage décennal réside, en droit français, à la seule hypothèse de vente d'immeuble par un constructeur qui n'y avait pas satisfait au moment propice. Mention du contrat d'assurance doit être portée à l'acte de vente et inscrit au livre foncier par le notaire sous peine de sanction. A défaut de souscription d'assurance, le notaire ne sera libéré que s'il fait la preuve de la communication aux intéressés et dans l'acte même de son obligation d'information.

En dehors de cette hypothèse, aucune conclusion postérieure ne peut être fondée en droit. Le contenu du contrat d'assurance participe d'une exigence préventive.

Parag. II Le contenu du contrat d'assurance

L'article 8 du Code CIMA énumère les clauses qui doivent figurer dans la police d'assurance tout en soumettant l'opposabilité de certaines d'entre elles à des conditions spécifiques.

A. Les clauses formalistes du contrat d'assurance

Ce sont les clauses relatives notamment à l'identification des parties au contrat d'assurance, à la durée, à l'objet de la garantie et aux conditions de cette garantie.

S'agissant des parties, l'assureur doit être une compagnie d'assurance agrée dans une branche IARD définie à l'article 328 du Code CIMA. L'assurance responsabilité civile des véhicules terrestres automoteurs relève de branche N°10, ce qui n'est pas le cas de la construction qui ne relève pas de branche spécifique. La branche N°13 intitulée «  Responsabilité civile générale » regroupe toute responsabilité autre que celles mentionnées sous les numéros 10, 11 et 12, c'est-à-dire les responsabilités terrestres n'étant pas liées à la conduite d'une locomotive. La responsabilité des constructeurs relève de cette branche.

L'agrément est délivré par le Ministre chargé du secteur des assurances après avis favorable de la Commission régionale de contrôle74(*). La Commission régionale de contrôle des assurances est l'organe régulateur de la CIMA. Elle est chargée du contrôle des sociétés, elle assure la surveillance générale et concourt à l'organisation des marchés nationaux d'assurances.

L'assuré dans l'assurance constructeur doit être distingué du souscripteur. Le souscripteur est mandataire de l'assuré dans l'assurance pour compte. C'est notamment le cas de l'architecte qui souscrit pour le compte du maître de l'ouvrage une assurance de garantie de dommages de nature décennale. Dans l'assurance pour compte, seul l'assuré est tenu des obligations résultant du contrat.

La délégation se retrouve généralement dans l'assurance dommage ouvrage décennale où l'objet du contrat d'assurance est une construction alors qu'il est essentiellement fondé sur la faute du constructeur dans la responsabilité civile.

L'objet de la garantie permet par ailleurs de déterminer l'étendue de la responsabilité des parties. Par conséquent toute clause relative à cet objet doit être mentionnée clairement dans la police.

B. Les clauses probatoires

Ainsi les clauses édictant des « nullités, déchéances et exclusions » ne sont opposables à l'assuré que si elles sont mentionnées en caractères très apparents dans la police.

Des clauses spécifiques à l'assurance construction tiennent à la garantie des vices propres à la chose que sont les vices du sol et de la construction. Le COCC n'admet pas entre constructeurs des clauses d'exclusion de responsabilité dans le contrat d'entreprise alors que la livraison de l'ouvrage peut s'accompagner de réserves.

Les clauses de réserves de la police d'assurance couvrant un tel rapport juridique doivent, pour être opposables, être mentionnées en caractères très apparents. Les clauses de déchéances comme les exclusions n'annulent pas le contrat d'assurance mais le rend inefficace. Les clauses d'exclusions limitent la garantie de l'assureur au moment de la conclusion du contrat, alors que les clauses de déchéances limitent la garantie au moment de l'exécution du contrat, en cas de manquement de l'assuré à ses obligations.

Dans l'assurance construction obligatoire de droit français, la période de validité de la garantie n'est pas couplée à celle du contrat, le non paiement des primes ne peut avoir pour effet de suspendre la garantie due ou promise par l'assureur. Une jurisprudence constante réaffirme le principe que le contrat ne peut prévoir des clauses excluant la garantie de dommages survenus après la résiliation du contrat75(*).

Ainsi, aux obligations originaires liées à la formation du contrat, viennent s'ajouter d'autres obligations durant la période d'exécution.

Section 2. La mise en oeuvre du contrat d'assurance

Le contrat d'assurance est parfait une fois conclu par les parties. Toutefois, elle peut néanmoins produire tous ces effets et être perfectionné en cours d'exécution. Ainsi, entre autres clauses, la police doit prévoir les conditions de mise à jour du contrat d'assurance tenant aux obligations des parties en dehors de tout sinistre (Parag.I) et de leurs obligations en cas de sinistre (Parag.II).

Parag. I Les obligations des parties en dehors de tout sinistre

La prise en charge de la garantie par l'assureur est motivée en partie par les déclarations du risque par le souscripteur de l'assurance au moment de la conclusion du contrat. Toutefois, en cas de modification des circonstances à l'origine du contrat d'assurance, le sort du contrat relèvera pour le souscripteur en des déclarations obligatoires (1), et pour l'assureur en la prise en compte de ces déclarations (1).

A. Les déclarations obligatoires

Il s'agit de sujétions nouvelles aggravant les conditions initiales de conclusion convenues entre les parties76(*). L'information à l'assureur n'est pas assujettie à une condition de forme. Toutefois, l'absence d'une telle information est sanctionnée. C'est à l'assuré d'apporter la preuve de l'information, puisque « l'assureur ne peut plus se prévaloir de l'aggravation des risques quand, après en avoir été informé de quelque manière que ce soit, il a consenti au maintien de l'assurance ».

La preuve doit être préconstituée conformément à l'alinéa 3ème de l'article 12 du Code CIMA par lettre recommandée de l'assuré contresignée par l'assureur.

En cas de déclarations tardives, les clauses de déchéances relatives aux délais de déclaration ne sont opposables à l'assuré que si le retard porte préjudice à l'assureur77(*).

Les modifications des circonstances initiales du fait de l'assuré peuvent donner lieu à des réserves. Ces modifications pouvant être des aménagements opérés sur les ouvrages. De telles réserves ont pour effets d'instituer des franchises à la charge de l'assuré, c'est-à-dire une partie des dommages éventuels ne sera pas prise en charge par l'assureur s'ils se révèlent liés à l'objet des réserves.

Par ailleurs, l'alinéa 2 de l'article 20 écarte les déchéances ayant pour origine la violation des lois et règlements, « à moins que cette violation ne constitue un crime ou un délit intentionnel ». Ainsi, en matière de construction l'assureur pourra-t-il se prévaloir, suite à une élévation opérée sur un bâtiment, de l'absence d'octroi d'une autorisation de construire, s'il n'apporte pas la preuve de l'intention coupable pour refusée l'adaptation du contrat ou sa garantie ?

Le Code CIMA institue une faculté de dénonciation pour l'assureur dans la prise en compte des déclarations.

B. La prise en compte des déclarations : les avenants

La prise en compte des circonstances nouvelles opère un prolongement de la période de formation du contrat au moment de son exécution78(*). A risque nouveau prime nouvelle : telle est le sort des sujétions de nature à transformer les conditions originaires de la convention d'assurance. C'est par des avenants que sont constatées les modifications apportées au contrat d'assurance.

Le contenu de l'avenant obéit aux mêmes conditions de rédaction que la police d'assurance initiale. Comme tout anti virus, les mises à jour de la base virale auront pour effet de ne pas paralyser l'action de l'assurance qui pourrait être inopérante face à de nouvelles attaques ou modifications opérées sur l'ouvrage. Les avenants constituent avec le contrat initial une seule et même convention et obéissent aux mêmes conditions de forme que celui-ci quant à son contenu.

La prise en compte peut s'opérer négativement. En effet, l'article 15 du Code CIMA dispose : « En cas d'aggravation du risque en cours de contrat, telle que, si les circonstances nouvelles avaient été déclarées lors de la conclusion ou du renouvellement du contrat, l'assureur n'aurait pas contracté ou ne l'aurait fait que moyennant une prime plus élevée, l'assureur a la faculté, soit de dénoncer le contrat en remboursant la fraction de prime non courue, soit de proposer un nouveau montant de prime ». Ainsi, l'assureur peut opter pour la dénonciation du contrat.

La dénonciation doit être distinguée de la nullité qui sanctionne une violation des conditions de formation du contrat. Il n'y pas de nullité sans texte. La modification de l'objet du contrat en l'absence de manquement à une obligation contractuelle ne peut être constitutive d'une nullité. Toutefois, l'existence d'une violation d'une obligation contractuelle ne peut se résoudre à une exécution forcée à l'endroit de l'assuré, ni à un paiement de dommages et intérêts. Seule le non remboursement des primes échues est retenu ; ce non remboursement étant la contrepartie des garanties putatives qui auraient pu engager l'assureur en cas de sinistre. Seule la fausse déclaration intentionnelle de nature à modifier l'objet du risque ou en diminue de l'assureur est sanctionnée par la nullité en cours d'exécution du contrat.

La nullité a pour effet d'anéantir rétroactivement le contrat. Elle se rapproche de la lésion, cause de nullité de droit commun, qui suppose un déséquilibre dans les prestations réciproques des parties au moment de la formation du contrat.

La dénonciation pour cause de lésion en cours d'exécution du contrat, sans effet rétroactif, doit s'entendre soit de l'initiative de révision79(*) du contrat reconnue à une partie, soit d'une faculté de résiliation. D'ailleurs la substitution du terme « dénoncer » de l'article 15 par le terme « résilier » n'altère pas le texte.

La dénonciation résiliation unilatérale du contrat par l'assuré doit s'analyser en une révision de la convention d'assurance. Par ailleurs des obligations s'imposent aux parties en cas de sinistre.

Parag. II Les obligations des parties en cas de sinistre

En cas de manquement à une obligation ou de survenance d'un sinistre pouvant entrainer la mise en cause de l'assureur, il incombe à l'assuré de porter l'existence de celles-ci à la connaissance de l'assureur dans des délais établis (A), et à l'assureur s'impose en principe une offre d'indemnisation (B).

A. La déclaration du sinistre dans les délais

La déclaration du sinistre incombe à l'assuré à compter du jour où il a connaissance du sinistre. Ce délai de déclaration est de cinq jours minimum et peut être prolongé d'un commun accord des parties. La doctrine distingue entre déclaration à l'autorité administrative et déclaration à l'assureur. La déclaration à l'autorité est sanctionnée par la délivrance d'un procès verbal relatant les causes et les circonstances du sinistre. Ce document doit être porté à la connaissance de l'assureur.

Mis à part les délais, aucune condition de forme n'est instituée par la déclaration à l'assureur. La doctrine considère que la déclaration doit comporter les énonciations de la police ou de l'avenant, et une description détaillée des dommages.

Le retard de la déclaration, comme sus indiqué, ne peut être invoqué que s'il porte un préjudice à l'assureur. Ce préjudice pouvant s'apprécier par rapport aux difficultés de l'expertise du sinistre. L'avis de l'expert pourrait être requis des parties pour rechercher et ressembler les données nécessaires à l'estimation des dommages80(*). Le respect des délais permet d'éviter l'expertise après une éventuelle modification de l'état des lieux ou d'empêcher une possible extension des conséquences du sinistre81(*).

Cette déclaration est nécessaire pour déclencher la garantie de l'assureur.

B. L'offre d'indemnisation de l'assureur

Le Code CIMA institue une obligation pour l'assureur de faire une offre à l'assuré ou au bénéficiaire de l'indemnité sans préciser le contenu de l'offre. Le domaine de l'obligation de proposer une indemnité amène à voir les bénéficiaires de l'indemnité et l'étendue de la réparation du sinistre.

Dans l'assurance construction la notion de sinistré varie selon le contrat évoqué. Dans l'assurance responsabilité civile décennale, les bénéficiaires de la réparation sont le maître d'oeuvre ou les propriétaires successifs de l'ouvrage. Pour l'assurance dommage ouvrage, le bénéficiaire est soit le maître d'oeuvre assuré ou les propriétaires successifs de l'ouvrage, soit les tiers victimes du fait de la ruine de l'ouvrage.

Le préjudice réparable sera un dommage aux biens, la construction à réparer, et ou un dommage corporel, les victimes à soigner.

L'offre d'indemnisation résultant de la déclaration du sinistre doit être envisagée par rapport aux parties au contrat d'assurance ; les tiers victimes n'étant pas tenus d'une déclaration dans délais brefs ont une action contre le gardien de l'ouvrage ou de son assureur.

Quant au contenu de l'offre ou étendue de la réparation des dommages aux biens de nature immobilière, l'ouvrage, il s'agit de se demander comment sera évaluée la valeur de réparation ? Celle-ci doit-elle prendre en compte l'état de vétusté de l'immeuble sinistré, ou va-t-elle prendre en compte la flambée du coût des matériaux de construction, étant entendu que c'est le principe de la réparation intégrale qui gouverne les assurances de chose ? Que recouvre cette notion de réparation intégrale ?

La réponse à telles question occulte le contentieux de l'assurance construction, l'action en indemnité des victimes et bénéficiaires. Le tribunal compétent en matière immobilière est celui du lieu de situation de l'immeuble82(*), lieu du sinistre de constatation des vices de la construction et des dommages corporels liés à la ruine des constructions ; l'action des victimes contre l'assuré étant une action personnelle immobilière.

L'étude du contentieux de l'assurance nécessite une étude préalable des règles incidentes à l'assurance construction. Ces règles, même si elles n'ont pas vocation de parfaire le contrat d'assurance, participent d'une certaine manière à sa perfection.

CHAPITRE II. LES INSUFFISANCES DE LA REGLEMENTATION
DE L'ASSURANCE CONSTRUCTION

Les règles qui régissent l'assurance ne sont pas autonomes par rapport à celles qui régissent son objet. C'est ainsi que les insuffisances des unes tiennent à la non prise en compte des autres. Cette assertion se justifie dans la transmission du contrat d'assurance (Section1), mais aussi par rapport à l'action en réparation (Section 2).

Section 1. La transmission du contrat d'assurance

L'indemnité d'assurance construction est une créance dont serait propriétaire le maître de l'ouvrage en cas de sinistre affectant la propriété immobilière ou du à celle-ci. Ce qui fait de l'assurance construction un accessoire du droit de la propriété immobilière (Parag.I) de nature particulière, car non soumis à la règle du principal qu'est le droit de la propriété notamment dans la cession immobilière (Parag.II).

Parag. I L'assurance construction : un accessoire du droit de la propriété

Par rapport à son objet, l'assurance construction est un accessoire du droit de la propriété immobilière. Le droit de propriété immobilière est cessible. La transmission du principal transmet aussi celle des rapports d'obligations ayant un objet immobilier entre le nouveau propriétaire et les détenteurs de droit réels accessoires, notamment les droits attachés à l'immeuble, dont le bail, l'hypothèque, l'usufruit, la servitude. L'assurance est un droit de nature incorporel : c'est une promesse de garantie, une créance subordonnée à la réalisation d'un événement. Ainsi, seuls les effets de l'exercice des droits attachés au principal peuvent se déteindre sur le contrat d'assurance et en modifier des éléments.

Les modalités de transmission du contrat d'assurance sont posées par le Code CIMA en son article 40 qui dispose qu'en cas d'aliénation de la chose assurée, l'assurance continue de plein droit au profit de l'acquéreur. L'alinéa 2 de cet article subordonne cette transmission au transfert de la police au nom du nouvel assuré appelé attributaire définitif des objets assurés. La seule mention du nom du nouvel attributaire est-elle suffisante pour transmettre la police dans l'assurance construction?

A. La transmission de l'assurance de responsabilité civile décennale

Les conditions de forme de transmission sont subordonnées à la nature mobilière ou immobilière des objets assurés. En fait de meubles, possession vaut titre, sauf si la loi soumet la propriété à la détention d'un titre spécifique. En l'existence de titre spécifique, la transmission du contrat d'assurance ne sera opératoire qu'après la mutation au nom du nouveau propriétaire. Le propriétaire du véhicule est le titulaire de la carte grise, et la faute de tout autre conducteur de son véhicule ne sera appréciée que par rapport à la responsabilité du propriétaire pour l'indemnisation des dommages causés par le véhicule83(*). Dans une telle hypothèse, l'assuré ne peut être bénéficiaire de la réparation, seuls les tiers peuvent évoquer le bénéfice de la garantie, l'indemnité d'assurance.

La responsabilité civile décennale opère inversement à ce principe de l'assurance automobile même le propriétaire peut être bénéficiaire de la réparation, puisqu'il est considéré comme tiers, et évoquer les dommages résultant d'un préjudice causé par l'immeuble. C'est au tiers bénéficiaire de prouver son droit à garantie en apportant la preuve du droit de propriété sur l'immeuble et la preuve que la faute de l'assuré, le constructeur, est de nature décennale. Le tiers bénéficiaire est le propriétaire ou les propriétaires successifs de l'ouvrage.

Si c'est une obligation réelle qui le lie le propriétaire bénéficiaire aux parties au contrat d'assurance, les parties entre elles, assureur et assuré, n'ont que des rapports personnels et intransmissibles.

La nécessité d'identifier le propriétaire de l'objet assuré participe de la détermination du bénéficiaire dans l'assurance de responsabilité civile, alors que ce même propriétaire est partie au contrat d'assurance la garantie dommage ouvrage décennale.

B. La transmission de l'assurance dommage ouvrage décennale

Dans l'assurance de dommage ouvrage décennale l'assuré peut être le bénéficiaire de l'indemnité d'assurance, lorsque le sinistre porte sur l'objet assuré. Le tiers peut aussi être bénéficiaire en cas de dommage du fait de l'objet assuré nonobstant toute faute de l'assuré ; seule la qualité de propriétaire de l'ouvrage est déterminante. La Cour de cassation française réaffirme ce principe dans sa jurisprudence84(*).

En effet, un propriétaire ayant accompli des travaux sur un immeuble alors que son titre de propriété n'avait pas encore était porté au livre foncier s'est trouvé refuser le bénéfice de la garantie responsabilité civile résultant de tels travaux au motif qu'il n'était pas encore propriétaire au moment où il effectuait les travaux de réparation.

L'appel en garantie de l'assureur était motivé par la chute d'un tiers, Madame LE NOAN, qui aurait été provoquée par des gravats provenant de la démolition d'un mur de l'immeuble assuré. Selon les stipulations de la police, la garantie responsabilité civile en qualité de propriétaire couvre "les dommages causés aux tiers, lorsqu'ils entraînent la responsabilité de l'assuré et qu'ils résultent directement du fait des biens immobiliers et du contenu ainsi que des cours, jardins, plantations, et de toutes les installations intérieures ou extérieures".

En l'espèce, la cour de cassation réaffirme les conditions de mise en cause de l'assureur à l'égard des tiers dans la responsabilité civile ; conditions tenant à la qualité de propriétaire et à l'origine des dommages qui doivent résulter de l'ouvrage.

Ainsi, la Cour de cassation rejette sa demande au motif que « l'assureur n'était pas tenu contractuellement de lui accorder la garantie pour un risque réalisé à une date où sa qualité de propriétaire de l'immeuble, condition de base de la couverture du risque n'était pas acquise et où sa responsabilité civile en qualité de propriétaire ne pouvait donc être engagée ».

Les effets de la transmission sont de faire peser entre les nouvelles parties les obligations résultant du contrat. Mais l'effectivité de la transmission ne pourra être tangible que si elle tient compte des règles spécifiques aux droits de nature immobilière.

Parag. II L'absence de la mention de l'assurance dans les cessions immobilières

La mention du nom du nouvel assuré posé par l'alinéa 2 de l'article 40 du Code CIMA ne rend pas compte l'affectivité de la propriété immobilière. L'objet de l'assurance n'est pas de prouver un droit réel sur la chose. Toutefois, la non prise en compte de l'assurance par ce droit peut rendre rend caduque le contrat d'assurance en cas d'aliénation de l'immeuble assuré. Ainsi, importe-t-il de voir la transmission des droits dans la vente immobilière (A), avant de s'intéresser à la cession des droits de nature immobilière (B).

A. La transmission des droits dans la vente immobilière

En matière d'assurance de chose, l'aliénation de la chose entraine le transfert de la propriété de la chose. L'assurance construction s'applique à une chose de nature immobilière.

La transmission à titre onéreux de droit de propriété immobilière obéit à un formalisme rigoureux notamment la constatation de la vente par acte notarié et l'inscription de celle-ci au livre foncier. Le contrat de vente doit sous peine de nullité absolue, être passé par devant un notaire territorialement compétent sauf dispositions législatives et réglementaires contraires85(*).

En droit français, lorsqu'un acte a pour effet de transférer la propriété ou la jouissance d'un bien immobilier, mention de l'assurance doit être portée dans le corps de l'acte ou en annexe86(*). L'obligation de porter une telle mention incombe au notaire, qui ne sera libéré que lorsqu'il aura établi aussi dans le corpus de l'acte de vente le défaut d'assurance et l'accomplissement de son devoir d'information d'un tel défaut aux parties.

En droit sénégalais, seuls les actes, faits et opérations ayant un objet immobilier que la loi subordonne la régularité à la publicité foncière, font l'objet d'une inscription au livre foncier87(*). Ainsi peuvent faire l'objet de mention au livre foncier :
- les faits comme le mariage et le régime matrimonial applicable au titulaire de droit portant sur l'immeuble ;
- les opérations notamment les baux immobilier de plus de trois ans, la constitution de bien de famille créant une indivision sur le fond ;
- les actes portant sur les droits réels notamment l'usufruit des immeubles, les droits d'usage et d'habitation, le droit de superficie.

La mention de l'assurance n'est pas retenue dans la vente immobilière par le législateur sénégalais même si le droit à l'indemnité d'assurance, qui est une créance, fait partie du patrimoine du nouveau propriétaire de l'immeuble. Mais lorsque la propriété n'est pas effective ou la vente de l'immeuble n'est pas encore parfaite, comment se prévaloir ou qui pourrait se prévaloir de l'assurance ?

La vente est parfaite lorsque la chose est effectivement livrée et le prix intégralement payé. A ces conditions s'ajoute, en matière immobilière, l'inscription au livre foncier par devant le notaire territorialement compétent88(*). Une telle règle est difficilement applicable lorsque le transfert de la propriété immobilière est différé.

B. La cession des droits dans la location-vente immobilière

La location-vente est une opération par laquelle une société immobilière de crédit-bail donne en location un bien immobilier à usage d'habitation à un particulier qui peut devenir propriétaire de ce bien au plus tard à l'expiration du bail. La propriété n'est acquise que plusieurs années après l'occupation des lieux, après paiement de la dernière mensualité. La location-vente appelé aussi achat de logement avec accession à la propriété s'opère généralement par le paiement d'une fraction du prix, et le reste en des mensualités.

La construction d'immeuble en vue de la vente par un crédit-bailleur peut faire l'objet d'une assurance collective pour tout le site ou quartier nouveau en construction. La conclusion du contrat obéit aux règles de la concurrence notamment la procédure de l'appel d'offre ou plusieurs assureurs sont consultés et proposent leur prix. En l'absence d'assurance construction obligatoire seuls quelques promoteurs immobiliers s'aventurent à y recourir, notamment la SICAP.

L'entreprise immobilière étant partie au contrat d'une assurance construction au moment de la livraison de l'ouvrage devra céder celui-ci à un locataire tiers au contrat d'assurance au moment où ce dernier sera propriétaire, lorsque la garantie sera encore due. La mise en oeuvre de l'assurance construction sera biaisée dans la location bail pour la période de location.

Pour le dommage à l'ouvrage, l'absence de titre de propriété durant la période dite de location empêche toute action directe du locataire contre l'assureur pour les dommages de nature décennale affectant la construction. Le locataire étant tiers au contrat ne pourra se retourner que contre le crédit bailleur et pour les dommages liés à la jouissance des lieux et non à la consistance de la construction. Lorsqu'il entrera en pleine jouissance de la propriété, la prescription décennale empêchera toute action contre le bailleur et son assureur.

Le caractère consensuel et personnel du contrat d'assurance empêche l'adhésion de tiers à la convention des parties. Dans l'hypothèse ou le preneur à une location-vente acquiert la propriété avant dix ans, le rapport assureur-assuré doit en principe se déteindre sur lui, la prestation de l'assureur étant susceptible de division89(*).

L'article 233 du COCC dispose dans le même sens que : « lorsque l'obligation comporte plusieurs sujets, elle se fractionne en autant de rapports obligatoires qu'il y a de sujets dans l'obligation. Chacun de ces rapports s'exécute indépendamment des autres ». A la lecture de ce texte le contrat va produire des clones qui vont s'exécuter de manière autonome : l'éclatement du contrat initial en plusieurs sous-contrats.

Ainsi, comme le souligne la doctrine : « Si le maître de l'ouvrage est un promoteur qui vend des logements en accession à la propriété, l'assureur se trouvera face à une multitude de copropriétaires, qui lui demanderont souvent de suppléer les insuffisances de l'opération de promotion. C'est évidemment très couteux90(*) ».

Par rapport aux parties, le contrat d'assurance dommage ouvrage sera sans cause en l'absence de bénéficiaire. Le propriétaire réel de l'immeuble étant le crédit bailleur, la définition de la responsabilité des parties ne pourra être déconnectée des rapports locataire bailleur, même si aucune obligation légale n'impose la mention du contrat d'assurance dans le contrat de bail.

Les bénéficiaires de l'assurance construction disposent d'une action directe contre l'assureur.

Section 2. L'action directe des bénéficiaires contre l'assureur

Rappelons que l'assuré constructeur ou l'architecte ne sont pas les bénéficiaires dans la responsabilité décennale, pas plus que le maître de l'ouvrage qui peut céder son ouvrage. Le bénéficiaire sera envisagé comme titulaire du droit à réparation du sinistre. L'action du bénéficiaire repose sur le principe de la réparation intégrale admise dans l'assurance dommage ouvrage décennale (Parag.I), pouvant être étendue à l'assurance de responsabilité civile décennale (Parag.II).

Parag. I Le principe de la réparation intégrale dans
l'assurance dommage ouvrage décennale

L'étude des règles d'indemnisation ayant pour objet la réparation intégrale de l'ouvrage sinistré dans l'assurance construction se ramène, d'une part, à la détermination de la valeur de réparation des dommages (A), et d'autre part, aux limites de cette réparation qui tendent à exclure les troubles dits de jouissance (B).

A. La détermination de la valeur de réparation

La limitation de la réparation à la ruine de l'ouvrage exclu les troubles de jouissance.

La couverture des sinistres par l'assureur repose sur la distinction entre système de répartition et système de capitalisation. Dans la répartition, le défaut de paiement de primes annuelles suspend les effets du contrat d'assurance, et l'exception de prime pourra être évoquée par l'assureur. Pour pallier à cet inconvénient, le législateur français a introduit le système de capitalisation91(*) où l'assurance est censée se poursuivre jusqu'à l'expiration de la garantie, sans être subordonnée à un rapport permanant assureur assuré. Ainsi, l'assuré même s'il pourra se libérer en payant ces primes intégralement, c'est la masse des primes annuelles qui vont concourir à la couverture des sinistres de l'exercice. Mais ces deux systèmes sont des modalités de gestion interne propre aux assureurs.

La détermination de la valeur de réparation repose sur le système indemnitaire. Toutefois le Code CIMA admet un plafonnement conventionnel de la garantie.

Le plafonnement signifie que l'indemnité d'assurance est due, par l'assureur pour la réparation des dommages, jusqu'à une certaine somme déterminée dans la police ou l'avenant. Le principe indemnitaire signifie que l'indemnité due par l'assureur à l'assuré ne peut pas dépasser le montant de la valeur de la chose assurée au moment du sinistre92(*). Ainsi la chose doit être remise en l'état ou elle se trouvait avant la survenance du sinistre.

L'admission du plafonnement de la garantie s'oppose à la prise en compte de la vétusté de l'ouvrage au moment du sinistre et le coût des matériaux en évolution. La vétusté est l'état avancé de dégradation de l'ouvrage du fait du temps ou de l'usage.

Mais si on considère les règles de gestion du patrimoine immobilier des assureurs, on serait amené à s'y référer. Ainsi, l'offre d'indemnisation de l'assureur faite à l'assuré en cas de sinistre doit couvrir les travaux de construction et d'amélioration à l'exclusion des travaux d'entretien proprement dits93(*).

B. L'exclusion des troubles de jouissance

La ruine des bâtiments cause des dommageables qui sont d'abord le bâtiment même qui est en ruine, ensuite aux tiers dont le patrimoine mobilier ou immobilier peut être affecté, ou son intégrité physique. Donc des dommages aux personnes et aux biens. Les victimes sont l'assuré maître de l'ouvrage et les tiers sont généralement le preneur dans le bail à usage d'habitation ou une victime d'accident corporel du fait de la ruine.

Pour l'assuré victime, la réparation consiste en la remise en état de l'ouvrage. Le Code CIMA limite l'indemnisation et dispose que celle-ci ne peut dépasser la valeur de la chose au moment du sinistre. La chose signifie l'objet de l'assurance défini dans la police et non les biens du patrimoine du tiers sinistré.

En effet, l'article L 243-1 du Code français des assurances précise l'objet de la garantie dommage ouvrage décennale qui est une : « assurance garantissant, en dehors de toute recherche des responsabilités, le paiement de la totalité des travaux de réparation des dommages de la nature de ceux dont sont responsables les constructeurs au sens de l'article 1792-1, les fabricants et importateurs ou le contrôleur technique sur le fondement de l'article 1792 du code civil »

Mais s'agissant du preneur à bail ou de la victime de préjudice corporel, la réparation intégrale ne sera fondée que sur le respect des principes généraux de la responsabilité civile qui impose aussi que le préjudice soit intégralement réparé. Une telle réparation nécessite, même si elle coûte parfois plus cher à l'assureur que la réparation de la construction94(*), le recours à la responsabilité civile du fait des choses.

L'autre fondement de l'exclusion des troubles dite de jouissance tient aussi au fait des polices d'assurances particulières, notamment l'assurance habitation, les prennent en charge. Donc ce n'est que sur le terrain de la responsabilité civile que les troubles de jouissance peuvent être réparés.

Parag. II L'admission de l'action directe dans la responsabilité civile décennale

L'objet du contrat n'est pas le même dans l'assurance de responsabilité civile décennale que dans l'assurance de dommage à l'ouvrage. A la présomption de faute personnelle des constructeurs retenue pour la mise en oeuvre de la responsabilité civile décennale, s'oppose la garantie automatique de la réparation, en l'absence de toute recherche de faute, pour le dommage ouvrage. Cette garantie est fondée sur l'action directe du maître de l'ouvrage (A).

Mais cette garantie n'empêche pas l'assureur de rechercher ensuite la preuve de la responsabilité des constructeurs. Ainsi, ne serait-il pas nécessaire d'ouvrir aux tiers une action directe pour l'indemnisation(B) ?

A. L'action directe du maître de l'ouvrage

Lorsque le propriétaire a souscrit une assurance de dommage ouvrage le préfinancement des travaux est acquis. L'assureur qui le dédommage d'abord sur le fondement de sa propre police d'assurance dommage ouvrage décennale. C'est la responsabilité automatique qui rend l'indemnisation automatique95(*).

Ensuite l'assureur est subrogé des droits du maître de l'ouvrage ou propriétaire de mettre en cause la responsabilité des constructeurs.

Les conditions de la subrogation de l'assureur sont posées par le Code CIMA en son article 42. La subrogation est conditionnée par le paiement de l'indemnité, et à l'existence d'une action contre l'auteur présumé du fait dommageable. En dehors de cette subrogation, l'assureur ne possède aucun droit propre, distinct de celui de l'assuré à agir contre l'auteur du dommage.96(*)»

La subrogation va permettre à l'assureur de poursuivre les responsables sur le terrain du droit commun de la responsabilité. Le délai de prescription de droit commun de la responsabilité des constructeurs est de dix ans pour les vices cachés97(*).

La responsabilité de droit commun des constructeurs, entrepreneurs et architectes, est une responsabilité solidaire. La doctrine et la jurisprudence considère que l'existence de cette solidarité n'exclut pas la recherche d'un auteur. Ainsi, « dès que l'obligation de conseil due au maître de l'ouvrage ou à un autre constructeur est remplie, la Cour de Cassation considère que le maître de l'ouvrage prend et assume les risques qui lui ont été mentionnés. Aucune responsabilité décennale ne peut être soulevée98(*) ».

Les limites de cette responsabilité solidaire font que l'action de l'assureur se rapproche de celle du maître de l'ouvrage, lorsque celui-ci n'a pas souscrit une assurance de dommage ouvrage, mais aussi de celle des tiers victimes.

B. L'action directe des tiers victimes du sinistre

La notion de tiers renvoie à ceux qui n'ont aucune obligation qu'ils tiennent de l'assurance dommage ouvrage ou de l'assurance responsabilité civile décennale. Ainsi ils ne sont pas tenus de déclarer le sinistre à l'assureur, ni dans de brefs délais. Toutefois les délais de prescription leur sont opposables.

Les prescriptions de droit commun s'opposent à la prescription des actions nées d'un contrat d'assurance. L'article 28 du Code CIMA ne considère la mise en oeuvre des délais de prescription que lorsque l'assureur est actionné. La prescription des actions nées du contrat d'assurance ne lie que l'assureur et l'assureur. Elle est de deux ans pour les parties au contrat, et de cinq ans pour les victimes, encore faudrait-il que ces victimes soient des ayants cause de l'assuré décédé.

Ainsi, la prescription de l'action des victimes dans la responsabilité de droit commun va relever du COCC. L'appel en garantie de l'assureur aura pour effet de raccourcir ce délai, de faire relever cette responsabilité à la prescription de cinq ans, et enfin de retarder la date d'origine de son décompte.

Les tiers peuvent engager la responsabilité du maître de l'ouvrage pour les faits des constructeurs ; ces derniers n'étant pas connus des victimes au moment du sinistre. L'action des tiers est subordonnée à la saisine du tribunal compétent, à l'établissement d'une faute à l'origine du dommage, et l'imputation de celle-ci à un constructeur.

Rappelons que l'Etat, maître d'ouvrage, est son propre assureur. Les dommages aux tiers du fait des ouvrages publics vont relevés de la responsabilité administrative. Les entreprises promoteurs immobiliers de droit public vont voir leur contentieux soumis au droit administratif pour l'établissement de leur responsabilité. Le droit public sera applicable, avec son corollaire la responsabilité de principe de l'Etat. Par l'action récursoire, l'Etat pourra se retourner contre les constructeurs défaillants, une fois les victimes indemnisées.

La saisine préalable du juge judiciaire comme condition de la mise en cause de l'assureur ne milite pas en faveur des victimes dès lors que l'indemnisation pourra être retardée par les lenteurs de la justice. C'est ainsi que le Code CIMA a institué une action directe dont l'intérêt est d'installer l'assureur dans la procédure dès le début ou de s'adresser directement à l'assureur. Ainsi ce dernier pourra faire des offres d'indemnité à la victime au même titre que l'assuré tenu à la déclaration du sinistre.

Les conditions de l'action directe sont :
- la mise en cause préalable de l'assuré, puis de son assureur ;
- l'existence d'une créance de réparation fondée sur la présomption de responsabilité de l'assuré ;
- et enfin l'acceptation de l'assureur.

Cette dernière condition vise à favoriser le règlement amiable des différents par la transaction. En effet, l'assureur peut stipuler qu'aucune reconnaissance de responsabilité, aucune transaction, intervenue en dehors de lui, ne lui sont opposables. L'aveu de la matérialité des faits ne peut être assimilé à la reconnaissance d'une responsabilité99(*).

Ces conditions de l'action directe des victimes posées par le Code CIMA sont simplifiées par la jurisprudence actuelle de la Cour de cassation française qui ne fait plus de la mise en cause de l'assuré une condition préalable à l'action directe contre l'assureur100(*). Ainsi les victimes pourront s'adresser directement à l'assureur, encore faudrait-il qu'elles aient connaissance de l'existence de la police d'assurance.

* 6 DIA A. La gestion foncière des aménagements urbains, acte du Séminaire p. 37

* 7 Loi N°94-64 du 22 août 1994 autorisant la vente des terrains à usage industriel ou commercial. JO 27 août 1994. Cette loi comporte deux articles.

* 8 Art. 381 COCC.

* 910 MARTIN D., Droit civil et commercial sénégalais, NEA 1982, p53

* 11 MARTIN D. idem, p 60

* 12 Loi N°88-05 du 20 juin 1988 portant Code de l'Urbanisme.

* 13 Autorisation de construire en droit français :
http://www.coin-urbanisme.org/autorisations/permis/introduction/non-sanctio.html

* 14 Articles 2 et 3 Décret N° 2001 - 282 du 12 avril 2001 portant application du Code de l'Environnement : Loi 2001-01 du 15 janvier 2001

* 15 BA A. Note sur l'évolution de la construction et le potentiel d'assurance construction au Sénégal : CF: Annexe 1 

* 16BENOIST J.R. considère que le projet de construction de la route Cap Manuel Liberté qui n'a été réalisé que partiellement avait nécessité le déplacement des habitants de Cerf-volant, plus de 30 000 personnes, pour les reloger à Pikine-Dagoudane sans équipements de viabilité urbaine : Dakar venait de créer sa banlieue.

* 17 TRIBILLON J-F Bilan et tendances du droit de l'urbanisme, in EJA Droit des Biens, Tome V p. 237

* 18 Les populations se regroupent en GIE qui contrôle l'application des conditions avec le concours de main d'oeuvre locale : cas de Dalifort, acte du séminaire, p 232.

* 19 Afrique express N°288 du 17/02/2004

SENEGAL : On rase gratis autour de l'aéroport de Dakar

Les autorités procèdent depuis le 15/02 à la démolition d'habitations qui, selon les services de sécurité aérienne, avaient été construites dans le périmètre de sécurité de l'aéroport de Dakar. Problème : des habitants concernés affirment qu'ils avaient obtenu les permis de construire et suivi toutes les procédures pour construire leurs maisons, dont ils ont été sommés de partir par un courrier du bureau du gouverneur de Dakar.
Selon l'Agence de presse sénégalaise (APS), il était écrit dans la lettre de sommation, signée du gouverneur adjoint: «dans le cadre de son programme de sécurisation de la zone aéroportuaire, l'Asecna (Agence pour la sécurité de la navigation aérienne en Afrique et à Madagascar) vous prie de libérer les lieux dès réception de la présente sommation».
L'Asecna regroupe 17 pays, dont le Sénégal où elle a son siège.
Le bureau sénégalais de l'Asecna a confirmé avoir informé l'agence nationale de l'aviation civile des dangers que représentaient ces habitations, construites trop près de l'aéroport. L'aviation civile a ensuite saisi le ministère de tutelle, qui a lui-même demandé au gouverneur de se charger de la destruction.

* 20 La piste d'atterrissage de l'aéroport est actuellement entourée de la cité Avion de Ouakam, le quartier Ouest foire, la cité Mame Rane, la SICAP Sacré Coeur Extension, et le projet en cours de Cité Mourdata sur la VDN.

* 21 Art.2 alinéa 2 de la LOI 76-66 portant Code du domaine de l'Etat.

* 22 Art. 6 du Code du domaine de l'Etat.

* 23 DIEYE Ch.A. Touba signes et symboles p.91

* 24 Art.1er Loi N°78-43 du 06 juillet 1998, portant loi d'orientation de l'Architecture sénégalaise

* 25 Les arcanes de la ville cohérente : http://www.ceu-ectp.org/f/athens/index.html

* 26 Cass. Civ et Com 5 janvier 1994 RASD N°5-8 pp 373-389 Note : Alassane Kanté ; dans le même sens : http://droit.francophonie.org/df-web/publication.do?publicationId=1736

* 27 Art.380 et s. du COCC

* 28 C.Cass 19 juillet 1995 ; SARR Issa c. DIA Amadou Ben Cheikh in : http://droit.francophonie.org/df-web/publication.do?publicationId=1736

* 29 L'Arrêté interministériel n° 3222 M.INT-PC du 30 mars 1976 portant règlement de sécurité pour la construction des immeubles de grande hauteur et leur protection contre les risques d'incendie et de panique

* 30 Les délestages fréquents font que cette exigence est maintenant admise.

* 31 Art.69 alinéa 2 in fine du Code de l'Urbanisme.

* 32 PROUZET M. Les droits connexes en matière d'urbanisme et de construction in EJA Droit des Biens Tome V p 332

* 33 Société Sénégalo Italienne de fabrication de pavé de matériels de construction : voir annexe 2

* 34 Art.1792-2 Code civil

* 35 Art.436 alinéa 2 du COCC

* 36 SAIEDB : Société Africaine Immobilière El hadj Doudou Bass

* 37 KIRSCH M. Droit du travail africain, Tome 1, p 53-56

* 38 Convention collective fédérale des entreprises du BTP du 6 Juillet 1956, Editions CCIAD Dakar

* 39 Ecole Supérieure Polytechnique (avec ses centres à Thiès et Dakar à l'Université Cheikh Anta Diop), le CFPT Sénégal Japon, le G15 sis Colobane, le Groupe IPG à Sacré Coeur et une école privée au Point E nouvellement installée se partagent le marché.

* 40 Centre Nationale de Qualification Professionnelle et le Centre de Formation de l'Association Sénégalaise d'Aide à la Formation et à l'Insertion des Nécessiteux

* 41 En Wolof : celui qui doit se laver après le travail

* 42 BA Amadou: «  Note sur l'évolution de la construction et le potentiel d'assurance construction au Sénégal » Cf. : Annexe 1

* 43 La classification des intervenants aux marchés publics de travaux ou au marché privé d'exécution d'un contrat d'entreprise relève aux termes du Code des marchés publics et de la Commission de Qualification et de Classification des Entreprises, Entrepreneurs de Bâtiments et de Travaux publics. Les cahiers de procédures techniques des organismes représentant de la personne contractante notamment AGETIP, ADM, contiennent aussi des normes de classement. La Directive UEMOA ci-après va dans le même sens.

* 44 L'Etat constructeur ou les bailleurs de fonds sont toujours représentés par des organismes autonomes de droit public qui agissent comme maître d'ouvrage délégué en leur nom, notamment l'Agetip, l'ADM, l'Anoci.

* 45 Directive N°04/2005/CM/UEMOA portant procédures de passation, d'exécution et de règlement des marchés publics et des délégations de service public dans l'UEMOA

Article 23 : Des justifications des capacités financières

La justification de la capacité économique et financière du candidat est constituée par une ou plusieurs des références suivantes :

a) des déclarations appropriées de banques ou organismes financiers habilités, ou, le cas échéant, la preuve d'une assurance des risques professionnels...

d) ... Si, pour une raison justifiée, le soumissionnaire n'est pas en mesure de produire les références demandées par l'autorité contractante, il est autorisé à prouver sa capacité économique et financière par tout autre document considéré comme approprié par l'autorité contractante.

Dans la définition des capacités financières requises, les Etats membres s'engagent à ce que les autorités contractantes ne prennent aucune disposition discriminatoire, notamment celle visant à faire obstacle à l'accès des petites et moyennes entreprises à la commande publique.

* 46 L'alinéa 3de l'article 1er Code des devoirs professionnels des experts recommande la souscription et n'en fait pas une obligation : NDOYE D. Les experts, les syndics et administrateurs judiciaires au Sénégal, EDJA Dakar, juin 1991, p77

* 47 Art.1er alinéa 3 Code des devoirs professionnels des experts; NDOYE D. Les experts, les syndics et administrateurs judiciaires au Sénégal, EDJA Dakar, juin 1991, p77

* 48 Art.7 du Décret 72-709 du 16 juin 1972 réglementant l'exercice de la profession de commis d'architecte agréé.

* 49 Art.13 de la loi N°78-44 relative à l'exercice de la profession d'architecte et à l'ordre des architectes.

* 50 Le Décret N°83-209 du 10 mars 1983 portant exercice de la profession d'architecte et code des devoirs professionnels des architectes, Décret d'application de la loi N°78-44.

* 51 Art. 21 Alinéa 2 du Code CIMA

* 52 Clauses dites de Claims Made : http://www.jurisques.com/perio.htm

* 53 Art.241-1 Code des assurances Français

* 54 Par 7 arrêts de principe en date du 19 Décembre 1990, la Première Chambre Civile de la Cour de Cassation a décidé : « Le versement de primes pour la période qui se situe entre la prise d'effet du contrat et son expiration a pour contrepartie nécessaire la garantie des dommages qui trouvent leur origine dans un fait qui s'est produit pendant cette période; la stipulation de la police selon laquelle le dommage n'est garanti que si la réclamation de la victime, en tout état de cause nécessaire à la mise en oeuvre de l'assurance de responsabilité, a été formulée au cours de la période de validité du contrat abouti à priver l'assuré du bénéfice de l'assurance en raison d'un fait qui ne lui est pas imputable et à créer un avantage illicite, comme dépourvu de cause, au profit du seul assureur, qui aurait alors perçu les primes sans contrepartie ».
Depuis lors, la jurisprudence fait une application constante et extrêmement ferme de ce principe :
Régime juridique des clauses de Claims Made  http://www.jurisques.com/cass6.htm#regime

* 55 C.Cass 1ère Civ., 28 avril 1993; AUBY « Droit de l'urbanisme et de la construction » Montchrestien 6ème édition Novembre 2001 p. 824

* 56 Le paragraphe 3.1.5.5. Assurances de la loi 78-44 du 6 juillet 1978 portant sur les contrats de travaux privés barème 1978 - 1979.

* 57 Art. 10 Code CIMA

* 58 Art. 447 à 451 COCC

* 59 Art.452 du COCC

* 60 Art. 334 du COCC

* 61 Art. 11 de Arrête interministériel N° 000093 du 14 janvier 2004 relatif à la qualification et à la classification des entreprises, entrepreneurs, et artisans du bâtiment et de travaux publics

* 62 Art. 4 alinéa 3 in fine Code CIMA

* 63 Sur l'assurance professionnelle : voir supra pages ....et suivantes.

* 64 Le paragraphe 3.1.5.5. Assurances de la loi 78-44 du 6 juillet 1978 portant sur les contrats de travaux privés barème 1978 - 197.

* 65 ISSA-SAYEGH, Droit des assurances, p.357 N°998

* 66 Art.131 alinéa 3 Code des marchés publics

* 67 Art.8 dernier alinéa du Code CIMA

* 68 Art.146 Décret n° 2007-545 du 25 Avril 2007 portant code des Marchés Publics

* 69 Art. 15 Code CIMA

* 70 Le Pr Sayegh considère que les vices propres à la chose assurée ne constituent pas des risques. Sayegh J.I. : « CIMA : droit des assurances », p.281 N°811.

* 71 L'article L. 242-1 du Code de la construction et de l'habitation assujetti à cette assurance toute personne agissant en qualité de propriétaire de l'ouvrage, de vendeur ou de mandataire du propriétaire de l'ouvrage, fait réaliser des travaux de bâtiment doit souscrire, avant l'ouverture du chantier, pour son compte ou celui des propriétaires successifs.

* 72 un Fonds Roulant pour l'Habitat Social a été mis en place au niveau du Ministère chargé de l'urbanisme et de l'habitat dans les années 1990 pour aider les coopératives d'Habitat à constituer leur apport initial et accéder ainsi au crédit bancaire.

* 73 Art. 7 alinéa 4 Constitution de 2001

* 74 Art. 20 du Traité instituant la CIMA

* 75 CA Paris, 3 mai 2002, Jurisdata N°114066 ; AUBY op. cit. p 824

* 76 Art. 97 du COCC.

* 77 Art. 20 alinéa 1 du Code CIMA.

* 78 KALIEU ELONGO Y. « la distinction de la formation et de l'exécution des contrats »
in Afrilex N°5 pp 111-148 ; http://www.afrilex.u-bordeaux4.fr/pdf/05dosskalieu.pdf

* 79 Art. 97 du COCC.

* 80 Auby, op. cit. p.829

* 81 Sayegh, op. cit. p.327 N°644

* 82 Art. 30 alinéa 1 in fine du Code CIMA.

* 83 Art. 227 du Code CIMA

* 84 Cass. Com. 16 octobre 2001. M Richard Queguiner c/ Cie Axa assurances et autres : Arrêt n° 1754 : http://www.lexinter.net/JPTXT2/assurance_rc_du_proprietaire.htm

* 85 Art. 383 du COCC modifié par la Loi N°85-37 du 23 juillet 1985.

* 86 Art. L243-2 du Code des assurances français

* 87 MARTIN D. op. cit. p.45 N°163

* 88 Art. 383 du COCC modifié par la Loi N°85-37 du 23 juillet 1985.

* 89 Art. 239 du COCC

* 90 EDOU Emanuel Actes du Colloque SMABTP du 14 octobre 2003 p.44

* 91 Depuis la Loi du 27 décembre 1982 ; AUBY J.B. op. cit. p.825

* 92 Art. 31 Alinéa 1 in fine du Code CIMA.

* 93 Art.335-12 du Code CIMA

* 94 PERINET-MARQUET H. « la jurisprudence Spinetta : un système en évolution » Colloque du SMABTP p.7.

* 95 J.I.Sayegh considère que l'indemnisation automatique exclut la subrogation puisqu'elle ne suppose pas que l'on impute la survenance du dommage à une personne, voir Sayegh J.I. « CIMA : droit des assurance » p.388,N°1090

* 96 CA Paris, 1ère Ch. 19 octobre 1959.Selon la Cour : « l'action intentée par un assureur contre l'auteur du sinistre, n'est pas celle d'un cessionnaire, mais celle qu'il tient de la subrogation, que celle-ci soit conventionnelle ou qu'elle se réalise de plein droit, l'assuré étant censé, en vertu d'un usage constant en la matière subroger l'assureur au moment où il reçoit l'indemnisation ; qu'en dehors de cette subrogation, l'assureur ne possède aucun droit propre, distinct de celui de l'assuré à agir contre l'auteur du dommage » Navire LCT, DMF 1959, p 85, note P Bouloy. RCDIP 1960, 208, note C Gavalda.  

* 97 Art.451 alinéa 2 du COCC

* 98 Marquet H.P. Actes du Colloque p. 9

* 99 Art. 53 du Code CIMA

* 100 Cass. 1ère civ. 29 février 2000, Bull civ, I, n°64 : http://www.laportedudroit.com/htm/juriflash/droit_construction/breves.htm

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