§ 2.2.2. Analyse des
résultats.
Le tableau (1) présente les résultats des
estimations des scores d'efficience pour les dépenses militaires pour
les pays de l'échantillon, d'abord sur la période 1988-2004
classé du pays le moins efficient au plus efficient (colonne A), ensuite
sur la période 1988-1995 (colonne B) et enfin de 1996 à 2004
(colonne C). La division de nos résultats selon ces différentes
périodes s'explique par le fait que la plupart des pays africains ont
traversé une période de crise qui a débuté à
la deuxième moitié des années 1980, et ont connu
dès la fin des années 1990 une période de reprise
économique. Ceci dans le but de capter les effets par rapport aux
différentes périodes.
Les résultats montrent que les scores d'efficience du
secteur militaire sont faibles en moyenne dans la production des services
militaires sur l'ensemble de la période 1988-2004. On note aussi que
l'efficience moyenne des pays étudiés n'a pas beaucoup
évoluée entre les périodes de crise et de reprise
économique, elle est passée de 26,2% entre 1988 et 1995 à
23,7% entre 1996 et 2004. Toutefois, on observe des fortes disparités
entre les scores des différents pays. Afin de mieux observer ces
écarts, nous pouvons regrouper les pays par classe autour du
degré d'efficience, que nous fixerons à des seuils respectifs de
25%, 50%, 75% et 100%. On obtient le tableau suivant :
Tableau 2 : Classification des pays selon le
niveau d'efficience
Classe
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Période 1988-2004
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Période 1988-1995
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Période 1996-2004
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Pays à efficience médiocre
(0 ; 0,25)
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Bénin, Botswana, Burkina-Faso Burundi, Cameroun, RCA,
Tchad, Congo, Côte d'ivoire, Ethiopie, Kenya, Lesotho, Mali, Mauritanie,
Namibie, Niger, Rwanda, Sénégal, Swaziland, Togo
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Bénin, Botswana, Burkina-Faso Burundi, Cameroun, RCA,
Tchad, Congo, Côte d'ivoire, Ethiopie, Kenya, Lesotho, Mali, Mauritanie,
Mozambique, Namibie, Niger, Rwanda, Sénégal, Swaziland, Togo
|
Bénin, Botswana, Burkina-Faso Burundi, Cameroun, RCA,
Cap-vert, Tchad, Congo, Côte d'ivoire, Ethiopie, Kenya, Lesotho,
Madagascar, Mali, Mauritanie, Namibie, Niger, Rwanda, Sénégal,
Swaziland, Tanzanie, Togo, Ouganda
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Pays à efficience faible
(0,25 ; 0,50)
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Cap-vert, Madagascar, Mozambique, Tanzanie, Ouganda
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Cap-vert, Madagascar, Malawi, Tanzanie
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Mozambique, Nigeria, Zambie
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Pays à efficience moyenne
(0,50 ; 0,75)
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Nigeria, Malawi, Zambie
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Ouganda, Zambie
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_
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Pays à efficience élevée
(0,75 ; 1)
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Ghana, Maurice (Iles)
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Ghana, Maurice (Iles), Nigeria
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Ghana, Malawi, Maurice (Iles)
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La première remarque à l'analyse du tableau 2
est que la plupart des pays africains sont très faiblement efficients,
car se trouvant au dessous même de l'efficience moyenne qui,
elle-même, est très faible. Ceci se vérifie d'ailleurs pour
chacune des périodes considérées. On remarque, par
ailleurs, que les pays les plus efficients, le Ghana et l'Ile Maurice, sont
ceux qui dépensent le moins dans le secteur militaire (en moyenne 0.661%
du PIB sont consacrés à la défense) ; ces pays
allouent leurs ressources de manière très efficace, de ce fait
leur score est égal à l'unité et ils se trouvent sur la
frontière d'efficience. L'Ethiopie, la Mauritanie et le Mali figurent
parmi les pays qui ont les scores d'efficience les plus faibles. Ceci peut
être expliqué pour l'Ethiopie par les dépenses militaires
élevées, 5,05% du PIB, par rapport à sa capacité
d'absorption. Par contre, le Burkina-Faso, le Kenya et le Sénégal
ont des scores plus faibles que la moyenne alors que leurs dépenses
militaires sont relativement faibles.
Il est par ailleurs intéressant de s'attarder sur les
évolutions particulières de certains pays au cours de la
période 1988-1994 d'un côté, et 1996-2004 de l'autre
côté. En effet, si on observe une certaine stabilité dans
l'évolution de l'efficience sur les deux périodes pour certains
pays, à l'instar du Ghana, du Botswana, du Burundi, ou encore du
Swaziland ; certains cas méritent d'être soulignés.
Par exemple, le Nigeria a un score d'efficience de ses dépenses
militaires de 74,2% sur la période 1988-2004. Mais lorsque l'on scinde
les périodes, on se rend compte que le pays a été
parfaitement efficient de 1988 à 1995, avec un score 100%, et est
retombé à un score faible de 44%. De la même
manière, l'efficience de l'Ouganda s'est détérioré
au cours des deux périodes, passant de 50% à 8%. Par contre le
Malawi a sensiblement amélioré l'efficience de ses
dépenses militaires, passant de 44,4% entre 1988 à et 1995
à 97,2% entre 1996 et 2004.
La mesure de l'efficience du secteur public n'est pas une
tache triviale, principalement lorsqu'il s'agit d'effectuer des comparaisons
internationales. Toutefois, il ressort des résultats que nous avons
obtenu grâce à la méthode d'Enveloppement des
Données (DEA) que les pays qui dépensent le moins dans la
défense ne sont pas forcément les plus efficients. Ces
résultats confirment ceux de Gupta et al. (1997) et Romdhane (2006) qui
ont trouvé que les pays africains sont très peu efficients en
termes de dépenses publiques. On en déduit alors, à leur
suite, qu'il existe certainement d'autres facteurs, notamment ceux liés
à la gouvernance, qui affectent l'efficience des dépenses
publiques. Il s'agit dès lors de déterminer quels sont ces
facteurs et comment sont-ils susceptibles de maintenir la qualité des
dépenses militaires, pour les pays les plus efficients, ou alors
d'accroître la qualité de ces dépenses dans les pays les
moins efficients.
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