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Le Réseau Formation Fleuve au Sénégal : pour une régulation participative de l'offre de formation agricole et rurale

( Télécharger le fichier original )
par Xavier MALON
Université Toulouse 1 Sciences sociales - Diplôme d'Université - Ingénierie de formation et des systèmes d'emploi 2007
  

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I.2.2- L'ÉVOLUTION DES POLITIQUES AGRICOLE VS LA RÉALITÉ DU DÉVELOPPEMENT RURAL7(*)

Nous passerons très rapidement sur les premières décennies qui conduiront au début de l'effondrement marqué par l'ajustement structurel, imposé par les institutions financières internationales de Brettons Wood à des Etats au bord du dépôt de bilan.

A l'avènement de la République et de l'autonomie interne, en 1958, le Sénégal se tourne brièvement vers des options socialistes (c'est la période des coopératives et de l'animation rurale), mais dès 1964, le virage vers des politiques productivistes est pris. Nous le résumerons à travers l'importance accordée aux transferts de technologies, à l'encadrement des producteurs agricoles et l'administration des populations rurales.

Il s'agit plus d'un modèle d'économie administrée que d'une véritable libéralisation de l'économie. C'est la période de gloire des Offices nationaux et des Sociétés Régionales de Développement Agricole (contrôlés par l'Etat), mais aussi des écoles de formation agricole qui tournent à plein régime pour fournir les bataillons nécessaires à l'encadrement des producteurs, sans se soucier de leur devenir, puisque leur intégration au sein de la Fonction Publique est automatique.

Tout ce dispositif finira par coûter trop cher aux finances publiques et, les comptes de la nation se dégradant, conduira en 1979 aux portes de l'ajustement structurel qui, de l'avis de nombreux observateurs, n'est toujours pas terminé aujourd'hui.

Pour le secteur agricole, cet ajustement conduira à l'élaboration du Programme d'Ajustement Structurel du Secteur Agricole (PASA), qui consista essentiellement à supprimer les Offices et sociétés de développement étatiques, sans vraiment proposer d'alternatives : du jour au lendemain, les paysans se retrouvent sans interlocuteurs ni techniciens, et éprouvent les plus grandes difficultés à s'approvisionner en intrants.

Le Programme d'Investissement pour le Secteur Agricole en sera la suite logique mais tardive ; le mal est fait, mais surtout sa traduction opérationnelle sur le terrain mettra des années à se mettre en place (les premiers programmes et ou projets viennent seulement de s'achever en 2005).

L'évaluation du Programme National de Vulgarisation Agricole (1990 - 1995) n'est guère réjouissante : elle pointe du doigt i)une approche thématique ne tenant pas compte des préoccupations des producteurs dans le cadre de leurs systèmes de production, ii) un faible taux de couverture malgré un dispositif lourd et iii) la faible implication des Organisations de Producteurs dans la définition des programmes.

En 1995, la Lettre de Politique de Développement Agricole se veut un cadre pour asseoir de nouvelles orientations en vue de corriger les dysfonctionnements constatés dans les précédentes politiques, de saisir les opportunités offertes par le changement de parité du FCFA (dévaluation de 100% en 1993) et d'impulser une dynamique de croissance dans le secteur agricole.

Elle redéfinit les missions de services publics du Ministère de l'Agriculture en distinguant celles qui sont régulièrement dévolues à l'Etat, telles que la définition des politiques et stratégies agricoles au niveau national et leur traduction au niveau régional, la recherche agricole, la vulgarisation et la formation de base, la police et le contrôle pour l'application des lois et règlements ou encore la collecte et la diffusion de l'information (statistiques) et enfin les actions préventives et curatives face aux risques majeurs et aux calamités naturelles.

Toutes les autres missions sont transférées aux acteurs non étatiques du monde rural, telles que l'animation et la structuration du monde rural, l'assistance technique et la diffusion des technologies et la participation des plus démunis ( jeunes, femmes et petits producteurs )

Le Document d'orientations stratégiques (DOS)

Lors de la réunion du Groupe consultatif des bailleurs de fonds sur le Sénégal d'avril 1998, le Gouvernement a présenté le Document d'orientations stratégiques pour le secteur (DOS) et s'est engagé à établir les conditions de réalisation d'une croissance soutenue du secteur agricole sur la base d'un renforcement de la capacité du secteur à améliorer sa productivité et sa compétitivité. Ce document a pour objectif essentiel de relancer le secteur agricole après l'ajustement intervenu au niveau des différentes filières.

Les composantes majeures du DOS sont :

i) le renforcement des capacités des collectivités locales et des organisations paysannes;

ii) le développement de l'investissement privé;

iii) la mise en place de services agricoles (recherche, vulgarisation, formation, structures techniques d'encadrement) adaptés au contexte de régionalisation et de partenariat avec les organismes socioprofessionnels;

iv) la mise en place des infrastructures en milieu rural.

La Lettre de Politique de Développement Institutionnel du secteur agricole ( 1999)

Elle vient confirmer les orientations fixées par la LPDA, en affirmant que la politique de l'Etat privilégiera trois axes :

  • n renforcer la capacité des organisations paysannes pour qu'elles soient en mesure de jouer un rôle effectif dans la concertation avec les autres acteurs du monde rural en vue de la prise en charge des activités de développement.
  • n promouvoir un secteur privé agricole renforcé,
  • n renforcer les capacités des services étatiques recentrés sur leurs missions de services publics, et améliorer leur efficacité en les rendant comptables de résultats devant les utilisateurs. »

Elle reconnaît que les Organisations de Producteurs sont devenues des interlocuteurs crédibles et que le processus de décentralisation habilite progressivement les collectivités locales dans la prise en charge de la gestion de leurs ressources et leur développement économique et social.

Il n'est pas exagéré d'affirmer que cette LPDI constitue l'annexe principale de l'accord de crédit signé avec la Banque Mondiale pour le financement du Programme des Services Agricoles et d'Appui aux Organisations de Producteurs (PSAOP, dont la seconde phase devrait démarrer dans les prochaines semaines).

Elle constitue aujourd'hui le « socle politique » sur lequel s'appuient tous les acteurs en ce sens qu'elle reconnaît le rôle dominant de l'agriculture paysanne multi fonctionnelle à travers des exploitations familiales polyvalentes. Elle aborde et officialise également, et c'est une première, la modernisation irréversible des systèmes de production, et la nécessité de rendre durables les systèmes de production en tenant compte de la préservation des ressources naturelles.

Cette même année 1999, la Lettre de Politique de Développement Rural Décentralisé s'est focalisée sur des objectifs stratégiques, plaçant les populations rurales au centre du processus de développement rural au niveau local. Ces populations doivent être les promotrices et maîtresses d'ouvrage, par le biais de leurs institutions décentralisées (Conseil rural) et de leurs structures associatives, dans le cadre d'un partenariat effectif avec l'administration du territoire et les services déconcentrés de l'État.

L'objet de la LPDRD est de permettre aux populations d'accéder efficacement aux services sociaux essentiels et aux infrastructures de base avec comme conséquences des indicateurs de développement humain améliorés et le désenclavement total de toutes les Communautés rurales (CR) du pays. Elle met l'accent aussi sur une gestion durable des ressources naturelles qui sont à la base des activités de production à travers une meilleure maîtrise des systèmes de production.

Le principe retenu dans la LPDRD de co-gestion et de partage des coûts de réalisation et de maintenance des infrastructures socio-économiques entre l'État et les collectivités décentralisées a connu un début de mise en oeuvre avec le Programme national des infrastructures rurales (PNIR), et le Programme de soutien aux initiatives de développement local (PSIDEL). Cette mise en oeuvre se poursuit avec la toute récente fusion du PNIR et de l'Agence du Fonds de Développement Social, au sein d'un programme très ambitieux de plus de 100 milliards de FCFA (Programme National de Développement Local).

L'objectif premier de la LPDRD est de consolider le partage du processus de gestion du secteur agricole avec l'ensemble des partenaires de l'État sur la base d'un système de concertation, de participation dans les prises de décisions dans la conception, l'élaboration et la mise en oeuvre des politiques de développement agricole.

La Stratégie Nationale de Formation Agricole et Rurale (SNFAR)

A la même époque, une réflexion engagée en 1998 va aboutir à la validation en juin 1999, lors d'un atelier national réunissant 120 acteurs de la formation agricole et rurale, d'un document de référence intitulé : « Former les acteurs d'une nouvelle économie agricole et rurale - Orientations et stratégies de formation à l'horizon 2015 ».

Cet exercice a été suivi et encouragé par les différents ministères concernés jusqu'à la concrétisation de ce document, qui sert aujourd'hui de référence. Son contenu est organisé autour d'une triple analyse historique, diagnostique, et prospective, qui propose le choix de la modernisation de l'agriculture paysanne face à la tentation d'une agriculture sans paysan. Ce choix permet d'esquisser un ensemble cohérent de politiques inclusives en faveur d'un développement agricole et rural durable.

A partir des constats mis en évidence, le document pose la problématique en ces termes :

« La Formation Agricole et Rurale doit avoir pour priorité la modernisation de l'agriculture familiale, l'émergence d'une véritable économie rurale et leur intégration dans une économie nationale et internationale ouverte. Elle doit appuyer aussi le développement d'une agriculture intensive à base de capitaux. »

Quatre grandes orientations et les stratégies d'intervention ont été définies à partir de ces nouvelles missions et priorités :

  • n * Généraliser en milieu rural l'éducation de base et assurer à tous les ruraux l'accès à l'alphabétisation
  • n * Répondre aux besoins de formation professionnelle des ruraux dans tous les domaines.
  • n * Renforcer, adapter et mieux articuler les formations secondaires et supérieures entre elles et avec celles destinées aux ruraux.
  • n * Réguler l'ensemble des institutions publiques et privées de formation agricole et rurale.

Nous terminerons logiquement ce tour d'horizon des politiques agricoles par la Loi d'Orientation Agro-Sylvo-Pastorale (LOASP) dont l'esprit a été guidé par les documents de politique qui l'ont précédé.

La loi d'orientation, aux ambitions très (trop ?) vastes, a le principal mérite d'inclure dans la législation du Sénégal des notions fondamentales telles que la nécessité d'accompagner le développement de l'exploitation familiale, la nécessaire reconnaissance des métiers de l'agriculture, ainsi que le statut des Organisations Professionnelles, désormais habilitées de par la Loi à prendre part à la définition, à la mise en oeuvre et au contrôle des politiques agricoles.

Dans un soucis d'exhaustivité, nous signalerons également les lois de décentralisation de 19968(*), transférant aux collectivités locales neuf domaines de compétence ; la Loi n° 96-07, dans son Titre second, liste ainsi les responsabilités de la Région, de la Commune, et de la Communauté Rurale pour chacun des quatre volets suivants : l'éducation, l'alphabétisation, la promotion des langues nationales et la formation professionnelle.

Si les orientations reflétées par l'évolution des politiques agricoles vont dans le même sens, ce qui est plutôt encourageant, il n'en reste pas moins que le décalage est profond avec la réalité quotidienne vécue par les « producteurs » et les autres ruraux.

Les intentions sont louables et l'Etat, sous la pression des autres acteurs (notamment les Organisations Professionnelles et les Partenaires au développement), a admis qu'il ne peut plus être le seul maître à bord.

Au quotidien, subsistent cependant des velléités de toute puissance héritées d'un long passé d'administration de l'agriculture, mais subsistent surtout des lacunes dans la gestion des filières (quasi absence d'interprofessions), ou même dans la réorganisation des circuits d'approvisionnement en intrants et de collectes des produits.

Là ou l'Etat a dû se désengager, qui concerne des aspects éminemment stratégiques tels que les semences, la mise à disposition d'engrais au bon moment, le secteur privé peine à s'implanter : il semble plus exact d'affirmer qu'il n'en manifeste pas l'envie, du fait de conditions assez peu favorables (atomisation de la demande, besoins formulés au dernier moment en raison de trésoreries fragiles, concurrence de produits subventionnés par l'Etat épisodiquement, par exemple dans le cadre de programmes spéciaux de relance d'une culture).

Enfin, dans les domaines de la formation et du conseil agricole, l'expression de la demande est encore largement conditionnée par l'offre de services, souvent plus proche de l'organisme financeur que le demandeur lui-même.

Même dans les cas où les producteurs, via leurs organisations représentatives, sont réellement les commanditaires des actions de renforcement de capacités qu'ils sollicitent, l'expérience montre que l'absence de dispositif devant accompagner une réelle construction de la demande de services n'a pas permis de faire en sorte que les actions déroulées s'écartent des sentiers battus9(*) :

  • n aux femmes les thèmes récurrents de fabrication de savon ou de teinture et tricot ;
  • n aux hommes, l'embouche bovine et le maraîchage, quelque soit la région considérée.

* 7 source : Jacques Faye. «  Evolution et impact des politiques agricoles de 1960 à 2005 » - Forum sur l'arachide au CNCR - 7 et 8 décembre 2005 à Dakar

* 8 Loi n° 96-06 du 22 mars 1996, portant Code des Collectivités locales, et Loi 96-07 du 22/03/1996, portant transfert de compétences aux régions, aux communes et aux communautés rurales.

* 9 Source : Rapport d'achèvement de la première phase du programme PSAOP

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"I don't believe we shall ever have a good money again before we take the thing out of the hand of governments. We can't take it violently, out of the hands of governments, all we can do is by some sly roundabout way introduce something that they can't stop ..."   Friedrich Hayek (1899-1992) en 1984