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Du NOMIC au Sommet Mondial de la Société de l'Information : Le rôle de l'UNESCO dans la réduction de la fracture numérique

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par Destiny TCHEHOUALI
Université Stendhal (Grenoble) / Institut de la Communication et des Médias - Master 2 Recherche - Sciences de l'Information et de la Communication 2007
  

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B- Communication internationale au coeur des Théories du

développement et du modernisme

Quoique favorisant la croissance économique, les TIC compromettent la viabilité de nombreux systèmes économiques traditionnels dont notamment ceux des pays du Sud compte tenu de leur retard technologique et leur lenteur d'appropriation de ces technologies. Ce qui aggrave les inégalités existantes. La réduction de la fracture numérique est ainsi assimilée à la réduction de la pauvreté. Les pays en voie de développement en général et ceux du continent africain en particulier se trouvent dans l'obligation de faire appel à l'aide et la coopération internationale pour sortir de ce fossé numérique et gravir les échelles du développement. A ce titre, dans son discours de clôture de la Rencontre internationale Bamako 2000, le Chef d'Etat malien d'alors, Alpha Omar Konaré, réitère son appel à une collaboration Nord-Sud, en matière de TIC, en estimant que l'Afrique se trouve dans des conditions politiques et intellectuelles favorables pour une révolution technologique : « Si elle doit se préoccuper des autres aspects du développement, elle ne peut pas pour autant laisser passer l'opportunité d'intégrer la Société de l'information. L'appropriation des TIC par les populations africaines constitue en effet l'un des leviers du développement. »

7 FLICHY Patrice, Technologies et lien social. Colloque national de Paris : Pour une refondation des enseignements de communication des organisations 25 au 28 août 2003.

Cet appel à la coopération internationale a entraîné l'élaboration de politiques de développement prônées et tant promues par l'ONU, la banque mondiale, le G8, ainsi que par les organisations de coopération et de développement. Le recours aux concepts « fracture numérique » et « société de l'information » aurait ainsi permis à ces institutions de recycler les vieux concepts évolutionnistes et technicistes des politiques de développement et de retrouver élan, légitimité, et même argent. Du moins c'est ce que pensent de nombreux chercheurs du Nord et du Sud dont Marie Thorndal, la socio-économiste indépendante, qui, parlant des organisations internationales affirme qu'elles pratiquent la théorie du « comme si »8, c'est-àdire « Toujours faire semblant qu'on va régler les problèmes du monde sans s'en donner les moyens. Tenir un discours universel en le validant par des événements enthousiastes et généreux mais sans effet. Faire « comme si » le modèle de développement du Nord était généralisable, « comme si » la dette allait être remboursée, « comme si » le rattrapage du Sud était possible, « comme si » la fracture numérique pouvait être comblée. On change de discours, or ce sont les règles du jeu qui doivent être revues. A terme, c'est tout le système du multipartisme qui est en danger et l'ONU décrédibilisée. »

En effet, la notion de « société de l'information » et ses corollaires seraient donc mobilisés pour masquer des relations de domination. Il convient de noter que ce n'est pas à partir des années 90 que les Nations Unies et d'autres acteurs de coopération internationale se sont intéressés à l'introduction des TIC en Afrique. Déjà dans les années 1960, des initiatives avaient été prises pour que des TIC contribuent à l'amélioration de la qualité de l'enseignement en Afrique, et d'une manière générale contribuent au développement. Yvonne Mignot-Lefebvre confirme d'ailleurs que : « (...) Les premières technologies de communication sont entrées dans les pays du Tiers-Monde en accord avec une vision volontariste véhiculée principalement par les Nations Unies. Elles étaient orientées vers des objectifs éducatifs, culturels et sociaux. Progressivement leur utilisation est de plus en plus liée à des objectifs économiques » 9.

La société globale de l'information est bel et bien devenue un enjeu géopolitique autour d'intérêts financiers et économiques, et le discours qui l'entoure reste une doctrine sur les diverses formes d'hégémonie dont les prémisses étaient annoncées déjà depuis la "révolution technétronique" du géopoliticien Zbigniew Brzezinski dans les années 1960.

8 Cette théorie du « Comme si » évoque une figure rhétorique de la langue française appelée « l'hypostase ».

9 MIGNOT-Lefebvre Yvonne, Des mutations technologiques, économiques et sociales sans frontières, in Transfert des technologies de communication et développement, revue Tiers-Monde, 1987, PP487-51 1, p.498.

Dorénavant, l'hégémonie mondiale se manifeste à travers une triple révolution : diplomatique, militaire et managériale menée par les Etats-Unis. C'est l'apparition des stratégies de « soft power » et de « global information dominance » qui alternent selon les circonstances la diplomatie des canons et la diplomatie des réseaux (la cyberguerre) pour réorienter le monde en fonction de ce qu'on appelle la démocratie de marché. La politique extérieure nationale de Georges Bush dans les années 80 légitimera la diplomatie des réseaux à travers une sorte de droit international de la propagande : c'est la théorie de l'ingérence, très présente aujourd'hui dans les relations entre Etats, mais aussi dans la régulation de la communication internationale. Pour Isabelle Pailliart, la communication internationale mettrait ainsi fin à la capacité d'un espace territorial à « gérer ses propres modalités d'expression ». Dans la mesure où à travers ce processus, et toujours selon cet auteur, « les frontières géographiques nationales se brouillent »10, la communication donne l'impression générale d'un affaiblissement du pouvoir étatique national. Cette limitation de la souveraineté est « voulue » ou acceptée par les États à travers de traités, chartes, ou conventions... Exemple des projets de coopération technique en matière de communication (PIDC : Programme international de développement de la communication; Canad : Central african new agencies developpement) et de télécommunications.

Missé Missé dans l'un de ses articles11 rapporte que : « Sous la contrainte de cette théorie brandie à la fois par les organisations internationales, les opérateurs économiques ou même les organisations de la société civile africaine et non-africaine, tous les Etats africains s'engagent dans cette voie, convaincus ou non». Il faut noter que cette globalisation libérale contemporaine constitue pour le géographe, Yves Lacoste12, «une façon occidentale de se représenter le monde ». Cette vision du monde, sensée se répandre au nom des libertés et du bien de l'humanité, impose finalement sa manière d'envisager les rapports humains, leur organisation, plus particulièrement les échanges économiques mondiaux au détriment du continent africain auquel on conditionne « l'aide » à l'acceptation de ce modèle économique libéral, fixé par les institutions multilatérales, FMI et Banque mondiale en tête. Cette étape de la réflexion nous amène à aborder logiquement la théorie de la modernité ou théorie de la convergence. A ce sujet, Philippe Laburthe-Tolra et Jean-Pierre Warnier dans Ethnologie Anthropologie nous rappellent que :

10 PAILLIART Isabelle, Les territoires de la communication, Grenoble, PUG, 1993, p. 78, 233.

11 MISSE MISSE, Communication internationale et souveraineté nationale : Le problème des « ingérences » dans le nouvel ordre mondial.

12 LACOSTE Yves, « Une autre idée du monde », in Géo, numéro spécial, septembre 2004.

« La théorie de la modernité est une théorie de la diffusion des innovations à partir d'un centre qui est censé les produire : (...) l'Occident à l'époque moderne. Pour Eisenstadt et ses contemporains, le moteur de cette diffusion, c'est la rationalité scientifique, donc universelle, qui s'impose à des civilisations particulières fondées sur d'autres modes de pensée, qualifiés de « pré-scientifiques », « pré-logiques », voire d'« irrationnels »13. La modernisation est ainsi perçue comme le rouleau compresseur voué à écraser toutes les civilisations pour les réduire au modèle de l'Occident industrialisé.».

Cette école de la « modernisation », encore appelée école du « développement », a vite rencontré sa critique, articulée autour de la référence au concept « d'impérialisme », étendu du politique à l'économique et au culturel : « Le concept d'impérialisme culturel est celui qui décrit le mieux la somme des processus par lesquels une société est intégrée dans le système moderne mondial et la manière dont sa strate dominante est attirée, poussée, forcée et parfois corrompue pour modeler les institutions sociales, pour qu'elles adoptent, ou même promeuvent les valeurs et les structures du centre dominant du système » (Schiller, 1976). Toujours dans ce même ordre d'idées, il est important d'évoquer les analyses menées par Bertrand Cabedoche sur La construction de l 'étrangéité dans le discours d'information médiatique : actualité de l'accusation d'ethnocentrisme des médias transnationaux ? « Les analyses de la domination se sont seulement affinées, mais elles ne concluent pas toutes pour autant à la réhabilitation convaincante des lectures néo-libérales. »

En sciences politiques, depuis les années quatre-vingts, on parle de plus en plus d'« interdépendance inégale » (Coussy14, Hassner, Smouts, Hermet...en 1980), concept qui permet de sortir des analyses classiques de la domination pour identifier comment ces processus peuvent être, non pas subis, mais aussi récupérés, réappropriés et réutilisés par des pouvoirs « dominés » à des fins internes. Le concept permet également de prendre en considération que les puissants sur la scène internationale tentent toujours d'utiliser leur pouvoir exorbitant, notamment pour en garantir la reproduction». Tous ces travaux replacent la réception dans un contexte d'acculturation en remettant en cause les rapports de dominants- dominés.

13 LABURTHE-TOLRA P., WARNIER J.-P., Ethnologie Anthropologie, PUF, Paris, 1993.

14 COUSSY Jean, « Interpénétration des économies et évolution des rapports de dépendance », Revue Française de Sciences Politiques, « Les nouveaux centres de pouvoir dans le système international », vol. 30, n° 2, avril 1980, pp. 262-28 1.

En confrontant ces théories, il apparaît légitime de se focaliser sur la communication internationale dans la « société de l'information » tout en recentrant les questionnements fondamentaux sur le rôle des organisations internationales dans ces rapports hégémoniques Nord/Sud ayant hérité dans un passé récent d'une géopolitique de l'information, d'une histoire des cultures, et de nouvelles lois du marché cachant des conflits d'intérêts et de pouvoir pas forcément évidents.

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"L'imagination est plus importante que le savoir"   Albert Einstein