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Guérilla et Droit International Humanitaire: cas du conflit armé colombien

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par Mohamed Youssef LAARISSA
Université Cadi Ayyad - Licence 2007
  

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2- Le guérillero et les conditions de jugement équitable.

En cas de capture, le guérillero en tant que combattant et sujet de droit international, a droit à un ensemble de droits et de prérogatives dont celui de pouvoir bénéficier d'un jugement équitable. Afin de pouvoir en profiter, ce dernier doit d'abord posséder le statut de combattant et celui de PG, or l'obtention de ces statuts reste strictement attachée à la volonté des Etats.

Si dans le cadre d'un conflit armé international l'individu capturé accède facilement au statut de prisonnier de guerre, en sein d'un CANI les Etats font tout leur possible pour refuser à cet individu le statut de belligérant et de PG, afin de le soumettre à leurs juridictions internes, pour en faire un sujet de droit commun et pouvoir le juger d'après les dispositions du code pénal interne.

On trouve certaines dispositions relatives aux conditions de jugement et aux poursuites pénales dans l'article 6 du PA II qui stipule :

1. Le présent article s'applique à la poursuite et à la répression d'infractions pénales en relation avec le conflit armé.

2. Aucune condamnation ne sera prononcée ni aucune peine exécutée à l'encontre d'une personne reconnue coupable d'une infraction sans un jugement préalable rendu par un tribunal offrant les garanties essentielles d'indépendance et d'impartialité. En particulier :

a) la procédure disposera que le prévenu doit être informé sans délai des détails de l'infraction qui lui est imputée et assurera au prévenu avant et pendant son procès tous les droits et moyens nécessaires à sa défense ;

b) nul ne peut être condamné pour une infraction si ce n'est sur la base d'une responsabilité pénale individuelle ;

c) nul ne peut être condamné pour des actions ou omissions qui ne constituaient pas un acte délictueux d'après le droit national ou international au moment où elles ont été commises. De même, il ne peut être infligé aucune peine plus forte que celle qui était applicable au moment où l'infraction a été commise. Si postérieurement à cette infraction la loi prévoit l'application d'une peine plus légère, le délinquant doit en bénéficier ;

d) toute personne accusée d'une infraction est présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité ait été légalement établie ;

e) toute personne accusée d'une infraction a le droit d'être jugée en sa présence ;

f) nul ne peut être forcé de témoigner contre lui-même ou de s'avouer coupable.

3. Toute personne condamnée sera informée, au moment de sa condamnation, de ses droits de recours judiciaires et autres, ainsi que des délais dans lesquels ils doivent être exercés.

4. La peine de mort ne sera pas prononcée contre les personnes âgées de moins de dix-huit ans au moment de l'infraction et elle ne sera pas exécutée contre les femmes enceintes et les mères d'enfants en bas âge.

5. A la cessation des hostilités, les autorités au pouvoir s'efforceront d'accorder la plus large amnistie possible aux personnes qui auront pris part au conflit armé ou qui auront été privées de liberté pour des motifs en relation avec le conflit armé, qu'elles soient internées ou détenue

L'article comme on peut le constater, ne fait aucune allusion au statut juridique de la personne jugée, ce qui laisse le champ libre aux Etats de statuer sur ce dernier, le guérillero est donc laissé à la merci de l'Etat puisque ces derniers feront tout pour l'assujettir à leurs juridictions nationales, au lieu de le soumettre aux juridictions internationales.

Dans un premier temps, il faut dire que les Etats ne prennent pas en considération le principe de « l'immunité du Combattant », afin de pouvoir juger le guérillero rien que pour le fait d'avoir osé contester l'autorité de l'Etat par les armes. Car rares sont les Etats qui voudront soumettre des individus ayant -selon

eux- troublé l'ordre public et porté atteinte à la souveraineté nationale et à l'intégrité territoriale à des juridictions autres que les leurs.

Le fait que l'obtention du statut de PG et l'application des garanties qu'il comporte, dépendent uniquement des Etats dans le cadre d'un CANI reflète l'infériorité du guérillero face à l'Etat en DIH, et laisse ce dernier sans aucune chance de pouvoir être jugé en tant que prisonnier de guerre en bonne et due forme.

En Colombie, au cours de l'année 1999, fut créé le « Programme de démobilisation » dont le but est de permettre aux membres des « organisations armées illégales » de pouvoir se démobiliser sans attendre à qu'il y est l'instauration d'un processus formel de Paix. En 2003, le programme de démobilisation fut élargi et ouvert aux membres des « AUC » souhaitant se réincorporer au sein de la société (46).

Avant d'aller plus loin, faisons une brève description du processus de démobilisation.

Tout d'abord Le combattant irrégulier commence par se rendre aux autorités les plus proches de l'endroit où il se trouve et remettre le maximum d'arme en sa possession, il bénéficiera d'une indemnisation en fonction des armes qu'il aura rendu.

L'Etat s'engage à fournir au démobilisé, sécurité, santé, logement, nourriture, éducation, travail, et dans certains cas le regroupement familial. Le démobilisé en contre partie, doit d'abord se compromettre à cesser toute activité belliqueuse ou délictueuse, à faire part de sa volonté de réintégrer la société et de retourner à une vie normale, il demeurera en liberté surveillée pendant une période n`allant pas au-delà de 18 mois et devra accomplir des travaux d'intérêt général.

(46)Observatorio de los derechos humanos y derecho humanitario en Colombia, Programa presidencial de los Derechos Humanos y Derecho Internacional Humanitario Vicepresidencia de la República

En cas de non respect de l'une des dispositions de ce processus de démobilisation, le démobilisé perdra les prérogatives accordées par le processus et sera condamné et jugé selon le droit pénal interne.

Si le déserteur est un mineur, il bénéficiera de garanties plus favorables et pourra rejoindre sa famille dans les plus brefs délais (47)
·

Un autre processus de démobilisation verra le jour en 2005 à l'initiative du Président actuel « Alvaro Uribe » dans le cadre de la « loi de Justice et Paix » ou « loi 975 de 2005 ». Cette loi était principalement destinée aux membres des AUC, néanmoins les membres d'autres groupes armés illégaux peuvent en bénéficier.

L'objectif de cette loi est de faciliter le processus de paix et de permettre la démobilisation collective ou individuelle réincorporation des membres des groupes armés illégaux, tout en garantissant le droit des victimes à la vérité, la justice et la réparation (48).

La loi est dirigée aux membres de groupes armés illégaux- aussi bien les paramilitaires que les guérilleros- ayant été reconnus comme responsables de crimes et délits dont ces groupes sont accusés. Les autres membres quant à eux profiteront du programme cité antérieurement. Les bénéficières de cette loi ne seront pas jugés d'après le code pénal colombien, mais ils auront droit à des peines alternatives allant de 5 à 8 de prison et il ne pourront en aucun cas être extradés. Les bénéficiers doivent quant à eux s'engager à respecter les dispositions de la loi, et devront pendant leur séjour en prison exprimer leur bonne volonté de réintégration à la vie sociale, par le travail, les études et l'encouragement du programme de démobilisation.

(47)Boletín Estadístico del Programa presidencial de derechos humanos y Derecho Humanitario, n ° 6, décembre 2004.

(48) Article 1 de la loi 975 de 2005.

En cas de non respect de l'une des dispositions de la loi 975, les bénéficières perdront tous leurs avantages accordés par la loi, et seront jugés par les dispositions du droit commun et seront extradé si cela est jugé nécessaire (49).

Selon les autorités, plus 45.OOO individus auraient bénéficié du programme de démobilisation depuis 2003, 31.671 étaient des anciens membres des AUC à s'être démobilisés de façon collective dont 28.751 hommes et 2.920 femmes (50).

En outre des démobilisations collectives, plus de 13.629 personnes se seraient démobilisés de façon individuelle, dont 7754 appartenant aux FARC, 3.629 aux AUC, 1839 à l'ELN et 407 appartenant à d'autres groupes armés

illégaux (51).

Ce processus de démobilisation et la loi 975 ont été fortement critiqués par plusieurs organismes de défense des droits de l'Homme.

Pour la FIDH, l'adoption d'une telle loi représente une atteinte au DIH, du fait, que les individus ayant été reconnus coupables doivent en principe être conduit au sein des juridictions internationales et non pas être jugés en Colombie, d'autant plus que la loi 975 leur permet de bénéficier de peines alternatives beaucoup plus clémentes.

La FIDH remet en doute les chiffres présentés par les autorités colombiennes relatifs aux nombres de personnes démobilisées et constate que plusieurs d'entre elles auraient repris leurs activités délictueuses au sein de nouveaux groupes ayant été formés après le démantèlement des AUC et estime que les victimes n'ont pas eu droit à la réparation exigée par la loi de « Justice et Paix » (52).

Toute fois, nous constatons que, malgré les nombreux avantages que peuvent offrir le programme de démobilisation et la loi 975, ces derniers ne sont qu'un

(49) Ibid, Article 29.

(50) XVe rapport du processus de démobilisation, septembre 2007, ( www.ejercito.mil.com).

(51) Ibid.

(52) Rapport de la FIDH sur le processus de démobilisation des membres de groupes armés illégaux en Colombie, octobre 2007, ( www.fidh.org) .

moyen élaboré par le gouvernement colombien pour détourner les dispositions du DIH relatives à l'octroi du statut de prisonnier de guerre aux membres des groupes armés illégaux se trouvant sur son territoire.

Malgré l'adhésion des Etats au statut de Rome (53), ces derniers cherchent toujours le moyen pour détourner ses dispositions, ces dérogations sont comme on l' vu beaucoup plus flagrantes dans le cas du gouvernement colombien actuel, en effet non seulement il juge au sein de tribunaux internes, soit par application du code pénale colombien, soit par la loi de paix et justice décrétée par le président et dont les peines vont de 5 à 8 de prison, mais il se permet aussi d'extrader des individus ayant commis d'innombrables atrocités auprès de la population civile aux Etats-Unis non pour répondre de crime contre l'humanité mais pour trafic de drogue. Le dernier de ces cas remonte au mois de mai 2008.

Les individus ayant été extradé étaient des chefs démobilisés des AUC, qui bénéficiaient de la loi de justice et paix et ne pouvaient en principe être extradés et jugés, ailleurs qu'en Colombie.

La raison présentée par le président Uribe était que ces derniers n'avaient pas respecté les dispositions de la dite loi et n'avaient pas collaboré de la façon dont il fallait le faire. Là encore, la question qu'on peut se poser est la suivante : Ces ex-chefs paramilitaires, n'ont-ils vraiment pas respecté les dispositions de la loi 975 de 2005 ? Ou serait-ce pour le fait, qu'au bout de chaque procès auquel participaient ces derniers et livraient leurs témoignages, surgissaient les noms de fonctionnaires publiques et de hauts gradés des forces armées colombiennes dans les diverses massacres perpétrés par les AUC dans différentes régions du pays ? Et que ceci n'était pas très compatible avec l'image héroïque donnée par le gouvernement Uribe des forces armées à l'opinion publique.

(53) La Colombie a adhéré au Statut de Rome depuis le 5 août 2002. (www.icc-cpi.int)

Suite à ces remarques, nous pourrions dire que tout processus d'amnistie aussi clément soit- t'il ne constitue qu'un moyen parmi d'autre dont les Etat font usage, dans le but de contourner l'octroi du statut de prisonnier à certaines catégories de combattant. Le cas de la loi de « Justice et Paix » ne fait que confirmer la volonté des Etats à vouloir toujours garder l'emprise sur leurs citoyens au lieu de les soumettre aux juridictions internationales. Ce qui nous pousse à dire que, la « Raison d'Etat » prévaut toujours sur toutes les dispositions du DIH et sur une application objective, neutre et impartiale de ce dernier.

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"Ceux qui vivent sont ceux qui luttent"   Victor Hugo