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Efficacité de l'Aide Publique au Développement: cas du Sénégal

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par Fatou Gueye
Université Cheikh Anta Diop de Dakar - DEA 2006
  

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2.2.2. L'impact de l'Aide sur les réformes politiques

Le deuxième argument développé pour justifier l'idée d'une sélectivité plus grande des pays receveurs en fonction de leurs politiques économiques est que l'aide n'a pas d'effet sur la qualité de ces politiques. Plusieurs arguments théoriques ont été avancés concernant l'effet de l'aide sur les réformes de politique. Tout d'abord, Sachs (1994), Lafay et Morrison (1998),

Alesina et Drazen (1991), Nelson (1990), Waterbury (1989), Amprou et Duret (2000) ont développé l'idée selon laquelle l'aide peut permettre à un gouvernement de lancer les réformes en compensant leurs coûts d'ajustement, notamment si ces coûts sont supportés par un segment particulier de la population. En effet, les mesures de stabilisation et d'ajustement imposent des coûts immédiats, souvent concentrés sur des catégories de la population facilement identifiables et mobilisables, tandis que les bénéfices attendus de ces mesures sont différés, incertains et diffus.

A l'opposé, selon Rodrik (1996), Berg (1993 et 1997), les ressources extérieures réduisent à la fois le coût des réformes et le coût de l'inertie c'est-à-dire le coût d'éviter les réformes. Pour la Banque mondiale, l'aide n'a pas été l'élément principal des réformes économiques. Les raisons de cet échec sont les dysfonctionnements dont souffre l'instrument permettant à l'aide d'influencer les orientations de politiques économiques à savoir la conditionnalité attachée aux déboursements. Ce diagnostic est largement partagé par l'ensemble des bailleurs mais les stratégies pour y remédier diffèrent. Ainsi, la Commission européenne vise une réforme de la conditionnalité, consistant à prendre en compte des indicateurs de résultats. Tandis que la Banque Mondiale, elle, propose une sélectivité ex-ante des pays receveurs basée sur la qualité des politiques économiques comme indicateur instrument.

Cependant, les deux points suivants développent l'argument que l'aide n'a pas d'effet sur les réformes. Cet argument est analysé à travers les dysfonctionnements des conditionnalités et les analyses empiriques sur l'inefficacité de l'aide en matière de promotion des réformes.

2.2.2.1. Les conditionnalités

La conditionnalité consiste en l'accord de financement en contrepartie des réformes. Les bailleurs de fonds deviennent en quelque sorte des « conseillers-payeurs ». Malgré deux décennies de leur mise en oeuvre, les conditionnalités restent toujours un instrument peu performant pour promouvoir les réformes économiques. En effet, d'après Guillaumont (1995) les difficultés d'application de ces conditionnalités et les objectifs souvent contradictoires (débourser rapidement l'aide accordée et conditionner ces déboursements à des réformes destinées à favoriser durablement la croissance économique) ont contribué à pervertir le système.

Pour Collier (1997), deux éléments principaux sont à la base de ces dysfonctionnements : la politique du gouvernement déterminée par les forces politiques intérieures et la formulation des conditionnalités n'est pas appropriée.

D'après Williamson (1994), Waterbury (1989), Stiles (1990) et Haggard, Lafay et Morrison (1995), les choix des politiques économiques sont dictés par l'orientation doctrinale des responsables politiques et le comportement des groupes d'intérêt, notamment leur opposition à l'égard de mesures susceptibles de réduire les rentes de situation. Ainsi, lors de la conception des politiques faisant l'objet de conditionnalités, ces deux éléments représentent des obstacles à la réforme et provoquent un manque d'intériorisation des programmes soutenus par l'aide extérieure. Alors que le principe même de l'aide à l'ajustement impliquait un engagement des pays à mettre en oeuvre des réformes, il est fréquemment apparu que les conditions de politique économique étaient acceptées sans conviction, en raison de l'urgence d'obtenir un financement. Selon Guillaumont (1995), suivant cette perspective, l'engagement formel à opérer des réformes est devenu le prix à payer pour obtenir de l'argent. Ainsi, la réforme est perçue comme un coût et non comme un avantage. Face à la réticence des pays, à la lenteur des réformes qui en a résulté et à l'échec de nombreux programmes, la confiance des bailleurs de fonds a largement baissé. Ceux-ci, devenus acheteurs de programmes, ont alors été conduits à formuler des conditions de plus en plus particulières et à s'impliquer davantage dans les réformes pour en garantir la mise en oeuvre. Les programmes sont ainsi devenus l'affaire des bailleurs de fonds, plus que celle des Etats receveurs.

L'étude de Dollar et Svensson (2000) estime la probabilité de succès ou d'échec des programmes d'ajustement structurel mis en oeuvre par la Banque mondiale, en fonction des caractéristiques d'économie politique des pays receveurs (gouvernement démocratique, stabilité politique, polarisation ethnique) et de variables sous le contrôle de la Banque mondiale (coûts administratifs liés à la préparation et au suivi des programmes). Leur étude économétrique suggère que le succès des programmes de réformes dépend principalement des caractéristiques institutionnelles et politiques des pays receveurs, les variables sous le contrôle de la Banque mondiale n'étant, quant à elles, pas significatives.

Le deuxième élément susceptible de provoquer des dysfonctionnements de l'aide est la formulation des conditionnalités. La plupart des accords de financement comportent plusieurs conditionnalités liées à différents aspects d'une même réforme et correspondant au décaissement de différentes tranches. La propension à n'appliquer que partiellement les réformes convenues a été parfois renforcée par la modération des sanctions effectives, c'est-àdire par la poursuite des versements lorsque les conditions prévues n'étaient pas vraiment remplies. Ainsi, les performances des agences d'aide au développement sont le plus souvent mesurées en fonction des taux de décaissement des volumes financiers engagés. Selon cette

logique bureaucratique de succès, les institutions financières ont considéré les conditionnalités comme alors un moyen de pression qu'elles ne l'étaient pas.

Il apparaît donc que la conditionnalité macro-économique, qui est aujourd'hui l'instrument principal permettant aux bailleurs de fonds de promouvoir ou d' « acheter » les réformes de politique économique dans les pays receveurs, souffre de nombreux dysfonctionnements. Ces derniers constituent l'un des éléments à l'origine des performances largement discutées de l'aide en matière de promotion des réformes.

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"Piètre disciple, qui ne surpasse pas son maitre !"   Léonard de Vinci