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Education et croissance économique en Algérie: Une analyse en terme de causalité à l'aide des modèles VAR

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par BEKIOUA Fateh et REFFAF Mehdi
INPS Alger - Ingénieur en statistique appliquée 2006
  

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Section 2 : L'analyse empirique de la relation entre capital humain et croissance : 2.1. Les estimations du modèle de croissance néoclassique :

La question qui nous intéresse ici est la suivante : dans quelle mesure la littérature empirique qui s'appuie sur les types de modèles présentés dans la section 1 fournit-elle une estimation crédible du rôle du capital humain dans la croissance, c'est à dire du paramètre ß ou d'un de ses dérivés (â',â',â ' )? Il est d'abord utile de récapituler les différentes stratégies d'estimation susceptibles d'être appliquées aux différentes spécifications.

Dans leurs estimations, les économètres indicent les pays par i et posent 0

Ait = A e avec log A 0 = a + å

gt

å est un terme résiduel aléatoire et a une constante. Le progrès technique exogène g est donc supposé commun à tous les pays. Par ailleurs, les notations, y, k et h désigneront dorénavant les quantités par tête qui sont mesurables (alors que les quantités par unité efficace de travail ne le sont pas), soitY L, etc.

La procédure la plus directe consiste à estimer la fonction de production agrégée, logi t l o g l o g

y á k â h a g t i t

? = ? + ? + + + å (2.1)

i t i t

Cette fonction a l'avantage de décrire une relation technique et d'être très économe en hypothèses sur l'état de l'économie. Elle est le plus souvent exprimée en taux de croissance, soit,

log y it - log y io á (log k it - log k io ) â (log h it - log h io ) gt it - i o

? ? = ? ? + ? ? + + å å(2.2)

à l'opposé, la forme réduite de l'équilibre stationnaire permet d'écrire le revenu en fonction de variables supposées exogènes (les taux d'épargne), mais à condition de faire une hypothèse très forte sur l'état de l'économie :

log it log log - log( )

y = á ' s + â ' s ã n g ä a gt å it

? + + + + + (2.3)

ki hi it

dans une estimation en coupe transversale, g ne peut pas être identifié (gt est commun à toutes les observations et entre dans la constante) tandis que ä est en général mal connu, aussi est-il nécessaire de faire des hypothèses sur la valeur de (g + ä).

Si on suppose enfin que les économies sont peu éloignées de leur équilibre stationnaire, on a la relation dite « de convergence »

log it log ki log hi - log( it ) log

y ? = á '' s + â ' s ã ' n + g + ä + èy + a + gt + å it

? (2.4)

io

On trouve également dans la littérature une spécification intermédiaire, où shi est remplacé par *

hi :

log it log ki log h i - l og( ) log

y s it

? = á ' + â ' ã ' n + g + d + è y + a + gt + å

* ? (2.5)

it io

Dans l'une et l'autre de ces deux équations on peut mettre à gauche le taux de croissance du revenu par tête (au lieu de son niveau), ce qui conduit simplement à remplacer è par è-1 dans le terme de droite. Trois spécifications peuvent donc être utilisées pour mesurer le rôle du capital humain dans la croissance, la fonction de production (2.1), (2.2), le modèle d'équilibre(2.3) et le modèle de convergence(2.4),(2.5); en pratique la première et la dernière sont les plus souvent utilisées dans la littérature empirique.

L'estimation des modèles (2.3) et (2.4) a été réalisée par Mankiw, Romer & Weil (1992), leurs estimations principales portent sur 98 pays, pour lesquels ils disposent de données sur la période 1960-85. Ils prennent comme mesure du taux d'investissement en capital humain la proportion de la population active potentielle inscrite dans l'enseignement secondaire1 en pourcentage et expliquent soit le revenu par tête en 1985, soit son taux de croissance entre les deux dates. Barro (1991) avait proposé une estimation du modèle (2.4) en utilisant les taux de scolarisation primaire et secondaire en 1960 (et en incluant un grand nombre de variables de contrôle, dépenses gouvernementales, stabilité politique, etc., en plus de celles requises par le modèle). Ces estimations sont présentées dans le (Tableau 1)2 et indiquent sans ambiguïté une relation positive entre la production agrégée (ou la croissance) et ces mesures du capital humain.

Barro et Sala-i-Martin (1995) présentent d'autres estimations de la contribution du capital humain à la croissance, utilisant les mêmes données sur la même période. La croissance du PIB par tête est fonction entre autres du nombre moyen d'années d'études primaires, secondaires et supérieures dans la population, et des dépenses d'éducation en proportion du PIB au début de la période. Alors que le coefficient de l'éducation primaire n'est pas significatif, ceux de l'éducation secondaire et supérieure des hommes sont significatifs et positifs : un accroissement d'un écart-type du nombre moyen d'années d'études secondaires, soit 0,9 an est associé à une augmentation de la croissance de 1,5 point de pourcentage, les chiffres correspondants pour les études supérieures étant 0.2 an et 1,0 point. En revanche, l'éducation des femmes est négativement corrélée à la croissance : un accroissement d'un écart-type du nombre moyen d'années d'études secondaires (0,9 an) est associé à une diminution de 0.8 point par an.3

Ces résultats ont cependant deux défauts principaux. D'une part, ils font une hypothèse forte sur l'accumulation du capital humain, dont les mécanismes sont probablement beaucoup plus complexes que ceux du capital physique (Cohen, 1996, Dessus,1998), et d'autre part, ils font des hypothèses également contestables sur la proximité de toutes les économies à leur équilibre stationnaire et sur le taux de progrès technique supposé identique pour toutes4.

Des modifications plus spectaculaires interviennent lorsque les auteurs utilisent les données de stock pour estimer directement des fonctions de production, de manière à limiter les hypothèses sur l'état d'équilibre des économies. C'est le cas de Benhabib & Spiegel (1994) qui utilisent les données de Kyriacou (1991). Ils estiment la spécification (2.2) sur la période 1965-1985, sans imposer l'hypothèse de rendements d'échelle constants. Leur résultat est rappelé dans le (Tableau 2)5 et l'effet du capital humain est cette fois non-significatif. Pritchett (1996) estime également cette spécification avec les données de Barro & Lee (1993) et de Nehru, Swanson & Dubey (1995) et obtient des effets négatifs et parfois significatifs.

1

C'est la moyenne du produit du taux de scolarisation dans le secondaire des personnes âgées de 12 à 17 ans par la proportion âgée de 15 à 19 ans de la population âgée de plus de 15 ans.

2 voir page 38.

3 Ch.BAUDELOT et F.LECLERQ : « Les effets de l'éducation »-Rapport à l'intention du Piref (Programme incitatif de recherche en éducation et formation) ; janvier 2004 ; P111.

4 Marc GURGAND : « Capital humain et croissance : la littérature empirique à un tournant »- revue économie

public » ;N°06-2000/2 ; P77

5 voir page 38.

Les résultats des nombreuses études réalisées dans les années 1990 sont remarquablement contradictoires. Durlauf et Quah (1998, tableau 2) citent neuf articles qui ont trouvé des effets négatifs (mais pas toujours significatifs), en utilisant comme variables d'éducation dans les régressions de croissance, l'éducation primaire, l'éducation secondaire des hommes comme celle des femmes et l'éducation supérieure au début de la période considérée, ainsi que l'augmentation de l'éducation secondaire des femmes au cours de la même période. Dans d'autres articles : six seulement des seize effets mentionnés par Durlauf et Quah sont positifs et significatifs. Arcand et D'Hombres (2002) ont remarqué que la corrélation entre éducation et croissance semble être positive lorsque l'on utilise des données « en coupe », où l'on ne dispose que d'une seule observation par pays (cf. Barro, 1991 ; Barro ; 1997, McMahon, 1998 ; Temple, 1999), et non significative ou négative lorsque l'on utilise des données « de panel », où chaque pays est observé sur plusieurs années ou intervalles de quelques années (cf. Benhabib et Spiegel, 1994 ; Bond, Hoeffler et Temple, 2001 ; Bräuninger et Pannenberg, 2002 ; Caselli, Esquivel et Lefort, 1996;Hamilton et Monteagudo,1998 ; Islam, 1995 ; McDonald et Roberts, 2002)1.

Ainsi, il existe à ce stade une contradiction apparente entre les deux approches, celle qui utilise l'équation de convergence et celle qui utilise la fonction de production, la première fait apparaître l'effet positif du capital humain sur la croissance qui est attendu, la 2nd étant incapable de le mettre en évidence.

2.2. Les méthodes économétriques utilisées :

Afin de se concentrer sur la discussion des spécifications économiques, nous avons volontairement laissé de coté la discussion des méthodes économétriques utilisées pour estimer les différents modèles. En effet la plupart des modèles estimés sont des modèles structurelles, donc leurs estimation pose des problèmes d'identification puisqu'il est douteux que les stocks des différentes variables explicatives du modèle, à savoir le taux d'investissement, le stocks de capital, la croissance de la population ou encore le produit par tête initial, soient indépendants des caractéristiques non observées (résidus) qui distinguent les différents pays. Or les méthodes employées dans ces estimations utilisent cette hypothèse forte (l'indépendance des variables explicatives par rapport aux résidus) et cela même si l'existence de telles caractéristiques, et leur effet sur la croissance ou le niveau du produit sont pourtant attestés par l'introduction d'indicatrices2 régionales dans les estimations.

Pour clarifier la discussion, il convient de distinguer, dans le résidu non-observable, des caractéristiques constantes dans le temps et des événements dont la nature et l'ampleur peuvent varier d'une période à l'autre. Comme la composante du progrès technique dans la fonction de production peut s'écrire log Ao = a + å å est un résidu d'espérance nulle et a la valeur moyenne de log A0.

M. Gurgrand Suppose que si å se décompose lui-même en une composante individuelle constante
dans le temps et un résidu variable ; å it = ìi + vit , alors pour estimer les modèles (2.1), (2.4) ou (2.5)

par les moindres carrés ordinaires, il faut admettre que

E(å it /x i t )= 0

(où x représente l'ensemble des variables explicatives) et en particulier que E(u i / xit ) = 0 3

1 Ch.BAUDELOT et F.LECLERQ -op. cit- p.1 12.

2 Une variable indicatrice est une variable qui n'est composée que de 0 ou 1, elle est utilisée lorsque, dans un modèle, nous désirons intégrer un facteur explicatif binaire : « le phénomène a lieu ou n'a pas lieu » , ou bien lorsque le facteur explicatif est qualitatif : « facteur de développement ou de sous développement ».

3 Ces hypothèses ont été utilisées dans les estimations présentées dans le tableau 1.

Mais Lorsque le modèle est estimé sous la forme (2.2) en revanche, le résidu devient
å it - å i0 = í it - íio et les estimations sont robustes à l'hypothèse sur la corrélation entre l'effet

fixe ui et les variables du modèle. Le problème de la corrélation avec la composante í it reste
cependant entier. Le point le plus important est que les deux jeux d'estimations, celles résumées dans
le tableau 1 et celles résumées dans le tableau 2, qui conduisent à des conclusions
inverses, correspondent à des spécifications dans lesquelles l'effet fixe ui est respectivement présent et

absent.

Il est donc tentant de conclure que les résultats qui font apparaître un rôle positif du capital humain sont des résultats biaisés par la présence de l'effet fixe, tandis que les autres seraient plus robustes.

Tableau 1 : Les coefficients du capital humain dans les spécifications de convergence

Auteurs Variable de capital humain Estimation

Barro (1991) Taux de scolarisation primaire 1960 0.0181

(0.0060)

Taux de scolarisation secondaire 1960 0.0225

(0.0090)

Mankiw, Romer Taux de scolarisation secondaire 0.23 3

& Weil (1992) (moyenne 1960-1985) (0.060)

Islam (1995) Stock de capital humain en 1985 0.1823

(données de Barro & Lee, 1993) (0. 0895)

Source pour Mankiw, Romer & Weil (1992) : tableau V; pour Barro (1991) : tableau IV; pour Islam (1995) :
tableau V. Ecarts-types entre parenthèses

Tableau 2 : Les coefficients du capital humain dans les spécifications de fonctions de production

Auteurs Variable de capital humain Estimation

Benhabib Taux de croissance du stock 0.063

& Spiegel (1994) (données de Kyriacou, 1991) (0.079)

Pritchett (1996) Taux de croissance du stock -0.049

(données de Barro & Lee, 1993) (0.046)

Taux de croissance du stock -0.104

(données de Nehru, Swanson & Dubey, 1995) (0.050)

Source pour Benhabib & Spiegel (1994) : tableau 1; pour Pritchett (1996) : tableau 1.
Ecarts-types entre parenthèses.

Ce point a fait l'objet de la contribution d'Islam(1 995). Après avoir présenté le résultat que nous avons reporté dans le tableau 1, cet auteur exploite la dimension de panel de ses données en utilisant une observation par pays tous les cinq ans, au prix d'une légère réduction de la taille de son échantillon. Il estime alors le modèle (2.5) mais en spécifiant explicitement l'effet fixe ui de manière à obtenir des estimations non biaisées. Ses estimations sont reportées dans le tableau 3 et confirment que, lorsque les effets fixes sont pris en compte, le coefficient du capital humain n'est plus positif et peut être significativement négatif. Ce résultat démontre qu'il ne convient pas d'opposer les spécifications de convergence vers l'équilibre stationnaire aux spécifications de fonction de

production, mais plutôt les estimations qui ne tiennent pas compte de l'effet fixe, qui donnent des résultats positifs mais sont potentiellement biaisées et les estimations qui corrigent ce biais et qui ne font pas apparaître d'effet positif, quelle que soit la spécification économique de référence. En d'autres termes, lorsque la présence d'effets fixes est prise en compte, le capital humain n'a plus d'effet positif sur la croissance, quel que soit le modèle de référence (convergence ou fonction de production).

Tableau 3 : Les coefficients du capital humain dans l'estimation en panel de Islam (1995)

Echantillon de pays Variable de capital humain Estimation

Non-pétrioliers Stock de capital humain -0.07 12

(données de Barro & Lee, 1993) (0. 0323)

Intermédiaires Stock de capital humain -0. 0027

(données de Barro & Lee, 1993) (0.0471)

OCDE Stock de capital humain -0. 0208

(données de Barro & Lee, 1993) (0.0449)

Source : tableau V. Ecarts-types entre parenthèses.

2.3. Explication des résultats contradictoires :

Que penser de ces résultats contradictoires ? Une première réponse est que la qualité des données et la façon dont le capital humain est mesuré doivent faire l'objet d'une attention particulière. La plupart des travaux empiriques sur la croissance reposent sur la même base de données ; les « Penn World Tables1» (actualisée périodiquement ; par exemple, Summers et Heston, 1991), qui couvrent une centaine de pays depuis 1960, avec des observations tous les cinq ans, et contiennent les séries de PIB par tête. Les problèmes de qualité que peuvent poser ces données affectent donc l'ensemble des travaux publiés, et il ne reste pas grand-chose à lire de ces données car les innovations possibles à partir de cette base sont très importantes. Les données de capital humain proviennent de plusieurs bases (cf. Barro et Lee, 1993 Kyriacou 1991 ; Lee et Barro, 1998 ; Mulligan et Sala-i-Martin, 2000 Nehru, Swanson et Dubey, 1995) dont la qualité est variable. Kyriacou (1991) combine des enquêtes ménages réalisées dans 42 pays en 1970 avec les taux de scolarisation en 1965 et 1985 afin d'estimer les nombres moyens d'années d'éducation à ces dates. Comme toutes les enquêtes, les informations recueillies sont pleines d'erreurs: Krueger et Lindahl (2001) montrent que l'accumulation du capital humain mesurée à partir de cette base est polluée par un fort « bruit » statistique, ce qui expliquerait son absence d'effet sur la croissance comme dans l'article de Benhabib et Spiegel (1994). Barro et Lee (1993) utilisent une combinaison entre deux sources de données celle de l'UNESCO, et celle issue de recensement et des enquêtes ménages afin de donner plus de fiabilité à leur données, mais, cette méthode na pas non plus échappé aux critiques notamment par Behrman et Rosenzweig (1994), qui ont montré que les définitions utilisées par Barro et Lee n'étant ni toujours comparables d'un pays à l'autre ni toujours adéquates (par exemple, les taux de scolarisation de l'UNESCO incluent les enfants qui ne sont inscrits que nominalement ou quittent l'école peu après le début de l'année scolaire).

1 Les Penn World Tables sont des tables qui fournissent les données des variables macroéconomiques pour 168 pays pour certaines ou toutes les années 1950-2000.

D'autres auteurs ont axé leurs recherches sur la comparaison des différentes sources de données. On site par exemple Bosca, de la Fuente & Domenech (1996) qui analysent en détails les incohérences existante par exemple entre les données de Barro & Lee (1993) et celles de Nehru, Swanson & Dubey (1995) y compris dans le sous-ensemble des pays de l'OCDE, pour lesquels les données statistiques d'origine devraient être les meilleures. Un certain nombre d'invraisemblances lève en outre dans l'évolution des stocks construits par Barro & Lee (1993). Il est donc clair que les estimations présentent des biais d'erreur de mesure1.

Lorsqu'une variable est mesurée avec erreur, on sait que le coefficient estimé est biaisé vers zéro (le test de Student de cet coefficient peut être non significatif), simplement parce que sa corrélation avec la variable expliquée devient moins nette. Cela pourrait expliquer qu'un effet significatif estimé sur les taux de scolarisation (mesurés avec peu d'erreur) devienne non significatif lorsqu'on passe aux données de stock (mesurées avec d'avantage d'erreurs). En outre, le fait de passer en différences premières (comme lorsqu'on passe du modèle (2.1) au modèle (2.2) a pour effet d'aggraver l'erreur de mesure, car la différence des stocks cumule les erreurs sur chacun des deux stocks de départ.2

Il est cependant possible d'affirmer que ces travaux n'apportent pas plus d'information que les modèles théoriques évoqués à la sous section 2.1. quand aux voies par lesquelles l'éducation agit sur la croissance. D'autres études ont montré que le coefficient du niveau initiale de capital humain dans les modèles de croissance peut avoir plusieurs significations, selon l'état de l'économie des pays ou le type de régression utilisée, ainsi , Topel (1999) et Krueger et Lindahl (2001) montrent qu'un impact causal positif de l'éducation sur la croissance peut se traduire par un coefficient négatif dans une régression de convergence conditionnelle. Entre autre, le stock initial de capital humain peut représenter le niveau d'équilibre du revenu par tête; il peut affecter positivement le taux de croissance d'équilibre en accélérant le progrès technique ; il peut accélérer la croissance d'une économie dont le revenu initial est inférieur à son niveau d'équilibre en favorisant l'adoption de technologies existantes. Dans ce dernier cas, il est possible que le coefficient du capital humain soit négatif : Un pays dont le stock initial de capital humain est bas peut l'accroître très vite, et dispose d'une marge de rattrapage importante par rapport aux pays qui se trouvent déjà à leur niveau d'équilibre. Enfin, Bils et Klenow (2000) suggèrent que la causalité pourrait être inverse, de la croissance à l'éducation : l'anticipation d'une forte croissance peut inciter les individus à investir plus en capital humain.

Dans un article très remarqué, Pritchett (2001) présente des résultats d'estimation utilisant les données sur l'éducation de Barro et Lee (1993) et Nehru, Swanson et Dubey (1995), dans lesquels l'effet de la croissance du nombre moyen d'années d'éducation par travailleur sur la croissance du PIB par tête est négatif et significatif. Au contraire des auteurs précédemment cités, il considère que ce résultat n'est pas dû à la mauvaise qualité des données disponibles ou à des méthodes empiriques défaillantes. Il existerait bel et bien un « paradoxe micro/macro » c'est-à-dire que les effets microéconomiques avérés de l'éducation sur les revenus individuels n'auraient pas d'équivalent macroéconomique en termes de croissance. Pritchett insiste sur l'hétérogénéité des pays : l'effet négatif obtenu dans une régression utilisant des données internationales n'est qu'une moyenne d'effets positifs dans certains pays, négatifs dans d'autres, et ce sont ces derniers qu'il convient d'expliquer.

1 Ch.BAUDELOT et F.LECLERQ -op. cit- p.112.

2 Marc GURGAND , -op. cit- P 82.

Pritchett avance trois hypothèses. Premièrement, l'environnement institutionnel des pays en question pourrait être tel que des activités rentables individuellement mais contre-productives socialement, notamment la « recherche de rentes » constituent le principal débouché des diplômés. Le secteur public absorbe ou, du moins, a longtemps absorbé, jusqu'aux programmes d'ajustement structurel des années 1980 et 90, une part importante des diplômés dans les pays en développement, alors que sa productivité est souvent faible. Si les salaires de la fonction publique sont fixés en fonction de l'éducation, les rendements privés de celle-ci peuvent être élevés sans que les rendements sociaux le soient. Il est même possible que l'augmentation du nombre de jeunes éduqués accroisse la pression sur un gouvernement pour qu'il crée ou maintien des emplois publics indépendamment de leur contribution productive.

Deuxièmement, faute de transformations structurelles de l'économie suffisamment rapides, la demande de travail qualifié peut stagner alors même que les progrès de la scolarisation en accroissent fortement l'offre : L'augmentation du niveau d'éducation de la population peut déclencher une baisse de son rendement, d'où une corrélation négative entre éducation et croissance des revenus. Cette hypothèse pourrait s'appliquer en particulier à ceux des pays en développement dont la croissance a été faible depuis les années 70 ou 80.

Troisièmement, Pritchett évoque aussi la mauvaise qualité des écoles dans nombre de pays en développement (l'augmentation du nombre moyen d'années d'études pourrait n'avoir guère créé de capital humain) et la possibilité que le « tri par l'éducation » explique une part importante de l'effet microéconomique de l'éducation.

L'argumentation de Pritchett est contestable si l'on considère que ce n'est pas l'existence d'un impact positif de l'éducation sur la croissance qui est en cause, mais sa mesure. Ainsi, Topel(1999), se référant à une version de l'article antérieure à sa publication, montre que le coefficient significatif et négatif de l'éducation est dû à la façon dont Pritchett mesure le capital humain, qu'il considère erronée.

Ainsi, l'existence d'un effet positive de l'éducation sur la croissance, est un sujet qui suscite un débat économétrique très passionnant, et qui n'est pas actuellement en mesure de donner une réponse claire à ce problème.

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"Entre deux mots il faut choisir le moindre"   Paul Valery