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L'ONU et la démocratie

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par Salwa HAMROUNI
Faculté des sciences juridiques, politiques et sociales de Tunis - D.E.A. de droit public et financier 1996
  

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PARAGRAPHE DEUXIÈME

LA PORTÉE AMBIVALENTE
DU PRINCIPE D'ÉLECTIONS PÉRIODIQUES ET HONNÊTES

La promotion du principe d'élections périodiques et honnêtes n'a pris un relief particulier au sein de l'O.N.U. qu'après le changement de l'équilibre politique dans l'Organisation. Avant cette période, le droit international "ne se souciait même pas, toujours au nom de la non ingérence, de savoir si le principe même du choix, indépendamment de ses modalités d'exercice est consacré "68.

Cet état des choses nous explique en quelque sorte l'attitude qu'a affichée l'Assemblée Générale de l'O.N.U. en adoptant non seulement des résolutions relatives au "renforcement de l'efficacité du principe d'élections périodiques et honnêtes" mais aussi des résolutions sur le "respect des principes de la souveraineté nationale et de la non ingérence dans les affaires intérieures des États en ce qui concerne les processus électoraux".

L'analyse de ces résolutions nous permettra de démontrer qu'il s'agit de résolutions ambivalentes en elles-mêmes (A) et surtout de résolutions contradictoires entre elles (B).

A. Des résolutions ambivalentes en elles-mêmes

A partir de sa quarante troisième session, l'Assemblée Générale de l'O.N.U. a décidé d'inclure la question du "renforcement de l'efficacité du principe d'élections périodiques et honnêtes" dans l'ordre du jour de sa quarante quatrième session. Ainsi de 1988 à 1994, sept résolutions ont été adoptées dans ce sens : la résolution 43/157 du 8 décembre 1988, la résolution 44/146 du 15 décembre 1989, la résolution 45/150 du 18 décembre 1990, la résolution 46/137 du 17 décembre 1991, la résolution 47/139 du 18 décembre 1992, la résolution 48/131 du 20 décembre 1993 et

68 BEN ACHOUR (R), art. cit. p. 198.

la résolution 49/190 du 23 décembre 1994. Cette dernière ayant pour titre "Affermissement du rôle de l'Organisation des Nations Unies aux fins du renforcement de l'efficacité du principe d'élections périodiques et honnêtes et de l'action en faveur de la démocratisation".

Une vue globale sur l'ensemble de ces résolutions nous permet de dire que, déjà au niveau de l'intitulé, l'organe plénier de l'O.N.U. nous fait savoir qu'il ne s'agit que d'un renforcement de l'efficacité du principe d'élections périodiques et honnêtes autrement dit, l'Assemblée Générale considère que le droit aux élections périodiques et honnêtes est bien établi comme un principe en droit international, son efficacité est relative et elle doit être renforcée. De cette manière, les destinataires de ses résolutions comprendront que l'O.N.U. n'est pas en train de créer une nouvelle obligation pour les États mais qu'elle ne fait que rappeler à ces États leur devoir de respecter la volonté de leurs peuples qui fonde l'autorité des pouvoirs publics et qui, par conséquent, légitime ce pouvoir.

La première résolution adoptée par l'Assemblée Générale à savoir la résolution 43/157, a constitué une innovation dans la position de l'O.N.U. c'est pourquoi nous jugeons nécessaire l'analyse de ses dispositions significatives.

La résolution 43/157 a commencé, dans son préambule, par le rappel de l'obligation que lui impose la Charte des Nations Unies de développer et d'encourager le respect des droits de l'Homme et des libertés fondamentales pour tous. Par conséquent, l'Assemblée Générale a réaffirmé, en reprenant les termes de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme, et du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, "que toute personne a le droit de prendre part à la direction des affaires publiques de son pays soit directement, soit par l'intermédiaire de représentants librement choisis, que toute personne a le droit à accéder, dans des conditions d'égalité aux fonctions publiques de son pays, que la volonté du peuple est le fondement de l'autorité des pouvoirs publics et que cette volonté doit s'exprimer par des élections honnêtes qui doivent avoir

lieu périodiquement, au suffrage universel égal et au vote secret ou suivant une procédure équivalente assurant la liberté de vote"69.

L'Assemblée Générale a également noté les dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques qui prévoit que tout citoyen a droit, sans distinction aucune "de prendre part à la direction des affaires publiques, soit directement, soit par l'intermédiaire de représentants librement choisis, de voter et d'être élu au cours d'élections périodiques, honnêtes, au suffrage universel et égal et au scrutin secret, assurant l'expression libre de la volonté des électeurs et d'accéder dans des conditions générales d'égalité, aux fonctions publiques de son pays".

Jusque là, on peut très bien voir que l'O.N.U. n'hésite pas à annoncer sa préférence pour le modèle démocratique fondé, entre autres sur la liberté, l'honnêteté et la périodicité des processus électoraux, plus, on peut même confirmer qu'il existe "une profession de foi voir une tentative de fondement juridique d'une norme de légitimité démocratique"7°.

Seulement, après ces passages, l'Assemblée Générale de l'O.N.U. semble prendre une position contraire en rappelant "que tous les États jouissent de l'égalité-souveraine et que chaque État a le droit de choisir et de développer librement son système politique, social, économique et culturel".

Nous remarquons donc que, dans deux passages successifs, l'Assemblée Générale a rappelé deux principes antinomiques en ce sens qu'à partir du moment où on reconnaît aux États une liberté de choix de leur système politique, on doit se désintéresser de la manière suivant laquelle fonctionne ce système, à moins qu'on admette que le moyen du choix des gouvernants est indépendant du choix du système politique d'un État, ce qui est, à notre sens insensé.

Toutefois, le dispositif de cette résolution a résolu cette contradiction en
écartant le droit de l'État de choisir librement son système politique. En
effet, l'Assemblée Générale de l'O.N.U. a souligné sa conviction "que les

69 Résolutions et décisions adoptées par l'Assemblée Générale au cours de sa Quarante Troisième session, volume I, 20 septembre - 22 décembre 1988, documents officiels, Supplément N° 49.

LAGHMANI (S), art. cit. p. 269.

élections périodiques et honnêtes sont un élément nécessaire et indispensable des efforts soutenus visant à protéger les droits et intérêts des administrés et que, comme le montre l'expérience pratique, le droit de chacun de prendre part à la direction des affaires publiques de son pays est un facteur crucial de la jouissance effective par tous d'un grand nombre d'autres droits de l'Homme et libertés fondamentales y compris les droits politiques, économiques, sociaux et culturels".

L'organe plénier de l'O.N.U. a même déclaré dans la résolution 43/157 que "pour déterminer la volonté du peuple il faut un processus électoral offrant des choix différents et que ce processus doit donner à tous les citoyens des chances égales de devenir candidats et de faire valoir leurs vues politiques, que ce soit à titre individuel ou conjointement avec d'autres". Cette résolution exige donc des États l'organisation d'élections pluralistes et bien qu'elle s'adresse directement à l'Afrique du Sud, la résolution 43 / 157 a réconforté les partisans du régime démocratique libéral qui ont considéré que "l'Assemblée Générale avait donc finalement reconnu que l'exigence des élections libres; du suffrage universel et de la liberté d'opinion politique pour l'Afrique du Sud ne pouvait pas être limitée à ce pays il s'agissait d'une exigence universelle de démocratie"71.

Cette même résolution a provoqué la crainte de certains pays, jaloux d'une souveraineté difficilement acquise, qui ont insisté au cours des débats sur le fait qu'aucune ingérence extérieure ne doit toucher à leur souveraineté72.

La diversité des attitudes des États Membres de l'O.N.U. a suscité quelques modifications dans la position de l'Assemblée Générale lors de sa quarante quatrième session. En effet, dans sa résolution 44/146 portant le même titre que la précédente et après avoir fait référence à la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme et au Pacte international relatif aux droits civils et politiques garantissant le droit aux élections périodiques et honnêtes; l'Assemblée Générale a rappelé également qu' "il n'existe aucun système politique ni aucune méthode électorale qui puisse convenir également à

71 BEIGBEDER (Y), op. cit. p. 57.

72 Le pluralisme politique prévu implicitement par la résolution 43/157 se concilie mal avec les constitutions de certains États à parti unique tel que la Zambie. voir BEIGBEDER, op. cit., p. 58.

toutes les nations et à tous les peuples"73. Ce considérant reflète la position des pays du sud qui évoquent toujours leurs différences économiques, sociales et culturelles pour ne pas se voir imposer un système politique de type occidental.

Dans le dispositif de cette résolution, l'Assemblée Générale a déclaré que "pour déterminer la volonté du peuple il faut un processus électoral qui donne à tous les citoyens des chances égales de devenir candidats et de faire valoir leurs vues politiques que ce soit à titre individuel ou conjointement avec d'autres, dans le cadre délimité par la constitution et la législation nationale".

Bien que l'expression "offrant des choix différents" ait disparu pour être remplacée par la référence à "la constitution et la législation nationales", nous pouvons trouver dans cet extrait un fondement du pluralisme politique par la référence faite au droit de devenir candidat à titre individuel ou conjointement avec d'autres.

Ce caractère indécis de l'organe plénier de l'O.N.U. traduit une polémique entre les États Membres de cette Organisation qui, chacun de son côté, essayent de faire prévaloir l'un des deux principes contradictoires.

La résolution 44/146 a essayé de concilier les deux principes en considérant "que les efforts déployés par la communauté internationale pour renforcer l'efficacité du principe d'élections périodiques et honnêtes ne doivent pas remettre en question le droit souverain qu'à chaque État de choisir et d'élaborer librement ses systèmes politique, social, économique et culturel, que ceux-ci soient conformes ou non aux préférences d'autres États". L'Assemblée Générale a même souligné que "chacun des membres de la communauté internationale est tenu de respecter les décisions prises par les autres États dans l'exercice de leur droit de choisir et d'organiser librement leurs institutions électorales".

On peut dire à ce propos que, bien qu'elle soit relative au renforcement de
l'efficacité du principe d'élections périodiques et honnêtes, la résolution

73 Résolutions et décisions adoptées par l'Assemblée Générale au cours de sa quarante quatrième session, volume I, 19 septembre - 29 décembre 1989, documents officiels, supplément N° 49.

44/146 semble atténuer la portée de sa précédente. En fait, en lisant cette résolution on ne peut pas affirmer que l'O.N.U. a été catégorique quant à l'obligation d'organiser des élections libres et pluralistes.

De sa quarante cinquième à sa quarante neuvième session, l'Assemblée Générale de l'O.N.U. a donné aux résolutions relatives au "renforcement de l'efficacité du principe d'élections périodiques et honnêtes" une portée plutôt opérationnelle.

En effet, la résolution 45/150 du 18 décembre 1990 a repris termes de la résolution 44/146 en ajoutant des dispositions concernant l'action concrète de l'O.N.U. en vue de promouvoir l'efficacité du principe d'élections périodiques et honnêtes. C'est pour cette raison que l'Assemblée a affirmé "la valeur de l'assistance électorale que l'organisation des Nations Unies a apporté à certains États Membres, sur leur demande, et dans le strict respect de leur souveraineté"74. De plus, l'Assemblée Générale a considéré "que la communauté internationale devait continuer d'examiner avec soin les moyens par lesquels l'Organisation des Nations Unies peut répondre aux demandes des États Membres désireux de développer et de renforcer leurs institutions et procédures électorales"75.

Cette résolution est donc la première dans laquelle l'Assemblée Générale de l'O.N.U. donne un caractère concret à sa préférence pour le principe d'élections périodiques et honnêtes en insistant sur la valeur de l'assistance électorale. C'est ce qui explique peut être qu'elle n'a pas été adoptée sans vote comme les précédentes76.

Pour le reste, les résolutions 46/137, 47/138, 48/131 et 49/190 n'ont fait que donner suite au principe d'élections périodiques et honnêtes en prévoyant les moyens nécessaires pour garantir son efficacité.

L'étude des résolutions adoptées par l'Assemblée Générale de l'O.N.U. en
vue de promouvoir le principe d'élections périodiques et honnêtes nous a

74 Résolutions et décisions adoptées par l'Assemblée Générale au cours de sa quarante cinquième session, volume I, 18 septembre - 21 décembre 1990, documents officiels, supplément N°19.

75 Ibid.

76 Cette résolution a été adoptée par une majorité de 129 votes pour, huit votes contre et neuf abstentions.

permis de constater que, tout en essayant de créer à la charge des États l'obligation de respecter la volonté de leurs gouvernés telle qu'elle s'exprime par des élections périodiques et honnêtes, elles n'ont pas omis de se référer au principe de la souveraineté des États et de leurs droits à choisir librement leurs systèmes politiques.

C'est de là précisément que provient l'ambivalence de ces résolutions une ambivalence qui s'est accentuée lorsque l'Assemblée Générale de l'O.N.U. a adopté des résolutions situées aux antipodes de celles que nous venons d' analyser.

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"Il faut répondre au mal par la rectitude, au bien par le bien."   Confucius