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Evolution et Perspectives du Contrôle des Prix de Transfert en Afrique

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par Albert ATANGANA
Ecole Supérieure de Commerce de Rouen - Mastère Spécialisé Management, Droits des Affaire et Fiscalité 2007
  

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INTRODUCTION

Les phénomènes de concentrations d'entreprises sont apparus au 19e siècle1(*) avec la révolution industrielle en Europe occidentale et en Amérique du nord, puis en Asie et surtout au Japon. Ces phénomènes se sont poursuivis au cours du 20e siècle, marqué non seulement par le passage du capitalisme industriel à un capitalisme financier et cognitif,2(*) mais aussi par l'émergence de nouveaux modes de regroupements d'entreprises plus ou moins complexes,3(*) dont le groupe de sociétés constitue la forme la plus aboutie.

Economiquement, le groupe de sociétés est un « ensemble des sociétés dépendant d'un même centre de décision [...] ».4(*) Un auteur souligne que le groupe se caractérise par l'existence d'une pluralité d'entités juridiques, dont le degré d'autonomie réelle dépend de la nature et de l'organisation des pouvoirs qu'exerce sur elles une holding, qui a vocation à faire prévaloir une unité de décision, notamment en ce qui concerne la définition et la mise en oeuvre de la stratégie de développement.5(*) Il s'agit d'un système abouti de relations marquées par la dépendance économique et régies par un pouvoir centralisé6(*).

Juridiquement le groupe de sociétés peut se définir comme : « l'ensemble constitué par plusieurs sociétés, ayant chacune leur existence juridique propre, mais unies entre elles par des liens divers en vertu desquels l'une d'elles, dite société mère, qui tient les autres sous sa dépendance, exerce un contrôle sur l'ensemble et fait prévaloir une unité de décision »7(*). Le droit positif des sociétés8(*) ne reconnaît pas la personnalité morale du groupe. La jurisprudence comme la doctrine, dans la majorité des cas, insistent sur deux idées essentielles, à savoir, d'une part, l'existence d'unités juridiques indépendantes mais unies entre-elles, et d'autre part, l'existence d'une société mère qui tient les autres sous sa dépendance, exerce un contrôle sur l'ensemble et fait prévaloir une unité de décision.9(*)

Du point de vue comptable et de l'information financière, le groupe de sociétés correspond à un ensemble d'entités juridiques dont les comptes doivent être consolidés. L'objectif de la consolidation10(*) est de présenter la situation financière et les résultats d'un ensemble de sociétés comme si ces dernières ne formaient qu'une seule société composée de départements, divisions ou succursales.

Fiscalement, le groupe de sociétés n'est, en principe, pas considéré comme étant une entité fiscale autonome. Chaque société membre est donc dotée de la pleine personnalité et de l'autonomie fiscale. L'une des conséquences majeures de cette règle est le strict respect de l'intérêt de chaque société dans l'imposition des transactions intragroupes et le fait que la notion d'intérêt de groupe n'autorise pas ses membres à déclarer un résultat fiscal différent de celui qu'ils auraient réalisé en l'absence de groupe.

Il apparaît donc que le groupe de sociétés constitue une réalité pluridimensionnelle. Un auteur l'a défini comme étant un « ensemble de structures sociales autonomes mais interdépendantes, car réunies par des intérêts et/ou des moyens communs et selon des systèmes spécifiques »11(*). Sous une approche pragmatique, on peut appréhender le groupe de sociétés comme une modalité d'organisation de l'entreprise. Cette dernière en tant qu'organisation exerçant notamment une activité de production et de distribution de biens et de services12(*) a pour finalité la réalisation de profits. C'est l'objectif ultime qui justifie le risque économique et financier encouru par ses fondateurs et propriétaires.

Dans un contexte de mondialisation de l'économie, l'environnement des affaires de plus en plus concurrentiel oblige les entreprises à rechercher de nouveaux débouchés dans le monde, afin d'accroître leur chiffre d'affaires et leurs bénéfices pour se positionner comme leader de leur secteur d'activité13(*). Certes, il ne s'agit pas seulement d'expansion géographique, mais également de l'intégration de tous les métiers liés à l'activité du groupe.14(*) Néanmoins, la mise en oeuvre d'une stratégie de développement international suppose que les groupes d'entreprises étendent leur présence par l'implantation de filiales et représentations commerciales à l'étranger.15(*)

Sur le plan fiscal, les différentes filiales et succursales d'un groupe international sont assujetties, à titre individuel, aux impôts, droits, taxes et cotisations institués par les législations fiscales de leurs pays de domiciliation.16(*) Les conventions fiscales bilatérales permettent quelquefois à un groupe international d'éviter une double imposition économique17(*) des bénéfices et flux transfrontaliers. Toutefois, du point de vue de l'imposition du résultat de l'ensemble du groupe, les souverainetés fiscales nationales ne tiennent pas compte du groupe international en tant qu'unité économique, de telle sorte que celui-ci peut être soumis à l'impôt sur les bénéfices dans un ou plusieurs pays du fait de résultats bénéficiaires réalisés par certaines filiales, quand bien même le résultat consolidé du groupe serait déficitaire. Il existe, certes, des régimes dérogatoires18(*) dans certains pays permettant aux groupes de sociétés de déduire les pertes réalisées par les filiales étrangères pour la détermination du résultat fiscal consolidé. Ces mécanismes de faveur sont cependant marginaux et la majorité des groupes internationaux restent confrontés à la question d'une circulation rationnelle des revenus à l'intérieur de l'ensemble économique. Cet aspect peut devenir particulièrement complexe lorsqu'on envisage un groupe international possédant plusieurs milliers de filiales.19(*) Compte tenu de l'impact financier des impositions sur le revenu net des groupes internationaux, les centres de management des sociétés multinationales n'ignorent pas les considérations fiscales dans leurs prises de décisions quotidiennes comme sur le plan stratégique. De telles considérations pourraient, en effet, commander les options prises par les dirigeants lorsqu'ils déterminent le prix d'une opération internationale réalisée entre deux entités du groupe (Annexe 1)20(*).

Selon la définition de l'Organisation de Coopération et de Développement Economiques (OCDE), les prix de transfert sont «les prix auxquels une entreprise transfère des biens corporels, actifs incorporels, ou rend des services à des entreprises associées».21(*) Le Guide des prix de transfert22(*) considère notamment comme tel tout « flux intragroupe et transfrontalier, refacturation de coût... ». Au sens du Forum Européen Conjoint sur les Prix de Transfert : « La notion de prix de transfert s'applique à deux parties liées et concerne les prix pratiqués entre entreprises associées établies sur des territoires fiscaux différents pour leurs transactions intragroupe, telles que le transfert de biens et de services ».23(*) Ils se définissent plus simplement comme étant les prix des transactions entre sociétés d'un même groupe24(*) résidentes d'États différents. Il s'agit donc d'opérations d'import-export au sein d'un même groupe, ce qui exclut toute transaction à l'international avec des sociétés indépendantes, ainsi que toute transaction intragroupe sans passage de frontière.25(*)

Toute entreprise quelle que soit sa taille est confrontée à la problématique du prix de transfert dès lors qu'elle conduit des transactions internationales qui impliquent des sociétés liées. Les entreprises sont concernées non seulement pour les ventes de biens et de marchandises, mais également pour toutes les prestations de services intragroupes incluant le partage de certains frais communs entre plusieurs entreprises du groupe (frais d'administration générale ou de siège), la mise à disposition de personnes ou de biens, les redevances de concession de brevets ou de marques et les relations financières. Les prestations de services non rémunérées et les mises à disposition gratuite de personnel ou d'éléments incorporels entre entreprises associées sont également concernées.

L'OCDE a posé le principe selon lequel les transactions commerciales et financières internationales entre sociétés liées doivent se conclure dans des conditions de pleine concurrence au même titre que celles qui seraient réalisées entre entités indépendantes. 26(*) Le principe de pleine concurrence constitue la norme internationale qui autant que possible27(*) doit être utilisée pour la détermination des prix de transfert à des fins fiscales. Ce principe est défini comme suit par l'article 9.1.b) du modèle de convention OCDE : "Lorsque les deux entreprises sont, dans leurs relations commerciales ou financières, liées par des conditions convenues ou imposées qui diffèrent de celles qui seraient convenues entre des entreprises indépendantes, les bénéfices qui, sans ces conditions, auraient été réalisés par l'une des entreprises mais n'ont pu l'être en fait à cause des conditions, peuvent être inclus dans les bénéfices de cette entreprise et imposés en conséquence". Les législations fiscales des Etats28(*) prévoient dans le même sens que les prix des transactions entre entreprises d'un même groupe doivent être conclues dans des conditions de pleine concurrence faute de quoi ceux-ci peuvent faire l'objet de redressements fiscaux. Il convient de relever à cet égard que la détermination des bénéfices imputables à un établissement stable situé dans un Etat étranger pose également des questions connexes aux prix de transfert dans la mesure où cet établissement stable doit obtenir une rémunération de pleine concurrence de la même manière qu'une entreprise indépendante.29(*)

Ceci étant dit, des observateurs avertis30(*) reconnaissent aujourd'hui que la problématique que soulève la question des prix de transfert constituent un sujet de préoccupation de plus en plus récurrent pour les dirigeants, financiers, comptables, fiscalistes et conseils31(*) d'entreprises ayant une activité internationale. En effet, on constate sur le plan international que les Etats mettent progressivement en place des réglementations strictes imposant aux multinationales des méthodes de calcul précises. On note par ailleurs une attention croissante des administrations fiscales qui s'attachent à vérifier les conditions dans lesquelles les entreprises liées concluent entre elles leurs transactions.

Afin de mieux cerner le contexte de ce travail, il nous a paru judicieux de clarifier la typologie des opérations internationales des entreprises (1), avant de mettre en exergue la notion de transfert indirect de bénéfices (2).

* 1 http://fr.wikipedia.org/wiki/Trust_%28%C3%A9conomie%29: C'est en effet durant cette période que naissent les premiers conglomérats issus des concentrations verticale et horizontale d'entreprises (trust, konzern, zaibatsu).

* 2 Capitalisme de la « connaissance » en raison de l'importance économique croissante des aspects liés à la propriété intellectuelle et aux nouvelles technologies de l'information et de la communication. Cf. notamment BENCHIMOL (G), L'entreprise à l'heure de l'économie de la connaissance, Guy Benchimol, 2006.

* 3 Sous-traitance, fabrication et recherche en commun, accords de distribution et de franchise, sociétés en participation, filiales communes, groupement d'intérêt économique ou groupement européen d'intérêt économique, groupements momentanés d'entreprises.

* 4 PIRIOU, Jean-Paul (CB). Lexique des sciences économiques et sociales, 8ème édition, Éditions La Découverte, 2007, 62.

* 5 DESPALLENS, (G), Gestion financière de l'entreprise, Paris, Dunod, 1997.726

* 6 MONTIER (J.), La diversité de la notion de groupe, Revue Française de Comptabilité, 1995

* 7 Mémento Pratique Francis Lefebvre - Groupe de Sociétés - Juridique, Fiscal, Social, Francis Lefebvre, édition 2003/2004

* 8 Exemple Cass. Com. 18-10-1994 : RJDA 12/94 n°1298

* 9 GUYON Yves, Droit des affaires, Tome 1, Droit commercial général et des sociétés, 11e édition mise à jour 7 octobre 2002, n°580 et suivants.

* 10 Cf. PCG, p. II. 141, US GAAP normes SFAS No. 94, normes IAS 27 paragraphe 6 (Nota depuis le 1er avril 2001 les normes comptables internationales adoptées par l'IASB ont pris la dénomination de normes IFRS.

* 11 REY (Mathias), La responsabilité du dirigeant dans les groupes de sociétés en droit français, Mémoire de DEA, Université de Paris 1 Panthéon Sorbonne, 2005/2006.

* 12 GUYON (Y) op. cit. n°644. L'entreprise est principalement une notion économique. Il s'agit d'une unité de décision regroupant des moyens matériels, financiers et humains dans le but de produire des biens et services afin de générer un profit. Elle suppose donc la réunion de trois éléments : le capital, le travail et les organes de décision.

* 13 http://www.total.com/fr/finance/annual_general_meetings/agm-2007_11863.htm Illustration de l'internationalisation de la vie des affaires, le groupe pétrolier Total a réalisé un bénéfice net de 12 milliards d'euros en 2006 dont près de 90% de ce montant hors de France.

* 14 Par exemple en amont (R&D), en aval (après-vente) etc.

* 15 http://www.observateurocde.org/news/fullstory.php/aid/353/Prix_de_transfert_:__le_principe_de_pleine_concurrence___.html: « 60 % des échanges mondiaux sont le fait d'entreprises multinationales »

* 16 Application du principe de la territorialité de l'impôt.

* 17 L'article 23 A et B des modèles de conventions fiscales OCDE et ONU prévoit deux mécanismes d'élimination de la double imposition : l' « exemption » et l'« imputation »

* 18 En France, régime du bénéfice mondial accordé sur agrément.

* 19 Vivendi Universal en possédait 3 000 dans le monde entier en 1999, source Journal « Le Monde », 20 octobre 1999.

* 20 Cf. page 83 : Illustration de l'incidence fiscale d'un transaction intragroupe.

* 21 Organisation de Coopération et de Développement Economique (OCDE), Principes applicables en matière de prix de transfert à l'intention des entreprises multinationales et des administrations fiscales, Edition 1995, réimprimé en 1998, P-3.

* 22 Les prix de transfert, Guide à l'usage des PME, Direction générale des impôts du Ministère français de l'Economie, des Finances et de l'Industrie, 2006.

* 23 http://ec.europa.eu/taxation_customs/resources/documents/taxation/company_tax/transfer_pricing/forum/MEMO-05-414-fr.pdf: MEMO/05/414 Code conduite relatif à la documentation en matière de prix de transfert dans l'UE, Bruxelles, 2005.

* 24 Le terme utilisé par l'OCDE est celui de « entreprises associées ». Les principes de l'OCDE prévoient que deux entreprises sont associées si l'une d'elles remplit vis-à-vis de l'autre entreprise les conditions fixées par l'article 9 alinéa 1a) ou 1b du Modèle de convention fiscale de l'OCDE. Il s'agit en substance de deux entreprises appartenant à un même groupe.

* 25 GOUTHIERE (B), Les impôts dans les affaires internationales, Francis Lefebvre, 6e éd., 2004, n°2639 : En droit français, lorsqu'elle estime que le prix d'une transaction internationale dissimule une évasion fiscale, l'Administration peut invoquer l'acte anormal de gestion ou le transfert indirect de bénéfice à l'étranger. Toutefois, si elle entend se fonder sur l'acte anormal de gestion, elle doit non seulement établir la minoration, mais l'élément intentionnel, alors que pour l'application de l'article 57 du CGI, la preuve de la minoration suffit.

* 26 Principes OCDE, G-8, I-1 et suivants.

* 27 L'OCDE n'étant pas un législateur, ses recommandations ont surtout une portée didactique.

* 28 En France, article 57 CGI

* 29 Voir sur ce point : OCDE Rapport de référence sur l'attribution de bénéfices aux établissements stables, 2 août 2004, partie I, pages 15 et suivantes.

* 30 BERGER (F), Contrôle fiscal ; Les prix de transfert dans le collimateur des administrations fiscales, Option Finance n°904, 30/10/2006.

* 31 Voir à ce sujet l'Avis du Conseil National des Barreaux - Commission des règles et activités «d'économiste» dans la profession d'avocat du 16 novembre 2007.

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