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La protection du creancier gagiste du fonds de commerce en droit positif rwandais

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par Modeste BISANGWA
Université Nationale du Rwanda - Bachelor's degree in law 2005
  

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B. Conflit du créancier gagiste du fonds de commerce et les créanciers chirographaires saisissants

Le débiteur gagiste n'a plus que le créancier gagiste. Il peut avoir d'autres créanciers fussent-ils chirographaires. La constitution du gage du fonds de commerce n'a pas pour effet de priver lesdits créanciers du droit de saisir-exécuter les éléments du fonds auxquels cette voie d'exécution s'applique160(*). Néanmoins, lorsque les créanciers chirographaires ont fait usage à leur droit de saisie, le droit du créancier gagiste du fonds de commerce se rapporte sur les deniers provenant de la vente161(*).

Dans un cas d'espèce, l'art. 9 de la loi belge du 25 octobre 1919 portant vente et nantissement du fonds de commerce protège le créancier gagiste du fonds de commerce en cas de saisie-exécution pratiquée sur tout ou partie des actifs qui composent le fonds, par un autre créancier. Cet article lui reconnaît le droit de former opposition entre les mains de l'huissier instrumentant. Selon T'KINT, cette règle contraint l'huissier par voie de conséquence à vérifier chaque fois si les fonds dont les éléments ont été saisis n'est pas grevé d'un gage et dans l'affirmative à prendre en compte la sûreté lorsqu'il s'agira de répartir le produit de la vente162(*). Lorsque les deniers ont été distribués aux créanciers saisissants au mépris du privilège du créancier gagiste, celui-ci garde une action en dommages et intérêts contre l'huissier qui a procédé à cette répartition sans avoir vérifié au greffe si le fonds est libre de tout droit de gage et sans avoir prévenu le créancier gagiste163(*). Le créancier ne peut pas réclamer des saisissants la restitution des sommes reçues.

C. Concours avec le créancier hypothécaire

Ni le décret hypothécaire, ni celui sur la mise en gage du fonds de commerce ne donnent aucune indication à cet égard. Le conflit entre le créancier gagiste du fonds de commerce et le créancier hypothécaire ne peut surgir que quand le débiteur gagiste est en même temps propriétaire de l'immeuble dans lequel est exploité le fonds. En effet, il faut envisager un cas où une hypothèque grève le mobilier et l'outillage immobilisé par destination. Or, pour qu'il en soit ainsi, il faut que le propriétaire des meubles soit aussi propriétaire de l'immeuble par nature (art. 8 du CCL II).

Le conflit entre ces deux créanciers semble se résoudre assez aisément, car les deux sûretés sont soumises à une publicité. Dès lors il suffit d'appliquer la règle de l'antériorité de droits « prior tempore, potior jure ». L'application de cette règle suppose que soit admise l'inclusion des immeubles par destination dans l'assiette du gage du fonds de commerce164(*), question qui a fait longtemps problème165(*).

A ce propos, Jacques HEENEN dans sa note sous Liège 4 juin 1963166(*) a exposé 4 thèses qui s'affrontent. Selon la première thèse, le matériel n'est jamais compris dans le gage lorsque le fonds de commerce est exploité dans un immeuble appartenant au commerçant. Le motif à l'appui de cette thèse est que les art. 8 et 9 de la loi belge du 17 Mars 1909 (équivalent à notre art. 2 du Décret de 1937), en disposant que le mobilier commercial et l'outillage servant à l'exploitation du fonds sont susceptibles d'être compris dans le nantissement n'ont pas modifié le caractère du contrat de gage en ce que celui-ci ne peut avoir pour objet que les choses mobilières.

- La deuxième thèse se résume de la manière suivante : L'inscription du gage fait cesser ou empêche l'immobilisation par destination du matériel.

- La troisième thèse : Le matériel affecté à l'exploitation après l'inscription du gage est grevé en premier rang par celui-ci et ensuite par l'hypothèque.

- La quatrième thèse admet le concours entre le créancier hypothécaire et le créancier gagiste sur le matériel, quel que soit le moment de l'affectation. C'est cette thèse qui a été adoptée par plusieurs auteurs et jurisprudence167(*). Selon cette thèse le matériel affecté à l'exploitation par le propriétaire de l'immeuble peut être grevé du gage sur le fonds de commerce tout en restant un immeuble par destination. Si une hypothèque a en outre été consentie, le concours entre les deux sûretés se règle par la date de l'inscription de chacune d'elles : le premier inscrit aura la préférence, quel que soit le moment de l'affectation au service du fonds168(*).

Le droit Rwandais semble avoir consacré implicitement cette thèse. En effet, l'art. 24 du décret hypothécaire étend l'hypothèque aux immeubles par destination. Par contre, selon l'art. 2 du décret de 1937 le gage comprend notamment le mobilier et l'outillage. De l'analyse de ces deux dispositions on en conclut d'une part, que le mobilier et l'outillage peuvent faire l'objet d'hypothèque s'ils sont immobilisés par destination et d'autre part qu'ils peuvent faire l'objet du gage du fonds de commerce et le conflit entre le créancier hypothécaire et le créancier gagiste du fonds de commerce se règle par antériorité de droits.

D. Concours avec le porteur du warrant des marchandises et le créancier gagiste ordinaire

Le conflit entre le créancier gagiste du fonds de commerce et le porteur du warrant surgit lorsque le débiteur, ayant grevé le fonds de commerce de gage, consent un warrant sur les marchandises faisant partie du fonds déjà grevé. Or, comme il est de règle, les conflits entres les sûretés conventionnelles soumise à l'inscription se résout par la règle d'antériorité.

C'est cette solution qui a été consacrée par la cour de cassation belge dans son arrêt du 19 Nov. 1992 dans une affaire qui opposait l'INCA (l'Institut National du Crédit Agricole), porteur du warrant en concurrence de 50% des marchandises à SONAGES s.a et la Caisse Nationale de Crédit professionnel, toutes deux créanciers gagistes du fonds de commerce constitué par la société Maes s.a qui, dans la suite est tombée en faillite.

En l'espèce, l'INCA soutenait que les biens warrantés avaient cessé de faire partie de l'assiette du gage sur le fonds de commerce, qu'il n'y avait donc pas de concours entre lui et les deux autres protagonistes, car en tant que porteur du warrant son privilège s'exerçait sur les biens qui ne formaient plus l'assiette du privilège de ses protagonistes (créanciers gagistes du fonds de commerce).

Face à cette question, la cour de cassation énonce comme principe que la mise en gage n'enlève pas à l'exploitant du fonds de commerce la possession à titre de propriétaire des marchandises warrantées, et que ces marchandises continuent à faire partie du fonds de commerce du débiteur gagiste. L'une de ses motivations est libellée comme suit :

[...] « Attendu que le warrantage de biens faisant partie d'un fonds de commerce gagé n'a pas pour effet de modifier l'assiette du gage du fonds de commerce et partant, de contraindre le créancier à user des droits que lui confère l'art. 11 de la loi du 24 Oct. 1919 » 169(*)[...]

On déduit de ce jugement que même si le créancier conserve le pouvoir de disposer des biens isolés du fonds de commerce, et de les mettre en gage, le privilège procédant d'un engagement ultérieur d'un bien faisant partie du fonds nanti précédemment ne préjudicie en rien des rangs respectifs qu'il conviendra d'attribuer, le cas échéant aux privilèges en question. Le warrantage du fonds de commerce n'a pas pour effet de le faire échapper aux privilèges des créanciers antérieurs. En d'autres termes, les biens warrantés continuent de faire partie de l'assiette du gage du fonds de commerce et le conflit entre le créancier gagiste et le porteur du warrant des mêmes biens se règle par la règle d'antériorité des droits.

* 160 Répertoire pratique de droit belge, op. cit., n° 163.

* 161 Ibidem.

* 162 F. T'KINT, op. cit., n° 344, p. 179.

* 163 Répertoire pratique de droit belge, op. cit., n° 163

* 164 I. MOREAU MARGREVE, op. cit., p. 162 ; Répertoire pratique de droit belge, op. cit., n° 168 ; A-M. STRANART, op. cit , p. 44 ; Jacques HEENEN, note sous liège, 4 Juin 1963, R.C.J.B., 1964, p. 21.

* 165 STRANART, op. cit., p. 44.

* 166 L'arrêt peut se résumer comme suit : Un commerçant exploite son fonds de commerce dans un immeuble qui lui appartient ; il a donné le fonds en gage à un créancier et hypothèque l'immeuble au profit de l'autre. La question étant de déterminer les droits de chacun.

* 167 Répertoire pratique de droit belge, op. cit., n° 168, p. 810.

* 168 J. HEENEN, op. cit., p. 24.

* 169 Cass. belge, 19 nov., 1992, commenté par MARC VAN QUICKENBORNE, " Du concours entre le créancier gagiste du fonds de commerce et le gagiste classique", in R.C.J.B., 1994, pp 28-72.

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"Là où il n'y a pas d'espoir, nous devons l'inventer"   Albert Camus