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La délinquance dans le canton de Coussey durant le premier XIXème siècle

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par Hugues Herbillot
Université Nancy 2 - Master 2009
  

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d. Variables et évolutions au sein des coteries.

Les amitiés ne sont jamais figées, pour se perpétuer, elles doivent s'entretenir, nous avons vu avec quelle facilité la bonne entente entre voisin peut se muer en de vives querelles, il en va de même avec les amitiés au sein du village.

En 1826, à l'atelier de Charles Desprez, Etienne et son frère Charles se disputent violemment avec le maire François Grojean qui travaille avec eux. La querelle éclate à propos du travail réalisé, Alexandre se saisit d'un maillet et s'en sert pour agresser François qui porte immédiatement plainte309(*). Seize ans plus tard un scandale éclate au village, l'instituteur Chevillot battrait ses élèves, l'affaires est révélée par le maire. Parmi les témoins à charge, on retrouve Etienne Desprez310(*), celui qui avait frappé le maire seize ans plus tôt témoigne en sa faveur pour faire tomber Chevillot l'ennemi intime du maire. Ces retournement de situations sont assez rares, la tendance est plutôt à la permanence dans les relations villageoise à Grand.

Les amitiés au sein du village, nous l'avons vu, reposent sur quelques personnages influents et des familles de propriétaires. Cependant si certains membres d'une famille sont alliés à d'autres il n'en va pas de même pour la totalité de la famille, lorsque les enfants s'établissent en fondent de nouveaux foyers, ils peuvent s'éloigner de leur famille voir même devenir ennemis, à l'image des frères Biez311(*).

Les frères ne se choisissent pas toujours les même amis, Alexandre Durand fait partie de la coterie numéro deux. Il est un allié indéfectible du maire, mais ses frères Vincent et Etienne sont amis avec l'instituteur du village. Vincent Durand en 1840 témoigne en faveur de Chevillot, l'ennemi du maire. Etienne, le troisième frère témoigne lui aussi en faveur de l'instituteur contre le maire Grojean en 1842. Il existe quelques exemples de ce type, mais en général les ressortissants d'une même famille s'allient aux mêmes personnes ou au moins n'en sont pas ennemies.

e. Grojean et l'affaire de 1840.

· Grojean contre Chevillot.

Suite à l'étude approfondie des relations au sein du village de Grand, on observe nettement deux coteries et peut-être un troisième clan soutenant l'instituteur du village. Les divers clans interagissent entre eux à diverses reprises, ces relations conflictuelles se limitent pour la plupart à un seul individu du clan, on n'observe pas d'affrontements directs entre factions comme François Ploux les décrit dans le Quercy312(*). Cependant un conflit durable entre deux habitants du village permet d'observer le fonctionnement des diverses alliances. L'antagonisme du maire Grojean et de l'instituteur Chevillot est particulièrement intéressant313(*).

Le maire Grojean est en conflit depuis plusieurs années avec l'instituteur du village Etienne Chevillot qui lui conteste son autorité et l'outrage régulièrement. En juillet 1837, l'instituteur se dispute avec le maire en lui rétorquant, «- je ne vous reconnais aucune qualité314(*) ». Lors du procès le maire alors plaignant ne trouve que deux témoins, Joseph Marchand et sa femme ainsi que Jean-Baptiste Rollet. Le prévenu de son côté peut compter sur le soutient de sa femme, mais celui-ci se révèlera insuffisant puisque l'instituteur sera condamné.

· L'affaire des placards.

Trois ans plus tard en 1840, un nouveau conflit éclate entre les deux hommes, puis dégénère en entrainant une partie du village à témoigner en faveur du maire ou de l'instituteur. Le jugement produit ainsi quinze témoins à charges et onze à décharge. Ce conflit a pour origine un conflit de personnes, l'instituteur est visiblement jaloux du maire.

En 1840, Etienne Chevillot est prévenu d'avoir affiché des placards, monsieur Jeanson, le maire de Liffol-le-Grand est alors délégué par le comité d'arrondissement pour enquêter sur l'instituteur. Parallèlement le maire de Grand est dénoncé de « faire le métier de marchand d'avoine, de bois et de chasseur315(*) ». Cette dénonciation est la bienvenue pour Etienne Gérard, un opposant au maire et ami de Chevillot qui affiche un placard signé, où il se plaint du maire qui aurait ourdi un complot contre Chevillot. Sur son affiche il décrit l'instituteur comme ayant plus d'amis que le maire et que de nouvelles malveillances contre Chevillot sont imminentes. La « course au amis » est déterminante il s'agit ici de réunir le plus de témoins possibles en sa faveur pour gagner le procès.

Quelques jours plus tard, le 19 avril 1840 le maire publie la date de l'arrivée de Jeanson pour son enquête. Chevillot se sent menacé, et « un instant après a été cloué au-dessus de cette affiche deux autres qui ont été apposé de la part de l'instituteur, invitant les petits et les grands de se présenter le jour de l'enquête pour déposer en faveur de Chevillot316(*) ».

Le 21 avril, Jeanson arrive à Grand et se rend à la mairie pour les besoins de son enquête. Le liffolois dans son rapport décrit le climat ; «- une grande exaspération s'était manifestée dans cette commune le 21 du présent mois pendant une partie du temps qu'a duré mon enquête au sujet de l'instituteur, deux membres du conseil municipal avaient été insultés et avaient été obligés à se sauver et M. le maire lui-même avait été l'objet de la grossièreté de plusieurs personnes qui lui avaient manqué au point que si des individus ne s'étaient employés à le secourir dans le moment ( Jacques François, Alexandre Desprez et Nicolas Marchal), il y avait eu aurait sans doute quelques actes de violence contre lui317(*) ».

Pendant l'enquête Étienne Gérard, Charles Bertrand et Étienne Chevillot réunissent leurs partisans pour réunir le maximum de signatures sur la place publique du village, quand soudain deux conseillers municipaux passant par hasard « furent assaillis par la foule de telles sorte qu'ils furent obligés de se sauver et de se réfugier dans l'église318(*) ».

Les trois agitateurs forcent ensuite la porte de la mairie, le conseil municipal et le maire de Liffol se réfugient eux aussi dans l'église. « Le tumulte passé François Grojan tente une sortie mais il est aussitôt assailli par les trois individus dénommés ci-dessus (Chevillot, Bertrand, Gérard), une personne dans la foule s'élance sur le maire mais elle est aussitôt ramené chez elle319(*) ».

Cet épisode révèle les jeux d'alliances, Chevillot dispose de deux « lieutenants » qui sont ; Etienne Gérard et Charles Bertrand. L'affiche qu'Etienne placarde pour récolter des signatures a été réalisée par François Cottenot, son beau-frère. Lors de son procès l'instituteur compte dix soutiens320(*).

Le maire quand à lui, semble disposer d'un plus gros réseau de soutien321(*), trois membres de son groupe témoignent en sa faveur, ainsi qu'une bonne part de son conseil municipal, et neuf sympathisants. Sa suprématie de témoins lui permet de faire condamner l'instituteur et ses amis à 100 francs d'amende et à un mois de prison.

· L'affaire de 1842.

Deux ans après les « émeutes », le maire et l'instituteur s'affrontent à nouveaux en Justice. Le maire accuse l'instituteur de maltraiter ses élèves. Cette affaire produit à nouveau de nombreux témoins ; huit contre Chevillot et treize en sa faveur. Parmi les membres habituels du réseau Chevillot, on peut citer François Tabouret et Etienne Durand, Elophe Melcion un témoin favorable à Grojean dans l'affaire des placards semble avoir changé de camps puisqu'il apparaît dans les soutiens de Chevillot dans cette affaire. Le maire est lui épaulé par son lieutenant habituel François Guerre et par Marchal Nicolas un autre habitué.

Les témoins sont moins nombreux dans ce procès car seuls les élèves et leurs parents témoignent ce qui écrème les réseaux traditionnels des deux camps. Cette fois c'est l'instituteur qui gagne et qui est finalement relaxé.

Cet affrontement incessant entre les deux individus permet d'observer le jeu des alliances et les stratégies mise en place pour gagner un procès en se basant sur son réseau de solidarité pour gagner un procès.

Les réseaux de solidarité sont finalement plus actifs dans l'entraide que dans l'affrontement avec d'autres familles. Les conflits d'individus soutenus, montrent que les coteries défendent les leurs au moment des procès en témoignant en leur faveur. Le maire, premier représentant de l'Etat au village, dispose de moyens d'actions importants, il apparaît comme un chef de clan. Charismatique, il n'est cependant pas à l'abri de ses opposants qu'il tente de museler par ses réseaux d'amitiés.

* 309 AD Vosges, 22u69, Grand, 1826.

* 310 AD Vosges, 22u82, Grand, 1842.

* 311 (Cf : p 129).

* 312 PLOUX F, op., cit.

* 313 (Cf : Annexes d'illustration, Annexe XVI. Procès auxquels participent François Grojean. p 200).

* 314 AD Vosges, 22u82,

* 315 Ibid.

* 316 Ibid.

* 317 Ibid.

* 318 Ibid.

* 319 Ibid.

* 320 Etienne Durand, la femme de Dutrône, Christophe Morlot, Nicolas Tabouret, Jean François Victor Cottenot, Anne Marie Ledone, Joséphine Saleur, Joseph Georgin, Christophe Morlot et que Victor Léonard.

* 321 Amis proches : Jean-Baptiste Pelletier, François Guerre, Alexandre Durand.

Membres du conseil municipal : Pierre Maugras (conseiller municipal), Elophe Melcion (conseiller municipal), François Laurencier.

Autres témoins : Emilie Michel (domestique du maire), Alexandre Desprez, Alexandre Durand, Nicolas Marchal, Charles Henri Minette, Louis Napoléon Gaillot (garde champêtre), Pierre Laurent, Vincent Durand.

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"En amour, en art, en politique, il faut nous arranger pour que notre légèreté pèse lourd dans la balance."   Sacha Guitry