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Crises financières : Cas de la crise des subprimes 2007

( Télécharger le fichier original )
par Tayeb BENDJEDI et Mohammed GHILES
Université de Toulouse 1 - Master 1 Finance 2009
  

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Section 3 : L'excès de la liquidité et le boom du crédit

Les flux de capitaux contribuent à la fragilisation et sont capable de déclencher une crise. D'abord, une phase euphorique : un optimisme démesuré du côté des créanciers internationaux, des banques en particulier, conduisant à des situations de sur-financement, au-delà en tout cas des besoins liés aux déficits courants et aux écarts entre épargne et investissement domestiques, provoquant tout à la fois un boom du crédit, avec sélections adverses et risque moral, une profitabilité bancaire élevée mais précaire, un choc d'investissement et un boom d'activité, des augmentations de réserves jouant un rôle de collatéral implicite, des sur-réactions, voire des bulles sur les marchés d'actifs, en particulier sur le taux de change. Puis une phase neurasthénique qui provoque une inversion de toutes ces séquences : détérioration de la situation financière des entreprises, dégradation des bilans bancaires, pessimisme excessif, sous-investissement, ralentissement de l'activité, pertes massives de réserves, chute des cours boursiers, faillites bancaires, étranglement du crédit et crise réelle, diffusion de la panique, attaque spéculative, sorties de capitaux, crise de change...

La création excessive de liquidités par les deux principales banques centrales, la Fed et (dans une moindre mesure) la BCE, renforcée par le souhait de beaucoup de nouvelles et d'industrialisation de pétrole et de gaz des pays exportateurs, de limiter l'appréciation de leur monnaie vis-à-vis le dollar américains. Le comportement de ces banques centrales peut être rationalisé en partie comme une réponse aux faiblesses de la demande effective keynésienne que beaucoup craignaient être le résultat du 18 Septembre. La Fed a abaissé le taux des fonds fédéraux de 50 points de base. Dans les deux cas, le taux d'escompte a été réduit du même montant que le taux cible des fonds fédéraux. Elle a également injecté des liquidités sur les marchés à l'échéance immédiate pour 3 mois. Les montants ont été injectés quelque part entre celles de la Banque d'Angleterre (avec des différences dans la taille des économies des États-Unis et le Royaume-Uni) et ceux de la BCE. La Banque centrale européenne a injecté des liquidités et à la fois au lendemain des échéances plus longues sur une très grande échelle certes, mais

44 Desroches et Francis, op.cit

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avec un succès limité. Elle n'a pas réduit le taux d'escompte, mais elle s'est abstenue de relever ses taux comme elle l'avait prévu de faire.

La surliquidité qui a conduit à la consommation ou à titriser le moindre crédit immobilier résulte de déséquilibres structurels. Le premier déséquilibre est démographique. Aglietta et Berrebi, tout comme Artus et Virard, soulignent que, compte tenu des populations vieillissantes des vieux pays industrialisés, on pourrait s'attendre à ce que l'épargne y soit abondante et qu'elle se place dans le Sud. Le deuxième déséquilibre structurel, lui clairement évoqué par les ouvrages d'Artus et Virard et celui dirigé par J. H. Lorenzi, est celui d'une réorientation radicale de l'accumulation vers un mode de développement soutenable à l'échelle de la planète, ailleurs et autrement que dans la politique de communication des grands groupes... pétroliers. En effet, tous ces ingrédients de la crise ont été rassemblés pour faire surgir la crise des subprimes. La situation actuelle est particulièrement surprenante. Début 2007, les marchés de capitaux disposaient d'une liquidité45 abondante (figure 21) et les investisseurs n'exigeaient qu'une prime de risque faible. Ce qui est essentiellement dû à l'accumulation de réserves de change dans les pays émergents et exportateurs de matières premières (figure 21 et 22). Les banques étaient liquides (abondance en liquidité bancaire) et correctement capitalisées (abondance en liquidité de marché)46 , avec un volant de sécurité important par rapport à leurs exigences en fonds propres réglementaires. Des constatations similaires auraient pu s'appliquer à l'ensemble des principales composantes du système financier. Même en mai 2007, il aurait été difficile de prévoir que les pertes sur les investissements hypothécaires subprimes pouvaient entraîner une crise de l'ampleur de celle que nous observons actuellement.

45 Il est plus facile d'identifier la liquidité que de la définir précisément. Fondamentalement, la liquidité peut être décrite comme étant la facilité avec laquelle il est possible d'extraire de la valeur à partir d'actifs. Cette extraction de valeur peut être réalisée, soit en utilisant sa solvabilité pour obtenir des financements externes, soit en vendant son papier sur le marché (Andrew Crockett, 2008)

46 Pour saisir le concept de liquidité bancaire et liquidité de marché, voire Praet et Valérie Herzberg.

Figure 21. Réserves de change (Mds de
dollars)

Figure 22. Réserves de change et base monétaire mondiale
(variation sur un an, en Mds de dollars)

Cette liquidité mondiale très abondante circule internationalement : si une banque centrale achète des titres en devises pour accroître ses réserves de change, elle fournit de la liquidité au vendeur de ces

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titres. La présence d'un excès de liquidité qui alimente initialement la liquidité des banques (figure 23) conduit à la possibilité d'un excès de crédit (figure 24), d'un excès d'achat de titres, donc de bulles sur le prix des actifs. D'où vient cet excès de liquidité ? De l'absence de coordination internationale des politiques monétaires, essentiellement entre : les États-Unis, où la politique monétaire n'est pas utilisée pour faire remonter le taux d'épargne des ménages et réduire le déficit extérieur; les pays émergents (surtout d'Asie) et exportateurs de pétrole où l'accumulation de réserves de change qui est mise en place pour éviter l'appréciation des devises par rapport au dollar, impose le maintien d'une politique monétaire extrêmement expansionniste.

Figure 23. Réserves des banques commerciales
auprès des banques centrales et crédits (GA en %)
dans le monde

Figure 24. Base monétaire mondiale (en
% du PIB en valeur) dans le monde

Les facteurs d'augmentation de la liquidité sont aussi bien exogènes qu'endogènes. Parmi les facteurs exogènes on peut citer, au moins pour la période récente, la progression très rapide des réserves de change des banques centrales des pays émergents (la Chine en particulier) et des pays exportateurs de matières premières; or cette augmentation des réserves n'est que partiellement stérilisée. L'augmentation des réserves est due à d'importants excédents commerciaux et à un fort taux d'épargne dans ces pays qui connaissent des taux de croissance élevés depuis plusieurs années (ce rattrapage a par ailleurs contribué à limiter le ralentissement de la croissance dans les pays de l'OCDE depuis 2000). Parmi les facteurs endogènes, on trouve l'expansion du crédit (dont les causes sont à rechercher dans la croissance, la baisse des taux d'intérêts réels, les innovations financières...) qui a nourri également la liquidité mondiale. Quelles qu'en soient les raisons, cette liquidité abondante aurait pu susciter des risques inflationnistes, mais ils apparaissent sous contrôle en raison de la crédibilité acquise par les banques centrales (CAE, 2008).

La forte croissance du crédit bancaire au secteur privé reflète souvent une amélioration des fondamentaux économiques accompagnants le processus d'approfondissement financier mais elle est parfois apparue comme le signe avant-coureur d'une crise bancaire et financière dans les pays émergents au cours de la dernière décennie. De nombreux travaux empiriques sur les booms du crédit visent à définir des techniques quantitatives afin de distinguer un boom du crédit d'une période de forte croissance du crédit. Le premier phénomène est défini comme une expansion exceptionnellement marquée du crédit qui finit par retomber d'elle-même parce qu'elle devient intenable sur le court et sur le moyen terme tandis que le second est lié à la bancarisation dans les pays en développement et émergents et peut donc stimuler la croissance économique à long terme (FMI, 2004). Les entrées de capitaux étrangers et la libéralisation financière jouent un rôle majeur dans les booms du crédit. Reinhart et al. (2008) trouvent que les politiques de libéralisation financière interne et externe menées par les pays stimulent les entrées de capitaux étrangers qui se traduisent par un excès de liquidité et peuvent ainsi conduire à un accroissement des crédits bancaires et de la masse monétaire. Lorsque ces entrées massives de capitaux dans l'économie sont intermédiées par un système bancaire sous capitalisé et peu réglementé, elles entraînent une hausse de la consommation et, par conséquent, des importations tandis que l'investissement reste faible ; l'économie devient alors plus vulnérable aux chocs exogènes.

Les booms du crédit sont parfois associés à une augmentation rapide des prix des actifs en particulier dans l'immobilier ou sur les marchés boursiers conduisant éventuellement à la formation de bulles spéculatives dont l'éclatement risque de provoquer un effondrement de l'activité économique47 .

Le dynamisme du crédit qui accompagne l'activité économique accroît les opportunités de prise de risque par les banques. Le manque de diversification de ces prises de risque peut parfois conduire à des défaillances bancaires. Ainsi, si la croissance très rapide du crédit bancaire se traduit par une détérioration de la qualité des actifs bancaires et une insuffisance de fonds propres alors elle risque de compromettre la solvabilité des banques. La prise de risque excessive des banques peut également être favorisée par la présence de l'État au capital des banques apportant une garantie implicite ou explicite qui crée un « aléa moral » (Hilbers et al. 2005).

La baisse des taux d'intérêt et des primes de risque alimente ainsi un crédit abondant et bon marché. Mais cette abondante liquidité ne se retrouve pas dans les hausses de prix des biens (figure). En effet,

47 L'expérience des pays asiatiques dans les années quatre-vingt-dix a notamment illustré les implications pour l'économie de taux élevés d'investissement et de la flambée des prix dans le secteur de l'immobilier.

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les facteurs de production ne sont pas pleinement utilisés, suite à la récession de 2001 et à la croissance molle de 2003 dans les pays développés qui fait sentir ses effets jusqu'en 2005. Par ailleurs, la concurrence des pays émergents à coûts salariaux faibles continue d'agir sur les prix. La croissance non inflationniste se poursuit, même quand les prix des matières premières se mettent à croître (pétrole, métaux, produits alimentaires de base), suite notamment à la demande des pays émergents, Chine en premier lieu. Et quand l'idée se répand que la phase de désinflation mondiale est en train de s'achever, la perception demeure que la flexibilité de l'offre joue dans ce processus un rôle désinflationniste dominant, même s'il est en passe de s'arrêter.

La baisse des taux d'intérêt et des primes de risque favorise aussi les opérations à fort effet de levier. Et cette augmentation du levier d'endettement n'est pas seulement le fait des banques commerciales. Le levier des hedge funds et des fonds de private equity a en effet beaucoup augmenté depuis 2002, tout comme celui des entreprises : en Europe, il y a hausse du levier des entreprises surtout par la hausse de l'endettement (figure 25), aux États-Unis surtout par les rachats d'actions.

Figure 25. L'augmentation de l'effet de levier

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"L'imagination est plus importante que le savoir"   Albert Einstein