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Le cinéma d'horreur en France : entre culture et consommation de masse

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par Laure HEMMER
EAC Paris - Master 1 Management de projets culturels 2007
  

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1.1.2. Internet : le domaine de tous les possibles

Le développement de la toile a permis l'accès à des informations venues de la terre entière. La multiplication des sites Internet personnels et des forums -en un mot de ce que l'on appelle le Web 2.02- a permis l'émergence d'une nébuleuse immense, où tous les domaines, des plus respectables aux plus répréhensibles peuvent bénéficier d'une vitrine internationale. Le succès des pratiques amateurs témoignent de cette engouement pour le monde virtuel, qui ne connaît aucune limite, ni d'âge ni de localisation ni de rang social, et fait apparaître les blogueurs comme des protagonistes, égaux face à leur écran d'ordinateur (ou désormais de téléphone mobile). En ce sens, Internet est la nouvelle république du XXIe siècle, créant un espace public (le terme de forum, emprunté au vocabulaire politique de l'Antiquité en témoigne) ouvert à tous, mêlant l'intimité et la vie privée à l'information publique relayée par les institutions et les médias eux-mêmes ; il permet à leurs détracteurs comme aux tenants d'une marginalité effective dans l'espace public réel, de manifester leur existence et d'affirmer leurs revendications et leurs goûts. Cette liberté d'expression nouvellement acquise est une chance pour les uns, une malédiction pour les autres, mais n'en est pas moins un outil incontournable dans le monde contemporain, pour qui veut et sais l'utiliser.

1 Voir entretien mené le 24/07/08, annexe n° 26, p.66

2 Symbolisé par les systèmes Wikipédia, Myspace ou Facebook

En ce qui concerne les films d'horreur, de nombreux sites leur sont consacrés dans toutes les langues : informations sur les sorties de films, filmographies ou biographies de réalisateurs, chroniques de sorties DVD, analyses de films, bibliographies, sites collaboratifs, forums affiliés, concours avec cadeaux à la clé, bases de données,...La logique mise en oeuvre dans le développement de tels sites est résolument celle du partage, de la facilitation de l'échange, comme l'affirme Jean-Michel, webmaster et créateur d'Oh My Gore ! : « Au départ, Oh My Gore ! n'était qu'un site perso que je m'étais créé afin de me faire une petite base de données de films que j'avais vus ou que j'aimerais voir. Ensuite j'ai commencé à mettre des photos pour égayer un peu les fiches et j'ai vu que quelques personnes commençaient à surfer sur le site. J'ai donc décidé de l'améliorer (...). Les visites ont suivi et donc maintenant, j'essaie de proposer un maximum d'infos et d'actus sur le cinéma horreur et fantastique (...) Le but essentiel est de partager une passion, donc oui, plutôt un site d'échange. J'aime être au courant de l'actualité et je prends le temps nécessaire pour partager mes infos avec les personnes intéressées1. » Il n'en demeure pas moins, malgré cette dimension amateur et plutôt artisanale, que le sérieux des informations est garanti, dans un réel souci de professionnalisme. Ce que souligne Christophe Lemaire, journaliste cinéma : « Je ne suis pas un de ceux qu'avec Christophe Gans nous appelons « les gardiens du temple », qui tiennent à leur position en déplorant l'apparition de l'étonnant nouveau média qu'est Internet. Au contraire, place à la nouvelle génération et à son attirail de nouvelles technologies qui lui permet de tout appréhender plus vite. C'est pour cela que je ne me lance plus dans la critique, d'autres le font mieux que moi et plus rapidement !2 » Comme le rappelle Jean-Michel, « la création de news est un processus très long puisqu'il faut aller les chercher sur un tas de sources différentes (...) puis les mettre en forme, uploader les photos, les vidéos etc... ».

Et les visiteurs se comptent en dizaines de milliers, allant de 15 000 en moyenne pour Zone Bis (mais le site fut en pleine restructuration et n'offre pas toutes ses anciennes potentialités) à plus de 50 000 pour Oh My Gore !. Face à leur importance, tant quantitative que qualitative, les professionnels n'hésitent pas à contribuer au fonctionnement de ces sites, en y apportant leur savoir comme leurs produits. En effet, des concours sont souvent organisés lors de sorties salles ou DVD, avec goodies à la clé3. Malgré tous les efforts déployés pour apporter et partager des informations sur le

1 Voir questionnaire, annexe n° 29, p.77

2 Voir entretien mené le 24/07/08, annexe n°26, p.66

3 « Les lots sont souvent des produits dérivés de films c'est-à-dire des affiches, des dvds, des places de cinéma, des tee-shirts ou quelques fois des objets plus insolites comme un couteau pour Haute Tension ou une fiole d'eau bénite pour L'Exorciste : Au commencement » explique Jean-Michel, op. cit.

genre de films qui fait vibrer les passionnés, il faut noter que ces sites restent bien souvent amateurs et que leurs contributeurs ne sont pas rémunérés pour leur travail, quelle que soit son importance. Tous les administrateurs, webmasters ou chroniqueurs côtoyés ou interrogés sont des bénévoles. C'est toute la caractéristique des pratiques amateurs ; une passion motivant un travail sans toutefois bénéficier d'une rémunération effective pour celui-ci (en dehors d'une rémunération symbolique, celle de contribuer à la diffusion de leur centre d'intérêt). Cependant, cela n'empêche pas certains de se projeter un jour dans la filière cinématographique, surtout parmi les plus jeunes. Mais il semble que cette volonté reste marginale, constituant le propre de l'amateurisme ; celle de ne pas vouloir mêler emploi et passion, reléguant cette dernière dans le domaine de la sphère privée.

Souvent attachés à ces sites, les forums sont un autre avatar de la communauté des cinéphiles en général, et des fans de cinéma d'horreur en particulier, et constituent à eux-seuls un véritable microcosme. En effet, les « posteurs » suivent les discussions virtuelles de façon quotidiennes, parfois sur plusieurs plateformes différentes, et donnent leur avis différemment sur leur appréhension des films ; certains adoptant une attitude détachée, procédant simplement de l'affirmation ou de validation de leurs goûts, d'autres élaborant un réel débat autour des enjeux économiques ou des caractéristiques artistiques de tel ou tel oeuvre ou événement plus ou moins affilié au genre en question. De véritables affrontements sont en jeu dans ces espaces, allant jusqu'au boycott et à la scission, comme ce fut le cas au sein du forum attaché au site Devil Dead, dont les anciens se reportèrent sur celui de Zone Bis1. En effet, la position et l'ancienneté y sont très importantes : les administrateurs et modérateurs y sont respectés pour leur proximité supposée avec le monde professionnel (ce sont souvent les responsables des sites affiliés), et a fortiori leurs connaissances, tout comme les posteurs présents depuis l'ouverture du forum. Les jeunes arrivants y sont souvent raillés, taxés de novice et méprisés par les premiers. Or cette logique est à l'oeuvre dans tous les milieux qui cultivent volontairement un certain degré d'initiation, afin de préserver leur cercle de l'arrivée massive d'individus attirés par une certaine marginalité, à la manière des tribus musicales. Malgré ces comportements parfois un peu fermés, il semble que ce soit néanmoins le partage qui prime, la gratuité de l'échange, la relation humaine ou virtuelle, qui est également à l'oeuvre dans le visionnage de films en groupe, comme c'est le cas dans les séances spéciales et les festivals.

1 Voir entretien mené le 10 juillet 2008 avec Cyril Despontin, annexe n°24, p. 59

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