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L'enfant naturel haitien entre le droit et la realite

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par Rose Maggy b. SHOUTE
Faculte de droit et des sciences economiques de Port- au- Prince - Licence 2002
  

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B- Perception sociologique

1- Avant l'indépendance.

Le plus superficiel examen de la société de Saint Domingue révèle immédiatement l'existence de trois éléments aux caractères nettement tranchés, formant les trois classes de la population coloniale : les blancs, les affranchis et les esclaves. Les premiers étaient les maîtres et les deux derniers n'avaient que des droits limités. Ces trois groupes, par suite des barrières dressées entre elles par les règlements coloniaux, par leur mode de vie, par leurs habitudes, par l'opposition de leurs idées et de leurs intérêts, présentent des différences remarquables.

Les blancs créoles, comme les historiens s'accordent à le reconnaître, se distinguaient par leur élégance et la beauté de leur corps. Ils étaient vifs et impétueux. Un contemporain, Ducoeurjolly, dit qu'ils présentent à l'imagination ardente aux sens surexcités et dans les veines desquels, pour employer l'expression du romancier haïtien Amédée Brun, coûtait véritablement du sang.  Selon un auteur haïtien, Hannibal Price bien peu de ces hommes si entichés de leur qualité, avaient pur sang dans les veines.

Les premiers n'avaient pas fait délicats. Ils s'étaient unis, légalement ou illicitement à leurs négresses. De ces unions étaient nés des mulâtres. Ceux-ci par des unions successives avec des personnes de teint clair, tachaient de se rapprocher de cet idéal de peau blanche qui, atteint, devait leur procurer le bonheur parfait sous la forme d'avantages positifs.1(*)

Ces blanches créoles ne manquaient pas cependant de charmes, elles étaient très passionnées et poussaient la tendresse maternelle jusqu'à l'extravagance. Mais les blancs les accusaient tout de même de manquer d'affection comme épouses. Les hommes préféraient porter leurs hommages monnayés aux sémillantes mulâtresses ou abuser, pour répéter le mot du Père Du Tertre, de leurs servantes noires, plantureuses et saines.

Bref, le mariage n'a jamais été le mode d'union privilégié. Le concubinage était la règle et le mariage l'exception. Hilliard d'Auberteuil constate le fait pour le blâmer. Un blanc, dit-il, qui épouse une mulâtresse descend du rang des blancs et devient légal des affranchis : Ceux-ci regardent même comme leur inférieur.

Cet auteur va encore plus loin : « non seulement il ne doit pas être permis aux négresses, mulâtresses quarteronnes de se marier à des blancs, il est nécessaire qu'à l'avenir tous les nègres, griffes et marabouts restent dans l'esclavage ».

Un homme de couleur, Julien Raymond né à Aquin et issu de l'une de ces unions si véhémentement condamnées par Hilliard d'Auberteuil, avait été envoyé en France et avait reçu une brillante éducation. Le mélange des races, dit Lucien Peytraud, avait trop d'occasions fatales de se produire pour qu'il n'en fût pas ainsi. Il suffit de rappeler que, sous ce climat chaud, les négresses étaient à peine vêtues, qu'elles étaient de moeurs naturellement douces et qu'elles ne s'appartenaient pas.1(*)

Les négresses y trouvaient d'ailleurs leur intérêt, sinon leur plaisir. Leurs enfants, nés de ce commerce immoral, étaient le plus souvent affranchis, pendant qu'elles voyaient elles mêmes leur situation s'améliorer.

Beaucoup de sang-mêlé sautaient la barrière. L'appellation de sang mêlé constituait la plus grave injure qu'on pût faire à un blanc ou à un homme libre se prétendant de race pure.

Défense était faite à ceux, issus de mulâtresses, négresses quarteronnes non mariées, de porter les noms des blancs. Ils devaient avoir un surnom titré de l'idiome africain ou de leur métier et couleur, qui ne pourrait jamais être celui d'une famille blanche de la colonie. Les Unions légitimes entre blancs et gens de couleurs étaient rares. L'administration locale, de même que le gouvernement métropolitain, mettait tout en oeuvre pour les empêcher. L'autorité coloniale, approuvée par le pouvoir royal, refusa maintes fois l'autorisation nécessaire à des négresses affranchies qui étaient sur le point de se marier avec des blancs, elles ne pouvaient ni ne voulaient épouser des nègres esclaves, parce qu'un pareil mariage les eût entraînées dans la servitude.

Elles ne pouvaient s'unir aux blancs à cause du préjugé de couleur. Elles n'avaient devant elles que deux voies à suivre : ou se marier à des affranchis comme elles, qui ne s'en souciaient guère de leur côté dans leur désir de se rapprocher du blanc ; ou se livrer â la prostitution.

Les sang-mêlé ne pouvaient être nommés à aucun emploi ou dignité dans les colonies. Les charges dans la judicature et les milices étaient interdites aux affranchis. Ils n'avaient pas le droit d'exercer certains métiers ou d'occuper certains offices. Ils ne pouvaient être ni prêtres, ni avocats, ni médecins.

2- à partir de l'indépendance.

Tous les chefs d'Etat qui se succédaient au pouvoir n'étaient pas insensibles à la question de l'accroissement des naissances hors mariage. Les enfants illégitimes restent majoritaires, et il y a plusieurs facteurs qui sont à la base : les facteurs économiques, sociologiques, culturels.

2-1 facteurs économiques

Une grande partie de nos masses rurales évoluent dans la polygynie. Ceci s'explique par la politique agraire mis en place par nos premiers dirigeants. Ce système, oblige l'homme à avoir une concubine sur chacune de ses parcelles de terre en vue de la préserver et de la fructifier.

Le plaçage offre aux cultivateurs le moyen de conserver cette semi clandestine dont l'expérience séculaire démontre les avantages. Et il arrive souvent que cet homme soit déjà engagé dans les liens du mariage avec une de ses femmes d'où la naissance des enfants de toutes conditions sociales et juridiques.

Les conditions pécuniaires des gens sont encore plus déterminantes dans le régime des unions illégitimes. Les préparatifs et les cérémonies en vue du mariage sont très coûteux.1(*) Pour éviter des dépenses ils n'avaient pas d'autre choix que de se placer. Car, on se répète souvent un bon ménage vaut mieux qu'un bon mariage.

Il arrive très souvent que l'homme marié profitant de sa situation économique, à d'autres jeunes filles à coté de son épouse. Ces jeunes filles, à cause de leurs faibles ressources économiques, acceptent d'entretenir des relations sexuelles avec l'homme marie. Et pour retenir ce dernier afin de ne pas perdre son assistance économique, se réjouissent d'une grossesse. De là est né un enfant répute adultérin d'après la loi.

2-2 facteurs sociologiques et culturels.

Le mariage, institution d'origine aristocratique, est un facteur de promotion sociale : le passage d'une classe pauvre à une classe plus ou moins aisée. Il est considère comme un événement considérable, attestant une émancipation effective de la commune condition, et qu'à ce titre, il doit être entouré de jouissances particulières. Toutefois, on ne peut nier le plaçage polygynique qui est un signe déterminant dans la recherche du statut social de l'individu.1(*)

Le plaçage reste, dans les campagnes haïtiennes aussi bien que dans les milieux populaires urbains, le moyen le plus répandu de fonder un foyer. Il répond aussi à une ancienne tradition dont on retrouve les racines à l'époque coloniale, dans les moeurs de la masse servile. Cette situation de polygynie se rencontre souvent chez une catégorie des gens tels les chefs de section, les hougans, certains militaires. La polygynie est le modèle essentiel des structures familiales africaines. Pour ainsi dire nous sommes des descendants d'Afrique. Dans ces conditions, les unions libres offrent plus d'intérêt au couple que le mariage. Autant de facteurs qui ont concouru a cette affluence de naissances illégitimes. En Haïti, traditionnellement la majorité des unions ne sont pas sanctionnes par le mariage. Le placage est encore pour diverses raisons la forme d'union la plus répandue dans les villes et dans les campagnes.2(*)

Cette section a présenté l'ampleur et de la perception du phénomène de l'enfance naturelle en Haïti tant avant qu'à partir de l'indépendance. La prochaine section traitera du statut juridique de l'enfant naturel en Haïti.

* (1) Bellegarde, Dantes : Histoire du peuple haïtien, p.33.

* (1) Bellegarde, Dantes : Histoire du peuple haïtien, op.cit., p.34.

* (1) Vieux Serge,Henri : Le plaçage, droit coutumier et famille en Haïti,p.59-62.

* (1) Vieux Serge, Henri : Le placage, droit coutumier et famille en haiti, po.cit., p.55.

* (2) ibidem : p.59.

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"Je voudrais vivre pour étudier, non pas étudier pour vivre"   Francis Bacon