WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

L'effet dissuasif de la justice pénale internationale, cas du TPIR et de la CPI

( Télécharger le fichier original )
par Jean-Damascène NYANDWI
Université libre de Kigali - Licence en Droit 2007
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy
III.4.1.2 La souveraineté étatique

Pour le TPIR, la question de la souveraineté ne remet pas tellement son fonctionnement en cause. La primauté qu'il a à l'égard des juridictions nationales lui permet de demander à tout Etat de se dessaisir d'une affaire en sa faveur, si le Tribunal le juge opportun dans l'intérêt de la justice.

Néanmoins, comme nous venons de le mentionner, le TPIR ne disposant pas de force de police, se retrouve de temps en temps face à cette barrière de souveraineté étatique puisque le personnel judiciaire ne peut accomplir sa mission en pleine liberté que s'il bénéficie d'une bonne hospitalité de la part d'un Etat sur le territoire duquel se trouvent les informations dont le Tribunal a besoin.

Bien que le Statut du TPIR reconnaisse certains privilèges et immunités aux juges, au Procureur et à son personnel ainsi qu'au Greffier et à son personnel114(*) pour leur faciliter la tâche, ils sont souvent confrontés à la question de souveraineté. Aussi les Etats doivent-ils être contraints par le Conseil de sécurité de coopérer pleinement avec le TPIR.

En ce qui concerne la CPI, la situation devient de plus en plus compliquée avec des Etats qui ne veulent pas signer et ratifier le Statut de Rome ou qui l'ont fait mais qui cherchent à en limiter le pouvoir, comme les Etats-Unis qui ne cessent de manifester une opposition farouche à l'existence de la CPI. En effet, les Etats-Unis ont été catégoriques lors de la Conférence de Rome. Ils ne sont pas disposés à accepter que la CPI puisse représenter un quelconque danger pour les intérêts nationaux américains ou une perte importante de sa souveraineté115(*). Aussi cherchent-ils à conclure des accords bilatéraux avec les Etats parties à la CPI, assurant l'immunité à tout ressortissant américain116(*).

Un autre enjeu majeur concerne le principe de complémentarité prévu par le Statut117(*). Ce nouveau concept, principale innovation du Statut de Rome, permet à la CPI d'intervenir subsidiairement avec les autorités nationales lorsqu'il s'est avéré qu'un Etat manque de volonté ou se trouve dans l'incapacité de mener à bien des enquêtes ou des poursuites à l'encontre d'auteurs potentiels de crimes internationaux. Le bien-fondé de ce principe est de responsabiliser tout Etat dans la poursuite et la répression des auteurs de crimes graves118(*).

Toutefois, la consécration de ce principe par le Statut de Rome ne manque pas de conséquences fâcheuses : le plus souvent, dans l'hypothèse où un Etat ne veut pas poursuivre, le Procureur de la Cour devra d'abord prouver la mauvaise foi de cet Etat. Pire encore, la Cour aura des difficultés à entamer des poursuites si cet Etat ne lui accorde pas accès sur son territoire.

Ce principe, qui donne la primauté de poursuite et de juridiction aux tribunaux nationaux pose quelques questions de fond. La CPI ne saurait fonctionner sans que les Etats n'adoptent des lois nationales harmonisant leur droit interne avec le Statut de Rome. Ces lois doivent essentiellement comprendre des dispositions visant à mettre en oeuvre les obligations de coopération avec la CPI qui pèsent sur chaque Etat partie, ainsi que des dispositions harmonisant et adaptant le droit matériel de chaque Etat en ce qui concerne des définitions des crimes, ou encore les principes généraux de droit pénal comme l'absence d'immunité quel que soit le rang officiel ou l'imprescriptibilité des crimes graves.

Critiquant ce principe de complémentarité, Jean-Paul BAZELAIRE déplore le fait que les signataires de la Convention de Rome se sont cantonnés sur ce principe de complémentarité. Selon lui, ils ont fait un réel pas en arrière119(*), et nous sommes du même avis que cet auteur. Cependant, l'existence de la Cour incitera fortement les Etats à relever le niveau de leur système judiciaire.

En dehors des inquiétudes liées à la consécration du principe de complémentarité que nous venons d'évoquer, l'existence de la CPI suscite un optimisme sans égard : graduellement sa pratique et ses procédures deviendront la référence internationale en matière de justice, par rapport à laquelle sera mesuré le niveau atteint par tel ou tel Etat.

Déjà, certains Etats ont modifié leurs constitutions ainsi que leur droit pénal et leurs règles de procédures, pour les rendre conformes aux dispositions du Statut de Rome120(*).

Une autre raison qui suscite l'optimisme, c'est que la compétence de la CPI peut s'étendre aux Etats non parties quand le Conseil de sécurité décide de déférer une situation à la Cour. Par exemple, le Conseil de sécurité, en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies, et agissant sur la base de la compétence qui lui est conférée par le Statut de Rome spécialement en son article 13 b), a adopté la Résolution 1593 déférant la situation du Darfour à cette Cour. Le Conseil de sécurité devrait le faire dans les meilleurs délais, sinon la cessation d'une menace à la paix et à la sécurité internationale risque d'entraîner l'extinction de son action.

Par la même résolution, le Conseil de sécurité priait le Gouvernement soudanais de coopérer avec la CPI pour traduire en justice les personnes présumées responsables des violations graves du DIH et des attentes graves aux droits de l'homme commis dans la région de Darfour.

Ainsi, le Soudan qui n'a pas ratifié le Statut de Rome et qui n'a pas exprimé la moindre volonté de coopérer avec la justice internationale allègue qu'il est capable de juger ses nationaux. Or, l'inefficacité du système judiciaire soudanais ne permet pas de garantir des jugements impartiaux et conformes aux droits fondamentaux.

Le Statut de Rome est donc un nouveau pas franchi par les Etats dans la lutte contre l'impunité mais les problèmes liés à la compétence ratione temporis ne manquent pas de se poser tant pour le TPIR que pour la CPI.

* 114Article 29 du Statut du TPIR.

* 115 BOUQUEMONT, C., La Cour pénale internationale et les Etats -Unis, Harmattan, 2003 ; p.33.

* 116 BOUQUEMONT, C., op. cit., p.101.

* 117 Préambule du Statut de la CPI.

* 118 MUTABARUKA, A., Problématique de la répression des crimes de droit international par les jurisdictions pénales internationales, mémoire, ULK, Kigali, mars 2005, p.48.

* 119 BAZELAIRE, J.P. et CRETIN, T., La justice pénale internationale, PUF, Paris, 2000, ; p.95.

* 120 Le Canada qui a signé le Statut de la CPI le 18 décembre 1998 a été le premier Etat du monde à adopter une loi de mise en oeuvre du ce Statut : Loi concernant les crimes de guerre et les crimes contre l'humanité du 29 juin 2000 avant même l'entrée en vigueur de la CPI..

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Un démenti, si pauvre qu'il soit, rassure les sots et déroute les incrédules"   Talleyrand