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Libéralisation financière et investissements des entreprises marocaines

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par Abdessamad OUNIR
Université Cadi Ayyad - Master en Finance Appliquée 0000
  

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Introduction générale

Depuis son apparition, la théorie financière n'a cessé d'attiser la convoitise des chercheurs en étudiant les interactions entre le développement économique et l'efficience des systèmes financiers et explique et aident à comprendre les phénomènes financiers. Le champ de recherche correspond à l'étude de l'intermédiation financière, définit comme un processus d'ajustement des besoins et des capacités de financement par l'intervention d'une institution financière.

En effet, jusqu'aux années cinquante, la théorie financière n'intégrait pas véritablement les banques et les institutions de crédits car que les agents interviennent directement dans la transmission de l'épargne à l'investissement. La mise en évidence de celle-ci s'est faite, à la fin de la décennie 50 suite à l'étude des marchés financiers. Les travaux de pionniers ont fait ressortir la montée de l'institutionnalisation du processus de l'intermédiation financière dans l'économie américaine. Dans une étude, Gold Smith s'est interrogé sur les raisons de la complexité croissante des systèmes financiers des économies contemporaines, mais n'a pas permis d'expliquer ni justifier la prolifération des intermédiaires financiers dans les économies en développement. Ce n'est qu'en 1960 que Gurley et Shaw ont montré, pour la première fois, le lien entre les institutions financières et leur fonction d'intermédiation aussi que sur le processus de financement de l'activité économique.

Le modèle d'intermédiation financière de Gurley et Shaw a sans doute présenté l'expression théorique la plus synthétique de l'intermédiation. Bien que ce cadre est toujours d'actualité, il est construit à partir de la distinction entre finance directe et finance indirecte. Sur la très longue période, l'évolution de la structure financière de l'économie semblerait marquée à la fois par un glissement de la finance directe vers la finance indirecte de l'activité bancaire traditionnelle de crédit et de création monétaire (désintermédiation bancaire) au profit de la gestion collective de l'épargne.

Jusqu'au milieu de la décennie 80, le système financier est dominé par la finance indirecte et fonctionne sur la base de fondements d'une économie dirigée. Les institutions financières intervenaient sur des segments cloisonnés et soumises aux politiques restrictives imposées par les autorités publiques, qui traduisaient une baisse de l'importance des crédits bancaires dans le financement global de l'économie. Cette situation caractérisée par l'administration du secteur financier en forçant les institutions financières à financer les secteurs prioritaires tels que au détriment d'autres est à l'origine de la notion de répression financière (McKinnon & Shaw, 1973)).

Ils ont ainsi vivement critiqué cette politique apparente dans les économies en développement du fait que les interventions étatiques ne permettent que la création de plusieurs distorsions financières. Les politiques restrictives tels que les réserves obligatoires, la politique d'encadrement des crédits, le financement privilégié et l'administration des taux d'intérêt accompagnée des taux d'inflations élevés, ont entraîné une réduction des fonds prêtables aux entreprises, et une limite de la concurrence bancaire. Les situations économique et financière dégradées qui caractérisent les économies dirigées montrent l'impact néfaste des interventions massives de l'Etat au sein de l'économie.

Afin de surmonter ces difficultés, notre objectif dans le cadre de cette recherche consiste à déterminer les liens de causalité entre le développement financier et la croissance économique à travers le financement de l'investissement des entreprises.

En effet, l'accroissement de l'essor économique peut être traduit par une politique incitative de l'épargne et de l'investissement, par un accroissement de la proportion de l'épargne transmise au financement des investissements et une baisse des coûts de transactions dues à la collecte de l'épargne et de son allocation. Les effets de la libéralisation financière à travers la déréglementation des taux d'intérêt et la suppression des réserves obligatoires ainsi que le désencadrement de crédits aura pour conséquence à la fois d'accroître la compétitivité des banques, la productivité du capital et la croissance économique.

De ce fait, nous tenterons de voir dans un premier point si la libéralisation financière a permis d'éliminer les contraintes de financement des investissements des entreprises, ensuite évaluer l'impact des réformes entreprises par les autorités marocaines sur le comportement de l'investissement des entreprises.

Pour ce faire, et dans un premier chapitre, nous exposerons brièvement, le cadre théorique de la libéralisation financière et sur son impact sur l'investissement des entreprises.

Dans un deuxième chapitre, nous présenterons les caractéristiques du système financier marocain aussi que le climat des affaires (surtout pour l'investissement) pré et post libéralisation financière.

Le troisième chapitre quant à lui présentera l'analyse empirique de l'enquête réalisée par le laboratoire GREER1 et portant sur « l'évaluation de processus de réforme et mise à niveau efficiente des entreprises dans le cadre d'un développement durable : cas des entreprises marocaines à l'horizon 2010 ».

i Laboratoire de Recherche en Economie de 1'Energie, Environnement et Ressources.

Chapitre 1 : Libéralisation financière et investissement des entreprises : revue de littérature

Du point de vue théorique, la libéralisation financière a trouvé ses origines dans les écrits de McKinnon et Shaw (1973) qui implique un retrait partiel de l'Etat dans les affaires financières. Ils trouvent ainsi dans les interventions massives des autorités financières des déséquilibres majeurs décourageant l'épargne et rendant l'affectation des ressources non optimale. Leurs travaux se sont fondés sur le rôle de système financier qui est considéré comme moyen efficace pour accélérer la croissance économique par canal de transmission des taux d'intérêt réels positifs.

Ce paradigme de libéralisation financière a permis de mettre en évidence les différences fondamentales entre les approches néoclassiques d'une part (R.I.McKinnon et E.Shaw (1973)) et les approches néo-structuralistes inspirées des analyses keynésiennes (Taylor et Van Wijnberen (1983)) d'autre part.

L'importance des effets de l'efficacité informationnelle des intermédiaires financiers sur la libéralisation financière est soulignée par des auteurs inspirés des théories de McKinnon et Shaw (Arndt (1982), Cho (1986)). Ils démontrent que les contraintes de crédit peuvent rendre l'allocation des ressources non optimale et entraîner un rationnement de crédit.

En revanche, les auteurs du courant néo-structuraliste controversent les affirmations libérales et s'appuient, pour assurer le financement de l'économie, sur une vision structurelle de l'économie par le maintien des taux d'intérêt à des niveaux bas.

1.1 Libéralisation financière : approche néoclassique

1.1.1 McKinnon & Shaw et libéralisation financière

1.1.1.1 De la répression à la libéralisation financière

McKinnon et Shaw partent du constat que les marchés financiers des pays en développement sont étroits et imparfaits et considèrent un système économique en déséquilibre avec une abondance d'opportunité d'investissement. Ils se placent en effet dans le cadre des économies des pays en voie de développement dans lesquels les politiques financières adoptées ne permettent pas d'exploiter ces opportunités2.

D'après ces auteurs, ces économies appelées superficielles (Shaw, 1973) dont le rôle des
intermédiaires financiers est faible, se caractérisent par des taux d'intérêt bas et par une forte

2.McKinnon & Shaw (1973).

intervention des autorités dans l'allocation des crédits notamment par le biais des réserves obligatoires et de la politique d'encadrement des crédits (Shaw, 1973).

En effet, La répression financière3 critiquée vivement par les auteurs est à l'origine de plusieurs distorsions telles que la faiblesse des taux d'intérêts sur les dépôts et le mauvais choix des projets d'investissement plus rentables.

Pour McKinnon et Shaw, la libéralisation financière serait la meilleure solution pour ces économies pour accroître leurs niveaux d'investissement et promouvoir la croissance économique. Ils retiennent les arguments suivants :

· D'une part, le plafonnement des taux d'intérêt à des niveaux bas réduit l'épargne, l'offre des fonds prêtables qui conduit à un rationnement de l'investissement et un ralentissement de la croissance économique.

· D'autre part, la répression financière entraîne une mauvaise allocation des crédits. Leur objectif consistait à mobiliser l'épargne domestique et améliorer son affectation par le biais des taux d'intérêt réels positifs. En conséquence, le secteur financier est appelé à jouer un rôle stratégique dans l'allocation des ressources et permettre son allocation efficace4.

1.1.1.2 Epargne et financement des entreprises

La première considération pour appréhender l'épargne est celle de l'identité des épargnants et de la forme de l'épargne en différence avec la consommation. Le sens commun assimile les épargnants aux ménages, aux entreprises, aux établissements financiers, aux administrations et encore aux associations. L'épargne peut prendre soit sa forme liquide (thésaurisation) ; soit sous forme placement financier destinée à l'investissement.

Les différences fondamentales entre les théories concernent les déterminants de l'épargne. Pour les keynésiens, l'épargne est déterminée par le revenu de l'agent. La partie qui n'est pas consommée est répartie entre épargne et/ou thésaurisation. C'est la consommation qui précède l'épargne.

Quant aux post keynésiens (Rochon, 1999), c'est la création monétaire et non l'épargne des ménages qui constitue la principale source de financement des investissements des entreprises. Ceci suppose d'après Rochon que l'économie en question se caractérise par un système financier développé.

3 La « répression financière », notion proposée par McKinnon (1973) et Shaw (1973), est défmie comme une situation dans laquelle le secteur financier est administré par les pouvoirs publics dans le but de financer les déficits publics et de subventionner les secteurs prioritaires. Selon McKinnon et Shaw, en forçant les banques et les institutions financières à pratiquer des taux d'intérêt bas et parfois négatifs, la répression financière décourage l'épargne et nuit à l'accumulation du capital productif.

4 McKinnon -- Shaw, (1990), pp. 477-480.

En revanche, pour les néoclassiques, l'agent qui cherche toujours à maximiser son utilité, fait au préalable un arbitrage entre l'épargne et la consommation pour déterminer sa position. Lorsque le taux d'intérêt réel lui semble important, il aura tendance en fait à épargner davantage et renoncer à la consommation dans le présent dans le but d'assurer des revenus importants dans le futur.

Pour McKinnon, l'épargne prend deux formes principales : une épargne sous forme d'actifs réels improductifs (qui rapporte le taux d'inflation anticipé) et une autre sous forme d'encaisses monétaires réelles (dépôts bancaires).

L'épargne dans la théorie de McKinnon joue un rôle stratégique dans le développement de financement des entreprises par canal de transmission des taux d'intérêt réels positifs.

Selon McKinnon, la fonction entre les taux d'intérêts réels créditeurs positifs et les niveaux d'investissement est croissante et veille, la théorie de McKinnon, à ce que les niveaux d'épargne soient toujours maintenus. En effet, plus les taux d'intérêt servant la rémunération des dépôts bancaires sont élevés, plus est importante l'incitation à investir.

Le raisonnement est le suivant : une augmentation des taux d'intérêts réels positifs (sur les dépôts) permet un accroissement de l'épargne financière ce qui va stimuler les niveaux d'investissement (les banques vont disposer des fonds pour permettre le financement des investissements des entreprises avec des coûts moins élevé). Cet accroissement engendre une évolution positive de la croissance. A son tour cette évolution permettra une amélioration de l'épargne globale par une hausse du revenu national.

Dans le modèle de McKinnon, les encaisses réelles jouent un rôle important dans la conduite de formation de capital physique : monnaie et capital seront donc complémentaires.

La fonction de demande fait apparaître cette complémentarité qui dépend de revenu national, de taux d'intérêt créditeur et de l'investissement. Elle se présente sous la forme suivante :

1

Ef (Y, Y--, (ci -- 71"

--a))]

(1.1) est la fonction de la demande de monnaie.

Avec :

Y : le produit national brut ;

--I : Le taux d'investissement ;

Y

d : le taux d'intérêt nominal créditeur ;

7C a : Le taux d'inflation anticipé ;

(d --71-a): Le taux d'intérêt réel créditeur.

A l'équilibre du marché de la monnaie, l'offre est égale à la demande de monnaie :

(1.2)

1

f -- f(Y,--Y,(ci --7ra»

M

f --

P

(1.2) est l'équation de la demande de monnaie.

La demande de monnaie croît avec le revenu et diminue lorsque le taux d'intérêt augmente.

j; > 0 : La demande de monnaie pour motif de transaction (où ft = af ). Le principe stipule

ay

que le niveau de production national évolue positivement avec la demande de monnaie, c'est- à-dire que l'augmentation de l'activité nationale engendre un accroissement de la demande d'encaisses réelles pour motif de transaction.

a() > 0 : La demande de monnaie pour motif d'investissement : Accroissement des

I)

niveaux d'investissement engendre une demande accrue de monnaie. Celle-ci est une condition élémentaire de réussite de la politique de libéralisation financière par voie de l'épargne.

La fonction d'investissement d'après McKinnon se présente sous cette forme :

= f (r ,(d -- rt- a)) (1.3)

Y

(1.3) est la fonction d'investissement.

Avec r : taux de rendement moyen du capital physique.

/ /

a(--) a(--)

et : Y > 0 et Y > 0 , l'hypothèse de complémentarité se voit dans les dérivés

ar a (d -- rca)

partielles suivantes :

a(f) > 0 et Y) > 0, tout accroissement de l'investissement en

a() 5(d -- rra)

Y

 

capital physique entraîne un accroissement de la demande de monnaie qui exige une augmentation du taux d'intérêt réel créditeur.

Le raisonnement précédent décrit par McKinnon peut être vérifié à partir de ces hypothèses où le taux d'intérêt réel provoque une hausse des investissements à travers l'épargne.

A long terme, la libéralisation financière aura permis un développement financier qui influencera positivement la croissance de la production et du revenu et donc de l'épargne, si la consommation ne change pas (effet indirect de la libéralisation).

Shaw, comme pour McKinnon, suppose que l'économie pourrait être financée depuis les ressources bancaires à condition que les intervenants financiers jouent leur rôle d'intermédiation financière. Pour cet auteur, les taux d'intérêts élevés influencent positivement les dépôts des banques et exercent par conséquent un effet sur les investissements des entreprises.

Pour Shaw, l'investissement est une fonction décroissante du taux d'intérêt réel pratiqué par les institutions financières et l'épargne est une fonction croissante du taux de croissance de l'économie et du taux d'intérêt réel servant la rémunération des dépôts.

1.1.1.3 Effets de la répression financière

On a mentionné ci-dessus que la répression financière constitue un handicap à la croissance de système financier. La répression financière peut ainsi avoir effet sur les taux d'intérêt réels par la fixation des taux nominaux servis ou demandés par les banques au dessous de leurs valeurs d'équilibre de marché.

Cet effet réduit en conséquence la croissance économique dans la mesure où :

cela réduit la quantité de fonds disponibles pour l'investissement via la baisse des dépôts bancaires ;

cela affecte la quantité de l'investissement via la modification de comportement des intermédiaires financiers. Comme le souligne Shaw, « les plafonnements effectifs à la baisse des taux créditeurs réels intensifient l'aversion pour le risque et la préférence pour la liquidité des intermédiaires5 ».

L'analyse de McKinnon/Shaw6 vise donc à montrer que la fixation des taux au dessous de leur valeur d'équilibre :

- réduit l'épargne (baisse des dépôts bancaires) au profit de la consommation courante ; - fixe l'investissement au-dessous de son niveau optimal ;

détériore la qualité de l'investissement réalisé dans la mesure où les banques sont forcées par le gouvernement de financer des projets à faibles rendements (production agricole...).

5 McKinnon R., (1989), p 29.

6 McKinnon -- Shaw, (1990), pp. 477-480.

Figure 1 : équilibre épargne-investissement

Intérêt

i2 in i

E f(R)

E, (R) En (R) El (R) Epargne

Source : DEBONEUIL X « La politique monétaire et son contexte économique », la Revue Banque, p.436.

Sur le graphique et pour un revenu donné (R), l'épargne est une fonction croissante de taux d'intérêt et l'investissement est une fonction décroissante de celui-ci. L'équilibre sur le marché des capitaux s'établit au niveau E0(R) d'épargne et io d'intérêt. Dans ces conditions, la rentabilité des investissements doit se situer logiquement au dessus du taux de marché, par exemple entre io et i2.

L'objectif étant d'apprécier l'impact de l'intervention des pouvoirs publics pour fixer des taux d'intérêt au dessus de son niveau d'équilibre il. Cette intervention conduit à un déséquilibre entre le volume de l'épargne et la demande des fonds destinés aux investissements (la différence entre E0(R) et E2(R).

La politique de plafonnement des taux d'intérêt à la faveur des activités prioritaires aura comme conséquence le financement des projets d'investissement à faible rendement (qui se situent dans la zone ombrée).

Par ailleurs, étant donné qu'il n'est pas possible de financer tous ces projets (puisque l'épargne se situe au niveau E0(R), les banques sont obligées de mettre en place des procédures non financières de rationnement des crédits.

1.2 Prolongements théoriques de la libéralisation financière

D'autres auteurs se sont inspirés des théories de McKinnon et Shaw, ainsi Kapur7 (1976) qui considère que la variable volume du crédit bancaire pourrait stimuler les investissements des entreprises car l'amélioration des taux d'intérêt nominaux sur les dépôts financiers pourrait traduire un maintien de la croissance de l'économie à travers la collecte des ressources constituées des dépôts des clients.

Galbis (1977) quant à lui s'est intéressé à la sensibilité de l'épargne aux taux d'intérêt réels dans un modèle à deux secteurs, un « traditionnel » où le rendement de capital est faible et l'autre « moderne » où, le rendement de capital est important. Galbis montre que l'augmentation du taux d'intérêt permet de mobiliser l'épargne. Il considère que le premier secteur autofinance ses investissements, alors que pour le second, le financement se fait par l'épargne et donc par les prêts bancaires, et considère que pour stimuler les niveaux d'investissement des entreprises, il faut accroître les taux d'intérêts réels sur l'épargne des ménages.

Pagano (1993)8 identifie trois canaux de transmission entre le développement financier et la croissance à long terme :

un accroissement de la proportion de l'épargne transmise au financement de l'investissement, par la baisse des coûts de transaction impliqués dans la collecte de l'épargne et dans son allocation à l'investissement, qui s'interprète comme la perte d'une partie de l'épargne dans le processus d'intermédiation ;

un accroissement de la productivité marginale du capital, car un système financier performant alloue l'épargne vers les projets les plus rentables ;

un effet ambigu, bien connu et documenté dans la littérature, sur le taux d'épargne privé. D'un côté le développement d'instruments d'épargne fiables et efficace et la rémunération de l'épargne peuvent conduire à la hausse du taux de celui-ci. Mais le développement financier peut aussi réduire l'épargne : des ménages mieux assurés par exemple, peuvent réduire l'épargne de précaution.

Le développement financier relâche aussi la contrainte de liquidité à laquelle les ménages font face et permet un lissage de la consommation, ce qui peut également entraîner une baisse du taux d'épargne.

Kapur (1976) fut un des premiers à compléter l'analyse de McKinnon en l'intégrant dans un modèle dynamique. Il conclut qu'il est préférable d'accroître le taux nominal servi sur les dépôts plutôt que de réduire le rythme de croissance de la masse monétaire. La première solution permet d'atteindre simultanément deux objectifs: la réduction de l'inflation (grâce à une diminution de la demande de monnaie) et la stimulation directe de l'épargne.

8 Pagano M., (1993), pp. 613-622.

Ces effets sur l'organisation financière ont pour conséquence d'accroître à la fois, le niveau et la productivité du capital, donc l'amélioration des investissements et la croissance économique, selon l'enchaînement présenté dans la figure 2.

Figure 2 : effets de l'organisation financière sur la production

Sélection d'investissement Amélioration de la collecte et de la

I rémunération de l'épargne

I

Productivité du capital Epargne 1

I Investissement

I


· Production

L'impact de l'organisation financière sur le taux de croissance de l'économie peut être justifié par l'existence d'une proportionnalité entre le stock de capital et le niveau de production. En effet, une efficience du système financier accrue peut entraîner une augmentation des niveaux de production à travers l'augmentation du niveau de productivité de capital et générer une augmentation de l'épargne, qui, à son tour accroît à nouveau le stock de capital.

Néanmoins, un système financier pourrait manifester des contraintes de distribution des crédits destinés au financement des entreprises : elles sont dues à la présence des asymétries d'information entre prêteurs et emprunteurs.

1.3 Contraintes de crédit et imperfections des marchés de crédit

L'effet de la libéralisation financière sur le développement économique est souvent analysé au travers le lien entre épargne et investissement, c'est-à-dire la manière dont les fonds prêtables sont alloués aux agents économiques. Dans le cas du financement des entreprises, cette relation est traditionnellement analysée en termes d'efficacité allocative et d'efficacité

informationnelle des intermédiaires financiers9. Les relations entre prêteurs et emprunteurs sont à l'origine des asymétries informationnelles. Celles-ci peuvent prendre deux formes (Fabienne Rosenwald, (2001)) : soit la sélection adverse ex ante, c'est-à-dire que le prêteur n'a pas d'informations suffisantes sur l'emprunteur (informations sur l'entreprise et degré de risque de son projet), soit l'aléa moral dans le cas où l'emprunteur agisse sur le risque de son projet d'investissement et donc sur la rémunération du prêteur, soit encore de sélection adverse ex post dans le cas où le prêteur n'arrive pas à constater le degré de remboursement de son prêteur et attendre le résultat de projet.

1.3.1 Rationnement de crédit

La prise en compte des effets des asymétries d'information remet en question la conclusion de Arndt (1982) et Cho (1986) quant à l'effet positif de la libéralisation sur les contraintes de financement des entreprises. Des contraintes endogènes au marché de crédit, résultant du comportement des banques, comme réponse à la présence d'asymétries d'information entraînent des problèmes de rationnement (Stiglitz et Weiss, 1981).

A cet effet, et comme le souligne Cho10 (1986), on peut distinguer entre deux types de contraintes sur les marchés de crédit pouvant affecter l'allocation efficace de crédit et entraîner un rationnement. Les premières appelées contraintes exogènes liées aux réglementations (comme le plafonnement des taux d'intérêt), et les secondes appelées contraintes endogènes liées aux coûts résultant des problèmes d'information. Cho montre que les arguments pour la libéralisation financière sont incomplets et qu'en particulier, ils laissent trop de côté la possibilité que des contraintes endogènes sur le marché de crédit, comme celles qui résultent de l'asymétrie d'information entre emprunteur et prêteur, soient une barrière à l'allocation optimale du crédit.

A cet effet et comme le souligne Cho (1986): «les régimes seuls d'intérêt libres ne sont pas suffisants pour assurer une allocation optimale complète du capital lorsqu'il existe des imperfections d'information. Les banques vont éviter de financer de nouveaux groupes d'emprunteurs productifs parce qu'ils seront perçus comme trop risqués, et cela même si les banques sont neutres au risque ou qu'il n'existe pas d'administration des taux d'intérêt]] ». En d'autres termes, l'allocation du crédit ou l'existence de banques d'Etat d'investissement, pourrait être une réponse aux imperfections de marché (l'effet de la répression financière).

9 Mishkin ,(1996) propose un examen synthétique de ces questions dans le contexte des pays en développement. Cho Y.J., (1986), pp. 196-197

il Cho Y.J., (1986), Inefficiencies from Financial Liberalization in Absence of Well Functioning Equity Market, Journal of Money, Credit and Banking, volume 18, n°2

L'approche de Cho vise donc à comparer les rendements marginaux de l'investissement entre différents secteurs industriels du essentiellement à la segmentation du marché de crédit.

Le rationnement de crédit est donc lié à l'existence d'informations imparfaites sur le marché de crédit. Il suffit pour cela, que le rendement attendu du prêteur n'augmente pas de manière monotone avec le taux d'intérêt (Jafee et Stiglitz (1990)) car « une hausse du coût de crédit peut avoir pour effet de décourager les emprunteurs les moins risqués (phénomène d'antisélection) car le rendement de leur projet en cas de réussite est inférieur à ceux des emprunteurs risqués, et ainsi de diminuer le rendement moyen pour le prêteur. De la même façon, une hausse du coût de crédit peut avoir pour effet de sélectionner les projets les plus risqués d'un entrepreneur (phénomène d'aléa moral)12 ».

Pour certains auteurs (Stiglitz et Weiss (1981), Mankiw (1986)), l'intervention publique sur le marché des capitaux est un moyen de remédier aux effets des imperfections de marché.

1.3.2 Le modèle de Gale

Suite aux développements théoriques que nous avions développés auparavant, Gale (1991) dans son modèle montre que le résultat d'un rationnement de crédit dépend de la valeur de l'élasticité d'offre de dépôts bancaires. Le modèle utilisé par Gale (1991) pour analyser les effets des programmes fédéraux sur l'allocation du crédit est basé sur le modèle de Stiglitz et Weiss (1981). Il existe plusieurs types d'emprunteurs (agriculteurs, étudiants...etc.), l'appartenance au groupe est une information publique, et l'information cachée (dont ne dispose que l'emprunteur) porte sur le rendement futur de l'investissement. L'asymétrie d'information peut exister donc entre les emprunteurs et les prêteurs.

La banque va offrir un taux d'intérêt différent selon le groupe. L'effet de sélection adverse va entraîner une relation non monotone entre taux d'intérêt et rendement de la banque. Cette relation sera la cause d'un équilibre de rationnement du crédit. L'intervention du gouvernement va consister à garantir des crédits ou à en subventionner. Ces programmes sont financés par emprunts, qui sont remboursés par les revenus des programmes et par des taxes sur les dépôts. Gale suppose que le gouvernement a les mêmes informations et les mêmes coûts que les banques. Il utilise ce modèle pour des simulations de politiques économiques et montre que l'effet des subventions de crédits sur l'allocation du crédit dépend du niveau de l'élasticité de l'offre de dépôt.

Bloch et Coeuré, (1995), p.163

1.3.3 Williamson et les imperfections du marché de crédit

Pour Williamson, cette imperfection de marché n'implique pas nécessairement qu'une intervention publique puisse être une solution13. En effet, si le gouvernement offre une garantie sur les crédits financée par les primes d'assurance supportées par les prêteurs, et si le marché est caractérisé par un rationnement d'équilibre, le programme va réduire le taux reçu par les prêteurs, et augmenter le taux débiteur et la probabilité qu'un emprunteur soit rationné. Ainsi pour Williamson, tous les participants sont dans une situation sous-optimale lorsque l'Etat intervient.

Dans le cas d'un programme de crédit direct, Williamson, en supposant que l'Etat offre des crédits selon les mêmes termes que les banques privées, montre que ce programme n'a qu'un effet d'éviction du crédit de certains emprunteurs vers d'autres emprunteurs, et que l'effet net est nul. Dans le second modèle, le marché de crédit caractérisé par la sélection contraire et le filtrage (screening) des emprunteurs par la banque occasionne des coûts.

Williamson (1998) considère deux types d'emprunteurs, g (good) et b (bad), qui diffèrent en fonction de la distribution des rendements de leurs investissements. Le prêteur peut connaître le type d'emprunteur auquel il a à faire en encourant un coût fixe, dit coût de sélection. Ce modèle est proche de celui de « costly state verification ». Toutefois, une différence importante est que les coûts d'information ont cours avant que l'investissement ait eu lieu et non pas ex post comme dans le modèle de « costly state verification ». Si l'équilibre existe, il est séparateur, et dans ce cas la banque offre un contrat différent selon le type d'emprunteurs g ou b. A l'équilibre, la probabilité que la banque filtre des emprunteurs de type g est positive, tandis que les emprunteurs de type b ne sont pas filtrés. Williamson montre que dans ce second modèle l'intervention de l'Etat n'est pas Pareto optimale13.

1.4 La libéralisation financière : approche néostructuraliste

En opposition aux néoclassiques, les auteurs inspirant du courant néo-structuraliste (Taylor, 1983 ; Fry, 1988 ; Williamson, 1998; Kapur, 1992) contestent les fondements théoriques de la libéralisation financière prônés par McKinnon & Shaw en se basant dans leurs démonstrations sur une vision structurelle de l'économie. Pour eux , les marchés financiers non officiels 'compétitifs et agiles'15 qui sont considérés comme plus efficaces que les marchés officiels jouent un rôle important dans la formation des mécanismes d'ajustement.

13 Williamson J. & Mahar M., (1998).

14 Fry, M.J., (1988).

15 Taylor, (1983), p. 92

Pour relancer la croissance économique, ils fondent leurs hypothèses sur le maintien des taux d'intérêt à des niveaux faibles. Toute augmentation de ces derniers ne fait qu'élever l'inflation et donc ralentir la croissance (Taylor 1983).

Les néo-structuralistes rappellent que le marché informel est plus efficace que le marché bancaire officiel et assure une croissance économique16.

1.4.1 Hypothèses de l'approche néo-structuraliste

Selon Fry (1988) : « les modèles structuralistes reposent sur cinq affirmations absolument différentes de celles de McKinnon :

Les salaires sont déterminés d'une manière exogène (ou institutionnelle) à travers de conflits entre les classes sociales ;

L'inflation est déterminée par les poids relatifs des capitalistes et des travailleurs (qui sont eux-mêmes influencés par l'état de l'économie) ;

L'épargne se détermine comme une fraction des profits et non des salaires ;

Le niveau général des prix est déterminé par des marges fixes sur les coûts du travail, les importations et le financement du capital productif (taux d'intérêt),

Les pays en voie de développement dépendent de façon critique de leurs importations

de matières premières, des biens d'équipement et des biens intermédiaires17 ». L'analyse économique de l'approche structuraliste qui s'inspire des analyses keynésiennes fait ressortir les points suivants :

c'est l'égalisation entre l'offre et la demande de crédit et de monnaie qui permet l'ajustement des taux d'intérêt sur le marché financier non officiel ;

l'ajustement entre l'offre et la demande sur le marché des biens et services se réalise par les quantités et non par les prix ;

sous l'hypothèse de détermination de l'inflation par les coûts, et suite aux analyses de McKinnon et Shaw, cette hypothèse va conduire à une détérioration de la situation économique.

16 Fry, r M.J., (1988), Money, Interest, and Banking in Economic Development, The John Hopkins University Press, Baltimore

17 Fry.M.J.,(1988), p. 87.

1.4.2 Principaux développements théoriques de l'approche néo-structuraliste 1.4.2.1 Secteur informel et libéralisation fmancière

Les effets de la libéralisation financière ne peuvent être appréciés concrètement sans soulever le problème que pose l'existence d'un secteur informel. Pour les tenants de la libéralisation financière, ce dualisme marqué par la coexistence de deux marchés n'est qu'un avatar de la répression financière et de la segmentation de l'économie (Taylor (1983),). En conséquence, ce secteur perdra toute son importance dans la mesure où « le secteur informel [qui ne constitue qu'un substitut imparfait aux actifs financiers indirects] va devoir faire face à la concurrence accrue d'un secteur financier organisé plus libéralisé secteur officiel et secteur informel seraient donc substituables et la croissance du premier conduirait à la disparition immanquablement du second18 ».

Sur le secteur non officiel, les taux d'intérêt jouent un rôle crucial dans la mesure où ils représentent le coût marginal de l'emprunt, et constituent un instrument déterminant de la demande d'encaisses réelles monétaires.

Le problème consiste donc à déterminer qui, du secteur bancaire officiel ou du secteur informel, est le plus à pouvoir stimuler la croissance de l'économie. Pour les néostructuralistes, le secteur non officiel est, par nature, plus efficace que le secteur bancaire. Le second, en effet, est tenu de constituer des réserves obligatoires qui représentent une certaine fraction des dépôts. Cette hypothèse fondamentale permet de conclure, selon les néostructuralistes, à la nuisance de la libéralisation financière prônée par les modèles McKinnon & Shaw.

Revenons aux conclusions de Kapur19 en matière de la constitution des réserves obligatoires par le secteur officiel. Ses conclusions coïncident avec les affirmations des néostructuralistes, selon lesquelles les réserves détenues par le secteur bancaire officiel sont un gage de liquidité à court terme et donc qu'elles accroissent la sécurité de système.

C'est la liquidité qui constitue le point de différence entre les deux secteurs. Si le secteur informel veut connaître la même sécurité, il doit lui aussi, constituer des réserves. En l'absence de celles-ci, les agents courent un risque de liquidité important qui explique le niveau élevé des taux d'intérêt sur les marchés informels. Kapur arrive à la conclusion que, dans une économie où le secteur financier officiel est libéré de ses contraintes, les agents vont détenir à la fois des actifs du secteur non officiel (moins liquides mais mieux rémunérés) et des dépôts bancaires.

18 Taylor, L (1983), Structuralist Macroeconomics: Applicable Models for the Third World, New-York, Basic Books.

19 Kapur, B. (1992), pp. 63-77.

La conclusion de Kapur en terme de comparaison nous amène à souligner une certaine complémentarité entre les deux secteurs. Le secteur informel, d'après Kapur, présente trois principaux avantages :

Sa bonne implantation géographique dans des zones où il est difficile au secteur officiel de s'implanter si on tient compte des coûts ;

Absence d'asymétrie informationnelle entre prêteurs et emprunteurs dans la mesure où les prêts ne sont accordés qu'à des individus membres de la communauté où l'information circule très vite ;

La faiblesse du risque d'aléa moral parce que le mauvais débiteur risque l'exclusion pure et simple de la communauté.

1.4.3 Le modèle de Van Wijnbergen

Van Wijnbergen (1983) a beaucoup réfuté la théorie de McKinnon & Shaw de la libéralisation financière. Il insiste, comme les autres théoriciens inspirés des analyses néostructuralistes, sur le rôle de secteur informel dans le financement de l'économie.

Selon Van Wijnber, l'augmentation des taux d'intérêt servant les dépôts bancaires aura des effets néfastes sur les niveaux d'investissement des entreprises via la réduction des fonds prêtables (demande d'encaisses monétaires). Ceci aura aussi comme conséquence une hausse des taux d'intérêt sur le marché informel. Le marché des biens et services sera influencé négativement suite à cette hausse des taux d'intérêt sur le marché non officiel.

Van Wijnbergen suppose dans son modèle que la richesse réelle des agents se partage entre la monnaie, les dépôts bancaires à terme et les prêts directs au secteur productif sur les marchés informels. Ces éléments sont supposés substituables et sont dépendants des variables : le taux d'inflation, le taux d'intérêt nominal d'équilibre du secteur informel (i), le taux d'intérêt réel servi sur les dépôts à terme (rtd) et le revenu (y). Les effets d'une augmentation du taux réel servi sur les dépôts peuvent être présentés dans la figure 3.

Nous pouvons visualiser schématiquement les effets de la façon suivante :

20 Van Wijnbergen, S. (1983), "Interest Rate Management in LDC's", Journal of Monetary Economics, vol 12, n°3, septembre, pp. 433-452.

Figure 3 : Les effets d'une augmentation du taux réel sur les dépôts à terme

i

, LM'

i' i

LM

IS

Y' Y Y

M.J.Fty, « Money, Interest and Banking in Economic Development », p. 92

Une augmentation du taux réel servi sur les dépôts (rtd) n'affectant pas le marché des biens - qui ne dépend que du taux d'intérêt réel du secteur informel ( i -- Tc) et du revenu (y)- IS ne varie pas. Par contre, il y a deux effets contradictoires sur le marché de la monnaie. D'une part, la hausse de rtd accroît la demande d'encaisses monétaires et fait donc déplacer LM vers le haut (passage à LM'). D'autre part, on peut constater une hausse de l'offre de monnaie suite à l'effet de substitution entre la monnaie et les dépôts à terme, c'est-à-dire que les agents vont se tourner vers les dépôts à terme et négliger la détention des encaisses monétaires.

L'impact net sur la courbe LM est fonction du ratio des réserves obligatoires et des élasticités des demandes de monnaie et d'actifs du marché informel par rapport aux taux servant les dépôts à terme. Dans le cas où les agents privilégient les dépôts à terme aux actifs du marché informel, une partie des fonds collectée va alimenter les réserves obligatoires, ce qui va réduire les ressources d'investissement pour les entreprises. La courbe LM va donc se déplacer vers le haut, et l'élévation des taux d'intérêt sur les dépôts affecte les taux d'intérêt nominaux sur le marché informel : déplacement de (i) vers (i') et le revenu va baisser pour passer de (y) vers (y'). C'est en fait l'effet substitution qui l'emporte selon les néostructuralistes. La libéralisation financière d'après McKinnon & Shaw qui visait l'accroissement de la rémunération réelle servie sur les dépôts bancaires n'a eu que des résultats néfastes.

Les hypothèses selon lesquelles reposent cette approche néo-structuraliste constituent ses limites : l'efficacité de secteur informel dans l'allocation des ressources et la constitution des réserves obligatoire par le système bancaire.

1.5 Les contraintes de financement et effets des réformes financières

1.5.1 Les contraintes de financement et taille des entreprises21

De nombreuses analyses empiriques qui s'intéressaient aux problèmes financiers comme contraintes qui s'imposent davantage aux petites entreprises qu'aux grandes ont pris un intérêt particulier durant les dernières années (Jaffee & Russell (1976), Keeton (1979), Stiglitz & Weiss (1981), Fabienne Rosenwald (1988), Fazzari, Hubbard & Petersen (1988), Crépon & Rosenwald (1988) et Duhautois (1995)).

Fazzari, Hubbard & Petersen22 (1988) sont considérés comme les premiers à analyser empiriquement cette problématique de contraintes financières. Les tests menés reposent sur l'identification d'un sous ensemble d'entreprises qui sont susceptibles de subir davantage des contraintes financières. Les critères de séparation utilisés sont ;

- le taux de rétention des dividendes qui peut être corrélé fortement avec les opportunités d'investissement ;

- la relation solide banque-entreprise permet de réduire les coûts d'information ;

- la taille et l'âge de la firme qui sont considérés comme des variables déterminants pour que la firme soit contrainte financièrement ;

- la présence des notations sur les titres émis pour les entreprises cotées.

Dans leur papier, ils ont mis l'accent sur la relation positive entre le cash-flow généré par les firmes et leurs dépenses d'investissement.

Fazzari, Hubbard & Petersen affirment que la relation positive montre que les entreprises de petite taille par rapport aux grandes sont contraintes financièrement, du fait que les fonds externes demeurent plus coûteux que les fonds internes et que la prime de risque demandée est une fonction décroissante de la richesse de l'emprunteur.

Pour Hines (1995) et Thaler, la raison est simple : les petites entreprises pour lesquelles l'information est plus difficile à collecter sont plus éloignées des marchés de crédit.

La conclusion des tests de Fazzari, Hubbard et Petersen est qu'on ne peut rejeter l'hypothèse selon laquelle certaines entreprises sont contraintes financièrement.

21Certains organismes de crédit demandent un niveau de garanties important pour les petites entreprises composant un risque de faillite élevé : comme la capacité à offrir des garanties plus élevée pour les grandes entreprises dont le risque de faillite est relativement moins faible. C'est le même scénario au niveau d'endettement.

22 Les auteurs ont travaillé sur un échantillon de 422 entreprises de l'industrie manufacturière de 1970 à 1984.

En revanche, pour Kaplan et Zingales23 (2000) ce résultat --relation positive entre cash-flow et dépenses d'investissement- est réfuté : la relation positive est plus forte pour les entreprises qui ne sont pas, théoriquement, susceptible d'être soumises aux contraintes financières.

Une autre explication due à Jensen (1986) qui s'appelle la théorie de free cash-flow. Pour lui, le résultat en question peut avoir origine les relations d'agence qui naissent entre actionnaires/propriétaires de l'entreprise et les managers. Ces derniers qui peuvent suivre d'autres objectifs que celui de la maximisation de la valeur de l'entreprise et avoir des tendances à élaborer des projets d'investissement même ceux qui présentent moins de rentabilité de moment que ces projets agrandissent la taille de l'entreprise. Ces relations créent ainsi des conflits d'agences.

1.5.2 Désengagement de l'Etat et effet des réformes financières sur l'investissement des entreprises

Sur la période 1969 à 1996, Borensztein et Lee (1999) analysent l'évolution de l'allocation du crédit en Corée du Sud, à partir d'un panel comportant des données sur 32 secteurs manufacturiers. Selon ces auteurs, l'importance de l'intervention de l'Etat sur le marché du crédit est caractérisée par une forte allocation du crédit à des secteurs jugés prioritaires ou à des entreprises fragilisées. D'autre part, du fait de l'existence de « chaebol » (groupes industriels), les grandes entreprises ou celles ayant de forts liens avec le pouvoir ont accès d'une manière disproportionnée au crédit. Même après les réformes financières, ces auteurs estiment que les banques peuvent être incompétentes à évaluer et à contrôler les projets et donc les fortes relations clients/banques restent l'un des déterminants importants dans l'allocation du crédit. Ils utilisent une méthode comparable à celle de Jaramillo, Schiantarelli et Weiss (1992). Leur test est construit sur la régression de flux de dettes rapporté au stock de capital, expliqué par une variable d'efficience (le taux de profit ou alternativement la productivité marginale du capital) et des variables de contrôle : la variable expliquée retardée d'une période, le logarithme du stock de capital, le ratio dette sur capital moyen, les exportations rapportées au chiffre d'affaires et enfin des variables muettes annuelles.

Leurs résultats indiquent que sur la période 1970-96, l'efficacité du secteur ne joue pas un rôle important dans les choix de l'allocation du crédit (le coefficient de la variable taux de profit n'est pas significativement différent de zéro) et même a un effet négatif si l'efficacité est mesurée par la productivité marginale du capital : le crédit est alloué de préférence aux secteurs ayant des performances économiques médiocres.

23 Kaplan & Zingales (2000), Investment -- Cash flow Sensitivities are not Valid Measures of Financing Constraints, Quarterly Journal of Economics, pp. 169-215.

Lorsqu'ils distinguent deux périodes pour prendre en compte l'effet des réformes financières (1970-84 et 1985-96), les résultats sont équivalents : malgré le désengagement de l'Etat, les banques continuent à financer en priorité les secteurs les moins performants. Les auteurs expliquent ce résultat par les liens privilégiés entre clients et banquiers, qui passent avant les questions d'efficacité.

1.6 Déterminants de l'investissement et la théorie financière : le modèle de Jorgenson24 Le modèle théorique de l'investissement de Jorgenson (1963), repose soit sur les déterminants coût du capital et coût réel du travail, soit le déterminant coût relatif capital/travail. Pour Jorenson, quand le coût d'utilisation du capital est important relativement au coût du travail, l'investissement de l'entreprise sera plus faible. C'est l'élasticité de substitution entre les deux facteurs qui détermine les niveaux d'investissement.

Mais quant aux mesures et signe de l'impact des déterminants en question sur le comportement des investissements, ils restent peu concluants et par conséquent, conclure que les coûts des facteurs de production (les salaires et les taux d'intérêt) ne jouent aucun rôle dans les décisions d'investissement.

Peu d'économistes seraient prêts à signer un tel propos, ne serait-ce que parce que ces mêmes variables (les salaires et le taux d'intérêt) jouent sur le profit qui lui-même joue sur l'investissement25. Ce n'est pas parce que l'on ne parvient pas à identifier précisément un effet que cet effet n'existe pas.

1.7 Les modèles post-keynésiens

Les post-keynésiens ont critiqué à leur tour la théorie de la libéralisation financière des néoclassiques. L'épargne qui est considérée par McKinnon & Shaw comme la clé de la réussite de processus de libéralisation, les post-keynésiens insistent sur le fait que l'investissement dépend en particulier de la demande effective (la demande d'investissement anticipée par les entreprises) et des taux d'intérêt débiteurs (Beckerman (1988), Burckett & Dutt (1991) et Demirguç-Kunt & Detragiache (1997)).

24 Jorgenson D.W. (1963), Capital Theory and Investment Behavior, American Economic Review, vol. 53, n° 2, May, pp.247-259.

25 Herbet J.B., Peut-on expliquer l'investissement à partir de ses déterminants traditionnels au cours de la décennie 90 ?, Economie et Statistique, n° 341-342, (2001), p. 94.

1.7.1 L'analyse de Burkett & Dutt26

Les travaux de Burkett & Dutt (1991) traitent l'effet de la libéralisation financière dans un contexte d'une économie caractérisée par un sous emploi de ses capacités de production. Leurs écrits s'opposent aux théories de McKinnon et Shaw. Sous des conditions de sous emploi des capacités de production, la politique de libéralisation financière ne produit que des impacts négatifs sur la croissance économique. Dans une étude empirique effectuée par Burkett & Dutt (1991) sur le Chili, ils ont montré que le processus de libéralisation n'a pas pu stimuler ni les niveaux d'investissement ni la croissance économique. L'effet traduit par cette politique est dirigé vers des secteurs moins productifs, tels que l'immobilier, les spéculations sur les marchés financiers et l'importation des biens de luxe.

En effet, d'après les auteurs, toute augmentation des taux d'intérêt sur les dépôts va engendrer une baisse de l'investissement : l'augmentation des taux d'intérêt nominaux encourage l'épargne, mais baisse la demande effective des entreprises. L'effet limite et contradictoire dans ce canal réside dans le rôle faible donné aux intermédiaires financiers en matière de collecte des fonds et leur affectation optimale sur les l'ensemble de l'économie.

Burkett & Dutt affirment que l'effet négatif sur la demande effective des entreprises domine l'effet positif via l'intermédiation financière : Compte tenu de la hausse des taux servis sur les dépôts, la demande effective diminue à cause de la baisse du taux de profit des institutions financières qui réduit l'investissement et la production.

Ce phénomène peut être amplifié par le comportement des entrepreneurs. Si ces derniers deviennent pessimistes -à cause de la baisse effective du taux de profit- l'effet négatif sur l'investissement est renforcé.

1.7.2 L'analyse de Dutt

Dutt dans son modèle raisonne dans un contexte de plein emploi des facteurs de production et estime qu'il est possible de retrouver les effets de libéralisation financière de court et long terme par une hausse des taux d'intérêt réels via l'augmentation du volume d'épargne. En situation de chômage, la libéralisation d'après Dut n'a que des effets fâcheuses à court terme et long terme expliquée par la sous utilisation des facteurs de production.

Dutt distingue entre quatre catégories d'agents dans l'économie : les travailleurs, les
capitalistes, les entrepreneurs et les banques. Le salaire est la contrepartie que reçoivent les
premiers qui sera détruit pour sa totalité dans un unique produit dans l'économie. La

26 Burkett, P. et Dutt, A.K. (1991), Interest Rate Policy, Effective Demand, and Growth in LDC's, International Review of Applied Economics, vol 5, n°2, pp 127-153.

détention du capital et des entreprises caractérise les seconds qui procèdent à une épargne d'une partie de leurs revenus sous deux formes : placement financiers (achats d'autres titres financiers) ou dépôts bancaires. La troisième catégorie utilise du travail et du capital pour produire, tandis que la dernière assure l'allocation des fonds et le financement de l'économie. Les banques peuvent faire recours à la banque centrale en cas d'insuffisance des ressources financières pour satisfaire la demande en contrepartie d'un taux déterminé par la politique monétaire en vigueur.

Deux situations peuvent marquer l'économie : d'abord en cas où les entrepreneurs anticipent une demande insuffisante, l'environnement de concurrence imparfaite régnera et les prix fixés par ces derniers dépendent de la marge fixe sur le salaire des employés et déterminent leurs niveaux de productions en fonction de juste demande s'adressant à ces entreprises. C'est le taux de profit dégagé, l'ampleur de la capacité de production et le taux d'intérêt qui vont déterminer leur stratégie d'investissement. En revanche, dans le deuxième cas caractérisé par une demande importante permettant aux entreprises l'utilisation pleine de leurs capacités de production, cela va causer une augmentation des niveaux des prix. Dans cette situation, la décision d'investissement est déterminée conjointement par le taux de profit et le taux d'intérêt ;

Enfin, comme l'offre de monnaie est déterminée par la demande, les entreprises ne sont pas limitées dans leurs investissements par une insuffisance de fonds prêtables. En fait, ce sont en premier lieu les "esprits animaux" qui conditionnent la décision d'investir.

Dutt met l'accent à la fin dans son article sur la pertinence de son modèle compte tenu des spécificités des pays en voie de développement. Les principaux résultats tirés portent notamment sur les caractéristiques des structures des économies de ces pays ainsi que les problèmes liés à ses économies. Sa vision keynésienne semble bien peu adapté.

L'aspect traditionnel des pays en voie de développement (domination des structures économiques agroalimentaires) fait que la déréglementation de système financier se tient en échec (Dutt (1991)) qui se fait dans un cadre de programme d'ajustement structurel.

Selon Dutt, les problèmes liés à l'insuffisance de la demande effective rendent son analyse pertinente pour les pays en voie de développement, y compris pour les moins développés27 .

27 Dutt, A.K., (1991), pp. 228-229.

1.7.3 Les conclusions de Modigliani et Miller

Sur le plan empirique et en relation avec l'effet des imperfections exogènes de marché sur la contrainte de crédit des entreprises, s'inspirent des méthodes développées pour analyser la contrainte de crédit en présence d'imperfection de marché.

Ces méthodes s'appuient sur le comportement d'investissement des entreprises et sur le principe d'indépendance de Modigliani et Miller (1958).

Ils montrent en fait que les décisions d'investissement sont indépendantes de la structure financière de l'entreprise (dont les imperfections de marché de crédit), et par conséquent, il fallait donc penser à d'autres variables expliquant le montant de l'investissement réalisable. « C'est donc la relation entre ces variables financières et investissement qui pourra déterminer si les entreprises sont contraintes »28.

La spécification du modèle qui tient compte de l'absence de contraintes de crédits consistait à montrer que les décisions d'investissement ne dépendent que des anticipations de profit et des investissements passés. La forme réduite de la fonction d'investissement de type accélérateur est la suivante :

(I I K)i,t = ai (//K)i,t_i + a2(AY/K)i,t + E i,t (1.4)

(1.4) est la fonction d'investissement de type accélérateur.

Avec I : Investissement

K : Stock de capital

AY : Variation de la production

E : Terme aléatoire

i : entreprise

t : année

Mais en présence des contraintes de financement des investissements des entreprises citées précédemment (contraintes endogènes - asymétries d'information- ou exogènes -- interventions des pouvoirs publics-), l'hypothèse d'indépendance de principe de Modigliani et Miller est rejetée. On devrait donc faire recours aux autres variables financières pour expliquer les montants d'investissement réalisables.

28 Jaffee et Stigliz, (1990), p.876.

1.8 Autres développements théoriques de la libéralisation financière

1.8.1 La sélection des emprunteurs

Pour financer les investissements des entreprises, les banques s'appuient sur un ensemble de critères pour sélectionner les emprunteurs (entreprises). En effet, les banques collectent des informations comptables et financières dans les bilans et les comptes de produits et charges des entreprises et étudient l'environnement dans lequel elles évoluent. Malgré cela, la sélection n'était jamais parfaite car trop coûteuse. L'endettement de l'entreprise emprunteuse influence aussi la décision de la banque, une entreprise trop endettée aura une moindre propension à pouvoir rembourser tous ses crédits.

Néanmoins, la réputation de l'emprunteur et sa capacité à rembourser les dettes sont des éléments centraux qui déterminent la décision de prêteur d'accorder ou non le crédit, « la valeur des fonds propres est ici un bon indicateur » (Gilles, 1992). Disposer d'un actif net initial important réduit le poids de l'incertitude qui a une forte influence en matière de décision d'investissement. Selon Bernanke et Gertler (1989), une entreprise disposant d'importants fonds propres réduit son problème d'asymétrie d'information car son endettement relatif au capital est faible et présente moins de risque. Elle peut ainsi obtenir plus de crédit et à de meilleures conditions. Ces fonds propres donnent également aux entreprises la possibilité d'éviter le risque de rationnement de crédit grâce à une forte garantie hypothécaire (Gale, 1990).

De fait, l'évaluation ex-ante des projets d'investissement peut être à l'origine des problèmes d'asymétrie d'information29.

Les individus qui évoluent dans un environnement où chacun est doté d'une richesse limitée et d'un projet, qui est soit de bonne ou de mauvaise qualité, et que l'information dont ils disposent est propres à chacun. L'asymétrie d'information peut causer par conséquent deux problèmes, soit l'antisélection ou la sélection adverse, soit l'aléa moral. Le premier problème peut survenir en situation où les préteurs connaissent mal les qualités de l'emprunteur et que les emprunteurs qui ont une mauvaise cote de crédit sont fortement incités à chercher des prêts. Lorsque le manque d'informations complètes empêche les prêteurs de bien évaluer la qualité de crédit, ils n'acceptent de payer un prix donné pour des titres reflétant la qualité moyenne des entreprises qui les émettent que lorsque ce prix est inférieur au juste prix de marché pour les entreprises de haute qualité, mais supérieur au juste prix du marché pour les entreprises de faible qualité.

29 Boyd & Prescott (1986) et Gertler (1988).

On parle de l'aléa moral lorsque les emprunteurs peuvent modifier leur comportement, après la conclusion de la transaction, d'une façon qui pourrait être jugée non souhaitable par le prêteur. Les emprunteurs souhaitent investir dans des projets relativement risqués dont ils retireront des bénéfices en cas de succès, mais dont les pertes, en cas d'échec, seront pour l'essentiel à la charge du prêteur ; les prêteurs par contre souhaitent limiter les risques des projets. Ainsi les emprunteurs cherchent à modifier leurs projets de manière à accroître les risques courus après la conclusion de la transaction financière, ce qui facilite l'asymétrie de l'information. Dans ces conditions, beaucoup de projets d'investissement effectivement mis en oeuvre sont excessivement risqués. Les prêteurs deviennent dès lors plus réticents à accorder des prêts et les niveaux d'intermédiation et d'investissement sont sous-optimaux.

1.8.2 La supervision des emprunteurs

La supervision des emprunteurs consiste à mettre les engagements de ceux-ci sous le contrôle des banques, car ils peuvent mettre en place des activités plus risquées que celles pour lesquelles le crédit lui a été accordé : la banque, pour éliminer ce risque d'aléa moral, inscrit dans le contrat des clauses obligeant l'emprunteur à respecter son engagement et n'investir que dans des projets pour lesquels le crédit est alloué.

C'est à partir de ce rôle de supervision des emprunteurs que Diamond (1984) montre que, dans un environnement caractérisé par l'existence d'asymétrie d'information ex post entre prêteurs et emprunteurs, la dette est le contrat optimal entre emprunteur et prêteur, d'où l'émergence d'intermédiaires financiers.

Il nous semble enfin que les imperfections qui règnent sur les marchés financiers ont constitué un souci considérable dans les théories modernes de la libéralisation financière. McKinnon (1988) revient à souligner l'importance de la prise en compte des asymétries d'information et de sélection adverse dans les validations empiriques et conclut que l'instabilité macro-économique et les aléas moral peuvent conduire à un taux d'intérêt trop élevé et à un excès de prise de risque par le secteur bancaire. Dans un tel univers « le gouvernement devrait probablement imposer une administration sur le taux d'intérêt type sur les prêts (et sur les dépôts) aussi bien qu'un nombre de mesures prudentielles, telles que des provisions plus grandes sur les créances douteuses » (McKinnon 1988). Il ajoute même que « les économies ayant connu un développement réussi ont combiné une stabilité du niveau général des prix avec des taux d'intérêt nominaux substantiels --même s'ils sont réglementés- sur les dépôts et sur les crédits ».

1.9 Libéralisation et réformes financières : étapes et conditions de réussite

La réussite de la libéralisation financière, notamment dans les pays émergents nécessite le passage d'un certain nombre d'étape et suppose l'existence préalable des conditions de stabilisation de l'économie. L'ordre dans lequel les mesures politiques doivent être prises et la vitesse des réformes financières peuvent constituer également des limites justifiant l'échec ou la réussite de la libéralisation financière.

1.9.1 La séquence de libéralisation optimale

Suite à l'échec des tentatives de la libéralisation financière dans le Cône Sud d'Amérique Latine (Argentine, Chili et Uruguay), ainsi que dans d'autres régions (Philippines), plusieurs travaux ont été intéressé à la détermination de la séquence des réformes.

La séquence de libéralisation financière est définie comme étant celle « qui maximise la valeur actualisée de l'addition nette à l'économie » Michael (1986).

o Etapes de la libéralisation financière interne

Avant de définir l'ordre d'adoption des réformes ainsi que leur vitesse au sein de chaque économie, les conditions initiales sont nécessaires pour la réussite de toute libéralisation financière. Ainsi, la nomenclature des étapes de la libéralisation financière se fait aux niveaux interne et externe du secteur. Les politiques qui concernent la première étape et touchent à la sphère réelle concernent : Stabilité macroéconomique, libéralisation des prix, levée des taxes ainsi que les subventions et privatisation. La seconde étape qui concerne la sphère financière nécessite la restructuration et privatisation du système bancaire domestique, et la création ou réactivité du marché monétaire

La troisième étape qui concerne le secteur réel nécessite : la libéralisation des opérations courantes (levée des barrières commerciales) et la création d'un marché de changes et convertibilité de la monnaie ;

Dernière étape qui concerne le secteur financier nécessite : la levée de contrôle des mouvements des capitaux et convertibilité totale de la monnaie.

Villanueva D. et Mirakhor A. (1990).

1.9.2 La vitesse des réformes financières

1.9.2.1 La libéralisation financière brutale

Villaneva et Mirakhor (1990) accentuent la relation entre la vitesse des réformes financières et les conditions initiales de libéralisation financière. Ils montrent, à leur tour, que si la réforme est appliquée dans un environnement macro-économique instable et/ou si la surveillance et la supervision bancaire inefficace, la politique de libéralisation des taux d'intérêt doivent être progressive et inversement, la libéralisation des taux d'intérêt peut être prématurée.

La périodisation de la libéralisation du secteur financier constitue un problème qui occupe une place particulière dans la théorie financière. Si la période de transition est permanente, la déréglementation du système financier ne peut être faite que lorsque l'économie est aboutie à une phase de maturité plus appropriée. Ensuite, la longueur de la répression financière qui précède la politique de libéralisation financière entrave l'approfondissement financier et cause des effets néfastes sur la croissance économique. Il serait donc utile de mettre un programme d'apprentissage des nouvelles règles.

Nous pouvons ainsi affirmer que l'application d'une politique de libéralisation financière ne peut être adoptée que dans une économie stable et un ordonnancement optimal qui prévoit le passage de la stabilisation à la croissance.

1.9.2.2 La libéralisation financière graduelle

Dans certaines économies émergentes, les expériences de libéralisation financière s'avèrent prudentes (cas des pays d'Amérique Latine). Les structures économiques et les modes de fonctionnement des économies sont des variables dont dépend la réussite des réformes financières. En effet, lorsque la réforme est graduelle, la libéralisation risque de perdre son impulsion à travers le temps. De même, plus les mesures de réformes sont rapides et profondes, plus les gains potentiels sont importants mais le passage est risqué d'être coûteux. D'après la Banque Mondiale (1989), la libéralisation du système financier ne doit être ni trop rapide ni trop longue. Si la libéralisation est trop rapide, les entreprises pourraient encourir de lourdes pertes alors qu'elle est trop longue, le prix à payer pour la persistance de l'inefficacité financière sera plus élevé.

A titre d'exemple, McKinnon (1991) en analysant la voie optimale de la libéralisation financière conclut que le Japon n'a commencé à libéraliser son système financier qu'a une époque récente, après que les conditions initiales sont remplies.

Au total, les gouvernements doivent s'engager dans la voie de réformes avec prudence, dans la mesure où la stabilisation macro-économique et la supervision bancaire sont importantes à la modernisation du secteur financier et à la croissance économique.

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