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Les comptes spéciaux du trésor

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par Moussa TRAORE
Université Gaston Berger de Saint-Louis du Sénégal - DEA 2010
  

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Chapitre premier : La particularité des règles de

fonctionnement

Les CST reposent sur un ensemble de règles qui en constituent à la fois le domaine de définition et le cadre juridique. Ces règles renseignent sur la particularité de ces derniers puisqu'elles les déterminent dans leur généralité et dans leur singularité.

Il y a donc des règles communes à tous les CST (section première) et qui les distinguent des autres comptes et des règles spécifiques à chaque catégorie (section II) prise singulièrement et qui renforcent la particularité des CST eu égard au budget général tout en les différenciant les uns des autres.

Section première : Les règles communes aux CST

Abstraction faite de l'interdiction d'y imputer des dépenses de personnel, tout compte du Trésor qualifié de spécial l'est au moins pour deux raisons : d'abord il est censé retracer des opérations à caractère exceptionnel (§1) ; ensuite il fonctionne sur la base d'une corrélation entre recettes et dépenses (§2).

§ 1. La description d'opérations à caractère exceptionnel

Le cachet exceptionnel de ces opérations peut revêtir deux formes : il peut être dû à une différence de nature qui existe entre ces dernières et les opérations relevant du budget général et qui est matérialisée par leur caractère temporaire (A). Les CST peuvent toutefois retracer des opérations à caractère définitif (B) et dans ce cas la particularité est à rechercher dans les moyens de financement ou leur caractère secondaire compte tenu de la mission principale assignée au service qui les effectue.

A - Les opérations à caractère temporaire

La première préoccupation qui a présidé à la mise en place de CST est la nécessité pour l'Etat de prendre en compte des opérations qui, contrairement à celles présentes dans le budget général, ont cette singularité d'être décrites « au-dessous de la ligne »19(*), c'est-à-dire d'être temporaires. La première approche de la notion de CST proposée par la plupart des auteurs est basée sur cet aspect. Il en est ainsi du doyen DUVERGER qui atteste : « Certaines dépenses publiques ont un caractère purement apparent : il ne s'agit pas de véritables dépenses, mais de sorties provisoires de fonds destinés à rentrer d'eux-mêmes dans les caisses de l'Etat. (...). A l'inverse, certaines recettes sont également apparentes et provisoires »20(*). A quelques exceptions près21(*), tous les CST retracent ce genre d'opérations. En dehors des avances aux Collectivités locales22(*), on peut citer à titre d'illustration les avances sur salaire consenties par l'Etat aux fonctionnaires à l'occasion des fêtes de Tabaski et dont le remboursement s'effectue par défalcation mensuelle à la source sur une durée de dix mois pour suivre encore le même circuit un mois plus tard. Ce dernier exemple montre que la même somme débloquée au départ par le Trésor retourne dans ses caisses ; ce qui signifie que cette opération ne peut être enregistrée comme une dépense. L'échéance pour le remboursement total va coïncider avec l'approche du même événement et ce montant va servir à nouveau d'avance ; ce qui ne laisse pas à l'Etat la latitude de compter sur ces fonds pour une autre destination. Ainsi, comme le fait remarquer monsieur Maurice DUVERGER, « Ces comptes spéciaux sont, par définition destinés à se clore d'eux-mêmes, lorsque rentrent les fonds provisoirement sortis ou sortent les fonds provisoirement rentrés »23(*).

Il faut cependant préciser que le caractère provisoire n'est pas toujours aussi avéré qu'on le pense. Comme le défendent les professeurs GAUDEMET et MOLINIER : « Le caractère temporaire d'une sortie de fonds est parfois douteux ; on prétend qu'il ne s'agit que d'une avance qui sera suivie d'un remboursement, mais si le remboursement ne vient pas, l'avance devient une véritable dépense. »24(*). Dans ce cas de figure, comme pour les admissions en non valeur, les opérations dans les prévisions n'étaient pas supposées avoir une incidence sur le budget. Mais si nous nous intéressons de près au compte d'émission des monnaies métalliques, l'Etat achète les pièces fabriquées au coût de production et les revend à l'institution d'émission au prix de leur valeur nominale. La différence peut donc créer pour l'Etat des revenus (ce qui est souvent le cas d'ailleurs) qui sont de véritables recettes et qui en principe auraient dû figurer dans le budget. La même remarque reste valable pour les prêts consentis par l'Etat aux particuliers étant donné qu'ils sont grevés d'intérêts.

En somme, à opérations spéciales, comptabilisation spéciale, et les opérations des CST le sont pour le simple fait de ne pas constituer de réelles recettes ou dépenses à l'image du budget, ce qui constitue une raison suffisante pour ne pas les fondre dans ce dernier. Toutefois, l'aptitude de ces comptes à être spéciaux n'est pas réductible à ce premier caractère ; elle peut aussi se manifester pour les opérations définitives.

B - Les opérations à caractère définitif

Les CST n'ont pas pour seule vocation de retracer des opérations à caractère provisoire. Ils peuvent en effet décrire des mouvements de fonds de nature identique aux opérations budgétaires. Dès lors, où se situerait leur spécificité ? Qu'est-ce qui s'opposerait à leur soumission à un régime de droit commun ? On peut faire appel à deux cas de figure pour défendre la particularité de ces comptes dans pareils cas.

Dans le premier cas, elle trouve son soubassement dans le financement au moyen de ressources particulières. Il s'agit des comptes d'affectations spéciales. Cette catégorie de CST se rapproche des budgets annexes par le procédé mais au moment où les activités de ces derniers sont financées par l'exploitation industrielle et commerciale du service, les comptes d'affectations spéciales disposent comme ressources de diverses contributions, taxes ou redevances25(*). Pour ne pas revenir sur les exemples du fonds national de la retraite et de la caisse d'encouragement à la pêche et à ses industries annexes, nous allons recourir au droit français. Le compte de gestion des participations financières de l'Etat - prévu à l'article 21 de la loi 2001-692 portant LOLF - qui décrit les opérations de nature patrimoniale est alimenté par les produits des cessions de titres parts et droits de sociétés détenus directement ou indirectement, des reversements, les produits de réduction de capital ou de liquidation des remboursements d'avances d'actionnaires et les dotations en capital26(*).

Dans le second cas de figure, les fondements de cette particularité sont à rechercher dans la gestion d'activités industrielles et commerciales tout comme les budgets annexes, à la seule différence que la gestion est ici accessoire. C'est ce que rend M. Mamadou DIOP en ces termes : « la formule du compte spécial a été utilisée pour déroger aux règles trop strictes de la comptabilité publique, pour l'enregistrement d'opérations à caractère industriel et commercial effectuées accessoirement par des services publics non dotés de la personnalité morale. »27(*). Ces opérations sont comptabilisées dans les comptes de commerce. Nous avons en France en guise d'exemple le compte Régie industrielle des établissements pénitentiaires. La fonction principale ou première de ces établissements est d'enfermer ou de priver de liberté les prévenus et condamnés. Parallèlement à cette vocation, il peut arriver que les détenus accomplissent des travaux (menuiserie, artisanat etc.) dans une perspective de commercialisation. Les opérations afférentes à cette activité seront retracées par ce compte. Contrairement à ce qui se passe avec le budget, l'Etat ne peut pas baser ses prévisions sur ces opérations pour la simple et bonne raison que les services qui tiennent ces comptes ne sont pas censés générer des recettes ou supporter des charges. On ne peut pas s'en prendre au responsable d'un pénitencier parce qu'il n'a pas satisfait à l'obligation de tenir une comptabilité alors que pour le budget, les comptables publics sont considérés responsables des sommes à recouvrer puisque sur la base des prévisions budgétaires, l'Etat les considère comme des montants disponibles.

A côté des opérations temporaires, certaines opérations définitives occupent une place de choix dans les CST. La spécificité de ces derniers y est perceptible non plus du fait de la nature de ces opérations, mais par la provenance des ressources, exceptionnelles au regard de la mission principale des services qui les gèrent ou particulières parce que connues d'avance.

En somme, la différence entre comptes budgétaires et CST ne passe pas inaperçue en tout cas si l'on s'en tient aux opérations qu'ils retracent. Et cette différence peut être inhérente aux opérations elles-mêmes (nature) ou conforme ou non au principe de la non-affectation qui se traduit par une corrélation entre recettes et dépenses et qui mérite qu'on s'y intéresse davantage.

§ 2. La corrélation entre recettes et dépenses

Une autre spécificité des CST consiste à établir un lien direct entre recettes et dépenses soit par le procédé de l'affectation (A), soit par l'auto-approvisionnement du compte, c'est-à-dire par système revolving (B).

A - L'affectation de certaines recettes à certaines dépenses

En méconnaissance du principe de l'universalité budgétaire qui voudrait que l'ensemble des recettes de l'Etat finance la totalité de ses dépenses, les CST, pour les dépenses qu'ils effectuent, ont cette caractéristique de disposer de ressources dont les origines sont connues et qui leur sont exclusivement réservées. Comme le soulignent le professeur BOUVIER et alii, « La procédure des CST est dérogatoire au droit commun, notamment parce que l'affectation et le report de crédits y sont la règle. »28(*).

Dans presque tous les textes constitutifs ou d'application d'un compte dit spécial, il est énuméré la liste des ressources destinées à servir exclusivement et uniquement au règlement des dépenses prévues par le même compte. Ainsi, le décret 79-1151 du 17 décembre 1979 fixant les règles d'organisation et de fonctionnement du compte d'affectation spéciale dénommé fonds d'aide au sport et à l'éducation populaire29(*) énumère en son article 9 l'ensemble des recettes comptabilisées par le compte et qui sont destinées à financer uniquement les dépenses prévues à l'article 14. Ce choix des autorités publiques trouve ses motivations dans des considérations de nécessité. En effet, la particularité des CST apparaît en évidence étant donné que l'Etat ne peut pas inscrire dans le budget - qui est un document de prévision de l'ensemble des ressources dont l'Etat peut disposer pour financer n'importe quelle dépense figurant dans la masse des charges - une recette sur laquelle il ne peut plus compter parce que déjà imputée. De même tenter de prendre en compte une dépense dont le règlement est prévu à plus ou moins brève échéance par une recette extrabudgétaire aurait à juste titre des apparences frauduleuses pour le parlementaire examinant la loi de finances. Ce contrôle exige donc, pour ne pas fausser le document budgétaire, que ces recettes tout comme les dépenses qu'elles couvrent soient retracées dans des comptes ad hoc. D'un autre côté, cette affectation présente l'avantage d'exposer moins que pour le budget, les dépenses des CST à des problèmes de disponibilité.

En définitive, M. Mamadou DIOP résume bien nos propos lorsqu'il affirme : « Le procédé du compte spécial a pu servir à dégager de la masse du budget les résultats d'une activité publique particulière pour laquelle l'Etat établit des ressources spéciales ou affectées à un objet particulier. »30(*).

Donc vu sous l'angle des recettes, cette corrélation vise à extraire du pouvoir d'affectation discrétionnaire de l'Etat des ressources utilisées de droit pour les seules dépenses d'une activité donnée. Il serait cependant intéressant de l'analyser du point de vue des dépenses.

B - L'approvisionnement des comptes par système revolving

Le système revolving est un terme emprunté à la terminologie bancaire où il qualifie un crédit qui se présente comme une réserve d'argent permanente qui se renouvelle partiellement au fil des remboursements de son souscripteur. Le montant dont dispose ce dernier est déterminé en fonction de ses besoins et de sa capacité de remboursement.

Dans le jargon des agents de la Direction Générale de la Comptabilité publique et du Trésor, il recouvre la même réalité, à la seule différence qu'aux mots prêt et remboursement se substituent respectivement dépenses et recettes. Ainsi, ce sont les dépenses qui se chargent de générer les recettes. Les comptes d'avances et les comptes de prêts fonctionnent dans leur ensemble sur la base de ce système. En dehors des avances consenties aux Collectivités locales et aux particuliers, nous avons le compte de prêts DMC auquel les fonctionnaires ont souvent recours pour concrétiser leur projet de construction de logement. Le prêt accordé par la DMC est fonction de la capacité du fonctionnaire à rembourser31(*) et de la hauteur du montant demandé. Ce sont les remboursements mensuels qui vont venir alimenter à nouveau le compte et permettre de nouveaux prêts32(*). Le fonds national de retraite obéit au même principe mais avec une certaine originalité. Contrairement aux autres comptes où les décaissements précédent les encaissements, dans le cadre du FNR, les fonctionnaires actifs cotisent en réalité pour les retraités. Mais dans le fondement, c'est pour eux-mêmes qu'ils épargnent puisque cette somme va leur revenir par tranche à la fin de leur carrière. L'importance de la somme qu'ils vont percevoir n'est plus fonction des revenus qu'ils sont susceptibles d'avoir, mais de revenus qu'ils ont déjà. Donc le mot clef qui résume cette situation est la solvabilité ou la capacité de la dépense à générer une recette au moins équivalente.

Dans ce second aspect de la corrélation, nous pouvons affirmer qu'une dépense n'est effectuée qu'à la condition sine qua non qu'elle retournera sous forme de recette dans les caisses des CST. Donc autant il est possible d'utiliser des recettes pour effectuer des dépenses, autant il est possible d'effectuer une dépense pour générer des ressources.

En résumé, les CST dans leur généralité manifestent des caractéristiques qui leur sont propres ; ce qui nous pousse à admettre une dose de particularité non négligeable aussi bien du point de vue matériel, (les opérations retracées), que du point vue formel, (la possibilité de présenter leur contenu sur la base d'une affectation des recettes aux dépenses).

En marge de cette spécificité du régime juridique du procédé du CST, il existe des règles qui permettent de les distinguer les un des autres et qui aboutit à leur catégorisation.

* 19 Les comptes budgétaires sont regroupés suivant la nature des opérations qu'ils retracent. Si elles sont définitives, on parle d'opérations « au-dessus de la ligne », si par contre elles sont temporaires, elles sont dites « au-dessous de la ligne» Cf. Christian BIGAUT, Finances publiques-Droit budgétaire : Le budget de l'Etat, Paris, Ellipses, 1995, p. 34

* 20 Maurice DUVERGER, Finances publiques, PUF, 7e éd., 1971, p. 274

* 21 Nous nous voulons suffisamment circonspect pour ne pas indexer une catégorie entière. La majeure partie des auteurs citent en exception à cette règle les comptes d'affectations spéciales or, en France, deux d'entre elles en l'occurrence le fonds forestier national et le compte de soutien à l'industrie cinématographique, procèdent à des prêts qui naturellement sont comptabilisés comme des opérations temporaires. Le projet de loi de finances pour 2003 en France dans son exposé des motifs est clair ; il précise que cette catégorie retrace « des opérations définitives et, le cas échéant temporaires ».

* 22 Voir introduction, p. 3

* 23 Maurice DUVERGER, ibid.

* 24 P.-M. GAUDEMET & J. MOLINIER, op. cit. p. 285

* 25 Cf. article 8 du décret n° 80-518 du 21 mai 1980 fixant les règles d'organisation et de fonctionnement de la CEPIA. Voir aussi arrêté n° 4795 du 04-06-2008 du Ministère de l'économie maritime et des transports maritimes, de la pêche et de la pisciculture portant compte prévisionnel pour la gestion 2008 de la CEPIA.

* 26 Il faut ajouter qu'en cas d'insuffisance de ressources, l'Etat se charge de combler ce déficit par l'entremise de subventions du budget général.

* 27 Mamadou DIOP, Finances publiques sénégalaises, NEA, 1977, p. 35

* 28 Michel BOUVIER et alii, Finances publiques, 4e éd., Paris, LGDJ, 1998, p. 213

* 29 JORS n° 4751 du 16 février 1980, p. 63. Ce compte a aujourd'hui disparu du paysage des CST

* 30 Mamadou DIOP, ibid.

* 31 Il suffit de connaître le montant du salaire net et de lui faire supporter les remboursements mensuels perçus à la source tout en tenant compte des années de service donc de salaire qui restent au demandeur du prêt. Cette durée doit au moins être égale au temps prévu pour le règlement définitif du prêt.

* 32 Pour le cas spécifique du compte DMC, le remboursement peut précéder de 12 voire 24 mois la disponibilité de la somme pour le demandeur du prêt.

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"Les esprits médiocres condamnent d'ordinaire tout ce qui passe leur portée"   François de la Rochefoucauld