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Syndicats de salariés et territoire : La place des syndicats dans l'Intelligence Economique Territoriale

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par Philippe LATOMBE
IAE-IEMN Nantes - Master II 2010
  

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B- Un objectif syndical assumé de renforcement économique et d'attractivité sociale du territoire.

Malgré les éventuelles divergences de vues micro ou macro-économiques quant aux moyens à mettre en oeuvre, l'objectif commun aux différents acteurs de l'IET est de permettre au territoire d'avoir une activité économique soutenue permettant de dégager des moyens pour en assurer la pérennité dans le cadre d'une compétition mondialisée âpre. Cet objectif commun passe par le renforcement économique du territoire (sa capacité à produire des richesses) mais également sa capacité à être attractive socialement. Les syndicats partagent totalement cette vision et participent à permettre le plein emploi en aidant les entreprises à se renforcer ou se développer (1) ainsi qu'à permettre de favoriser l'attractivité sociale du territoire (2).

1. Permettre le plein emploi par la force des entreprises.

Ainsi que nous l'avons décrit précédemment, les syndicats cherchent à ce que le marché du travail atteigne le plein emploi. Cette vision globale syndicale se décline aussi de manière territoriale, et la participation des syndicats à l'IET s'inscrit dans cette optique. Or l'emploi se crée par un mécanisme complexe qui associe le marché38(*), l'organisation du travail (intra et extra entreprise), les pouvoirs politiques et leur orientation des finances publiques (locales ou nationales) et la consommation privée. Dans ce mécanisme les syndicats ont toute leur place pour plusieurs raisons.

Leur rôle dans la gestion au quotidien du marché du travail est en effet incontournable. C'est par la négociation collective (notamment des conditions salariales, des durées de travail...) que le marché du travail évolue. Cet effet est plutôt du ressort de la négociation collective à un niveau supra-local (accord de branche ou accord national), mais, au niveau local, le principal levier d'action des syndicats repose sur la volonté de préserver l'emploi et d'éviter, par tous les moyens à sa disposition, la destruction d'emploi, soit par des effets de délocalisations d'entreprises soit par l'effet de disparitions pures et simples d'entreprises. Les prérogatives légales des syndicats en matière d'information sur la santé financière des entreprises sont importantes on l'a vu. Mais cette information privilégiée n'est rien sans la volonté absolue des organisations syndicales d'améliorer (ce qui inclus l'orientation, l'insertion, la formation et la qualification notamment : idée d'une gestion qualitative) et de protéger l'emploi (dans le sens de maintenir l'emploi sur le territoire en cas de difficultés d'entreprises, ou de favoriser sa croissance : idée d'une gestion quantitative). Ainsi, l'action syndicale va pouvoir trouver toute son expression sur le territoire par sa participation à des mécanismes particulièrement bien codifiés, soit en amont lors de difficultés économiques, soit lorsque le territoire est confronté à des mutations économiques importantes. Au niveau des entreprises, les outils comme le Plan de Sauvegarde de l'Emploi (PSE) et/ou la création de cellule de reclassement sont systématiquement recherchés par les organisations syndicales car ils permettent de recourir à un cadre juridique formalisé, et offrent des contreparties en terme de reclassement pour les salariés. En effet, le Code du travail dispose que le plan de sauvegarde de l'emploi « doit déterminer les modalités de son suivi » et que « ce suivi fait l'objet d'une consultation régulière et approfondie du comité d'entreprise et des délégués du personnel » (article L. 321-4 du Code du Travail). L'implication syndicale pour en proposer la mise en place chaque fois que cela est possible est donc logique, le cadre juridique lui permettant de conserver un rôle prépondérant dans son suivi, même si, en l'état actuel des textes législatifs il n'est pas fait mention de communication directe entre l'organisme de reclassement et les organisations syndicales. Même si de nombreuses études montrent que ces méthodes ne produisent pas en totalité les effets attendus39(*), la recherche de leur utilisation est un marqueur de la volonté syndicale de protéger l'emploi en recourant à un processus d'IET car ces possibilités légales imposent la discussion entre l'ensemble des acteurs ainsi qu'un process calqué sur le cycle de l'IET.

Dans le cadre de mutations ou de difficultés ne concernant plus une seule entreprise sur le territoire (quelle qu'en soit sa taille) mais à une filière complète (par exemple la filière d'extraction de charbon et de houille dans les territoires du nord ou de l'est de la France ou plus récemment la filière de la chaussure et de la production de vêtements dans le choletais), les syndicats sont là aussi un acteur incontournable de l'IET car leur mobilisation à la sauvegarde de l'emploi est évidente. Leur participation aux CBE, aux Comités de Développement Locaux ou aux études et expériences lancées ou coordonnées par la Mission Interministérielle sur les Mutations Economiques (MIME)40(*) est indispensable à la recherche d'une solution coordonnée qui permette à la fois aux entreprises d'opérer des mutations (changement d'activité si possible, réduction des coûts pour rester compétitives...), aux salariés licenciés un départ dans de bonnes conditions (pour éviter tout stress ou risque sur leur santé, mais également pour leur offrir des opportunités de rempli), pour le territoire enfin pour maintenir le niveau global d'emploi et éviter toute spirale descendante d'activité (moins d'entreprises donc moins de population résidente donc moins d'attractivité donc moins d'entreprises...). Les syndicats ont un rôle d'accompagnement de ces mutations et leur place dans ce schéma est bien celui d'un acteur à part entière de l'IET (collecte d'information, analyse, partage de celles-ci avec les autres acteurs, dialogue pour élaborer des solutions communes, suivi et évaluation de celles-ci).

En revanche, il faut bien noter que les syndicats ont une vision relativement figée de l'entreprise, et leur implication est souvent ex-post. Les Organisations Syndicales (OS) ont souvent une action en réaction à la survenance des évènements de mutations ou de restructurations. Dans le contexte récent de mondialisation et donc de territoires (et d'entreprises) en « mutation permanente » l'implication syndicale est sans doute perçue comme plus lointaine, ce qui explique vraisemblablement que l'on ne considère pas sa place comme essentielle pour l'IET. Or les syndicats sont impliqués et concernés par la création d'entreprise.

Certes, il est possible de considérer que la création d'une entreprise peut être ressentie par les syndicats comme au mieux ne la concernant pas, ou au pire comme un danger, car cela constitue un renforcement (numéraire au minimum) du patronat. Cette vision doit sans doute être dépassée. Les syndicats ne peuvent en effet exister que si les entreprises existent, et si elles ont besoin de salariés. Ainsi, sans nouvelles entreprises, le salariat serait en danger et l'influence (voir l'existence) des syndicats en serait altérée41(*). Les syndicats ont donc besoin que la création d'entreprise soit initiée, que leur croissance soit stimulée afin que le territoire puisse bénéficier d'une population salariale importante, ce qui par voie de conséquence permettra la reconnaissance de ses représentants. La participation syndicale a ces processus est existante mais peu visible. Elle ne s'effectue en effet pas dans les mesures ou organisations les plus visibles : pas de syndicats dans les Plates-Formes d'initiatives Locales (PFIL), ni dans les associations de soutien à la création d'entreprise. Ces organismes sont souvent la « chasse gardée » des associations de chefs d'entreprise. L'action syndicale dans le processus d'encouragement de la création d'entreprise est plus institutionnelle et liée à une vison plus « macroscopique » du territoire. Les syndicats participent, via les CBE notamment, à l'adaptation du territoire et à sa spécialisation. Les clusters ou la création de pôles technologiques sont des décisions auxquelles les syndicats ont participé. Leur participation est souvent silencieuse mais bien réelle et s'exprime généralement par leur participation à la réflexion sur les infrastructures ou sur des projets structurants. La création de pôles s'effectue sur la base d'un savoir-faire spécifique du territoire. Ce savoir-faire est généralement l'apanage d'une ou de plusieurs entreprises leaders dans le domaine et dans lesquelles les syndicats sont présents. L'élargissement de l'activité par l'agrégation de nouvelles entreprises liées (directement ou non) permet aux syndicats un essaimage qui conduit normalement au renforcement de sa présence. La création d'un pôle aéronautique à Nantes/Bouguenais par exemple a permis aux syndicats présents chez Airbus d'essaimer au sein des entreprises qui se sont installées dans la zone technologique. Ce point de vue est défendu par l'Amnyos dans sa synthèse du séminaire de juin 200042(*) ces « actions relèvent essentiellement de l'initiative des entreprises, des milieux d'affaires locaux et de la coopération interentreprises au sein de systèmes productifs localisés, intégrés et souvent spécialisés. L'idéal type est représenté par le modèle des districts industriels. Si les dirigeants d'entreprises y sont des acteurs clés, ce n'est pas en tant que "partenaires sociaux" et le rôle institutionnel des syndicats est, dans ce type de système, assez effacé. Toutefois, la situation de plein emploi, l'existence de cultures d'entreprise et techniques communes, la forte intégration d'une main d'oeuvre qualifiée au système productif, ont conduit à promouvoir une forme de coopération informelle entre partenaires sociaux qui est sans doute un facteur de succès de ce type de développement local».

Enfin, le rôle syndical dans le renforcement économique du territoire se manifeste par sa participation à la formation des salariés. En effet, en réponse à la demande croissante des entreprises et du patronat de disposer d'une main d'oeuvre qualifiée, les syndicats ont investi rapidement le champ de la formation professionnelle continue et de l'adaptation des compétences. Les mutations économiques devenant de plus en plus des « mouvements permanents, diffus et protéiformes »43(*), l'employabilité permanente des salariés est une forme de réponse à des restructurations, mutations ou situations de chômage. L'employabilité peut-être définie comme « la capacité du salarié à se mouvoir dans un univers professionnel qui est fondamentalement instable et qui peut le conduire à changer d'emploi au sein de l'entreprise mais aussi à changer d'entreprise »44(*), or celle-ci n'est favorisée que par la formation permanente des salariés. La Gestion Prévisionnelle des Compétences (GPEC) est un processus que les syndicats ont rapidement utilisé pour s'imposer comme un acteur incontournable de la formation professionnelle, d'autant que la loi n'imposait aux employeurs que peu de contraintes de forme à ce sujet45(*). Les modifications législatives intervenues récemment pour créer la Validation des Acquis de l'Expérience (VAE) et la loi portant obligation aux entreprises d'adopter un plan de GPEC discuté avec les organisations syndicales sont venues officialiser le rôle syndical dans ce processus. Celui-ci est tenu au sein de l'entreprise mais également au-delà, notamment par l'intervention des collectivités locales (essentiellement la Région46(*)), des services de l'Etat (AFPA, Pole Emploi...) et des organismes paritaires chargés de financer les Congés Individuels de Formation (CIF) ou Droit Individuel à la Formation (DIF). Pour les entreprises, un territoire dans lequel la main d'oeuvre bénéficie d'une qualification représente la possibilité de recruter (ou de licencier) en fonction de ses besoins tout en sachant que sa décision n'entrainera que peu d'impact sur le territoire du fait de l'employabilité des salariés.

La formation des salariés est donc un facteur clé de succès pour un territoire, car elle permet de renforcer son économie par le renforcement des entreprises. Les syndicats ont dans ce processus, qui participe donc de l'IET, un rôle primordial qui conforte ainsi la légitimité de ceux-ci.

* 38 Dans le sens marché de l'emploi

* 39 Les dispositifs publics d'accompagnement des restructurations, DARES, Premières informations n° 35.1, août 2003.

* 40 Dont les missions ont été définies par le décret du 20 octobre 2003

* 41 (a contrario le statut de l'auto-entrepreneur est un véritable danger pour les syndicats car il « rogne » sur le salariat en créant un statut non salarié non productif en emploi salarié)

* 42 Cf bibliographie

* 43 « Anticiper les mutations : accompagner les entreprises dans le développement des compétences », Guide Pratique. MINEFI Direction Générale des Entreprises.

* 44 « Concilier flexibilité des entreprises et sécurité des salariés », Cahier du Groupe Bernard BRUNHES, n°11, février 2004

* 45 Contrainte financière assise sur la masse salariale et commission obligatoire du CE.

* 46 Dont la compétence dans le domaine de la formation a été accordé par les lois de décentralisation.

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"L'ignorant affirme, le savant doute, le sage réfléchit"   Aristote