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L'analyse des pratiques professionnelles: un moyen de "faire équipe"?

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par Emilie Stella-Lyonnet
Institue de Formation des Cadres de Santé Marseille - Cadre de Santé 2007
  

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2.2.2. La question des interactions

Dans un premier temps, intéressons-nous à la qualité des interactions au sein de l'équipe.

« Une interaction est d'abord un échange entre membres du groupe [...] Elle suppose donc une communication (... (Mucchielli, 1980) or, celle-ci est fonction du nombre de membres du groupe ainsi que de son homogénéité.

P Qualité des interactions et nombre de membres du groupe

R. Mucchielli20, dans son ouvrage sur le travail en équipe (Mucchielli, 2007) cite plusieurs résultats d'expérience ayant prouvé la relation entre qualité des interactions et nombre de membres du groupe. Voici ce qu'il en ressort :

? « Plus le groupe est nombreux, moins les membres sont satisfaits parce que les difficultés de communication s'accroissent (...) (Golembiewski, 1962 ; Thomas et Fink, 1963)

? Plus le groupe est nombreux, plus il y a de chances pour que se forment des sousgroupes et des cliques. (Hare, 1952 ; Berkowitz, 1963)

20 Op. Cite. p. 46.

? Plus le groupe est nombreux, plus les problèmes interpersonnels prennent d'importance, au détriment de l'unité d'action dans la réalisation de la tâche. » (Deutsch et Rosenau, 1963 ; Hackman et Vidmar, 1970)

Selon les mêmes chercheurs, la taille optimale d'une équipe serait de trois à douze membres. Nous pouvons donc considérer comme normal qu'une équipe de soins rencontre des difficultés en termes de communication, celle-ci étant toujours constituée d'un collectif supérieur à douze membres.

P Qualité des interactions et homogénéité des membres du groupe

Attachons nous désormais à l'homogénéité. Selon Anzieu et Martin, « l'efficacité des communications dans un groupe requiert une certaine homogénéité des membres [...] homogénéité du niveau de culture et des cadres de référence mentaux (l'homogénéité intellectuelle est moins importante) (...) »21 .

S. Moscovici22 (Anzieu, 1968), quant à lui, fait remarquer l'importance de « l'homogénéité des systèmes de valeurs ». Selon lui, chaque individu ou chaque sous-groupe apporte son propre système de valeurs et celui-ci est unique ; la confrontation de ces systèmes à l'intérieur du groupe conduit généralement à une dégradation, voir à une rupture des échanges au sein de l'équipe.

Les difficultés de communication rencontrées dans les services de soins peuvent également s'expliquer par ces postulats.

Le << système de valeurs » d'un groupe peut aussi être appelé << code des valeurs », c'est-à-dire les règles de conduite qui apparaissent au sein du groupe. Ces règles permettent de déterminer quels sont les comportements ou opinions qu'il convient de suivre au sein du groupe : elles introduisent donc la notion de conformité. Or, ce qui est conforme l'est en fonction de normes.

21 Op. Cite. p. 208.

22 Op. Cite. p. 208-209.

Le fondement psychologique pour l'établissement de normes est « la formation de cadres de référence communs en tant que produit de l'interaction des individus. »23. Tout est donc étroitement lié : la communication est moins importante lorsque le groupe est nombreux, le produit des interactions est donc plus faible, et l'homogénéité des cadres de référence est donc plus difficile à obtenir ; c'est ce qui se passe au sein d'une équipe exerçant en service de soins.

Une homogénéité des cadres de référence et systèmes de valeurs apparait difficile à obtenir sans que l'équipe pluridisciplinaire n'y travaille réellement. Certes l'ensemble des professionnels de santé revendique des valeurs humanistes ; que l'on soit médecin, infirmier, aide-soignant, cadre de santé ou autre, le patient est au centre des préoccupations. Cependant, chacun s'est construit différemment et ne possède pas le même « groupe de référence ».

Ce groupe participe à la construction des identités professionnelles et sociales : de manière plus ou moins consciente, chacun possède la culture24 (opinions, principes, valeurs, langage et buts) du groupe de référence auquel il se rattache.

Or, cette identification « est considérablement favorisée par l'existence de filières promotionnelles instituées permettant de planifier l'accès à ce groupe » (Dubar, 2002)25. Il convient donc de nous arrêter sur les différences d'accès aux professions de santé.

D'une part, les médecins suivent un cursus universitaire : celui-ci assoit le savoir médical fondé sur la recherche scientifique et permet une reconnaissance de la profession.

D'autre part, les personnels paramédicaux sont formés en écoles et instituts. Ce sont « des milieux fermés, propices au développement d'une culture propre » (Hart, et al., 2002)26.

23 Coindre, Brigitte. 2007/2008. Cours de psychologie sociale. Licence AGES. Marseille.

24 La culture est un ensemble de croyances, de modèles, de représentations et d'habitudes qui guident inconsciemment les manières de penser et les conduites des individus qui participent à cette culture. Par définition elle s'acquiert par l'expérience. Une culture professionnelle se développe par les études et la formation ainsi que dans la pratique du métier. Mucchielli, Alex. 1985. Les mentalités. Paris: Presses Universitaires de France (PUF), 1985. p. 127 pages. pp.7-23. Coll. Que sais-je?. 978-2130388340.

25 Dubar, Claude. 2002. La socialisation. Construction des identités sociales et professionnelles. Paris: Armand-Colin, 2002. p. 255. ISBN 2-200-26448-8.

26 Hart, Josette and Mucchielli, Alex. 2002. Soigner l'hôpital. Diagnostics de crise et traitements de choc. Rueil-Malmaiison : Lamarre, 2002. p. 167. Coll. Gestion des ressources humaines. ISBN 2-85030-715-7. p.150.

Enfin, si nous retenons les infirmiers, leur savoir n'est pas reconnu comme scientifique puisqu'il n'est pas encore officialisé par la faculté.

Ces différences de formation impliquent une différence de références. Celle-ci est amplifiée par la pratique du métier. En effet, à l'heure actuelle, les médecins disposent de temps consacrés à la recherche, ce qui n'est pas le cas des professions paramédicales. De ce fait, les médecins se retrouvent fréquemment pour remplir leur mission de recherche et développent des normes « médicales ». Les paramédicaux, quant à eux (notamment les infirmiers), sont payés pour une production de soins et non de travaux de recherche. Leur quotidien est au chevet des patients, et c'est auprès d'eux qu'ils développent leurs propres normes.

Au sein de l'équipe pluridisciplinaire, nous nous retrouvons face à deux groupes de référence : les médecins et les personnels paramédicaux27. Chacun d'entre eux possèdent son propre système de normes et sa propre culture. Une enquête menée pour le Ministère de l'Emploi, de la Cohésion sociale et du Logement et le Ministère de la Santé et des Solidarités vient appuyer cette idée ; voici ce que l'on peut y lire : « en milieu hospitalier, c'est l'esprit de corps qui est souvent évoqué comme constituant un principe d'union et d'alliance supérieur à l'esprit d'équipe » (Gheorghiu, et al., Juin 2005)28.

Il existe à l'intérieur d'une équipe de soins plusieurs systèmes de référence différents.

Etablir des normes passe par le produit des interactions. Travailler sur les interactions et la qualité de la communication permettrait-il d'améliorer l'esprit d'appartenance29 à l'équipe (en opposition à l'esprit de référence) ?

27 Pour cette étude, nous distinguerons les paramédicaux et les médicaux, mais il est fort à supposer que dans une étude plus approfondie, on puisse révéler l'existence de plusieurs groupes restreints au sein du personnel paramédical.

28 Gheorghiu, Minhaï Dinu and Frédéric, Moatty. Juin 2005. Les conditions du travail en équipe. Conditions et organisation du travil dans les établissements de santé. Ministère de l'Emploi, de la Cohésion sociale et du Logement et Ministère de la Santé et des Solidarités. s.l. : Centre d'études de l'emploi (CEE), Juin 2005. p. 289, Post enquête. n°49. p.13

29 Nous faisons ici référence au « groupe d'appartenance » ; groupe dans lequel s'exerce la relation de travail, en l'occurrence l'équipe. Celui-ci se distingue du « groupe de référence » qui fournit à l'individu ses valeurs, ses opinions, ses comportements et ses normes.

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