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Le mouvement syndical haitien: luttes et conquêtes dans le secteur de l'éducation 1986-2000

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par Leonel l PIERRE
Université d'état d'Haiti INHAGEI - Licence en admnistration publique 2004
  

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DEUXIEME PARTIE

LA RECHERCHE DES SOLUTIONS AUX PROBLÈMES DE L'EDUCATION PAR

LE MOUVEMENT SYNDICAL HAÏTIEN

CHAPITRE 4

BREF HISTORIQUE DU MOUVEMENT SYNDICAL HAITIEN.

Les réflexions sur la vie sociale en Haïti d'une part, sur le concept de travail d'autre part, nous conduisent à des constats selon lesquels les gens de même profession, confrontant les mêmes problèmes ont compris la nécessité de s'orgnaniser en vue de se constituer en groupe de pression pour défendre leurs intérêts. Fort souvent, ces organisa-tions qui fonctionnent, portent souvent le nom de syndicats. Pendant que dans de nombreux pays le mouvement ouvrier notamment le syndicalisme plus que tout autre, est chargé de mémoire et fait l'objet d'une attention particulière; en Haïti c'est le contraire qui se produit. Dans une histoire qui nous enserre et nous conditionne nous ne pouvons penser le contraire. Car les structures actuelles du mouvement syndical haïtien sont le produit d'une maturation des institutions d'hier qui puisent leur force dans un passé lointain.

Les perspectives d'évolution du mouvement syndical haïtien vont donc se faire dans les différentes périodes à partir des actes des divers gouvernements qui se sont succédés. Il conviendra dans ce chapitre de retracer l'histoire du mouvement. Nous allons distinguer : les étapes marquantes de l'évolution du mouvement syndical haïtien et les difficultés internes et externes de ce mouvement.

Section 1 : Les étapes marquantes de l'évolution du mouvement syndical.-

L'année 1946 est considérée comme une référence dans l'histoire du mouvement ouvrier en Haïti. En tant que telle, toute étude sur le mouvement syndical doit être positionnée par rapport à elle. Pour mieux comprendre le mouvement syndical haïtien nous porterons un regard retrospectif sur la période d'avant, pendant et après 1946.

Les étapes marquantes de l'évolution du mouvement syndical en Haïti portent l'empreinte des divers gourvenements qui se sont succédés au pouvoir et peuvent se résumer de la manière suivante:

Soulignons d'abord qu'avant 1946, on ne parlait pas encore de mouvement syndical en Haïti mais ceci n'exclut pas l'existence des syndicats dans le pays. Déjà en 1870, sous le Gouvernement de Nissage Saget, il existait dans le Nord d'Haïti une organisation dénomée «Coeurs unis des Artisans» qui ne portait pas encore le nom de syndicat. Cette organisation regroupe les artisans, les petits fonctionnaires de l'État et quelques intellectuels.

De 1870, en passant par l'occupation Américaine en Haïti en 1915 et la formation du Parti Communiste Haïtien, très favorable au mouvement ouvrier jusqu'à la chute du président Elie Lescot à la faveur des mouvements du 7 au 11 janvier 1946. Les syndicats qu'on pourrait dénombrer étaient au nombre de 11 et répondent au nom de :

§ syndicats ouvriers cordonniers d'Haïti(*)

§ l'union des syndicats du corps de santé,

§ l'association du corps de l'enseignement

§ le collège de avocats

§ l'association nationale des ouvriers et salariés haïtiens

§ l'association fraternelle des travailleurs haïtiens

§ sydicats des chauffeurs

§ l'union des ouvriers de la construction

§ la confédération nationaliste des ouvriers et des paysans

§ l'union syndicale haïtienne.

Au cours de l'année 1946, considérée comme une période marquée par la chute de Lescot et l'avènement de Dumarsais Estimé au pouvoir, le mouvement syndical allait être non seulement constitué mais encore prendre sa vitesse de croisière. Si le président Lescot a été sevèrement critiqué pour son esprit de sectarisme, de discrimination sociale et enfin pour ses mesures anti-démocratiques et anti-populaires qui affaiblissent le mouvement syndical, le président Dumarsais Estimé quant à lui, allait être considéré comme celui qui renforcera le mouvement syndical. La liste des syndicats de l'époque comprenait :

§ des syndicats des Électriciens, des mécaniciens, des travailleurs de la Hasco et de l'industrie de Cuir qui revendiquent les salaires et le respect de la dignité humaine.

§ de la Fédération des Travailleurs Haïtiens (FTH) dirigée par Edriss St Armand, Victor Vabre et Cameau qui regroupe 17 Syndicats.

§ du Mouvement Ouvrier Paysan (MOP) de Daniel Fignolé qui regroupe 11 Syndicats.

§ de l'Union Nationale des Ouvriers Haïtiens (UNOH) dirigé par Nathanaël Michel, Milfort Josaphat qui regroupe 6 Syndicats.

§ du Groupe des Syndicats Indépendants (GSI) de Alexandre Anoual, Molière Compas qui regroupe les syndicats des chômeurs, les employés de la Panam, des employés du commerce et de la construction, les syndicats des chauffeurs, de la coopérative de Transport.

Cependant, Après 1946, il se produit une grave détérioration dans l'orientation démocratique initiée en janvier 1946. Les syndicats qui existaient étaient :

§ l'Intersyndical qui se transforme plus tard en Union Intersyndicale d'Haïti (UIH)

§ la Fédération Haïtienne des Syndicats Chrétiens (FHSC)

§ la Fédération Ouvrière Paysanne (FOP)

Mais il faut également souligner que le mouvement syndical connaissait des temps difficiles. La tendance anti-démocratique a triomphé; le mouvement se trouve sous le contrôle du Gouvernement. Certains syndicats comme la FTH, le MOP sont dissous par le gouvernement. A la même époque, une loi anti-communiste est promulguée. Cette triste situation accompagnée de la politique anti-démocratique et anti-populaire favorise le coup d'État du colonel Paul Eugène Magloire le 6 Décembre 1950.

En 1957, Après les éléctions qui mettaient en face les quatres (4) principaux candidats : Louis Déjoie, François Duvalier, Daniel Fignolé et Clément Jumelle. Le 22 septembre de la même année les éléctions présidentielles qui portèrent le Docteur François Duvalier au pouvoir eurent lieu(1). Un mois après soit le 22 octobre 1957, dans l'enthousiasme général et l'allégresse de nombreux partisans amis et adeptes de première heure; il prêta le serment constitutionnel.

En 1963, dans le cadre de son projet de présidence à vie, Duvalier croyait que c'était nécessaire et même urgent de vaincre toute force capable de faire échouer son projet. C'est dans ce contexte que le mouvement syndical s'est vite heurté à sa politique repressive.

En effet, en Décembre 1963 la dissolution de l'UIH est prononcée pour n'avoir pas apporté son appui au chef de l'État, du même coup la FHSC est interdite de fonctionner pour avoir manifesté sa solidarité à l'UIH(2). Ainsi s'achevait la seconde poussée du syndicalisme.

_____________________

(1) Dorsainvil J.C : Histoire d'Haïti cours supérieur, Ed H. Deschamps, 1934 PP 306-307

(2) Hector Michel : Syndicalisme et Socialisme en Haïti, Op. Cit P 121.

Cette situation affectait considérablement le mouvement syndical mais les ouvriers n'ont pas baissé l'échine. Car, diverses formes d'expressions de mécontentement ouvrier éclataient entre 1965 et 1968; des luttes sporadiques extériorisaient la volonté des ouvriers dans les usines : la SEDREN et Haïti Métal.

En avril 1971, le président François Duvalier meurt. Son fils Jean-Claude Duvalier hérite du pouvoir. Cinq (5) années après, soit en 1976, le mouvement syndical tente de se réorganiser et déclenche une grève au ciment d'Haïti. Depuis, la flamme de la mobilisation du mouvement ouvrier a été rallumée, mouvement qui durera quatre (4) années consécutives. Mais en 1980, le mouvement commençait à être victime des actes arbitraires du régime. La Centrale Autonome des Travailleurs Haïtiens (CATH) est frappée d'interdiction de fonctionner et le mouvement syndical tombe à nouveau en léthargie. Cependant, le travail de mobilisation de plusieurs organisations continue dans la clandestinité.

Vers la fin de l'année 1985 et au début de 1986 une vague de manifestation contre la politique anti-populaire et anti-démocratique de Jean-Claude Duvalier secoue tout le pays. Elle l'ébranlait dans toute sa structure sociale et politique. Les syndicats assoiffés de mener ouvertement leurs activités accompagnent le peuple haïtien dans ses démarches visant à divorcer d'avec la dictature. Le 7 février 1986, le président Jean-Claude Duvalier était obligé de laisser le pouvoir à un Conseil National de Gouvernement (CNG).

Dès les premiers jours de cette victoire, les ouvriers se révoltent contre les superviseurs et les patrons liés au président renversé. Ils en ont profité de crier d'une seule voix avec le peuple : «Haïti libéré.» Le 14 février, les ouvriers de la HASCO entrent en grève pour hausser le ton. Durant cette même période, plusieurs centrales syndicales apparaissent sur le terrain : La CNEH, la FOS, la CATH et la CATH / CLAT.

Mais n'est on pas en droit de dire qu'après 1986 ce n'était que le Duvaliérisme sans Duvalier ? Car, avec les gouvernements militaires continuent les pressions enclen-chées par le régime des Duvalier contre le mouvement syndical. Malgré tout, dans la longue période de transition démocratique, les revendications pour un changement et pour un mouvement syndical pullulaient.

1991, à l'avènement du Président Jean Bertrand Aristide au pouvoir le mouvement allait connaître des temps forts; malheureusement ce grand rêve allait s'estomper avec les coup d'État du 30 septembre 1991.Une fois de plus des ombres noires planaient sur le mouvement syndical haïtien. Et de plus c'était très difficiles pour les syndicats de s'organiser et de se mobiliser pendant l'exil du Président.

Au retour du président de l'exil, seuls les syndicats d'enseignants ont pu créer une mobilisation effective à caractère national en 1995. Jusqu'à l'avènement du président René G.Préval le mouvement syndical n'a pas connu un grand essor, seuls les syndicats du secteur Éducatif, une fois encore, ont pu entrer en grève pour faire respecter ses revendications. A cet effet, ils ont signé un accord qui jusqu'à date n'est pas respecté et depuis le mouvement syndical chancelle.

En 1998, plusieurs organisations syndicales, et centrales ont donné, dans la recherche de l'unité, naissance à une coordination dite Coordination Syndicale Haïtienne (CSH) qui est le porte-parole des travailleurs et travailleuses auprès de l'opinion nationale et internationale. La CSH a présenté son agenda syndical en l'an 2000 Agenda qui a notre avis charrie la plupart des revendications des travailleurs et des travailleuses son programme définit quatre axes d'action prioritaires : le renforcement des institutions, la lutte contre la chèreté de la vie, la création des conditions de travail appropriées et la mise en oeuvre d'une politique de justice sociale.

La mission de la CSH est claire:

§ défendre les droits des travailleurs et travailleuses et leur garantir de meilleur condition de vie et de travail

§ travailler à l'unification, au renforcement et au rayonnement du mouvement syndical haïtien

§ contribuer à la lutte pour le respect des valeurs démocratiques et le progrès socio-économiques du pays.

1-1 LES DÉBUTS DU MOUVEMENT.-

Dès la création du travail pour le compte d'un employeur, on ne parlait pas encore de syndicalisme, mais cela ne veut point dire que les travailleurs n'avaient pas des intérêts particuliers à défendre. Les corporations qui existaient à l'époque relèvent malgré tout d'une autre logique que celle du syndicalisme. «on peut donc, vers les années 1830, où apparaissent les sociétés de résistance qui entendent s'opposer à un patronat tentant de diminuer les salaires à la faveur du développement du machinisme et de l'éxode rural situer l'apparition du syndicalisme(1). Celui-ci est né en Europe. Chez-nous, il n'est qu'une importation et qui se manifeste dans presque toutes les branches d'activités. De petites et moyennes entreprises installées, à l'époque, dans le pays pouvaient embaucher entre 10 et 50 ouvriers. D'autres de plus grandes envergures, allaient au delà, elles pouvaient utiliser la main d'oeuvre allant de deux cents (200) à trois cents (300) ouvriers dans les activités de cabotage, de construction, de l'imprimerie... Il s'agissait là d'une classe embryonnaire très faiblement organisée. Devant les difficultés causées par les différentes tentatives d'organisation de la classe ouvrière en syndicat, il a fallu attendre 1946 pour que les ouvriers puissent se regrouper librement en syndicat pour donner un essor au syndicalisme et de l'éclosion réelle du mouvement syndical en Haïti.

1-2 LE MOUVEMENT SYNDICAL À PARTIR DE 1946 : son évolution.-

Comme nous l'avons souligné plus haut c'est à partir de 1946 que le mouvement syndical est né en Haïti et prend sa vitesse de croisière. Il grandit et se développe; tantôt dynamique, tantôt plongé dans la léthargie forcée, car, le mouvement porte la marque des divers gouvernements qui se sont succèdés au pouvoir. C'est ainsi qu'il a connu des moments de conquêtes comme ceux de répressions. Les lignes qui suivent vont relater les différentes phases de son évolution.

1-2-1 LE MOUVEMENT DE 1946 - 1950.-

L'année 1946 commence avec la chute du président Lescot le 11 janvier 1946 qui ne pouvait pas résister à une grève d'étudiants qui a commencé le 7 janvier 1946 et l'arrivé au pouvoir de Dumarsais Estimé au cours de la même année. Si le président Lescot a été reproché parcequ'il croyait que la direction des affaires du pays était strictement réservée à dix familles haïtiennes et leurs alliés sans se soucier de l'éxistence d'un peuple qui aspirait à un peu plus d'humanité, pour son insouciance à cerner les graves problèmes qui se réposaient devant la conscience nationale, pour le peu d'attention qu'il accorde aux intellectuels noirs et en général les plus compétents sont considérés comme des parias et enfin pour ses mesures anti-démocratiques et anti-populaires qui affaiblissent le mouvement syndical. Dumarsais Estimé paraît être l'homme tant attendu capable de prouver le contraire de ce que faisait Lescot.

_____________________

(1) Guy Caire : Les syndicats ouvriers Op. Cit P. 39

Au cours des mois séparant sa chute et l'éléction de Dumarsais Estimé à la présidence, la classe ouvrière fait son entrée en scène. Une trentaine d'organisations syndicales font leur apparition dont onze (11) concernant les salariés de très petites et moyennes entreprises dans lesquelles parfois les travailleurs sont saisonniers et bénéfi-cient d'aucune stabilité.

Ces trente (30) organisations étaient affiliées à des courants syndicaux respective-ment :

§ à la FTH qui évoluait sous la l'influence du Parti Communiste Haïtien (PCH) et du Parti Socialiste Populaire (PSP) elle regroupe 17 Syndicats

§ à l'UNOH qui représentait une base du syndicalisme Américain (AFL-CIO). Elle regroupe 6 Syndicats

§ au MOP qui évoluait sous l'orientation politique du Fignolisme. Elle regroupait 11 Syndicats

§ au GSI qui, selon Jean Jacques Doubout et Ulrick Joly, n'était que des valets du gouvernement dans le mouvement syndical. Elle regroupait les syndicats des chômeurs, les employés de la Panam, des employés du commerce et de la construction, les syndicats des chauffeurs de la coopérative du Transport. Tous ces syndicats ne totalisent qu'un effectif de 20.000 ouvriers.

Cette période très mouvementée, paraît prometteuse d'espoir puisque le mouvement syndical touchait presque tous les secteurs et toutes les branches d'activités. Bien de conquêtes ont été arrachées : La reconnaissance du droit de réunion et de revendication; du droit de constituer légalement des syndicats, la limitation de la journée de Travail, la fixation du salaire minimum, le paiement des congés et de certaines prestations sociales, le paiement du préavis, de licenciement, la conciliation obligatoire en cas de conflit, la mise sur pied de l'Institut Social d'Assurances et enfin la création d'un bureau du travail dans le cadre du département du Travail.

Cependant, toutes ces conquêtes allaient être remises en question. Devant la division la corruption, la trahison, l'espionnage et la répression par exemple la loi anti-communiste de 1947, le mouvement syndical fraîchement constitué tombe en léthargie. Aussi, la menace que constituait le mouvement syndical automne, combatif et démocra-tique est ecartée. Cette situation allait persister jusque vers les années 50; seul l'UNOH et le GSI subsistent déjà sous le contrôle du gouvernement. C'était bien une confusion. De cette dernière, le pays allait enregistrer un coup d'État militaire ayant porté au pouvoir le Colonel Paul E. Magloire; mettant fin au régime d'Estimé qui représente un espoir pour le pays.

Comme le mouvement syndical porte l'empreinte des gouvernements qui se sont succèdés au pouvoir. Ainsi, la chute du Président Estimé sera dominée par la présidence de Paul E. Magloire jusque vers les années 56 et même deux années après.

1-2-2 LE MOUVEMENT DE 1950 - 1958.-

Cette période commence avec le coup d'État de Magloire. Elle bouleverse l'ordre des choses et change le jeu démocratique et populaire de 1946. Jusqu'à la chute de Magloire en 1956 les syndicats connus sont : la Fédération des Ouvriers Haïtiens (FOH), l'Union Nationale des Ouvriers Haïtiens (UNOH) et la Fédération des Syndicats du Nord (FSN), mais il n'y avait pas de luttes syndicales actives. Quelques organisations de chauffeurs, les travailleurs de la Hasco reprennent timidement leurs activités. Se référant au mouvement de 1946 nous disons que le mouvement, à cette époque était bel et bien en difficulté.

Elle s'explique par le fait que certaines revendications formulées ont rarement fait l'objet d'une mobilisation effective; la corruption qui avait commencé sous le gouvernement précédent est certe généralisée sous la dictature militaire qui parvient à vider toute conscience de lutte et de classe. Tout se passe entre la bureaucratie et le département du travail. Comme conséquence, les conditions de vie de la classe ouvrière s'aggravent considérablement, les prix augmentent de manière exponentielle, les salaires restent stables, les emplois ne sont pas sécurisés, les patrons devenaient arrogants, les conditions de travail devenaient très mauvaises. Tout ceci constituait le lot de misère du mouvement syndical particulièrement les travailleurs au cours de cette période.

A la chute de Magloire en 1956, le mouvement syndical se réanime dans l'objectif de reconquérir les positions perdues et des acquis de 1946. Une réforme s'est opérée au sein des syndicats : les dirigeants corrompus sont chassés, une bonne partie de la bureaucratie syndicale qui monopolisait le mouvement est balayé.

Ainsi les conditions semblent être réunies pour la reprise des luttes syndicales démocratiques. Une année après, soit en 1957, de nouveaux syndicats sont créés, il s'agit de l'Action Catholique Ouvrière (ACO), le Syndicat du secteur Hôtel, bar, restaurant, Hasco, ciment d'Haïti, agence maritime, administration Portuaire, construction, chauffeur guide, compagnie électrique, l'Union Nationale des Maîtres de l'Enseignement du Secon-daire (UNMES), la formation de l'Intersyndical permanent qui regroupe les employés de la Banque nationale devenue plus tard l'Intersyndical. En effet, dès les premiers jours du mois de Décembre 1957, le syndicat des travailleurs des Hôtels, bar restaurant, les délégués de plusieurs syndicats et associations ont décidé de former une organisation denomée comité Intersyndical en vue de coordonner les differents aspects de l'activité syndicale. Cette organisation cesse ses activités après l'échec du 1er Mai 1958.

1-2-3 LE MOUVEMENT DE 1958 - 1963.-

Après l'échec du 1e Mai 1958, certains militants comme Ulrick Joly, André Leroy, Henry Merceron ont convaincu de ce qu'est la liberté syndicale qui ne peut être en aucun cas une faveur octroyée par un gouvernement mais le fruit des luttes menées par les travailleurs pour imposer et faire respecter leurs droits. C'est ainsi qu'ils se réunissent et forment Intersyndical d'Haïti (IH) dans l'objectif d'arriver à la constitution d'une organisation syndicale unitaire afin de faire la résistance aux activités de sabotage du patronat contre le syndicalisme indépendant et actif.

Cette organisation occupe le devant de la scène syndicale alors que les autres Fédérations comme l'UNOH et la force ouvrière n'étaient pas dissoutes mais, pour le malheur des ouvriers, elles maintiennent des relations étroites avec le gouvernement en place.

En Avril 1960, l'Intersyndical se transforme en Union Intersyndical d'Haïti (UIH). Les luttes de l'époque sont dominées par ses activités. Elle a connu de nombreux succès qui lui a valu non seulement l'intégration de 14 nouveaux syndicats mais encore la possibilité de dominer la scène politique et de s'affirmer de plus en plus sur le plan national et international.

A partir de 1963, les diverses formes de luttes comme la grève, les manifestations des ouvriers paysans ont été d'une réussite considérable pour la plupart et ne manquèrent de causer de nombreuses difficultés au gouvernement en place. Cependant, à la suite d'une marche organisée le 1er Mai 1963, après les diverses manifestations, la machine répressive est mise en marche et va à l'encontre de toutes les lois nationales et internationales et l'UIH est dissoute par le gouvernement Duvalier. Et une année après la présidence à vie est proclamée; Cette dissolution était nécessaire pour le régime car, l'UIH représentait en effectif le syndicat le plus imposant, environ 10.000 membres lui étaient adhérés c'était une organisation syndicale combative avec une couverture nationale qui se manifestait dans le milieu urbain comme dans le milieu rural. Avec lui, la lutte des travailleurs manifeste beaucoup de vitalité d'autant plus que ses différentes activités étaient inscrites dans un processus de renforcement qui consolide chaque jour davantage. Pour toutes ces raisons, le Président Duvalier s'inquiète de l'avenir de son régime. Comme nous venons de le dire, l'UIH est dissoute et c'était bien là le signal de départ du déclin du mouvement syndical.

Ainsi le mouvement syndical Haïtien a connu des moments difficiles. Il était pour le moins quasiment inexistant durant cette période jalonnée par très peu de luttes face à la démagogie et à la machine répressive des Duvalier.

1-2-4 LE MOUVEMENT DE 1963 - 1985.-

La période allant de 1963 à 1985 a été très difficile pour les syndicats. Le mouvement syndical était victime de nombreux actes arbitraires du régime des Duvalier soutenant à l'exemple la dissolution de l'UIH et la FHSC. Devant cette situation qui avait pour objectif le renforcement du régime, le mouvement syndical était vite tombé en déclin et de plus un terme est mis à toute forme de luttes révendicatives.

En 1971, à la mort de Duvalier père, son fils Jean-Claude hérite du pouvoir, le mouvement syndical continue à être victime de l'arbitraire de ses actes et plonge dans les profondeurs du silence. Mais en 1976 le mouvement syndical tente de refaire surface et déclenche une grève à l'usine ciment d'Haïti et depuis le flambeau de la mobilisation est à nouveau allumé durant quatres (4) années consécutives. Cependant, la répression continue; et en Novembre 1980 la CATH est frappée d'interdiction de fonctionner, mais entre temps d'autres syndicats continuent, dans la clandestinité et le travail de la mobili-sation. Le mouvement syndical se trouve, en effet, tomber en léthargie jusqu'en 1985, pour reprendre vie en 1986 à la chute du régime.

1-2-5 LE MOUVEMENT DE 1986 - 1995.-

Au lendemain du 7 février 1986, qui correspond à la chute de la dictature, le mouvement syndical rebondit avec force, de nombreuses conquêtes ont été arrachées comme le droit effectif à la parole et à la liberté de la presse..etc. Et de plus les syndicalistes exilés reviennent au pays afin de redonner un élan au mouvement syndical.

De nouveaux syndicats naquirent et en plus de trois centrales syndicales qui font leur apparition : la CATH, la CATH / CLAT et la FOS.

Cependant, il est important de souligner que la CATH / CLAT a connu une nouvelle appelation c'est bien la Confédération des Travailleurs Haïtiens (CTH); de la CATH de 1980 est issu la Confédération Générale des Travailleurs (CGT). De plus, la scission au sein de la FOS donnera d'une part la FOS et l'Organisation Générale Indépendante des Travailleurs Haïtiens (OGITH) fondée en 1988.

Cependant le mouvement syndical a connu un certain succès. Malgré la répression des gouvernements militaires les syndicats ont pu entrer en grève, faire usage de la liberté d'expression, protester contre les mauvaises conditions sociales. En leur propre sein, ils ont aussi mené une lutte celle d'enlever le monopole de la réprésentation syndicale à Genève entre les mains de la FOS qui depuis sous le gouvernement de Jean-Claude Duvalier representait le secteur syndical. Ils ont, ensemble, opté pour le principe de la rotation et de la participation de toutes les centrales dans l'élaboration du message destiné à la conférence annuelle du Bureau International du Travail (BIT) .

Aussi, comme on peut le constater, cette période marque un tournant dans le monde syndical et une nouvelle page commençait à s'écrire dans l'histoire du mouve-ment ouvrier en Haïti.

Il n'est pas superflu de souligner, pendant cette période l'influence des syndicats dans le secteur Éducatif comme la CNEH, l'UNNOH, le CONEH, le GIEL, la FENATEC qui ont grandement agité le monde Éducatif dans ses prises de position. Il est important de demander pourquoi leur mouvement s'était tourné uniquement dans leur secteur sans être généralisé ?

Section 2 : LES DIFFICULTÉS INTERNES ET EXTERNES.-

La situation du mouvement syndical Haïtien n'est dans l'ensemble rien de réjouissant. Le mouvement fait face à d'énormes difficultés qui font souvent échec à certaines de leurs actions et contribuent même jusqu'à affaiblir le mouvement. Elles se manifestent à deux niveaux.

Au Niveau Interne:

Les difficultés rencontrées par le mouvement syndical au niveau interne peuvent se résumer de la manière suivante :

§ Pour être syndicaliste il faut être syndiqué, pour être syndiqué, il faut être travailleur, pour être travailleur il faut travailler. Le mouvement syndical est un mouvement de travailleurs, alors que, chez-nous, le taux de chômage est très élevé. A partir de ce constat nous sommes en droit de poser la question suivante : Peut-il exister un mouvement syndical efficace avec des chômeurs ?

§ Le mouvement syndical n'est pas unitaire, les syndicats sont divisés parfois en deux et pourquoi pas en trois ? De nombreux syndicats ne sont pas nés à partir de l'initiative de la masse des travailleurs mais plutôt d'un schisme syndical. Le cas de la CATH / CLAT, de la CGT, de l'OGITH est un exemple clair. Ils sont tous nés des malentendus.

§ Le problème de la formation syndicale est un facteur clé d'affaiblissement du mouvement. Parfois, certains syndicats s'engagent dans des mouvements de protestations, sans tactique et sans stratégie. Souvent, certains dirigeants syndicaux ne savent même pas comment négocier et n'attendent même pas le moment favorable d'enclencher une lutte revendicative.

§ La faiblesse financière des syndicats liée à l'absence de travail et au refus de ceux qui travaillent pour intégrer la coopération des syndiqués et à l'absence de travail et à la non cotisation de la masse des travailleurs.

§ L'embourgeoisement de certains dirigeants syndicalistes qui se complaisent dans les privilèges accordés par les patrons. Ce comportement fait souvent obstacle à la lutte syndicale, détruit chez les syndiqués l'esprit de combativité et enlève toute énergie leur permettant d'avoir une initiative courageuse d'où le mépris à l'objet même des syndicats.

§ L'analphabétisme diminue l'apport du mouvement syndical et met un point d'arrêt à son efficacité. Dans certains syndicats, il peut arriver, en plus des syndiqués, même le dirigeant syndicaliste n'est pas alphabetisé. Comment peut on arriver à un mouvement syndical combatif, autonome sans combler le fossé entre les syndicalistes alphabetisés et non alphabetisés ?

§ La prise en otage du mouvement par les syndicalistes non travailleurs car, pour eux, il semblerait que être syndicaliste c'est un métier. Ils ne sont pas des démo- crates, est-ce- pourquoi au sein du syndicat, il n'y aurait pas de démocratie ? Le dirigeant syndicaliste est à vie à la tête du syndicat.

§ L'usage du mouvement syndical, par certains dirigeants à des fins personnels. Souvent comme tremplin politique, dans notre histoire, nombreux sont ceux qui s'étaient déguisés en syndicalistes afin de devenir décideurs politiques en d'autres termes d'arriver au timon des affaires de l'État.

Au Niveau Externe:

Les difficultés au niveau externe viennent souvent des brèches créées par les syndicats et aussi par la force des choses. Nous les envisageons d'un triple point de vue et elles peuvent se résumer de la manière suivante:

§ Au point de vue économique le mouvement syndical fait face à des difficultés énormes. Ces difficultés peuvent se manifester sous diverses formes : l'inflation, le chômage, la misère, les termes de l'échange, le fardeau de la dette, le salaire minimum... etc.

§ Au point de vue politique le mouvement syndical a toujours été l'objet de persécution de la part des divers gouvernements qui ont dirigé le pays. Ces persécutions peuvent se manifester par la violation des droits des travailleurs, l'ingérence dans les affaires intérieures des syndicats, l'interdiction de fonctionne-ment d'un syndicat, la création de syndicats parallèles dans le souci de combattre la lutte des travailleurs, la corruption des dirigeants syndicalistes...etc

§ Au point de vue social, le mouvement syndical continue à connaître de nombreuses difficultés. De telles difficultés pourraient être attribuées au dévelop-pement de la technologie car, de nombreux travailleurs sont en mal de formation pour pouvoir se tenir sur le marché du travail.

§ Cependant, toutes ces difficultés tant internes qu'externes ne sont pas sans incidences sur le mouvement syndical. En effet si elles ont permis de contribuér au déclin du mouvement syndical, elles ont néanmoins permis la renaissance du mouvement syndical par l'adoption d'une nouvelle forme de lutte.

2-1 : Le Déclin du Mouvement.-

Le déclin du mouvement syndical commence avec l'acte arbitraire du gouvernement de Duvalier en passant par la dissolution de l'Union Intersyndicale d'Haïti (UIH) et la Fédération Haïtienne des Syndicats Chrétiens (FHSC) en Décembre 1963. Cet acte, selon Michel Hector, dépasse le cadre même du mouvement revendicatif proletariat(1). Il revêt un double visage; comme le mouvement a connu un élan dans la conjoncture politique de 1956-1957. Il ne vise qu'à détruire purement et simplement cet élan et les syndicats afin de détruire toutes forces qui pourraient contribuer à faire échec aux mécanismes dictatoriaux.

L'on comprend bien, que ce n'est pas du hasard, si après quelques mois de la fermeture des locaux par le gouvernement des Fédérations Syndicales Indépendantes, la présidence à vie s'instaure au pays. Car, le gouvernement avait travaillé dans le but de poursuivre cet objectif. A cet effet, le mouvement syndical fait face à deux obstacles : les patrons et les tontons macoutes. Ces obstacles conduisent au démantèlement d'un mouvement fort, combatif, dotant au mouvement syndical une structure fortement centralisée comme le cas se présente parfois dans les régimes autoritaires. Il est important de souligner l'apport du 1e Mai dans les activités syndicales.

Le 1e Mai de chaque année est considéré comme la fête du travail. Mais cette date ne cesse de causer des difficultés au mouvement syndical. Souvent, le Gouvernement contribue à mettre les syndicats dans des conditions difficiles; parfois il arrive même à les diviser autour d'une allocation qui n'a rien de justificative. Cette situation crée souvent de malaise entre syndiqué et syndiqué; entre dirigeant syndical et syndiqué, et enfin entre syndicats et syndicats et les met en défi d'arriver à la constitution d'un mouvement unitaire, autonome, capable de donner plus de force au mouvement et d'être mieux armé pour remplir sa mission. Quand il s'agit des salaires n'en parlons pas ? Car la baisse des salaires affaiblit en nombre et en efficacité le mouvement syndical. Le comportement des salaires et des prix est expliqué par une serie de facteurs nationaux et internationaux. La crise de l'emploi, l'explosion inflationniste, le coût de la vie évoluant à un rythme effréné ne sont pas sans incidences sur le mouvement syndical. Cette situation ne fait qu'aggraver les conditions de la masse des travailleurs et a également pour toile de fond l'inéxistence de tout mouvement syndical digne de ce nom.

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(1) Michel, Hector : Syndicalisme et socialisme en Haïti, et ed H. Deschamps, Port-au-Prince, 1989. P 129.

Si l'année 1946 a été pour le mouvement syndical une période de conquêtes et de combats. Les années 1957 à 1970 n'ont pas permis au mouvement de briller. Au contraire, c'était pour lui une période de déclin et de plus l'étouffement des luttes démocratiques. Les syndicats étaient identifiés comme obstacle. Il faut les surmonter pour mieux asseoir le régime, avait compris le gouvernement à l'époque. Chaque coup d'envergure porté aux forces démocratiques est suivi d'un pas en avant dans le renforcement des mécanismes dictatoriaux. L'action du Gouvernement de François Duvalier est un exemple clair. D'abord il proclame la dissolution du mouvement démocratique, ensuite il remplace son mandat par la présidence à vie de la République, frayant la voie de la dynastie.

C'est ainsi que la dynamique de la répression, l'anihilation des derniers cadres institutionnels légaux du combat démocratique et la grande déterioration des conditions de vie et de travail des masses laborieuses posent au mouvement la nécessité chaque fois plus urgente non seulement de donner la priorité à la lutte politique directe, mais aussi de chercher de nouvelles formes d'action susceptibles de stimuler, d'accélérer et de radicaliser la mobilisation contre la dictature(1(*)).

Comme la lutte doit continuer, le mouvement n'a d'autres choix que de redéfinir ces stratégies.

Est-ce pour cela qu'il attendait le départ des Duvalier pour rebondir avec force et manifester pleinement son existence ? Mais le coup d'État du 30 Septembre 1991 n'a fait qu'empirer le chômage à la suite de l'embargo décrété par l'organisation des États Américains (OEA). Les travailleurs se sont désunis, des milliers d'ouvriers, surtout ceux de la sous-traitance ont perdu leur emploi et le mouvement s'affaiblit en nombre. Car, il est évident que la force du nombre est annulée par la désunion.

Ainsi, à l'heure actuelle si on se refère au mouvement syndical dans les années antérieures, tenant compte des différentes actions syndicales. Par rapport à la politique du gouvernement de l'heure le mouvement syndical est non seulement en déclin mais encore il semble disparaître pour céder le pas aux organisations dites populaires. Mais cela n'exclut point des tentatives visant à faire renaître le mouvement.

2-2 : LA RENAISSANCE DU MOUVEMENT.-

L'histoire du mouvement syndical retient l'année 1946 comme l'année de départ de l'éclosion réelle du mouvement syndical haïtien. Selon Michel Hector, les années de 1958-1963 délimitent un autre moment important dans l'évolution du mouvement ouvrier. C'est ainsi qu'on assiste à la seconde poussée du syndicalisme démocratique.

Entre 1958-1960, la lutte revendicative ouvrière se déroule dans un cadre où d'autres organisations démocratiques comme celles des professeurs, des instituteurs, des employés de la banque, et des étudiants livrent également la bataille pour la sauvegarde de leurs intérêts et l'élargissement de leurs droits(1(*)). Tout le poids de la lutte pour la défense des droits des travailleurs vont se reposer sur le syndicalisme démocratique. Cette réapparition du syndicalisme démocratique paraît se renforcer avec l'installation de nouvelles entreprises. Car, leur fonctionnement va provoquer une augmentation en nombre des ouvriers. De nouveaux syndicats apparaissent; un nouveau concept apparaît; celui de l'unité.

Mais dans le contexte politique de la renaissance du mouvement les organisations nouvellement créées, à cause de leur jeunesse, disposent encore de force très limitées et peuvent difficilement mettre à profit toutes les potentialités offertes par la situation.

Les organisations les plus combatives au cours de ce premier moment étaient celles des professeurs et surtout des étudiants. Les grèves les plus importantes prove-naient de ces secteurs.

Leurs luttes revêtissaient une double signification pour le développement du mouvement syndical démocratique. Tout d'abord, elles permettent de dépasser définitive-ment la tendance manifestée depuis 1959, à donner la priorité aux intérêts des anciens groupes éléctoraux dans les activités des organisations de masses. L'unité se réalise sur une base de revendications démocratiques.

L'unité syndicale à l'époque faisant la une, l'UIH était au rendez-vous. Elle contribuait, dans une certaine mesure, à l'épanouissement du mouvement syndical démocratique. Diverses mesures ont été prises, diverses activités ont été réalisées. L'UIH domine la scène syndicale, en Août 1963, elle réfuse de signer un manifeste en appui au chef de l'État. En Décembre 1963, la dissolution de l'UIH est prononcée. Son local saccagé, le matériel pillé plusieurs militants et dirigeants syndicaux sont emprisonnés. Au même moment, la Fédération Haïtienne des syndicats chrétiens (FHSC) est également interdite de fonctionner pour avoir manifesté son appui à l'UIH. Ainsi, prend fin la seconde expérience du syndicalisme démocratique. Les syndicalistes croyaient ferme-ment que la lutte pour la défense des droits des travailleurs est une lutte permanente. L'UIH disparaît, mais la lutte doit continuer. Les syndicalistes considéraient le gouverne-ment comme un obstacle à l'évolution de la lutte syndicale démocratique. Diverses organisations syndicales ont compris la nécessité de surmonter l'obstacle que constituait le gouvernement . Aussi, ont-elles décidé d'adopter de nouvelles formes de luttes capable de faire avancer la cause des travailleurs ?

2-3 ADOPTION D'UNE NOUVELLE FORME DE LUTTE.-

Après la dissolution de l'UIH, le combat démocratique allait dépasser le cadre même de l'action syndicale. La dictature devient de plus en plus musclée c'était bien l'idée, dans le projet de présidence à vie et les syndicalistes se replièrent en vue de donner une réponse.

De nombreuses organisations syndicales dans la détermination pour un combat démocratique, s'allient aux organisations politiques et adoptent de nouvelles tactiques. Dans cette bataille de conquête, de liberté, démocratique, les organisations politiques porteuses de l'idéologie socialiste étaient au rendez-vous en se mettant à l'avant-garde des luttes ouvrières afin de les amplifier et de les faire progresser. L'arme de la dialectique cède la place à la dialectique des armes. Les communistes entrent en scène et la lutte ne sera autre que celle d'une lutte armée contre la dictature. En réponse, le régime de François Duvalier fait la chasse aux sorcières et réussi à tenir le pouvoir.

Il convient de signaler, en tout premier lieu, que la nouvelle tactique n'est pas déterminée par une intensification de lutte des masses populaires urbaines et rurales. C'est au contraire la stagnation et même l'échec de la mobilisation politique à travers les organisations clandestines de types revendicatifs qui, dans une grande mesure, provo-quent le changement. Elle n'est pas sans incidences sur le mouvement syndical. Incidences qui peuvent être à la fois positives et négatives. Mais, selon Michel Hector, la nouvelle tactique charrie une nette propension à sous estimer et même à ignorer l'action spécifique de la classe ouvrière(1).

Sans vouloir analyser cette nouvelle tactique, il nous paraît intéressant de nous demander si les organisations d'avant-garde avaient les moyens de leur politique. En effet, Michel Hector fait ressortir le moment de transition entre l'épuisement des possibi-lités de luttes pacifiques et celui du passage aux actions armées. Pour un mouvement qui traverse encore cette transition, il s'avère insdispensable de déterminer avec prudence et précision le type et le rythme de ses actions sur la base d'une appréciation correcte du rapport des forces(2). Comme souligne Jean Bruhat et cité par Michel Hector : «on ne combat bien un ennemi que si on apprécie avec exactitude sa signification et les forces dont il dispose». La lutte armée était nécessaire. Elle est présentée comme un même combat anti-dictatorial, anti-féodal et anti-impérialiste. Il s'agit donc de parvenir, par la voie armée, non seulement au renversement de la dictature mais aussi à la destruction de tout le système semi-féodal et néo-colonial.

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(1)- Michel Hector : Syndicalisme et Socialisme en Haïti, OP. Cit. P149.

(2)- Michel Hector : Syndicalisme et Socialisme en Haïti, OP cit P152 .

Il est important de souligner, que cette nouvelle forme de lutte adoptée par le mouvement syndical ne lui a pas permis d'aboutir ou du moins de faire avancer la cause des travailleurs. L'échec de cette lutte qui visait essentiellement au renversement de la dictature a permis au président François Duvalier de renforcer son pouvoir en instaurant une dynastie. La repression n'a pas été ménagée vis-à-vis des syndicats, certaines organisations comme la CATH apparaît à l'époque de la dictature. Mais les dirigeants sont réprimés; les ouvriers engagés dans les tentatives de réanimation des syndicats sont licenciés et arrêtés. C'était bien là, la dure période qu'a connue le mouvement syndical pour rebondir au grand jour aprés la chute des Duvalier en 1986. Depuis, la lutte syndicale reprend vie les formes de luttes deviennent beaucoup plus démocratiques. Le concept unité est ressuscité mais cette fois c'est par rapport à la globalisation ajoutée à d'autres comme société juste, emploi décent, syndicalisme fort...etc mais devant la division qui ronge le mouvement. Il reste encore rachitique.

* La première organisation qui porte le nom de syndicat créée le 24 Mars 1903 sous le Gouvernement de Nord Alexis et qui regroupait 46 ouvriers.

* (1)- Michel, Hector : Syndicalisme et Socialisme en Haïti op. Cit. P140.

* (1). Michel, Hector : Syndicalisme et Socialisme en Haïti op. Cit P 97.

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