WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Sémantique littéraire de l'espace du desert dans la traversée de Mouloud Mammeri

( Télécharger le fichier original )
par Abderrahmane Guetal
Université de Chlef. Algérie - Master en Littératures Francophones. 2015
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

Introduction générale

L'année 1982, l'auteur faisait paraitre aux Editions, Phon, « La Traversée »1, son quatrième et dernier roman, après une absence de dix-sept ans sur la scène littéraire. Durant cette période, toutes les oeuvres de M. Mammeri y compris « La Traversée » seront frappées d'interdit, que ce soit dans la presse ou dans l'édition. Auparavant, il avait publié : « La Colline oubliée »2(1952), ce premier roman a suscité une vive polémique au sein du milieu nationaliste. En cette même année, il est couronné par le « Prix des Quatre Jury » que l'auteur a refusé, « Le Sommeil du juste »3(1955) où l'auteur retrouve son algérianité, comme en témoigne Othmane Saadi (juin 1967) dans AL-Moudjahid athaqafi en arabe : « (...) le louant d'avoir trouvé son algérianité avec Le Sommeil du juste (1955)»4. « L'Opium et le Bâton »5 (1965) est adapté au cinéma par l'Office National du Cinéma et de l'Industrie Cinématographique (ONCIC) en 1969, sorti en salle en 1971 sous la réalisation d'Ahmed Rachedi. Chacun de ces romans se restreignait à un espace géographique clos : le village.

Pour l'essentiel, le narrateur nous raconte dans le roman, l'histoire de Mourad, un journaliste d'une quarantaine d'années environ, qui vient de déposer sa démission au journal « Alger Révolution », car il ne veut plus jouer le jeu des élus qui lui ont ouvert les portes du paradis. Mais avant de quitter le journal, Mourad rédige un article intitulé « La Traversée du désert (apologue en trois tableaux) »6. Ça n'a pas l'air de plaire à certaines autorités. Cela dit, bien entendu, le directeur du journal Kamel n'a pu faire autrement que de constater qu'il y avait une dimension politique masquée. Mourad décide de s'exiler en France. En attendant, il effectue un voyage symbolique, jette un dernier regard sur les tréfonds de son arrière-pays (Le Sahara) qui se délabre continuellement. Il préfère retourner au village, rejoindre ses origines avant que la mort ne l'emporte.

Il s'ensuit clairement que le roman raconte le drame de Mourad. Intellectuel et héros, à la fois, il appartient par ses origines à une minorité linguistique isolée, dans un village (Tasga) asphyxié, devenu fantôme. La société que décrit le narrateur avec une lucidité teintée d'amertume, renie ses idéaux et à laquelle il ne s'identifie pas totalement. Il exprime ses états d'âme, son mal de vivre, ses désillusions. Le héros est coincé entre deux espaces : celui des

1 M. Mammeri, La Traversée, Phon, 1982,197p

2 M. Mammeri, La Colline Oubliée, Phon, 1952, 255p

3 M. Mammeri, Le Sommeil du juste, Phon, 1955, 254p

4 Jean Déjeux, Situation de la littérature maghrébine de langue française, O.P.U, Alger, 1982, p. 150

5 M. Mammeri, L'Opium et le Bâton, Phon, 1965, 290p

6 M. Mammeri, La Traversée, Éditions EL-OTHMANIA, Alger, 2005, p.30

7

siens, méconnaissable ; celui de la société urbaine qui a fini par trouver des stéréotypes, pour mener « la grande vie »7. Lui et ses semblables mènent une vie au ralenti, se déchantent lentement, faute de croire à des valeurs pouvant justifier l'existence. La seule issue possible à ce déchirement : la fuite au terme d'une prise de conscience par le héros de ce qu'il est, un homme d'une époque révolue. Il ne croit même plus à la révolution qui avait pourtant motivé pleinement son engagement, pour son combat contre l'oppresseur. Il s'est avéré que cette révolution faite de promesses, ouverte sur un avenir moderne, n'était que leurre. Et le narrateur ne cesse de nous révéler l'impuissance du héros face à l'ordre établi.

Dans La Traversée, nous assistons à une ouverture de l'espace : c'est le désert qui devient, essentiellement, la scène ou plusieurs lieux sont cités et les personnages se déplacent continuellement. Il faut souligner que le déroulement de la diégèse dans un contexte postcolonial représente un indice qui exprime l'importance qu'occupe l'espace dans le roman. Or, celui-ci ne peut se limiter à une simple mention de lieux, ou de décors statiques mais intervient de la même manière que le ferait un personnage. Le décor est donc le premier élément faute de quoi l'action ne peut se réaliser. En outre, le décor relève du domaine du réel. L'auteur doit créer l'illusion réaliste afin de donner plus de vraisemblance au récit. C'est à partir de cette caractéristique que nous avons eu l'idée d'entamer le roman dans son aspect spatial.

Nous proposons de faire une étude de l'espace de La Traversée qui consiste à montrer : comment l'auteur présente les différentes étapes du voyage qu'effectue l'équipe des journalistes. Quelles sont les valeurs symboliques et idéologiques attribuées aux lieux visités ? Peut-on parler de métaphores développées au cours de la narration ? Partant de ce questionnement, nous aboutissons à l'interrogation globalisante de notre problématique qui se résume comme suit : « L'espace du désert joue-t-il le rôle d'actant dans La Traversée ?».

Notre objectif est de dégager l'aspect sémantique de l'espace du désert dans La Traversée. A ce stade de notre réflexion, nous émettons les hypothèses suivantes :

Le désert comme espace topographique et fonctionnel, organisé et suggéré par l'auteur, dégage des valeurs symboliques et idéologiques.

Le désert en tant qu'actant sert de véhicule de concepts plus abstraits et permet de dégager des métaphores en particulier celle de l'Algérie.

7Mammeri 2005, p.7

8

Notre intérêt transparait dans le désir d'informer le lecteur sur cet auteur talentueux, qui a écrit durant plus d'une trentaine d'années, et que l'en croit connaitre mais qui demeure le chantre de la culture berbère, non reconnu à sa juste valeur, parfois même lésé dans sa propre oeuvre. Il s'agit également d'apporter quelques précisions sur la littérature algérienne d'expression française, notamment celle qui s'illustre dans l'espace de la production romanesque.

Le choix de notre thème n'est pas du tout de circonstance, mais réside dans le constat selon lequel, nous sommes en présence d'un roman qui fait partie du patrimoine culturel algérien. Il est produit par un maitre de l'écriture. Une denrée rare de nos jours. A la lecture du roman, nous étions entrainés dans une diversité d'espaces dont le voyage à travers le désert s'accorda à nos ambitions, ce qui nous a motivés d'en faire un objet de travail. Ce voyage d'un mois nous a fait découvrir le monde isolé du sable, la nature sauvage. S'il est certes long et pénible, il nous a orientés sur d'autres pistes de lecture en particulier sociopolitique. Reste que le roman se révèle intéressant et imbu de symboles à décrypter.

Notre travail se compose de deux parties complémentaires. Dans la première partie, nous étalerons, tout d'abord, un aperçu sur la biographie de l'auteur, ainsi que les faits importants qui ont couronné sa vie. Ensuite, nous aborderons le mode d'écriture dans le roman La Traversée. Enfin, nous examinerons quelques-unes des approches théoriques qui nous étaient offertes, afin d'avoir une certaine direction, et pour qu'on puisse le mieux situer notre théorie spatiale choisie. Dans la deuxième partie, nous retracerons les différentes étapes du voyage apparaissant dans la diégèse. Ensuite nous tenterons de dégager les valeurs symboliques et idéologiques qui s'y attachent. Enfin, nous étudierons la métaphore de l'Algérie. Pour clôturer notre travail, nous synthétiserons la totalité des étapes de l'analyse de notre corpus.

9

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand