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La distribution des dividendes en droit des sociétés commerciales ohada

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par Marc Rostel KANA KENGNI
Université de Dschang - Master en droit des affaires et de l'entreprise 2013
  

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INTRODUCTION GÉNÉRALE

L'objectif premier de toute société commerciale est la réalisation des bénéfices. C'est pourquoi des auteurs ont pu dire que la société commerciale n'a pas d'âme ; elle ne connait pas les sentiments affectifs. Elle est guidée par un seul but : la recherche de bénéfices1(*).Il s'agit d'un élément fondamental qui permet de la distinguer d'autres groupements tels que le groupement d'intérêt économique, la société coopérative et l'association2(*). La notion de bénéfice a été définie par l'arrêt de la caisse rurale de Manigod du 11 mars 19143(*) comme « tout gain pécuniaire ou gain matériel qui ajouterait à la fortune des associés ». Cette définition était restrictive parce qu'elle mettait en évidence un critère qui s'accommode mal de l'esprit du droit commercial ou encore moins du droit comptable pour qui le bénéfice résulte aussi bien d'une diminution des charges que d'une augmentation des produits4(*). La recherche d'économies devait et allait donc s'ajouter à la recherche de bénéfices car, il est évident que la réalisation des bénéfices équivaut incontestablement à la recherche du gain5(*). Ces deux aspects sont désormais pris en compte par les législations contemporaines sur les sociétés commerciales à l'instar du Droit OHADA6(*).

Instituée par le traité signé le 17 octobre1993 à Port Louiset entrée en vigueur le 18 septembre 1995, l'OHADA compte aujourd'hui dix-septÉtats7(*). La structure de l'organisation comprend, un Conseil des ministres, un Secrétariat général etune Cour Commune de justice et d'arbitrage. Né dans un contexte caractérisé par le laxisme des législateurs africain, l'application dans ces pays de législations disparates avec des réformes peu profondes, inadaptées, archaïques et vétustes8(*) ; le Droit OHADA a eu pour ambition de réduire voire de mettre fin à l'insécurité juridique en Afrique. L'un de ses domaines de prédilection a été les sociétés commerciales, principaux acteurs de la scène des affaires, avec l'adoption le 17 avril 1997 d'unActe uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d'intérêt économiqueentré en vigueur le 1er janvier 1998.

La société commerciale y est définie à l'article 4 comme celle qui est « créée par deux ou plusieurs personnes qui conviennent, par un contrat, d'affecter à une activité des biens en numéraire ou en nature, dans le but de partager le bénéfice ou de profiter de l'économie qui pourra en résulter. Les associés s'engagent à contribuer aux pertes ... ».

Apriori constituée pour faire des bénéfices, la société peut aussiréaliser des pertes. Cette hypothèse constitue le revers de la médaille en matière de société. Autrement dit, en l'absence de bénéfices, la société sera dans la majorité des cas en déficit. Les pertes alors constatées devront être supportées par les associés. Ceux-ci n'ont pas la possibilité ou le pouvoir de denier la contribution aux pertes. En effet, en contrepartie de son apport, l'associé reçoit des titres sociaux qui lui confèrent des droits mais aussi le cas échéant, l'obligation de contribuer aux pertes sociales dans les conditions prévues pour chaque forme de société9(*). Cette contribution n'est pas très apparente en cours de fonctionnement de la société car les pertes font l'objet d'un traitement comptable et sont portées au passif du bilan en report à nouveaudébiteur10(*).

En principe, la contribution se fait à la dissolution de la société. Aucune disposition expresse ne la prévoit mais, c'est ce qui est classiquement admis. Exceptionnellement, la loi ou les statuts peuvent prévoir une mise à contribution anticipée. En cas par exemple de perte de la moitié du capital dans les sociétés de capitaux, les associés doivent pour continuer l'activité renflouer la société. Ce qui est une façon de contribuer aux pertes11(*). Mais les associés doivent également contribuer aux dettes12(*). Les pertes se distinguant des dettes en ce que les premières s'analysent dans les rapports entre les associés et la société lorsque l'actif de cette dernière diminue, alors que les dettes s'analysent dans les rapports entre les associés de la société et les tiers13(*). Dans les deux cas, si l'actif est supérieur au passif mais inférieur au capital social, les associés emportent moins qu'ils avaient apporté14(*). Si par contre, le passif est supérieur au capital social, les associés des sociétés à risque limité15(*) perdent leur mise tandis que, les associés des sociétés à risque illimité16(*) sont ténus indéfiniment et solidairement du passif17(*).

La situation généralement souhaitée, profitable non seulement à la société mais également à l'État18(*), est la réalisation des bénéfices. Ceux-ci feront d'abord l'objet d'un prélèvement fiscal, ensuite une partie sera réinvestie dans la société sous forme de réserves et une troisième partie enfin sera distribuée au titre des dividendes.D'où ce choix de s'appesantir sur cette étape déterminante de la vie des sociétés commerciales qu'est la distribution des dividendes.Pour pouvoir le faire, il convient apriori de procéder à une définition conceptuelle.

La distribution est un mot qui vient du latin distributio qui signifie division. Le Dictionnaire universel parle de la répartition des choses entre plusieurs personnes.

Dans sa fonction économique, la distribution consiste à assurer l'écoulement des produits du stade de la production à celui de la consommation. C'est dans ce sillage que les opérateurs économiques font généralement recours au contrat de distribution. Celui-ci est un nom générique commun aux divers contrats, qui souscouvert du droit de la distribution et de la concurrence, président à l'organisation en réseau le plus souvent, de la filière des achats et reventes des produits de l'industrie et du commerce, moyennant en général, l'articulation pour chaque type de contrat d'un contrat cadre et d'un contrat d'application19(*). On parlera par exemple : du contrat de concession ou de distribution exclusive, du contrat de distribution sélective, du contrat d'approvisionnement exclusif et bien d'autres.

Juridiquement, la distribution est une opération consistant à attribuer à chacun ce qui lui revient en vertu d'une répartition20(*).Il peut exister en l'occurrence une distribution des deniers, une distribution des affaires21(*), une distribution des pouvoirs en faisant allusion à la séparation des pouvoirs, ou encore une distribution des bénéfices qualifiés de dividendes.

Étymologiquement, le dividende correspond au terme latin dividendusqui signifie « qui doit être divisé ».Ce terme est lui-même issu du verbe dividere, verbe équivalant à partager, répartir ou encore séparer. Ordinairement, le dividende suggère l'idée de contrepartie. Il apparaît comme la rétribution d'un effort, d'un sacrifice22(*).

Dans le droit des procédures d' exécution et des procédures collectives, le dividende désigne la partie du produit d'une vente qui revient à chacun des créanciers lorsque par suite d'insuffisance d'actif, ceux-ci n'ont pas pu être intégralement payés des sommes qui leur étaient dues. Plus précisément, dans l'apurement du passif consécutif à une procédure de liquidation des biens, il désigne la quote-part des sommes provenant de la réalisation des biens du débiteur attribuée à chaque créancier proportionnellement à sa créance, à la condition qu'il ait régulièrement déclaré celle-ci23(*).

En droit fiscal, il est important de cerner la notion de dividende parce que seul celui-ci bénéficie d'un régime de l'avoir fiscal. En effet, les sociétés payent l'impôt sur le bénéfice réalisé. Dans les sociétés translucides comme les sociétés de personnes, l'impôt est directement supporté par les associés. Par contre, dans les sociétés opaques comme les sociétés de capitaux, l'impôt est d'abord payé par ces sociétés sur les bénéfices. Par la suite, ceux-cipeuvent être distribués aux actionnaires. Dans ce cas, ces dividendes supporteront, une fois dans le patrimoine de l'actionnaire, un impôt sur le revenu des capitaux mobiliers. Dès lors, on constate qu'unmême revenu pourra être imposé doublement. C'est pour atténuer cette double imposition qu'a été imaginé le système de l'avoir fiscal24(*).La législation fiscale ne définit pas la notion de dividende qui constitue pourtant la base d'imposition des produits des actionset parts sociales25(*). En l'absence de définition fiscale légale, le juge définit le dividende à la lumière du droit commercial.

Sous cet angle, le dividende est la part de bénéfices réalisés par une société distribuée à la fin d'un exercice aux associés en application d'une délibération de l'assemblée annuelle26(*). Autrement dit, c'est la part du bénéfice distribuable qui est distribuée aux associés à la suite de l'affectation des résultats27(*) qui doit être effectuée en respect du droit prévu en la matière.

Comme la majorité des mots français, le droit vient du latin directumlui-même pris de l'adjectif directusdésignantce qui est en ligne droite, direct, sans détours.

Le droit est un terme polysémique. C'est d'abord un ensemble de règles de conduite socialement édictées et sanctionnées, qui s'imposent aux membres de la société. Sous cette acception et pour le différencier des autres sens qu'il pourrait avoir, il est écrit avec un ``D'' ou suivi de l'épithète objectif. On distinguera alors le Droit des différents États comme le Droit camerounais, le Droit chinois. Il sera également question du droit applicable aux différentes matières telles que le Droit civil, le Droit administratif, le Droit pénal ou le Droit commercial.

Il désigne ensuite une prérogative individuelle reconnue et sanctionnée par le droit objectif qui permet à son titulaire de faire, d'exiger ou d'interdire quelque chose dans son propre intérêt ou parfois dans l'intérêt d'autrui. Sous cette perception on peut citer, le droit de vote, le droit à l'éducation, le droit à la vie, le droit de créance, le droit de propriété.Il désigne enfin une discipline, une science aussi bien du droit objectif que du droit subjectif. Il s'agira dans cette étude du droit objectif et plus précisément du Droit des sociétés commerciales.

La société commerciale, notion à origine lointaine28(*) et malgré la controverse qui existe sur la question de sa nature juridique29(*) a aujourd'hui acquis une unanimité sur sa définition30(*). Les sociétés commerciales OHADAsont alorscelles qui ont épousé une forme déclarée commerciale par l'Acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d'intérêt économique lui-même -SNC, SCS, SARL, SA,- qui accomplissent à titre de profession des actes de commerce par nature par application de l'Acte uniforme portant droit commercial général31(*).

Ilapparaît des définitions ci-dessus données que le dividende est une notion utilisée aussi bien dans les sociétés in bonisque dans les sociétés in malus. Dans cette dernière catégorie, il s'agit plus précisément de l'hypothèse de la liquidation des biens qui a pour conséquence la réalisation de l'actif du débiteur et l'apurement de son passif.À cet effet, le juge ordonne s'il y a lieu, une répartition des deniers entre les créanciers. Il fixe la quotité et veille à ce que tous les créanciers en soient avertis. L'article 164(2) de l'AUPCAP32(*)de l'OHADA dispose que si la répartition est ordonnée, « le syndic adresse à chaque créancier en règlement de son dividende, un chèque à son ordre tiré sur le compte ouvert spécialement à cet effet dans un établissement bancaire ou postal ou au Trésor public ».

Il découle de cette disposition que le dividende est ici un denier. Celui-ci obéissant à un régime de distribution des deniers, ne sera pas envisagédans le cadre de cette étude.

Dès lors, à ceux qui souhaitent s'enrichir en se partageant le bénéfice d'une entreprise commune, il n'est d'autre solution que de créer une société. Ici, un seul but anime les associés, réaliser et partager les profits. Le sujet sur la distribution des dividendes en droit OHADA véhicule alors l'idée générale de la mise en oeuvre d'un des droits financiers de l'associéou plus précisément, du partage de la part des bénéfices à distribuer dans les sociétés commerciales.Dans cedessein, il ne faut pas enfreindre les règles de recherche et de partage des bénéfices.

En effet, ceux-ci doivent se dérouler dans le respect des règles de fonctionnement des sociétés. Il est alors indispensable pour les associés de maîtriser et de respecter les exigences et prohibitions y relatives. Le non-respect pouvant aboutir à la disparition de la société. C'est le cas notamment de la distribution des dividendes par prélèvement sur le capital. Pourtant, la société se meut dans un environnement social caractérisé par le souci des États d'assurer la pérennité des sociétés commerciales, entités incontournables du développement économique.

Dès lors, comment le législateur OHADA règlemente-t-il la distribution des dividendes des sociétés commerciales de façon à concilier l'intérêt de l'associé et le souci de pérennisation de ces sociétés ?

Àtravers sa réglementation, le droit OHADA recherche non seulement à éviter la disparition des sociétés, mais aussi à protéger les associés et les tiers tout en attirant les investisseurs. Il s'agira ainsi dans ce travail de montrer que le législateur OHADA réglemente la distribution des dividendes dans une optique de protection des associés et de préservation de la société. L'appréciation des textes et l'usage de la jurisprudence permettrontd'effectuer cette démonstration. C'est dire que l'exégèse et la casuistique seront les méthodes à suivre pour répondre à la question ci-dessus posée quiest intéressante pour plusieurs raisons.

A priori, il n'est pas anodin de rappeler une fois de plus, la place prépondérante qu'occupe la société commerciale dans l'économie et le développement de nos pays 33(*); car plus de quatre-vingt-quinze pour cent des affaires se font par le truchement des sociétés34(*)qui sont devenues l'outil par excellence du progrès économique35(*). Il s'agit d'un moyen de dépasser l'entreprise individuelle36(*) afin de maximiser les chances de réalisation des gains à travers l'action collective. En cela, ce sujet permettra de présenter lecompromis réalisé par le législateur OHADA entre le fondement et le but37(*) de la société commerciale entant qu'objectif de toute législation contemporaine.

Par ailleurs sur ce même plan juridique, la décennie qui s'ouvre en 2000 est caractérisée par le souci de séduire l'actionnaire, de lui verser un dividende répondant à ses exigences38(*). Le droit aux dividendes apparaît alors comme une prérogative irréductible de l'associé, qui n'a pas été ignoré par le droit OHADA. Rendre alors compte des nouvelles normes juridiques et comptables issues de la réforme OHADA permettra d'avoir une vision précise des règles régissant la distribution des dividendes.

Sur le plan pratique, le dividende a un rôle informationnel. La décision de distribution des dividendes peut révéler l'état actuel des résultats de la société. Ainsi, les changements des dividendes représentent des signaux directs émis par les dirigeants, communiquant de la sorte une information aux investisseurs et au marché concernant les résultats de la société dans l'avenir39(*). L'augmentation des dividendes correspondant à l'image fidèle de la société traduit sa prospérité et prédit l'évolution future de ses bénéfices. Si tel n'est pas le cas, la société ferait miroiter une situation qui n'est pas la sienne et des conséquences fâcheuses peuvent s'en suivre. En cela, cette étude permettra aux sociétés commerciales d'avoir une vision plus claire des autorisations et prohibitions auxquelles elles sont astreintes lorsqu'elles décident de distribuer des bénéfices.

En outre, elle permettra aux associés de maîtriser les moyens légaux leurs permettant de protéger et d'assurer la jouissance d'un de leurs droits financiers qu'est le droit aux dividendes. Force est de constater à ce niveau, à travers la jurisprudence, que bon nombre d'associés désirant en cas de litige obtenir leurs dividendes, ne maîtrisent pas les canaux légaux leur permettant d'avoir gain de cause40(*). Ceci est renforcé par la tendance toujours grandissante des associés majoritaires d'inclure dans les réserves les bénéfices réalisés par la société au détriment des associés minoritaires qui espèrent obtenir une rémunération de leurs apports.

Sur le plan économique, l'étude permettra d'éviter la disparition des sociétés commerciales. En effet, le respect des règles relatives à la distribution des dividendes préservera la société d'éventuelles difficultés financières pouvant conduire à sa disparition.

De toutes les sociétés commerciales OHADA, la question de la distribution des dividendes peut susciter quelques interrogations concernant les sociétés unipersonnelles, les sociétés de fait, les sociétés créées de fait41(*)et les sociétés en participation.

Sur les sociétés unipersonnelles l'on se demande s'il faut parler de distribution des dividendes. En effet, s'il existe des éléments sans lesquels on ne peut parler de contrat de société notamment l'affectation à une activité des biens et le partage des bénéfices ; ces éléments ne se trouvent pas dans la société d'une seule personne qui ne peut par définition comporter ni mise en commun, ni partage, ni volonté de collaboration42(*). Pourtant la société unipersonnelle est une société comme toutes les autres et doit à cet effet respecter les règles de fonctionnement des sociétés. Elle doit pour cela prendre des décisions43(*). C'est à l'associé unique que revient notamment la mission d'approuver les comptes sociaux, de modifier les statuts, de dresser les procès-verbaux de délibérations et de décider de la distribution des dividendes44(*). L'existence de la distribution des dividendes dans les sociétés unipersonnelles est alors affirmée.Maisdans ce cas, l'on pourrait plutôt parler d'appropriation des dividendes surtout lorsque la société est gérée ou dirigée par l'associé unique lui-même car il s'agit tout simplement d'une opération par laquelle il transfère un élément du patrimoine social vers son patrimoine personnel.

Les sociétés de fait et les sociétés créées de fait ont également une particularité selon que l'on se trouve avant ou en cas de contestation45(*). Avant la contestation, compte tenu du silence du législateur, le partage devrait se fairedans les sociétés de fait conformément aux statuts sous réserve des dispositions d'ordre public46(*).Dans les sociétés créées de fait le problème du partage ne se pose pas dans la situation où les associés ignorent qu'ils sont en société47(*). En revanche, la société créée de fait peut être connue des associés. C'est le cas oùdeux ou plusieurs personnes physiques ou morales ont constitué entre elles une société reconnue par l'AUSCGIE mais n'ont pas accompli les formalités légales constitutives ou ont constitué entre elles une société non reconnue par le même Acte uniforme48(*). Dans la première situation, le partage se fera conformément aux statuts sous réserve des dispositions d'ordre public. Les règles des sociétés de droit correspondantes doivent être prises en compte en l'absence d'écrit49(*). Pour les sociétés non reconnues par l'AUSCGIE, les statuts doivent guider le partage et en l'absence d'écrit, il faudrait recourir à l'AUSCGIE.

En cas de contestation, il est impératif pour établir l'existence de la société de fait ou la société créée de fait d'apporter la preuve des éléments constitutifs du contrat de société à savoir : les apports, le but de partager les bénéfices et l'affectiosocietatis. Le but de distribuer les dividendes n'est ici qu'un élément de preuve de l'existence de ces sociétés. L'existence étant établie50(*), la société doit être liquidée. L'invocation de la société créée de fait permettra alors aux associés de tempérer l'iniquité née de la situation de fait en assurant la reprise de leurs apports et éventuellement le partage du boni de liquidation.

Dans les sociétés en participation51(*), l'absence de personnalité juridique influe sur leur fonctionnement. En l'occurrence, les apporteurs peuvent rester propriétaires de leurs apports52(*). Dans ce cas, la plus-value appartient sauf convention contraire pour sa totalité à l'apporteur à moins que la plus-value ne provienne de l'activité sociale et dans cette hypothèse, doit être partagée entre les participants53(*). En outre, étant dominé par la liberté contractuelle, l'écrit est nécessaire pour déterminer les droits et obligations des parties. Le partage du bénéfice est à cet effet librement organisé par les statuts sous réserves des dispositions impératives54(*). En cas de silence, les bénéfices sont répartis proportionnellement auxapports.

Au-delà de toutes ces spécificités55(*), le législateur OHADA a pris en compte tous les intérêts divergents dans le cadre de la répartition des bénéfices. C'est l'existence du bénéfice qui conditionne la distribution. Tous les associés participent à la décision de distribution et le législateur s'assure de l'effectivité de leurs droits par la possibilité de recourir au Juge. Celui-ci pourra également être amené à sanctionner les responsables d'une répartition fictive des dividendes préjudiciable à la société. C'est dire quelorsque la distribution des dividendes est envisagée, l'associé est au centre de la procédure et le souci de pérennisation de la société constitue le fil conducteur, le cadre dans lequel se déroule cette procédure.

Pour le démontrer, l'on pouvait envisager la distribution des dividendes dans les sociétés à risque limité et les sociétés à risque illimité. Mais cela aurait abouti à des répétitions eu égard la similitude de la procédure dans les deux catégories. L'on pouvait également distinguer la distribution des dividendes dans les sociétés in bonis et dans les sociétés in malus. Ceci serait aller au-delà de la définition stricte du dividende dans le cadre du contrat de société. L'on pouvait encore tour à tour envisager les protagonistes et le déroulement de la distribution des dividendes. Une fois de plus, cela ne répondrait pas à l'hypothèse ci-dessus présentée.

C'est pourquoi, la répartition des dividendes étant soumise à des préalables, il a fallu rechercher les éléments de conciliation des intérêts sociauxdans les conditions de la distribution des dividendes (Première partie) avant de dégager ceux qui permettent de protéger ces mêmes intérêts dans la répartition des dividendes (Deuxième partie).

* 1ANOUKAHA François, CISSE Abdoullah, DIOUF Ndiaw, NGUEBOU TOUKAM Josette, POUGOUE Paul-Gérard, SAMBMoussa, Sociétés commerciales et GIE, Collection Droit uniforme africain, Bruylant, Bruxelles, 2002, p. 124.

* 2 L'association, régie au Cameroun par la loi n° 90/53 du 19 décembre 1990 relative à la liberté d'association et celle du 22 décembre régissant les ONG, est constituée dans un but autre que de réaliser les bénéfices. Elle peut néanmoins faire des bénéfices mais ne peut les distribuer aux sociétaires. Le groupement d'intérêt économique quant à lui est celui qui a pour but exclusif de mettre en oeuvre pour une durée déterminée, tous les moyens propres à faciliter ou à développer l'activité économique de ses membres, à améliorer ou à accroître les résultats de cette activité (art 869 de l'AUSCGIE). À la différence de l'association, le GIE peut partager entre ses membres des bénéfices qu'il aura réalisés au cours d'un exercice. A la différence d'une société, il n'est pas constitué en vue de réaliser des bénéfices. Son objet ne peut être que de prolonger l'activité économique de ses membres. La société coopérative en ce qui la concerne est désormais régie en OHADA par l'Acte uniforme relatif au droit des sociétés coopératives du 15 décembre 2010. C'est un groupement autonome de personnes volontairement réunies pour satisfaire leurs aspirations et besoins économiques, sociaux et culturels communs, au moyen d'une entreprise dont la propriété et la gestion sont collectives et où le pouvoir est exercé démocratiquement et selon les principes coopératifs. Elle n'a pas pour but principal de faire des bénéfices. Si ceux-ci sont réalisés, ils sont qualifiés de ristournes et sont distribués aux coopérateurs.

* 3Arrêt Caisse Rurale de Manigod, D.P., 1914, I, note SARRUT.

* 4COZIAN Maurice, VIANDIER Alain et DEBOISSY Florence, Droit des sociétés, 12e éd., Litec, 2004, p. 8.

* 5 POUGOUE Paul-Gérard, ANOUKAHA François et NGUEBOU Josette, Le droit des sociétés commerciales et du groupement d'intérêt économique OHADA, PUA, 1998, p 41.

* 6 Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires.

* 7 Benin, Burkina Faso, Cameroun, République Centrafricaine, Comores, Congo, Côte d'Ivoire, Gabon, Guinée, Guinée Bissau, Guinée Équatoriale, Mali, Niger, Sénégal, Tchad, Togo et la RDC ayant finalisé son adhésion en 2012.

* 8ANOUKAHA François, CISSE Abdoullah, DIOUF Ndiaw, NGUEBOU TOUKAM Josette, POUGOUE Paul-Gérard, SAMBMoussa, op. cit, p.16.

* 9 Art 53-3° de l'AUSCGIE.

* 10 COZIAN Maurice, VIANDIER Alain et DEBOISSY Florence, Droit des sociétés, Litec, 2004. Il n'est pas anodin d'apporter une précision en distinguant le report à nouveau créditeur et le report à nouveau débiteur. Dans la première hypothèse, l'affectation des bénéfices est renvoyée, par l'organe compétent à une décision ultérieure. Dans la seconde hypothèse, il s'agit spécifiquement des pertes constatées à la clôture d'exercices antérieures qui n'ont pas été imputées sur des réserves ni résorbées par une réduction du capital social et qui devront être déduites du bénéfice de l'exercice suivant ou rajoutées au bénéfice du dit exercice.

* 11 COZIAN Maurice, VIANDIER Alain et DEBOISSY Florence, op. cit., p.70.

* 12 La contribution aux dettes ce fait en fonction du type de société.

* 13 Les dettes sont indispensables au fonctionnement des sociétés commerciales et sont généralement contractées a l'égard des tiers tandis que les pertes sont le résultat déficitaire de la société.

* 14ANOUKAHA François, CISSE Abdoullah, DIOUF Ndiaw, NGUEBOU TOUKAM Josette, POUGOUE Paul-Gérard, SAMBMoussa, op. cit. p. 70.

* 15 Il s'agit en droit OHADA des S.A.R.L, des S.A. et dans les S.C.S. des commanditaires.

* 16Il s'agit des S.N.C. et dans les S.C.S des commandités.

* 17Ce qui signifie que le patrimoine personnel des associés pourra être touché.

* 18 L'État est une sorte d'associé obligé puisqu'il a vocation à appréhender une partie des bénéfices réalisée par la société en termes d'impôts.

* 19CORNU Gérard, vocabulaire juridique, PUF, 1987, p. 301.

* 20Idem.

* 21 Opération par laquelle le président d'une juridiction comportant plusieurs chambres attribue à l'une d'elles la connaissance d'une affaire par une décision de pure administration judiciaire.

* 22 AMER YAHIA Amel, Le régime juridique des dividendes, Harmattan, 2010, p. 14.

* 23 CORNU Gérard, op. cit., p. 301 Voir en ce sens l'art. 164 de l'AUPCAP du 10 avril 1998.

* 24 Modalité d'atténuation de la double imposition économique supportée par les bénéfices distribués par les sociétés qui sont successivement imposés, dans le chef de la société, à l'impôt sur les sociétés, en tant que bénéfice réalisé, puis dans la personne de l'actionnaire à l'impôt sur les revenus en tant que dividendes.

* 25Art. 44(1) du Code Général des Impôts camerounais.

* 26 GUILLIEN Raymond et VINCENT Jean, lexique des termes juridiques, 14e éd., Dalloz, 2003, p. 218.

* 27 Journal Officiel de l'OHADA N° 10 - 4ème Année

* 28 Les premières manifestations de la société remontent au 12e s avec les phéniciens qui la pratiquaient dans le commerce international.

* 29 BERTREL Jean Pierre, « liberté contractuelle et société. Essai d'une théorie du juste milieu en droit des sociétés », RTD com. 1996, p. 595.

* 30 Voir article 4 de l'AUSCGIE.

* 31 ANOUKAHA François, CISSE Abdoullah, DIOUF Ndiaw, NGUEBOU TOUKAM Josette, POUGOUE Paul-Gérard, SAMB Moussa, Sociétés commerciales et GIE, op. cit, p. 35. L'on a pris en compte la nouvelle définition du commerçant donnée par l'art. 2 de l'acte uniforme portant sur le Droit commercial général adopté le 15 décembre à Lomé qui dispose qu' « est commerçant celui qui fait de l'accomplissement d'actes de commerce par nature sa profession ».

* 32 Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif.

* 33 POUGOUE Paul-Gérard, ANOUKAHA François, NGEUBOU Josette, Le droit des sociétés commerciales et du groupement d'intérêt économique OHADA, Collection Droit Uniforme, P.U.A, Yaoundé, 1998, p. 2.

* 34 ANOUKAHA François, CISSE Abdoullah, DIOUF Ndiaw, NGUEBOU TOUKAM Josette, POUGOUE Paul-Gérard, SAMB Moussa, op. cit., p.25.

* 35 MANIER, Droit des sociétés, cours Dalloz, 2002, p.1 cité par MOUTHIEU NJANDEU Monique-Aimée, L'intérêt social en droit des sociétés, Collection Études africaines, L'Harmattan, juillet 2009, p.1.

* 36 Il faut pour autant rappeler la possibilité de créer des sociétés unipersonnelles (art. 5, 558 et s. de L'AUSCGIE)

* 37MOUTHIEU NJANDEU Monique-Aimée, L'intérêt social en droit des sociétés, Collection Études africaines, L'Harmattan, juillet 2009, p.15 : « la particularité de l'univers sociétaire s'illustre par la présence d'une personne morale qui fait écran ; or, la logique de la théorie de la personne morale a un corolaire en droit des sociétés : l'existence d'un intérêt social distinct de la somme des intérêts des associés ».Dans ce cas, l'intérêt des associés est un fondement tandis que l'intérêt de la société est un but.

* 38 AMER YAHIA Amel, Le régime juridique des dividendes, L'Harmattan, 2010, p. 3.

* 39 HAFEDH BEN HAFIA et ABBES Lamia, Politique de distribution des dividendes : impact boursier, mémoire de fin d'étude, Université 7 novembre- Carthage, institut des hautes études commerciales,2001-2002, p. 26 et 27.

* 40 C.A. d'Abidjan, Chambre civile et commerciale, affaire liquidation de la société SADEA Edition (Me ATTALE Estelle) c/. ARNAUD Paul (SCPA PARIS VILLAGE), note NEMEDEU Robert, Juridis périodique n° 60, octobre 2004, p 101.

* 41 L'on ne reviendra pas sur le problème de la confusion entretenue par le législateur OHADA sur l'utilisation des notions de société de fait et société créée de fait. Il s'agit de montrer ici la difficulté que peut susciter le partage des bénéfices dans ces sociétés. Néanmoins, il faut entendre par société de fait, celle constituée et immatriculé mais qui est annulée. « il s'agit des sociétés formellement constituées mais dégénérées par l'effet de quelques vices » (TEMPLE Henri, Les sociétés de fait, LGDJ, Paris, 1975, p.32) ; ou encore plus simplement une « société réellement constituée par les associés mais qui, après avoir fonctionné comme telle pendant un certain temps faisait finalement l'objet d'une dissolution »(  MBA OWONO Charles, « société de fait et société créée de fait : une distinction emprunte confusion en droit OHADA », ohadata D-10-19, p. 1). Par ailleurs, la société créée de fait est celle qui se déduit du comportement des parties. Autrement dit c'est celle où « deux ou plusieurs personnes s'étaient comportées comme des associés sans pour autant manifester leur intention formelle de constituer une société ».C'est pourquoi, il faut entendre par société créée de fait les hypothèses prévues par les articles 115, 864 et 865 de l'AUSCGIE.

* 42ANOUKAHA François, CISSE Abdoullah, DIOUF Ndiaw, NGUEBOU TOUKAM Josette, POUGOUE Paul-Gérard, SAMB Moussa, Sociétés commerciales et G.I.E, op cit., p.51.

* 43 Voir l'art. 334, 558, 559, 560, 561 de l'AUSCGIE.

* 44NGOUE Willy James, OHADA, Pratique du droit des sociétés commerciales : la société à responsabilité limitée, collection droit des affaires, PUL, Douala 2007, p.151 et s. ; ANOUKAHA François, CISSE Abdoullah, DIOUF Ndiaw, NGUEBOU TOUKAM Josette, POUGOUE Paul-Gérard, SAMB Moussa, Sociétés commerciales et GIE, op cit., p.402; MEMAN THIERO Fatima, « La société unipersonnelle dans le droit des sociétés de l'OHADA : une oeuvre à parfaire », Ohadata D-07-18; BABONGENO Urbain, De la problématique de la société unipersonnelle en droit congolais eu égard le droit OHADA, Ohadata D-07-25.

* 45 L'existence de ces sociétés est révélée par une contestation émanant soit des tiers, soit des associés eux-mêmes. Par exemple, « lorsqu'il n'y a pas eu de partage de bénéfice, un associé agira contre le ou les associés pour se faire attribuer sa part ». TEMPLE Henri, op. cit., p. 118.

* 46 Au plan de la personnalité morale interne, la société de fait à un fonctionnement identique à celui de la société de droit correspondante. Ayant existé, elle a certainement adopté une des formes prévues par le législateur OHADA. Dès lors, une SNC, une SCS, une SARL ou une SA annulées se verront appliquer les règles de droit correspondante si, malgré l'annulation les dites société continuent de fonctionner.

* 47 Art 864 de l'AUSCGIE.

* 48 Art 865 de l'AUSCGIE

* 49 Cette solution est prônée par TEMPLE Henri.

* 50 Les règle de la SNC s'appliquent (art. 868 de l'AUSCGIE)

* 51 Art.854 de l'AUSCGIE.

* 52 Art. 857 de l'AUSCGIE.

* 53 MEUKE Yves Bérenger, « La société non personnalisée en OHADA, étude de l'absence de la personnalité morale dans la société en participation », ohadata D-06-01.www.ohada.com.

* 54 C'est le cas de l'interdiction des clauses léonines.

* 55 Qui ne sont pas expressément envisagé par le législateur.

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"Enrichissons-nous de nos différences mutuelles "   Paul Valery