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Le droit à la présomption d'innocence face au droit à l'information

( Télécharger le fichier original )
par Ouaogarin Roger SANKARA
Université Ouaga 2 - Master de recherche en Droit Privé Fondamental 2015
  

Disponible en mode multipage

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    BURKINA FASO

    Unité - Progrès - Justice

    ************

    UNIVERSITE OUAGA II


    UNITE DE FORMATION ET DE RECHERCHE EN SCIENCES JURIDIQUES ET POLITIQUES

    (UFR/SJP)

    *********

    Année académique : 2015-2016

    LE DROIT A LA PRESOMPTION D'INNOCENCE FACE AU DROIT A L'INFORMATION

    MEMOIRE

    Présenté et soutenu publiquement

    Par Ouaogarin Roger SANKARA

    Pour l'obtention du Diplôme de Master en Recherche

    Option : Droit Privé Fondamental

    Directeur de Mémoire :

    Pr. Dominique KABRE

    Maître de conférences agrégé en Droit Privé

    Décembre 2016

    AVERTISSEMENT

    L'Unité de Formation et de Recherche en Sciences Juridiques et Politiques de l'Université Ouaga 2 n'entend donner aucune approbation ni improbation aux opinions émises dans ce mémoire, qui doivent être considérées comme propres à leur auteur.

    REMERCIEMENTS

    Nous adressons notre gratitude à tous ceux qui, par leurs soutiens multiformes, ont contribué à l'élaboration de ce mémoire.

    Nous remercions très particulièrement le Professeur Dominique KABRE, notre directeur de mémoire, qui, en dépit de ses nombreuses occupations, nous a prêté une oreille attentive et prodigué de précieux conseils pour la réalisation de cette étude.

    Nous remercions l'ensemble du corps professoral du Master en recherche de Droit privé fondamental de l'Unité de formation en Sciences Juridiques et Politiques de l'Université Ouaga II, pour les enseignements reçus.

    A notre famille, à nos amis et à nos collègues, nous demandons de considérer ce mémoire comme le fruit de leurs efforts communs.

    TABLE DES SIGLES ET DES ABREVIATIONS

    ADP : Assemblée des Députés du Peuple

    AJB : Association des Journalistes du Burkina

    AN : Assemblée Nationale

    Ass. plén. : Assemblée plénière

    CA : Cour d'Appel

    Cass. : Cour de cassation

    CEDH : Cour Européenne des Droits de l'Homme

    Civ. : Chambre civile

    CNT : Conseil National de Transition

    CP : Code pénal

    CPI : Cour Pénal Internationale

    CPP : Code de procédure pénale

    Crim. : Chambre criminelle

    CSC : Conseil Supérieur de la Communication

    D. : Dalloz

    DUDH : Déclaration Universelle des Droits de l'Homme

    JDD : Journal Du Dimanche

    JJ : Journal du Jeudi

    JO : Journal Officiel

    OBM : Observatoire Burkinabè des Médias

    ONAP : Observatoire National de Presse

    OPJ : Officier de Police Judiciaire

    OSCE : Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe

    PUF : Presses Universitaires de France

    RBD : Revue Burkinabè de Droit

    REN- LAC : Réseau National de Lutte Anti-Corruption

    TGI : Tribunal de Grande Instance

    SOMMAIRE

    AVERTISSEMENT

    REMERCIEMENTS

    TABLE DES SIGLES ET DES ABREVIATIONS 1

    SOMMAIRE 2

    INTRODUCTION 3

    PREMIERE PARTIE : DROIT A LA PRESOMPTION D'INNOCENCE ET DROIT A L'INFORMATION : DEUX DROITS DE LA PERSONNALITE EN CONFLIT 7

    CHAPITRE 1 : LA REMISE EN CAUSE DU DROIT A L'INFORMATION PAR LE DROIT A LA PRESOMPTION D'INNOCENCE 10

    Section 1 : La délicatesse d'informer sur les affaires pénales 10

    Section 2 : Les interdictions de publier imposées à la presse 25

    CHAPITRE 2 : LA REMISE EN CAUSE DU DROIT A LA PRESOMPTION D'INNOCENCE PAR LE DROIT A L'INFORMATION 34

    Section 1 : L'activité journalistique attentatoire à la présomption d'innocence 35

    Section 2 : L'activité judiciaire attentatoire à la présomption d'innocence 45

    CONCLUSION PARTIELLE 54

    DEUXIEME PARTIE: DROIT A LA PRESOMPTION D'INNOCENCE ET DROIT A L'INFORMATION : LA NECESSAIRE CONCILIATION 55

    CHAPITRE 1 : LE DIFFICILE EQUILIBRE DES SOLUTIONS CONCILIANT LES DROITS A L'INFORMATION ET A LA PRESOMPTION D'INNOCENCE 57

    Section 1 : Des solutions contraignantes 57

    Section 2 : Le déséquilibre des solutions 69

    CHAPITRE 2 : DES SOLUTIONS DEONTOLOGIQUES PLUS CONCILIANTES 79

    Section 1 : La responsabilité sociale du journaliste protectrice de la présomption d'innocence 79

    Section 2 : La responsabilité sociale contrôlée au profit de la présomption d'innocence 89

    CONCLUSION PARTIELLE 98

    CONCLUSION GENERALE 99

    BIBLIOGRAPHIE 101

    TABLE DES MATIERES 108

    INTRODUCTION

    «Agis de telle sorte que tu traites l'humanité aussi bien dans ta personne que dans la personne de tout autre toujours en même temps comme une fin et jamais comme un moyen », écrivait Emmanuel KANT. On retrouve dans le droit contemporain les échos de cette maxime philosophique qui fait de la personne humaine une entité sacrée, dans ses composantes physique et morale.

    La protection de la personne humaine est au coeur des droits de la personne ou droit civil des personnes. En France, l'article 16 du Code civil énonce : « La loi assure la primauté de la personne ». En droit burkinabè, l'article 2 de la Constitution énonce le principe de l'intégrité physique de la personne humaine. Il édicte : « La protection de la vie, la sûreté et l'intégrité physique sont garanties ». L'intégrité morale est protégée à l'article 6 de la Constitution. Il pose : « La demeure, le domicile, la vie privée et familiale, le secret de la correspondance de toute personne sont inviolables ». Les droits de la personnalité sont également protégés par le Code des personnes et de la famille de 19891(*).

    L'épanouissement de la personnalité suppose la pleine jouissance d'une pluralité de droits subjectifs. Mais la coexistence entre cette multitude d'attributs n'est pas toujours aisée. Telle paraît être la situation que présente le droit à la présomption d'innocence et le droit à l'information, deux nouveaux droits subjectifs2(*). En effet, le droit à l'information se met en oeuvre par la divulgation, à l'antipode de l'omerta imposé par les autres droits de la personnalité qui s'accommodent mal de la publicité, tel le droit à la présomption d'innocence.

    On peut observer dans la presse nationale et étrangère un certain engouement pour les sujets portant sur l'actualité judiciaire, peut-être parce qu'ils laissent souvent apparaître des situations conflictuelles ou le sensationnel dont le public raffole. Ainsi, les présentations de personnes poursuivies par les services de la police ou de la gendarmerie, et les comptes rendus d'audiences, surtout celles des juridictions pénales, sont souvent rapportés dans les colonnes des journaux. Il en résulte des plaintes pour violation de la présomption d'innocence3(*).

    D'où notre choix de réfléchir sur le thème «Le droit à la présomption d'innocence face au droit à l'information ».

    La publication d'informations liées aux affaires pénales est justifiée par le droit à l'information comprise comme le «droit du public à être tenu au courant de l'actualité 4(*)». Le droit à l'information implique également l'accès des citoyens à des renseignements ou informations de toute nature, y compris des informations de nature administrative5(*). Le droit à l'information s'est beaucoup affirmé en matière sportive où il interdit le monopole sur les droits de retransmission en direct des grandes manifestations sportives6(*).

    Le droit à l'information tire son fondement de plusieurs textes internationaux et de lois fondamentales. Il découle, en droit français, de l'article 11 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, ainsi libellé: «La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'Homme. Tout Citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la Loi». Il est également prévu à l'article 19 de la Déclaration universelle des droits de l'homme, formulé comme suit : «Tout individu a droit à la liberté d'opinion et d'expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d'expression que ce soit ».

    Dans ces textes, le droit à l'information semble se confondre avec la liberté d'expression. Si les deux notions sont intimement liées, il importe de relever leur nuance. En effet, le droit à l'information veut «faire du principe de liberté d'expression ou de communication, au-delà du privilège de quelques-uns (éditeurs, journalistes), ou d'une simple conception formelle, un droit pour le plus grand nombre, sinon pour tous. Sans remettre en cause les valeurs et les acquis des régimes de liberté d'expression, la théorie du droit du public à l'information vise à les conforter7(*)». Alors que le principe de la liberté d'expression s'opposait à toute intervention étatique dans la sphère journalistique, on considère que le droit à l'information commande un engagement de l'Etat aux côtés des organes de presse afin de rendre l'information disponible. Au Burkina Faso, l'initiative étatique en faveur du droit à l'information procède de la création des organes de presse publics8(*), de la subvention9(*) accordée par l'Etat à la presse privée, servie à compter de 2016 par le Fonds d'appui à la presse privée (FAPP).

    Mais il existe des formulations beaucoup plus explicites du droit à l'information dans certains instruments juridiques internationaux. Tel est le cas de l'article 9-1 de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples de 1981 aux termes duquel «Toute personne a droit à l'information».

    La formulation de l'article 8 de la Constitution burkinabè se rapproche quelque peu de celle de la Charte africaine. Ce texte dit: « Les libertés d'opinion, de presse et le droit à l'information sont garantis». En droit burkinabè, le droit à l'information est également affirmé dans les lois de 2015 sur les régimes juridiques de la presse écrite, en ligne, sonore et télévisuelle10(*).

    Les plaintes enregistrées à la suite de publications relatives aux affaires pénales sont motivées par le droit à la présomption d'innocence. Par présomption d'innocence, le Lexique des termes juridiques propose d'entendre, un principe selon lequel, en matière pénale, toute personne poursuivie est considérée comme innocente des faits qui lui sont reprochés, tant qu'elle n'a pas été déclarée coupable par la juridiction compétente. Le droit à la présomption d'innocence est énoncé à l'article 9 de la Déclaration française des droits de l'homme et du citoyen de 1789: « Tout homme étant présumé innocent jusqu'à ce qu'il ait été déclaré coupable, s'il est jugé indispensable de l'arrêter, toute rigueur qui ne serait pas nécessaire pour s'assurer de sa personne doit être sévèrement réprimée par la loi11(*)». La Constitution burkinabè en son article 4 consacre la valeur constitutionnelle du droit à la présomption d'innocence en ces termes:« [...] Tout prévenu est présumé innocent jusqu'à ce que sa culpabilité soit établie». Outre la loi fondamentale, certaines dispositions du droit positif national ont implicitement un rapport avec le droit à la présomption d'innocence. Il en est ainsi de l'article 11 du Code de procédure pénale burkinabè. Il dispose: «Sauf dans les cas où la loi dispose autrement et sans préjudicier des droits de la défense, la procédure au cours de l'enquête et de l'instruction est secrète. Toute personne qui concourt à cette procédure est tenue au secret professionnel dans les conditions ou sous les peines prévues par les dispositions du Code pénal relatives aux révélations de secrets».

    La question se pose de savoir comment se présente concrètement la coexistence entre le droit à la présomption d'innocence et le droit à l'information.

    Si une telle interrogation conduit à une analyse des rapports entre les droits à la présomption d'innocence et à l'information, elle impose d'examiner et de proposer les conditions d'une coexistence pacifique entre ces droits.

    Par-dessus les deux attributs de la personnalité, objet de l'étude, les développements suivants pourront contribuer à une réflexion générale sur la protection de la personnalité humaine, tenaillée dans son aspect moral, par les impératifs et les avatars de la société de l'information.

    Nous verrons que le droit à la présomption d'innocence et le droit à l'information entretiennent des relations conflictuelles, qu'autant le droit à la présomption d'innocence remet en cause le droit à l'information, le droit à l'information remet en cause le droit à la présomption d'innocence. Ces rapports conflictuels entre les deux droits seront analysés dans la première partie de notre travail (Partie1).

    Par ailleurs, nous constaterons que le législateur et le juge ne se sont pas débinés face à la nécessité de concilier le droit à la présomption d'innocence et le droit à l'information. Nous tenterons de présenter les solutions de conciliation existantes, même si elles ne réussissent pas à établir un équilibre entre les deux droits subjectifs en conflit. Chose qui va nous amener à envisager la conciliation sous l'angle de la responsabilité sociale du journaliste, fondée substantiellement sur l'éthique et la déontologie de la profession. Cette nécessaire conciliation entre le droit à la présomption d'innocence et le droit à l'information sera traitée dans la deuxième partie du mémoire (Partie 2).

    PREMIERE PARTIE : DROIT A LA PRESOMPTION D'INNOCENCE ET DROIT A L'INFORMATION : DEUX DROITS DE LA PERSONNALITE EN CONFLIT

    Le droit à la présomption d'innocence et le droit à l'information constituent deux droits fondamentaux12(*) attachés à la personnalité. Le caractère fondamental de ces droits s'affirme dans les prérogatives de leur titulaire à l'égard des pouvoirs publics. Dans les rapports entre particuliers, ils prennent la qualification de droits de la personnalité13(*).

    C'est en tant que principe du procès pénal que le droit à la présomption d'innocence est prévu dans le Code de procédure pénale français, dans un article préliminaire, depuis la loi du 15 juin 2000 ayant renforcé la présomption d'innocence en France14(*). On pouvait d'ailleurs lire dans l'exposé des motifs de ladite loi : « Les autres principes directeurs qui gouvernent la procédure pénale sont la conséquence du principe de la présomption d'innocence15(*) ». Le juge constitutionnel français traite de la présomption d'innocence en tant que principe du procès pénal16(*).

    Historiquement, la présomption d'innocence s'est révélée comme une règle de preuve. Elle met à la charge de la partie poursuivante le fardeau de la preuve. C'est la règle «Actori incombit probatio». Si la partie poursuivante n'arrive pas à apporter la preuve de la culpabilité, la personne poursuivie doit bénéficier du doute. C'est la règle « in dubio pro reo ». Il en est ainsi lorsque le juge lui-même aura le moindre doute sur la culpabilité de la personne poursuivie.

    Mais le droit à la présomption d'innocence est devenu un droit civil de la personnalité. En France, il est protégé au même titre que le droit à la vie privée et le droit à l'image. L'article 9-1 du Code civil français énonce : «Chacun à droit au respect de la présomption d'innocence »17(*). Pour la Cour de cassation française, «les abus de la liberté d'expression prévus par la loi du 29 juillet 188118(*) et portant atteinte au respect de la présomption d'innocence peuvent être réparés sur le fondement unique de l'article 9-1 du Code civil 19(*)».

    Annick BATTEUR parle d'« un compromis difficile » entre la présomption d'innocence avec la presse, regrettant que « les journalistes portent souvent atteinte à cette présomption20(*) ». Ces atteintes sont commises sous le couvert du droit à l'information, considéré au plan collectif comme « l'oxygène de la démocratie21(*) » et au plan individuel comme un besoin vital, emportant une mission de « divulgation maximale22(*) », voire « un devoir de publier23(*) » mis à la charge du journaliste.

    Les rapports entre le droit à la présomption d'innocence et le droit à l'information sont fortement conflictuels. Ils s'inscrivent dans le cadre même du « malentendu permanent24(*) » entre la presse et la justice, « ce couple improbable » divisé entre le devoir de tout dire tout de suite et l'impératif de travailler dans la discrétion.

    Au vrai, les rapports entre le droit à la présomption d'innocence et le droit à l'information se présentent sous la forme d'une remise en cause mutuelle. Il semble judicieux de traiter de la remise en cause du droit à l'information par le droit à la présomption d'innocence (Chapitre 1) d'une part, et de la remise en cause du droit à la présomption d'innocence par le droit à l'information (chapitre 2) d'autre part.

    CHAPITRE 1 : LA REMISE EN CAUSE DU DROIT A L'INFORMATION PAR LE DROIT A LA PRESOMPTION D'INNOCENCE

    Le droit à la présomption d'innocence est prévu à l'article 4 de la Constitution burkinabè. Ce texte édicte : « [...] Tout prévenu est présumé innocent jusqu'à ce que sa culpabilité soit établie [...] ».

    Le droit à la présomption d'innocence se présente à la fois comme un droit subjectif et un principe essentiel du procès pénal. Sous l'angle du droit subjectif, il est un attribut de la personnalité. En tant que principe du procès pénal, il assure la sauvegarde des droits de la victime. Dans tous les cas, il protège la personne humaine.

    Le droit à la présomption d'innocence s'entend comme une interdiction d'annoncer publiquement la culpabilité des personnes mises en cause par la justice à certaines étapes de la procédure. Cette interdiction somme toute légitime et compréhensible commande au journaliste un traitement méticuleux de l'information sur les affaires pénales. Le droit d'informer du journaliste sur ces affaires est maintenu. Autorisé à relayer les affaires pénales à condition de ne pas bafouer la présomption d'innocence des personnes mises en cause par la justice, le journaliste doit faire montre de délicatesse dans sa mission d'informer relative aux questions judiciaires (Section I).

    Si le principe général de l'interdiction de présenter en tant que coupables les personnes poursuivies par la justice peut s'appréhender comme un simple gêne pour le droit à l'information, il y a que la présomption d'innocence a conduit le législateur a érigé de nombreuses interdictions de publier auxquelles les journalistes sont soumis (Section 2).

    Section 1 : La délicatesse d'informer sur les affaires pénales

    L'indélicatesse des journalistes est parfois relevée à l'occasion de la médiatisation des affaires pénales25(*).Tel a été le cas, par exemple, lors de l'affaire Gregory en France, dans laquelle des journalistes se sont immiscés, choisissant leurs propres coupables, jamais condamnés par la justice26(*).

    Pourtant, le droit à la présomption d'innocence interdit au journaliste d'être le « bûcher des innocents27(*) ». Le journaliste doit respecter le droit à la présomption d'innocence comprise comme l'interdiction d'annoncer la culpabilité des personnes poursuivies par la justice (§1).

    Cette interdiction ne prive pas le journaliste de son droit de traiter des affaires pénales. Seulement, le devoir de respecter l'innocence emporte une incidence gênante sur le droit d'informer du journaliste (§2).

    §1. L'interdiction d'annoncer la culpabilité des personnes poursuivies

    Le droit à la présomption d'innocence implique l'interdiction d'annoncer la culpabilité des personnes poursuivies par la justice, en l'absence de toute condamnation devenue définitive28(*). Cette interdiction s'impose aussi bien aux journalistes29(*) qu'aux juges et aux pouvoirs publics30(*).

    L'essence même du droit à la présomption d'innocence est d'empêcher la déclaration de la culpabilité des personnes poursuivies par la justice alors qu'elles n'ont pas été condamnées par une décision devenue définitive, rendue par une juridiction compétente. Cette interdiction est légitime tant il serait insensé de déclarer la culpabilité d'une personne alors qu'aucune décision de justice ne la fixe pas. Il s'agit d'une interdiction d'annoncer la culpabilité de façon prématurée (A).

    Il peut arriver que le rappel des faits produits depuis une certaine durée porte atteinte au droit à la présomption d'innocence. La violation de l'oubli est, dans cette hypothèse, attentatoire à la présomption d'innocence. Il pèse également sur les journalistes et autres diffuseurs l'interdiction de déclarer la culpabilité de façon tardive (B).

    A. L'interdiction d'annoncer la culpabilité de façon prématurée

    Le droit à la présomption d'innocence refuse qu'une personne mise en cause par la justice soit présentée, avant toute condamnation devenue définitive, comme coupable. Le journaliste doit se conformer à l'exigence d'une condamnation devenue définitive (1).

    En outre, il doit tenir compte du fait que depuis la loi française du 15 juin 2000 ayant renforcé la présomption d'innocence, la personne poursuivie peut demander protection, même si elle a été présentée comme coupable en l'absence d'acte spécifique de procédure (2).

    1. L'exigence d'une condamnation définitive

    L'article 9-1 du Code civil français, dans sa rédaction antérieure à la loi du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d'innocence31(*), interdisait que soit présentée publiquement comme coupable, avant toute condamnation, les personnes visées par des actes de poursuites.  L'interdiction porte sur l'annonce de la culpabilité « avant toute condamnation ». Le texte dans sa version actuelle contient toujours cette exigence d'une condamnation définitive.

    Sur ce point, Jean Pradel attribue à Louis XVI une assertion considérée comme le fondement originel de la présomption d'innocence : « Le premier de tous les principes en matière criminelle... veut qu'un accusé, fut-il condamné en première instance, soit toujours réputé innocent aux yeux de la loi jusqu'à ce que la sentence soit confirmée en premier ressort ».

    Bon nombre d'articles de presse faisant de la culpabilité de personnes poursuivies par la justice, avant une décision de condamnation, tombent sous le coup de la loi. En France, le Journal du Dimanche (JDD) s'est vu sanctionné parce qu'il s'est empressé de présenter à ses lecteurs « les enregistrements accablants » deux journalistes et montrant « comment ils ont fait chanter le roi  Mohammed VI»32(*).

    La 17eChambre civile du TGI de Paris a estimé que le JDD a porté atteinte à la présomption d'innocence des deux journalistes mis en examen parce que l'article publié à leur propos « ne laisse planer aucun doute dans l'esprit du lecteur sur la culpabilité des journalistes33(*) ».

    En France, l'information suivante a valu à ses auteurs une condamnation pour violation de la présomption d'innocence : "Une avocate toulousaine sous les verrous. Maître Agnès X... a été mise en examen et incarcérée à la maison d'arrêt de Versailles. Elle est soupçonnée d'avoir renseigné directement des trafiquants de drogue... C'est au cours d'une conversation téléphonique que l'avocate toulousaine aurait prodigué ses conseils. Le juge d'instruction chargé du dossier parle de complicité et c'est à ce titre que Maître X... a été mise en examen et écrouée. Cette affaire est unique, il faut remonter six années en arrière pour se souvenir d'avocats mis en examen et écroués : ils avaient passé des armes au parloir d'une prison parisienne34(*)". Le juge a estimé dans cette affaire que le journaliste ne laissait aucun doute sur la culpabilité de la personne, fortement suggérée.

    Depuis la loi du 15 juin 2000 renfonçant la présomption d'innocence en France, la personne poursuivie n'a plus besoin qu'un acte spécifique de procédure soit pris à son encontre pour opposer son droit à la présomption d'innocence aux journalistes.

    2. L'interdiction maintenue en l'absence d'actes de procédure

    Il ressort de l'article 9-1 du Code civil français, dans sa version de 1993, que la personne dont la culpabilité a été annoncée de façon prématurée ne pouvait obtenir réparation que si les faits dont on l'accuse font l'objet d'enquête ou d'instruction judiciaire. La protection n'était, en sus, accordée que si la personne objet d'enquête ou d'instruction judiciaire était placée en garde à vue, mise en examen ou encore visée dans une citation à comparaître, un réquisitoire du procureur de la République ou une plainte avec constitution de partie civile.

    Mais tel n'est plus le cas depuis l'adoption de la loi du 15 juin 2000 ci-dessus évoquée. Dorénavant, pour invoquer son droit au respect de la présomption d'innocence, il suffit qu'une personne soit présentée publiquement comme coupable d'une infraction faisait l'objet d'une enquête ou d'une instruction judiciaire. On observe un élargissement du domaine de la présomption d'innocence.

    Les conditions de la protection se résument ainsi à la publicité de l'annonce de la culpabilité. Dans la pratique, le simple fait de présenter publiquement une personne comme coupable de faits, avant une décision de condamnation, suffit à violer son droit à la présomption d'innocence.

    Par ailleurs, l'élargissement du champ d'application de la présomption d'innocence va entraîner la diversité des faits de culpabilité dont les personnes visées peuvent obtenir protection. Si l'expression « d'escroc à la charité » était constitutive d'injure et non d'atteinte à la présomption d'innocence sous l'empire de la loi de 1993, elle pourrait de nos jours tomber sous le coup de la loi de 2000.

    Outre l'interdiction d'annoncer la culpabilité de façon prématurée, le droit à la présomption d'innocence induit une prohibition de rappeler tardivement des faits de culpabilité.

    B. L'interdiction d'annoncer la culpabilité de façon tardive

    L'interdiction d'annoncer la culpabilité de façon tardive se confond avec le droit à l'oubli, un autre droit de la personnalité consistant à maintenir le silence sur des faits dont le rappel peut être nuisible à son titulaire35(*). « Certaines juridictions civiles36(*) ont localement retenu la notion de droit à l'oubli dans l'intérêt de la personne, dès lors que ce rappel de faits passés ne répond à aucune nécessité d'ordre éthique, historique ou scientifique 37(*)», ont écrit Thomas Arendt et autres.

    Le rappel des faits de culpabilité, après l'écoulement d'un certain temps, est préjudiciable à l'individu qui a intérêt à ce que son innocence soit maintenue. Ainsi, même si la culpabilité avait été prononcée par une juridiction, après un certain délai elle ne peut plus être rappelée. Le journaliste se trouve face au droit à l'oubli légitime de la personne antérieurement poursuivie, voire condamnée.

    Comme on le voit, l'oubli est un élément protecteur de la présomption d'innocence (1). Pour d'aucuns, le droit à l'oubli peut être source d'impunité. Ce qui a motivé une tentative non aboutie de sa levée (2).

    1. L'oubli protecteur de l'innocence

    L'oubli a essentiellement deux fonctions. Soit, il manifeste la clémence de la société à l'endroit d'un de ses membres. On parle d'oubli rédemption. Soit, il sanctionne le défaut de célérité ou la négligence dans l'exercice d'un droit. Il s'agit de l'oubli prescription ou sanction.

    En matière criminelle, la grâce, l'amnistie, la réhabilitation38(*) et même l'exécution de la peine donnent droit à l'oubli. Les faits ayant fait l'objet de grâce, d'amnistie et de réhabilitation ne devraient pas figurer aux bulletins n°2 et 3 du casier judiciaire39(*). On parle d'oubli-rédemption.

    Les personnes condamnées par la justice et graciées, amnistiées ou réhabilitées ont droit à ce que les faits ne soient pas rappelés. Selon la fiction juridique, elles n'ont rien commis et sont innocentes. Un rappel des faits peut s'analyser comme une déclaration tardive de la culpabilité. Lorsqu'elles ne bénéficiaient pas de grâce, d'amnistie ou de réhabilitation, leur culpabilité était sans équivoque, mais tel n'est plus le cas.

    La loi donne une protection à la personne innocentée suite à une révision40(*) de son procès sous la forme d'un droit à l'oubli. Selon l'article 620 du CPP, elle peut demander des dommages intérêts payés par l'Etat. L'action peut être introduite par les héritiers en cas de décès du condamné innocenté. En outre, le condamné innocenté peut obtenir l'affichage de la décision dans la ville de la juridiction qui a statué, l'insertion de la décision au Journal officiel et la publication de ses extraits dans un journal choisi par la juridiction.

    Selon l'article 90 du Code de procédure pénale, le bénéficiaire du non-lieu41(*) peut agir par le biais de la dénonciation calomnieuse ou demander des dommages intérêts au civil ou au pénal. Lorsque le prévenu innocenté choisit la voie pénale, il doit introduire son action par citation devant la chambre correctionnelle du TGI, dans les trois mois du jour où l'ordonnance est devenue définitive. S'il triomphe, il pourra obtenir la publication intégrale ou partielle du jugement dans un ou plusieurs journaux.

    On peut aussi voir dans la répression de la diffamation les manifestations du droit à l'oubli et l'interdiction d'annoncer la culpabilité de façon tardive. Si accusé de diffamation, le journaliste est admis à invoquer la vérité du fait diffamatoire, l'exceptio veritatis, pour sa défense, cette exception est irrecevable lorsque « l'imputation diffamatoire se réfère à un fait constituant une infraction amnistiée ou prescrite, ou qui a donné lieu à une condamnation effacée par la réhabilitation ou la révision ».42(*) Les nouvelles lois sur la presse ne semblent plus proscrire le rappel des faits remontant à plus de dix ans.43(*)

    Mais l'oubli peut consister en une sanction du titulaire de droit qui a manqué de l'exercer de façon prompte. En droit pénal, le droit à l'oubli se manifeste également par la prescription de l'action publique et des peines. On dit de la prescription qu'elle est la grande loi de l'oubli. Lorsqu'un certain temps44(*) se serait écoulé à compter de la réalisation de l'infraction, la personne mise en cause ne peut plus être poursuivie. Pareillement, lorsque la peine n'a pas été exécutée après l'écoulement d'un délai donné, son application devient impossible45(*).

    Ainsi, lorsque des faits constitutifs d'infraction ne peuvent plus être poursuivis parce que frappés de prescription, on suppose que la victime a été sanctionnée par la société pour sa négligence à exercer ses droits. Par ricochet, l'auteur des faits prescrits se trouve protégé contre une menace permanente de devoir répondre indéfiniment de ses actes.

    Le droit à l'oubli a connu des tentatives de levée, mais celles-ci n'ont pas abouti.

    2. La tentative non aboutie de la levée de l'oubli

    Le droit à l'oubli a quelque peu été bousculé par l'imprescriptibilité décrétée à propos de certaines infractions. En effet, il existe une interdiction d'oublier les crimes contre l'humanité caractérisés par leur imprescriptibilité. Au plan international, le statut de Rome46(*), texte fondateur de la Cour pénale internationale (CPI), prévoit l'imprescriptibilité des infractions relevant de sa compétence en son article 29 : les crimes contre l'humanité, les crimes de guerre, et le génocide.

    En droit français47(*) et burkinabè48(*), les crimes contre l'humanité sont imprescriptibles du fait de leur gravité et du tort qu'ils causent à l'humanité. Ce sont des actes « qui portent atteinte à la dignité de l'homme en tant qu'homme49(*)».

    Comme on le voit, l'imprescriptibilité concerne un nombre limité de crimes, ceux d'extrême gravité. Pour la grande majorité des infractions, la règle demeure la « prescriptibilité ». Ce qui signifie que dans la plupart des cas, le journaliste devra se garder de rappeler les faits frappés de prescription, dont le présumé auteur est impossible à poursuivre.

    En France, la prescription, la grande loi de l'oubli, a été fortement menacée par un projet de réforme qui ambitionne de doubler le délai de prescription de l'action publique pour la poursuite des crimes et délits. La refonte entend, en outre, consacrer les évolutions jurisprudentielles sur le délai de prescription. Il s'agit pour le législateur d'entériner le point de départ du délai de prescription relatif aux infractions astucieuses ou cachées, dégagé par la Cour de cassation française : le jour de la découverte de l'infraction. Si la proposition de loi a été adoptée par l'Assemblée nationale en mars 2016, le Sénat français, saisi, demande du temps pour examiner la réforme en raison de ses éventuelles répercussions sur la sécurité juridique50(*). Pour l'heure, la prescription est la règle et l'imprescriptibilité l'exception. Profitable au droit à la présomption d'innocence, la prescription constitue pour le droit à l'information un obstacle de traiter des affaires insusceptibles de poursuite.

    Le projet de réforme français est justifié par les facilités de recherche de la preuve offertes par l'essor technologique et scientifique, ainsi que l'amélioration de l'espérance de vie.

    Le droit à la présomption d'innocence induit une interdiction légitime d'annoncer la culpabilité des personnes poursuivies, soit avant une condamnation définitive, soit après l'écoulement d'un certain délai à compter de la commission d'une infraction ou de l'exécution d'une peine.

    Après avoir rappelé le principe de la non-publication de la culpabilité, il sied d'examiner son incidence sur le droit à l'information.

    §2. L'incidence de l'interdiction d'annoncer la culpabilité des personnes poursuivies sur le droit à l'information

    Le droit à la présomption d'innocence n'interdit pas au journaliste d'exercer son droit à l'information concernant les affaires pénales.  Charles DEBBASCH et ses co-auteurs estiment qu'« il n'est pas interdit de diffuser par voie de presse l'arrestation d'un individu présenté comme suspect, voire la commission d'un crime, la limite doit tenir de la part du journaliste, à l'absence de toutes conclusions définitives manifestant un préjugé tenant pour acquise la culpabilité de l'intéressé51(*)».

    Le droit à l'information est ainsi maintenu concernant le traitement des affaires pénales. «  De manière plus générale, concernant le compte rendu d'affaires judiciaires en cours, dès l'instant où le journaliste n'abuse pas du droit qui est le sien d'informer les lecteurs en n'assortissant pas ses propos d'un commentaire anticipant ses certitudes quant à l'issue de la procédure ou en ne cherchant pas à persuader le lecteur de la culpabilité de la personne mise en cause, il n'y a pas atteinte portée à la présomption d'innocence52(*) », soutiennent DEBBASCH et autres.

    Toutefois, avouons que « letracé de la frontière est délicat53(*) », comme le soulignent François TERRE et Dominique FENOUILLET, entre le droit d'informer et la présomption d'innocence. L'obligation légitime d'observer le droit à la présomption d'innocence va conduire le journaliste tantôt à hésiter sur le moment d'informer sur les affaires pénales sans être en porte-à-faux avec la loi, tantôt à être exagérément prudent au risque de rompre la fiabilité de l'information. Il semble judicieux d'aborder l'incidence de la présomption d'innocence sur le temps de l'information (A) et sur sa qualité (B).

    A. L'incidence sur le temps de l'information

    Par crainte d'être poursuivi pour méconnaissance du droit à la présomption d'innocence, le journaliste pourrait être tenté d'ajourner l'information sur une affaire pénale, jusqu'à ce qu'une décision définitive soit prononcée. C'est du moins un idéal dont l'effectivité aurait évité aux journalistes le maximum d'assignation en justice pour atteinte à la présomption d'innocence. Sauf qu'il y a une incertitude sur le temps d'attente idéale (1) et l'information sur l'arrestation ou la mise en examen pourrait perdre de son caractère actuel(2).

    1. L'incertitude sur le temps d'attente idéale

    L'idéal promu par le droit à la présomption d'innocence pourrait amener le journaliste à garder le silence sur les affaires pénales jusqu'à l'intervention d'une décision définitive statuant sur la culpabilité. Le jugement définitif, comme l'a écrit Mme GABET, « tranche tout le principal ou certains éléments du procès, ou certains incidents de telle sorte que le juge n'a plus à examiner les points jugés54(*) ». Mais le jugement devient vraiment irrévocable lorsque toutes les voies de recours (opposition, appel, cassation) ont été utilisées ou lorsque les délais pour emprunter ces voies de recours sont expirés.

    Or, on sait à quel moment commence une affaire pénale, mais il est impossible de prédire la date de son dénouement. Sur ce point, Jean-Claude MARIN, Procureur de la république près le Tribunal de Grande Instance de Paris, relevait le 12 janvier 2005 à l'occasion d'une rentrée solennelle, « que la justice était aussi malade de son anachronisme et du caractère souvent historique de sa réponse aux agissements les plus graves, les plus complexes ou les plus systémiques 55(*)». En France, le rapport sur « le(s) temps judiciaire(s) » publié en 2014 estime que devant les cours d'assises de premier ressort, le délai moyen entre l'infraction et le jugement était de 56, 2 mois.

    L'attente d'une décision de condamnation définitive pourrait hypothéquer le caractère actuel ou nouveau de l'information.

    2. Le caractère actuel de l'information hypothéqué

    Le droit à l'information du public s'exerce, en sus des documents administratifs et publics56(*), sur des faits d'actualité. Le journaliste français Michel DEPROST définit l'actualité comme un « évènement immédiat et transitoire, un ensemble d'évènements qui se produisent chaque jour57(*) ». La notion de « faits d'actualité » n'est pas étrangère au champ des droits de la personnalité. La jurisprudence tolère la diffusion d'images sans le consentement de l'intéressé, lorsque celui-ci est impliqué dans un fait d'actualité58(*). Elle évoque aussi « les faits divers d'actualité » constituant « un sujet légitime d'information du public »   pour admettre « certaines atteintes à la vie privée59(*) ».

    Les faits d'actualité contenus dans l'information n'ont d'intérêt pour leurs destinataires, lecteurs, téléspectateurs et auditeurs, que s'ils sont encore récents, sans pour autant être instantanés, l'information nécessitant un temps minimum de vérification. Si le journaliste devrait raisonnablement informer, de façon immédiate, du prononcé d'une décision de condamnation définitive, de relaxe ou de non-lieu, il est difficile de nier l'intérêt du public d'être mis au courant, au moins dans un délai raisonnable, de l'existence des poursuites.

    Sachant que toute « déclaration ou conclusion hâtive manifestant un préjugé tenant pour acquise la culpabilité 60(*)» est sanctionnée, le journaliste pourrait hésiter dans un premier temps de livrer l'information sur une arrestation par souci de protection de la présomption d'innocence. Il pourrait se résoudre plus tard à fournir cette information parce qu'il aurait attendu en vain une décision définitive sur l'affaire. Dans cette situation, il livre une information exacte mais dépourvue d'actualité ou de nouveauté. Sur ce point, il faut souligner que l'instantanéité n'est pas toujours une valeur positive en journalisme dans la mesure où elle peut être source d'erreurs61(*). Mais l'information doit au moins être récente ou nouvelle. Il faut relever la difficulté de déterminer le moment à partir duquel l'information perd sa nouveauté.

    Le droit à la présomption d'innocence, en plus d'occasionner une incertitude sur le moment d'informer relativement aux affaires pénales, exige du journaliste une grande délicatesse dans le traitement de l'actualité judiciaire, laquelle peut influer sur la qualité de l'information.

    B. L'incidence sur la qualité de l'information

    Comme dit plus haut, le droit à la présomption d'innocence ne s'oppose pas en principe au traitement des affaires pénales par les journalistes. Toutefois, le journaliste qui traite de l'actualité judiciaire en commettant « une maladresse de plume » et « sans avoir l'intention de nuire 62(*)» s'expose à des sanctions pour méconnaissance de la présomption d'innocence.

    Le respect du droit à la présomption d'innocence commande au journaliste un traitement précautionneux de l'information. Ces précautions semblent dispensables à la diffusion d'informations respectueuses des droits des tiers(1). Mais on peut regretter qu'elles puissent aboutir à une dégradation de la fiabilité de l'information (2).

    1. Des précautions indispensables à la qualité de l'information

    Il est autorisé au journaliste de diffuser l'information sur l'arrestation, la mise en examen ou l'inculpation des personnes par la justice. Mais il doit être méticuleux en utilisant des techniques pouvant lui éviter de présenter les personnes poursuivies par la justice comme coupables.

    Ces techniques vont généralement consister dans l'émission de réserves63(*). Il sera ainsi contraint d'utiliser dans son expression des formules dubitatives ou le conditionnel.

    En somme, les précautions que le droit à la présomption d'innocence impose aux journalistes pourraient se résumer « au devoir de prudence et de mesure dans la prise de parole »64(*), souvent rappelé par la jurisprudence dans des affaires de diffamation. Jean Pradel a particulièrement écrit que la Cour européenne des droits de l'homme « [...] invite les journalistes à la plus extrême prudence lorsqu'ils rédigent des articles sur les procédures pénales en cours [...]65(*)».

    Ces précautions journalistiques indispensables à la publication d'informations de qualité et nécessaires à la protection de la présomption d'innocence peuvent paradoxalement aboutir à une dégradation de la matière informationnelle, objet du droit à l'information.

    2. La fiabilité de l'information menacée

    L'information s'entend, selon Auby et Ducos-Adler, comme « l'action consistant à la connaissance d'un public certains faits ou opinions à l'aide de procédés visuel ou auditif comportant des messages intelligibles pour le public ; l'information est également le résultat de cette action sur les destinataires66(*) ».

    Le traitement des affaires pénales par la presse peut laisser transparaître, au nom du droit à la présomption d'innocence, un défaut de convictions pouvant susciter le doute dans l'esprit du public quant à la fiabilité de l'information sur l'actualité judiciaire. On se demande ce que représenterait aux yeux du public une information dont l'auteur n'est pas sûr.

    Les garde-fous imposés aux journalistes par la présomption d'innocence dans le traitement de l'actualité judiciaire sont somme toute légitimes, mais ils peuvent rendre l'information douteuse et dégrader sa fiabilité. Et ce défaut peut créer une crise de confiance entre le journaliste et le public dont on dit unis par une sorte de contrat social67(*).

    Outre la délicatesse dans le traitement journalistique des affaires pénales commandée par l'interdiction de publier de façon prématurée ou tardive la culpabilité des personnes mises en cause par la justice, certains actes, écrits ou images en lien avec le procès pénal semblent régis par une loi d'omerta.

    Section 2 : Les interdictions de publier imposées à la presse

    Bon nombre d'interdictions de publier sont contenues dans les Codes burkinabè et français de procédure pénale. Certaines de ces interdictions sont prévues dans les lois sur la presse et visent à éviter une perturbation des enquêtes, de l'instruction et du jugement par les hommes de presse.

    Quelles que soient leurs sources juridiques, toutes ces interdictions apparaissent comme des précautions prises par le législateur pour assurer une bonne administration de la justice et protéger la présomption d'innocence des personnes mises en cause par la justice. Pour Jean Pradel, les bornes fixées aux fins d'une bonne administration de la justice sont profitables au droit à la présomption d'innocence68(*).

    Certaines interdictions visent les actes et autres écrits liés à la procédure pénale (§1). D'autres concernent les images et les sondages en rapport avec la procédure pénale (§2).

    §1. Les interdictions de publier certains actes et écrits liés à la procédure pénale

    Ces interdictions semblent sous-tendues par le caractère secret de l'instruction. Le secret ne s'accommode pas d'une propension à la divulgation. L'interdiction couvre les actes d'accusation et d'instruction (A) ainsi que des comptes rendus d'audience (B).

    A. L'interdiction de publier des actes du procès pénal

    L'interdiction de publier les actes du procès pénal, si elle protège l'innocence, elle peut porter un coup dur au droit à l'information du public. Les actes interdits portent soit sur la mise en accusation (1), soit sur l'instruction (2).

    1. L'interdiction de publier des actes d'accusation

    En droit burkinabè, l'interdiction englobait, conformément à l'article 97 al.1 du Code de l'information de 1993, « les actes d'accusation  et tous les autres actes de procédures criminelles avant qu'ils n'aient été lus en audience ». Cet article était quasi-identique à l'article 38 al.1 de la loi française du 29 juillet 1881 sur la liberté de presse toujours en vigueur. Emmanuel DREYER s'est employé à démontrer que ces dispositions, plus qu'elles ne renforcent le secret de l'instruction, visent à protéger la présomption d'innocence69(*). La Cour de cassation française a jugé : « la publication desdits actes portait atteinte au droit de Monsieur X à un procès équitable dans le respect de son droit à la présomption d'innocence et des droits de sa défense 70(*)».

    Mais les lois sur les régimes juridiques respectivement applicables à la presse écrite, la presse en ligne et la radiodiffusion sonore et télévisuelle, adoptées en 2015 par le Conseil national de transition, ont opté pour une interdiction des « actes d'instruction préparatoire de crime ou de délit 71(*)». L'article 105 de la loi de 2015 sur la presse écrite se rapproche de l'article 95 du Code de l'information de 1993. Celui-ci réprimait « la publication d'information préparatoire de crime et délit ».

    Cette formule semble moins satisfaisante du point de vue de la protection de la présomption d'innocence car les délits ne font pas nécessairement objet d'instruction. Des délits peuvent être commis sans que des actes d'instruction ne soient posés. Y aurait-il la possibilité pour les journalistes de divulguer les actes de procédure (autres que des actes d'instruction) liés à la poursuite d'un délit ? L'expression « Les actes d'accusation et tous les actes de procédure » paraît plus protectrice de l'innocence.

    Il est interdit aux journalistes de relayer les actes d'instruction.

    2. L'interdiction de publier des actes d'instruction

    L'interdiction de publier les « actes d'accusation et tous les autres actes de procédure criminelle», s'est réduite en une prohibition relative aux actes d'instruction non encore lus à l'audience. Ainsi, il est interdit la publication d'informations relatives à l'audition des parties et des témoins, aux interrogatoires, aux transports sur les lieux du crime, aux perquisitions.

    De manière spécifique, il est défendu la publication des pièces issues d'une perquisition. L'article 97 du CPP édicte : «Toute communication ou toute divulgation sans l'autorisation de l'inculpé ou de ses ayants droit ou du signataire ou destinataire d'un document provenant d'une perquisition à une personne non qualifiée par la loi pour en prendre connaissance est punie d'une amende de 60.000 à 600.000 francs et d'un emprisonnement de trois mois à trois ans ». Cet article concerne les perquisitions effectuées par le juge d'instruction.

    Cette interdiction couvre les perquisitions opérées par les officiers de police judiciaire dans le cadre de l'enquête préliminaire ou en application d'une commission rogatoire. L'article 57 du CPP relatif à la perquisition faite par les OPJ est d'ailleurs rédigé dans des termes parfaitement identiques à ceux de l'article 97.

    En France, la Cour de cassation réprime « la présentation à l'écran de procès-verbaux issus d'une information en cours » sur le fondement de l'article 38 de la loi du 29 juillet 188172(*) sur la liberté de presse même si ces actes de procédure avaient été auparavant publiés par un journal écrit73(*).

    «  Cet article justifie l'ingérence dans la liberté d'expression par un souci de protéger la présomption d'innocence des accusés et de garantir l'autorité et l'impartialité du pouvoir judiciaire.Ainsi, il s'agit d'éviter que les journalistes ne livrent au public leurs propres conclusions, faussement étayées par une vision probablement partisane et partielle d'un dossier, alors qu'une enquête pénale et une instruction de l'affaire sont en cours et que le tribunal n'a encore pris aucune décision de condamnation 74(*)», soutient l'avocat français Anthony BEM.

    A l'interdiction de publier les actes de procédure et d'instruction, il faut ajouter celle de publier des comptes rendus d'audience

    B. L'interdiction de publier des comptes rendus liés à l'audience

    Le principe de la publicité des audiences des cours et tribunaux en matière pénale est affirmé par les articles 400 et 599 du Code de procédure pénale. «  Les audiences sont publiques. Néanmoins, [la chambre correctionnelle] peut, en constatant dans son jugement que la publicité est dangereuse pour l'ordre ou les moeurs, ordonner, par jugement rendu en audience publique, que les débats auront lieu à huis clos [...] », dit l'article 400 CPP. « La chambre [criminelle] statue sur le rapport du conseiller désigné par le président et au vu des conclusions écrites du ministère public, qui peuvent être développées oralement. Les audiences sont publiques, sous réserve des dispositions de l'article 5 de la loi 10-93 ADP du 17 mai 1993 portant organisation judiciaire au Burkina Faso75(*), dit l'article 599 du Code de procédure pénale. C'est dire que les comptes rendus fidèles des débats d'audiences sont admis.

    Mais les lois sur la presse contiennent des dispositions qui récriminent la publication des certains comptes rendus de débats de juridiction (1) et de délibérations (2).

    1. L'interdiction stricte de publier certains comptes rendus de débats de juridiction

    En vertu du principe de la publicité des audiences, l'on peut conclure à la possibilité pour les hommes de presse de publier des comptes rendus d'audiences.

    Toutefois, les débats des juridictions militaires statuant en matière de sécurité de l'Etat sont marqués du sceau du secret. L'article 107 de la loi sur la presse écrite76(*) punit « d'une amende de un million (1 000 000) à cinq millions (5 000 000) de francs CFA quiconque publie les débats des juridictions militaires, statuant en matière de sécurité de l'Etat ».

    Il faut souligner que l'interdiction de rendre compte des procès en diffamation, des débats (et non des jugements) de procès d'avortement, de déclaration de paternité, de divorce et de séparation de corps, imposée à l'article 98 du Code de l'information de 1993 est introuvable dans les nouvelles lois sur la presse. Il faut encore croire que les journalistes ont voulu, en complicité avec le législateur post-insurrectionnel, restreindre les restrictions à la liberté d'informer.

    Outre l'interdiction de publier les débats des juridictions militaires statuant en matière de sécurité, il est demandé au monde médiatique de se taire sur les délibérations des juridictions.

    2. L'interdiction de publier les comptes rendus de délibérations

    L'article 109 de la loi sur la presse écrite et ses équivalents pour la presse en ligne et l'audiovisuel77(*) posent : « Est puni d'une amende de un million (1 000 000) à cinq millions (5 000 000) de francs CFA quiconque rend compte des délibérations des cours et tribunaux ».

    Cette même interdiction était prévue à l'article 101 de l'ancien Code de l'information adopté en 1993.

    En France, cette interdiction était déjà posée à l'article 10 de la loi du 9 septembre 1835 sur les crimes, délits et contraventions de presse et des autres moyens de publication. Elle a été maintenue à l'article 39 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de presse. Il édicte : « [...] Il est également interdit de rendre compte des délibérations intérieures, soit des jurys, soit des cours et tribunaux. Toute infraction à ces dispositions sera punie d'une amende de 18 000 euros ».

    Ces nombreuses interdictions visent à protéger la présomption d'innocence des personnes poursuivies par la justice en ce sens qu'elles empêchent aux journalistes de divulguer des informations liés au procès susceptibles de jeter un doute sur l'innocence . « Avec le souci de protéger la présomption d'innocence, le législateur a très tôt interdit la diffusion de certaines atteintes à l'honneur de la personne par l'image et par le sondage78(*) », a écrit Emmanuel DREYER.

    §2. L'interdiction de publier des images et sondages

    La loi du 15 juin 2000 ayant renforcé la présomption d'innocence en France a ajouté un article 35 ter à la loi sur la liberté de presse du 29 juillet 1881. Ce texte créé d'une part un délit de diffusion de l'image d'une personne la montrant menottée ou en détention provisoire, sans l'accord de l'intéressé et d'autre part un délit de réalisation ou de diffusion d'un sondage sur la culpabilité des personne poursuivies79(*).

    En vertu de la présomption d'innocence, le journaliste ne saurait fixer et publier l'image de la personne poursuivie dans certaines conditions (A). Par ailleurs, quiconque organisera ou diffusera un sondage sur la culpabilité sera sanctionné pour atteinte à la présomption d'innocence (B).

    A. L'interdiction de diffuser des images de la personne entravée

    L'article 35 ter de la loi française sur la liberté de presse punit d'une amende de quinze mille 15 000 Euros, celui qui diffuse sans l'accord de l'intéressé, par quelque moyen que ce soit et quel qu'en soit le support, l'image d'une personne identifiée ou identifiable mise en cause à l'occasion d'une procédure pénale mais n'ayant pas fait l'objet d'un jugement de condamnation et faisant apparaître, soit que cette personne porte des menottes ou entraves, soit qu'elle est placée en détention provisoire.

    Au Burkina Faso, les lois sur la presse et le Code pénal contiennent des interdictions de portée plus générale pouvant assurer le même résultat que le texte français, à savoir la protection de la présomption d'innocence.

    Il semble logique d'examiner les éléments matériels constitutifs de ce délit en raison de leur pluralité (1) et la portée des dispositions burkinabè se rapprochant de l'article 35 ter de la loi française du 29 juillet 1881 (2).

    1. La pluralité des éléments constitutifs du délit

    Le délit de diffusion prévu par l'article 35 ter de la loi française du 29 juillet 1881 est constitué de quatre faits : la diffusion d'une image, la représentation d'une personne identifiée ou identifiable, la mise en cause à l'occasion d'une procédure pénale, avant l'intervention d'une condamnation et la mise en évidence du port des menottes ou des entraves.

    La diffusion de l'image renvoie à l'idée du moyen de la publicité. Il s'agit ici non seulement de la télévision comme le laisse penser le mot « diffusion », mais aussi vraisemblablement depar le livre, la presse, la radiodiffusion, le cinématographe ou de quelque manièreque ce soit 80(*)". Le caractère non exhaustif des moyens de « diffusion » se manifeste à travers l'expression « par quelque moyen que ce soit », utilisée par l'article 35 ter susmentionné.

    Par ailleurs, la loi interdit la diffusion d'images d'une personne, " faisant apparaître que cette personne porte des menottes ou entraves ". La diffusion d'images de personnes portant des menottes ou entraves n'est donc pas directement interdite, à condition que celles-ci n'apparaissent. Des organes de presse pourraient s'engouffrer dans cette brèche par le recours aux procédés techniques, tels que le " floutage " des menottes, dans l'optique de faire croire que l'image diffusée ne fait pas " apparaître " le port des menottes.

    L'article 35 ter de la loi française sur la liberté de presse constitue une suite de l'article 803 du CPP français disposant que nul n'est soumis au port de menottes ou d'entraves que s'il est considéré comme dangereux pour autrui ou lui-même, ou susceptible de tenter de s'enfuir. On peut dire que l'article 803 du CPP français vise les policiers et autres enquêteurs, tant dis que l'article 35 ter s'adresse aux journalistes.

    En droit burkinabè, il existe des textes traitant de réalités semblables.

    2. La portée similaire des textes burkinabè sur le délit de diffusion

    La législation burkinabè contient des dispositions susceptibles de protéger l'image des personnes mises en cause par la justice. L'article 104 de la loi sur la presse écrite punit d'une amende allant d'un à cinq millions de francs CFA la publication d'un montage réalisé avec l'image d'une personne sans son consentement. Les articles 81 et 124 des lois régissant la presse écrite et l'audiovisuel contiennent les mêmes récriminations. Les articles 371 et 372 du Code pénal sanctionnent les atteintes au droit à l'image d'un emprisonnement de deux mois à un an et d'une amende de cinquante mille (50 000) à un million (1000 000) de francs CFA.

    L'article 108 de la loi burkinabè sur la presse écrite sanctionne l'usage des moyens d'enregistrement de son et d'image lors des audiences des cours et tribunaux sans autorisation du tribunal ou de la cour. Les articles 84 et 128 des lois sur la presse en ligne et l'audiovisuel sont quasi-identiques à l'article 108 précité.

    Ces textes qui, de prime abord recherchent la sérénité des audiences, ne sont pas moins protecteurs de l'innocence. Ils évitent à la personne poursuivie de se retrouver au centre d'une publicité nuisible à son honneur ou à son innocence. En 2011, le Conseil supérieur de la communication au Burkina Faso relevait qu'un reportage télévisuel montrant des prévenus menottés à visage découvert était attentatoire à la présomption d'innocence81(*).

    L'interdiction aux fins de protection de l'innocence peut porter sur les sondages relatifs à la culpabilité.

    B. L'interdiction de publier des sondages sur la culpabilité

    L'interdiction de publier les sondages sur la culpabilité n'est pas clairement établie en droit burkinabè (1). Mais il n'est pas exclu que le juge ou le législateur incorpore un jour cette règle au droit positif national (2).

    1. Une prohibition formelle en droit français

    L'article 35 de la loi du 29 juillet 1981 sur la liberté de presse interdit « le fait-soit de réaliser, de publier ou de commenter un sondage d'opinion, ou tout autre consultation portant sur la culpabilité d'une personne mise en cause à l'occasion d'une procédure pénale ou sur la peine susceptible d'être prononcée à son encontre-soit de publier des indications permettant d'avoir accès à des sondages ou consultations à l'alinéa précédent ».

    Ainsi en France, quiconque organise un sondage d'opinion, le rend public ou formule un jugement y relatif tombe sous le coup de la loi. Ainsi la liberté d'expression concernant la culpabilité des personnes mises en cause par la justice est réduite par cette prohibition.

    Il reste à se demander si une telle interdiction va pénétrer un jour le droit burkinabè.

    2. L'éventualité de cette règle en droit burkinabè

    L'inexistence de cette règle en droit burkinabè pourrait s'expliquer par la rareté, il y a encore quelques années, des sondages d'opinion en général dans le pays. Mais une culture des sondages se fait jour, surtout dans le domaine politique82(*).

    Il n'est pas exclu que le législateur formalise cette interdiction en droit burkinabè. La jurisprudence peut lui être d'un grand apport si elle venait à se montrer regardante sur les sondages en lien avec la culpabilité. Le Conseil supérieur de la communication, lui, n'a-t-il pas désapprouvé la publication des personnes menottées à visage découvert, en l'absence de tout texte juridique?

    L'absence de cette règle dans le droit positif national semble profitable au droit à l'information.

    On aura remarqué que le droit à la présomption d'innocence remet en cause le droit à l'information à travers les interdictions d'annoncer la culpabilité des personnes poursuivies par la justice, que cette déclaration soit prématurée ou tardive. Dans le premier cas, il est imposé au journaliste d'attendre une décision de condamnation définitive pour déclarer la culpabilité. A défaut, le journaliste doit recourir à un langage précautionneux avec le risque de perdre la confiance du public dont il est redevable de l'information. Dans le second cas, le journaliste doit oublier la culpabilité de la personne soit parce que l'infraction est prescrite, soit parce que la société s'est montrée clémente à son endroit en effaçant, par fiction juridique, les fondements de sa culpabilité. Par ailleurs, le droit à la présomption d'innocence interdit au journaliste de publier les actes d'accusation et d'instruction, certains comptes rendus d'audience et les délibérations des cours et tribunaux.

    Mais le droit à l'information n'est pas pour autant fragile. Sa mise en oeuvre est marquée par une remise en cause du droit à la présomption d'innocence.

    CHAPITRE 2 : LA REMISE EN CAUSE DU DROIT A LA PRESOMPTION D'INNOCENCE PAR LE DROIT A L'INFORMATION

    Sous le couvert du droit à l'information, les journalistes revendiquent leur droit à couvrir l'actualité des juridictions pénales.

    Dans le nouveau droit de la presse burkinabè, le droit à l'information se laisse entrevoir à travers les lignes de l'article 9 de la loi sur la presse écrite. Il y est déclaré : «Les entreprises de presse publiques garantissent l'honnêteté, l'indépendance et le pluralisme de l'information, ainsi que l'expression pluraliste des courants de pensée et d'opinion dans le respect du principe d'égalité de traitement ». Ainsi rédigé, l'article 9 fait penser que l'obligation de fournir une information honnête, indépendante et pluraliste s'impose uniquement aux organes de presse publics, à l'exclusion de la presse privée.

    Rédigé en pleine transition politique, l'article 9 de la loi sur la presse écrite traduit les critiques portées à l'endroit de la presse publique, qui par le passé, se serait écartée des principes d'honnêteté, d'indépendance et de pluralisme. Ces exigences tributaires de la qualité de l'information doivent s'étendre à toutes les catégories de médias, journaux, radios, télévision et presse en ligne, qu'ils soient du public ou du privé.

    Dans la pratique, la mise en oeuvre du droit à l'information donne lieu à de nombreuses atteintes au droit à la présomption d'innocence. Il est même des praticiens du droit comme Me Nathalie Vaillant, avocate québécoise, pour qui « les journalistes ne sont pas soumis à l'obligation de respecter la présomption d'innocence, ni à un quelconque devoir de confidentialité ou de réserve 83(*)».

    Alors que le législateur et les acteurs de la justice ont pour mission de protéger les droits des personnes, on peut relever aussi bien dans la loi que dans la pratique judiciaire des atteintes au droit à la présomption d'innocence. Ces atteintes résultent tantôt du droit d'expression reconnus aux acteurs judiciaires, tantôt des termes législatifs.

    Nous examinerons les remises en cause du droit à la présomption d'innocence aussi bien par les journalistes (Section 1) que par les acteurs judiciaires (Section 2).

    Section 1 : L'activité journalistique attentatoire à la présomption d'innocence

    Si les journalistes sont considérés comme les principaux acteurs du droit à l'information, ils n'en sont pas les seuls bénéficiaires. Le droit à l'information bénéficie à tout le monde.

    Les journalistes se sentent investissent, au nom du droit à l'information, d'une mission, voire un devoir, d'information du public.

    Outre son caractère fondamental, le droit à l'information a acquis une dimension subjective. Relativement même à la position du juge constitutionnel français, Jean Chevalier a écrit : « En se plaçant du côté des destinataires et en s'efforçant de garantir l'accès à tous à l'information, on se préoccupe de l'exercice concret de la liberté de communication, et on la transforme en un véritable droit subjectif des individus84(*) ».

    Pour sa part, Frederique Brocal a démontré le caractère subjectif du droit à l'information en ce qu'il remplit les quatre critères de la subjectivité : l'objet (l'information), les titulaires déterminés ou déterminables (lecteurs, auditeurs et téléspectateurs), l'opposabilité et la justiciabilité85(*).

    Sur la justiciabilité du droit à l'information, on peut relever que dans une affaire, concernant la diffusion du Grand Prix de France de Formule 1, la Cour de cassation française avait jugé, au nom du droit au public à l'information, que des diffuseurs autres que les bénéficiaires de l'exclusivité de retransmission étaient en droit de capter de brèves images de la compétition86(*).

    Toutefois, l'activité consistant à satisfaire au droit à l'information du public peut porter atteinte au droit à la présomption d'innocence. Bruno RAVAZ et Stéphane RETTERER pensent qu' « à défaut de convaincre les juges professionnels, la presse peut influencer l'opinion publique par sa façon de résumer tels faits ou présenter telle personne comme coupable87(*) ».

    La loi reconnaît aux journalistes des prérogatives susceptibles de porter atteinte à la présomption d'innocence (§1). Par ailleurs, ils disposent de moyens de publicité de nature à rendre plus graves les atteintes à la présomption d'innocence (§2).

    §1. Les droits du journaliste attentatoires à la présomption d'innocence

    La loi reconnaît aux journalistes des prérogatives susceptibles de justifier les atteintes portées par cette catégorie de professionnels au droit à la présomption d'innocence. Poursuivi pour atteinte à la présomption d'innocence, le journaliste pourrait se prévaloir desdites prérogatives pour échapper à la condamnation (A). Par ailleurs, la loi offre aux journalistes des faveurs telles que des immunités et des circonstances atténuantes (B).

    A. Les prérogatives journalistiques attentatoires à la présomption d'innocence

    Etranger au procès pénal, le journaliste peut-il est astreint au respect du secret de l'instruction ? Les hommes de médias jurent sur leur inopposabilité au secret de l'instruction. En outre, ils revendiquent leur droit à protéger leurs sources. Nous verrons comment la soustraction du journaliste au secret de l'instruction (1) et la protection des sources journalistiques (2) peuvent porter atteinte à la présomption d'innocence.

    1. La soustraction du journaliste au secret de l'instruction

    Conformément à l'article 11 du Code de procédure pénale burkinabè, le secret de l'instruction s'entend de l'obligation de garder secret la procédure d'enquête et d'instruction. C'est l'interdiction de publier les actes et pièces relatifs à la procédure. Mais l'article 11 CPP circonscrit le respect du secret de l'instruction à « toute personne qui concourt à cette procédure [...] dans les conditions et sous les peines prévues par les dispositions du code pénal relatives aux révélations de secrets ».

    Le secret professionnel s'impose aux magistrats, aux greffiers, aux policiers et aux avocats, dans une certaine mesure88(*). Le journaliste ne concourt ni à la procédure d'enquête, ni à l'instruction. Par conséquent, il n'est pas soumis au secret professionnel.

    Les publications de l'intégralité de dépositions dans l'affaire Bettencourt en France89(*) et la diffusion d'extraits d'une procédure d'instruction ouverte au TGI de Nanterre90(*), pour ne citer que ces cas, illustrent la soustraction des journalistes au secret de l'instruction. Les manquements de ce type ont fait dire au professeur GARAUD qu'il faut substituer à cette « publicité illégale et frelatée une publicité franche » afin de « soustraire le dossier d'instruction à ces assauts de curiosité et d'indiscrétion91(*)».

    Si la loi permet aux journalistes de se soustraire du secret de l'instruction, la jurisprudence a trouvé un moyen de faire tomber cette impunité. Elle qualifie l'atteinte au secret d'instruction du journaliste de complicité de violation du secret de l'instruction. Lorsque l'auteur principal de cette violation n'est pas identifiable et la complicité impossible à réprimer, l'infraction est qualifiée de recel de violation du secret d'instruction92(*).

    Mais les journalistes s'opposent à cette qualification. Ils soutiennent que leur profession consiste même au recel d'informations et que toute interdiction de publier des informations liées à l'instruction est incompatible avec la libre circulation de l'information93(*).

    2. Le droit à la protection des sources journalistiques

    L'article 64 de la loi n°057-2015/CNT portant régime juridique de la presse écrite applicable au Burkina Faso dispose : « Le journaliste professionnel a droit à la protection du secret de ses sources d'informations et ne peut être, dans ce cas, inquiété par l'autorité publique 94(*)».

    Cette formulation est heureuse en ce qu'elle permet de comprendre non seulement que ce que d'aucuns appellent «le secret professionnel des journalistes 95(*)» n'en n'est pas un. Alors que le secret professionnel consiste en une astreinte au silence sur des informations obtenues dans l'exercice de bon nombre de professions, celui des journalistes désigne une prérogative, celle de garder le secret sur leurs sources, de ne pas les dévoiler.

    Ce privilège journalistique vise à favoriser une relation de confiance entre le journaliste et son informateur car sans celui-ci, il n'y a pas d'information. « Qui cite ses sources les tarit 96(*)». Le droit à la protection des sources des journalistes assure la permanence de l'activité de presse et concourt à l'effectivité du droit à l'information.

    En France, l'article 109 du Code de procédure pénale édicte: « Tout journaliste entendu comme témoin sur des informations recueillies dans l'exercice de son activité est libre de ne pas en révéler l'origine». Le droit à la protection des sources est ainsi renforcé et clairement opposable aux autorités judiciaires. Ainsi, un journaliste qui obtient des informations sur une procédure pénale en cours peut refuser de dévoiler sa source. Les poursuites qui viendraient à être engagées contre lui pour recel du secret de l'instruction pourraient échouer face à l'impossibilité d'établir l'implication de son informateur dans l'instruction judiciaire. « Dans cette droite lignée, la Cour de cassation considère que les juges ne peuvent pas condamner une personne pour recel de violation du secret professionnel sans caractériser au préalable la révélation d'une information à caractère secret par une personne qui en aurait été dépositaire97(*) », a écrit l'avocat français Anthony BEM.

    Le droit à la protection des sources permet aux journalistes d'échapper à des condamnations pénales pour atteinte au secret de l'instruction protecteur du droit à la présomption d'innocence.

    B. Des faveurs juridiques profitables à la presse

    La loi accordée au journaliste des faveurs susceptibles de provoquer une violation de l'innocence présumée. Pour s'en convaincre, il suffit d'observer les immunités (1) dont le journaliste a droit et qui lui permet d'ignorer la présomption d'innocence d'autrui et les circonstances atténuantes qui sont loin de dissuader les auteurs d'atteinte à la présomption d'innocence(2).

    1. Les immunités préjudiciables la présomption d'innocence

    Des immunités ont été prévues par le Code pénal, notamment à propos de la diffamation. Mais il a été déjà dit que l'atteinte à la présomption d'innocence pouvait se manifester sous la forme d'une diffamation. Sans compter que, par analogie, le juge pourrait les appliquer à tous les délits de presse.

    Les immunités sont prévues à l'article 361 al 2 du Code pénal qui renvoie à l'article 182 de la loi pénale burkinabè. Conformément à ce texte : « Ne peuvent donner lieu à des poursuites pour outrages :

    - les débats parlementaires;

    - les discours à l'occasion des campagnes électorales sans imputation de fait sur la vie strictement privée;

    - les débats judiciaires;

    - les prononcés ou les écrits produits devant les juridictions;

    - le compte rendu fidèle et de bonne foi de ces débats et discours à l'exception des procès en diffamation;

    - la publication des décisions judiciaires y compris celles rendues en matière de diffamation;

    - le rapport officiel fait de bonne foi par une personne régulièrement désignée pour procéder à une enquête et dans le cadre de cette enquête;

    - l'imputation faite de bonne foi par un supérieur ou son subordonné;

    - le renseignement donné de bonne foi sur une personne ou un tiers qui a un intérêt personnel ou officiel à le connaître ou qui a le pouvoir de remédier à une injustice alléguée;

    - la critique d'une oeuvre, d'un spectacle, d'une opinion quelconque manifestée publiquement à condition que ladite critique ne traduise pas une atteinte personnelle. »

    Ainsi si de la publication des actes et faits ci-dessus énumérés, il résulte une atteinte à la présomption d'innocence, la victime se trouvera face à l'immunité accordée par la loi aux auteurs de cette méprise. La publication des débats judiciaires peut occasionner des atteintes à la présomption d'innocence. En outre, l'immunité relative à la publication des décisions judicaires sans l'épithète « définitives » peut donner lieu à l'annonce de culpabilité en présence de voies de recours. Toutefois, l'immunité accordée ne devrait pas excéder les limites des droits de la défense98(*).

    Les auteurs d'atteinte à la présomption d'innocence et d'autres délits de presse pourraient bénéficier des circonstances atténuantes.

    2. Les circonstances atténuantes favorables aux journalistes

    Les circonstances atténuantes visent à diminuer la gravité de l'infraction et de la peine. Outre les circonstances atténuantes de droit commun99(*), il existe au profit du journaliste commettant une atteinte à la présomption d'innocence, laquelle pouvant se décliner comme une diffamation, une excuse spécifique. Aux termes de l'article 143 de loi n°057-2015/CNT du 4 septembre 2015 relative à la presse écrite : « Peuvent notamment être retenues comme une circonstance atténuante en matière de diffamation, les diligences accomplies par le journaliste pour recueillir la version de la personne sur les faits qui lui sont imputés100(*) ».

    Ainsi le journaliste qui annonce prématurément la culpabilité d'une personne mise en examen pourrait bénéficier, à défaut d'une relaxe ou d'un acquittement, d'une diminution de la peine s'il atteste qu'il a tenté de recueillir les propos du mis en cause. Mais les nouvelles lois sur la presse sont muettes sur l'ampleur de la réduction de la peine, contrairement au Code de l'information de 1993 dont l'article 139101(*) impose une réduction au moins de moitié de la peine normalement prévue.

    Les immunités et les circonstances atténuantes accordées aux journalistes expriment les faveurs du législateur pour le droit à l'information ; lequel se nourrit des prérogatives du journaliste tentant de s'affranchir du secret de l'instruction, auréolé de son droit à la protection des sources.

    Les atteintes à la présomption d'innocence sont aggravées par la nature même des moyens de diffusion.

    §2. La portée des atteintes en rapport avec les moyens de publicité

    Les atteintes à la présomption d'innocence sont d'autant plus graves que les moyens de publicité donnent un écho quasi-universel au coup porté à l'honneur et à la considération de la personne poursuivie. La protection d'une atteinte à la présomption d'innocence n'est d'ailleurs envisageable que dans la mesure où il y a eu un acte de publicité concluant à la culpabilité102(*).

    Aux moyens de publicité traditionnels et déjà influents au sein de l'opinion publique (A), sont venues s'ajouter les nouvelles technologies de l'information et de la communication (B).

    A. Des moyens traditionnels de publicité déjà influents

    En droit français, tout comme en droit burkinabè, la publicité des atteintes à la présomption d'innocence s'opère très souvent aux moyens de médias. Nous traiterons des médias de masse traditionnels (A) en ce que leur portée et leur influence (B) constituent des facteurs de gravité de l'atteinte à la présomption d'innocence.

    1. Les mass médias traditionnels

    En France, l'article 23 de la loi du 29 juillet 1981 a énuméré les moyens de publicité des atteintes à la présomption d'innocence. Il s'agit de la presse écrite, parlée et filmée. Ce triptyque existe en droit burkinabè, depuis le Code de l'information de 1993 qui régissait l'activité de la presse écrite et de l'audiovisuel (radio et télévision). La loi n°057-2015/CNT sur la presse écrite s'applique aux journaux et périodiques paraissant à intervalles réguliers, conformément en son article 2. La loi n°059-2015/CNT régit la radiodiffusion sonore et télévisuelle sous sa forme analogique.

    La libéralisation de l'espace médiatique au début des années 1990 avait déjà permis la naissance de nombreux médias de masse susceptibles de véhiculer des atteintes à la présomption d'innocence et à d'autres droits de la personnalité. Leur influence est préjudiciable à l'innocence des personnes mises en cause.

    2. L'influence des mass médias attentatoire à l'innocence

    Les atteintes à la présomption d'innocence véhiculées par les médias portent un coup dur à la réputation et à l'honneur des victimes. « La presse est un élément jadis ignoré, une force autrefois inconnue, introduite maintenant dans le monde. C'est la parole à l'état de foudre ; c'est l'électricité sociale », disait Chateaubriand.

    Les médias influencent l'opinion. Une fois la culpabilité annoncée, même en cas de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement, il devient quasi impossible pour la personne lésée de laver son honneur par le même circuit informatif. Les lecteurs d'un article annonçant la culpabilité ne liront pas tous un autre écrit faisant état de l'innocence, si celle-ci venait à être établie plus tard.

    Par ailleurs, les médias sont marqués par leur internationalité de sorte que la mise en cause publique d'un individu opérée à un point donné de la planète est reçue à tous les endroits du monde. L'honneur se trouve gravement atteint. Prenons l'exemple de la diffusion aux Etats-Unis de l'image de Dominique STRAUSS-KAHN, menotté, faisant le tour du monde alors que dans son propre pays, l'article 35 ter de la loi de 1881 sur la liberté de presse interdit que soient montrées de telles images.

    Avec l'apparition de nouveaux moyens de publicité, il y a une aggravation des atteintes à la présomption d'innocence.

    B. De nouveaux moyens de publicité à la portée universelle

    Le développement d'Internet a donné naissance à de nouveaux médias caractérisés par l'instantanéité et l'universalité dans l'émission et la réception de l'information. Nous traiterons en particulier des médias en ligne en ce qu'ils permettent une instantanéité dans la diffusion de l'information attentatoire à la présomption d'innocence (1) et des réseaux sociaux (2). Lorsque la culpabilité d'un individu est irrégulièrement déclarée via ces moyens de publicité, on peut imaginer l'immensité du préjudice causé à la victime.

    1. L'instantanéité attentatoire à la présomption d'innocence

    Au Burkina Faso, les dispositions du Code de l'information de 1993 étaient applicables aux médias en ligne. Mais ce texte de portée générale a été remplacé par plusieurs normes spécifiques dont la loi n°058-2015/CNT portant régime juridique applicable à la presse en ligne. L'article 2 de ladite loi définit non pas la presse en ligne, mais plutôt le service de presse en ligne, comme tout service de communication au public en ligne édité à titre professionnel consistant en la production et la mise à disposition du public d'un contenu original, d'intérêt général, renouvelé régulièrement, composé d'informations présentant un lien avec l'actualité et ayant fait l'objet d'un traitement à caractère journalistique.

    Les médias en ligne ont une portée universelle. Ils abolissent les frontières entre Etats. Ils atteignent les lecteurs où qu'ils se trouvent, en dehors de tout réseau de distribution. Ainsi, une fois l'information mise en ligne, elle est recevable dans les secondes suivantes à tous les points du monde.

    La portée de l'information en ligne, lorsqu'elle concerne la mise en cause d'un individu par la justice, entraîne une propagation de sa culpabilité à une grande échelle. Le préjudice est d'autant plus énorme que les médias en ligne se caractérisent par une interactivité permettant aux internautes de se livrer, par des commentaires, au lynchage médiatique des personnes poursuivies par la justice et présentées déjà comme coupables par la presse en ligne.

    Les réseaux sociaux constituent une autre menace au droit à la présomption d'innocence.

    2. Les communautés attentatoires à la présomption d'innocence

    En droit burkinabè, les réseaux sociaux sont régis par la loi sur le régime juridique de la presse en ligne. La protection des individus sur les réseaux sociaux est également régie par les lois portant traitement des données à caractère personnel103(*).

    Les réseaux sociaux couramment utilisés sont Facebook, Google+,Instagram, Twitter, etc. Comme leur nom l'indique, les réseaux sociaux sont animés par des communautés d'internautes interagissant entre eux. Les communautés constituent un terreau fertile au lynchage médiatique entendu comme une critique répétée et systématique par des médias d'une personne ou d'un groupe de personnes.

    Bien que n'étant pas directement régis par les lois sur la presse, les réseaux sociaux constituent des moyens de publicité des atteintes aux droits de la personnalité. Bien avant l'adoption de la loi n°058-2015/CNT du 04 septembre 2015 portant régime juridique de la presse en ligne, de laquelle se rapprochent les réseaux sociaux, le tribunal de grande instance de Ouahigouya a statué, en 2014, sur une affaire de diffamation suite à des faits publiés sur Facebook. Le juge avait fait application de l'article 109 du Code de l'information alors en vigueur, estimant que ce texte s'appliquait à tout support de communication de masse, tel que Facebook104(*).

    Sous le couvert du droit à l'information, les acteurs de la justice eux-mêmes portent atteinte au droit à la présomption d'innocence.

    Section 2 : L'activité judiciaire attentatoire à la présomption d'innocence

    Les acteurs de la justice se sont ouverts à la communication, trouvant ainsi la nécessité de s'adresser au public dans le but de le tenir informé de l'évolution de la procédure pénale. En France, on parle de fenêtres d'information.

    Outre cette guerre de communication entre avocats, procureurs et juges d'instruction, au nom des fenêtres d'informations (§1), on peut relever dans le vocabulaire juridique les prémices même des atteintes à la présomption d'innocence reprochées aux hommes de médias et surtout aux acteurs de la justice (§2).

    §1. Les fenêtres d'informations attentatoires à la présomption d'innocence

    La notion de « fenêtres d'information» est utilisée pour désigner toute communication du parquet sur la procédure pénale. En droit français, c'est loi du 15 juin 2000 renforçant le respect de la présomption d'innocence qui l'a introduite dans le Code de procédure pénale.

    Il est fréquent de voir des parquets communiquer sur la poursuite d'une infraction ou l'évolution d'un dossier judiciaire. Si la pratique est bien encadrée au plan juridique, il arrive qu'elle soit dévoyée.

    Il semble approprié de voir comment la pratique est encadrée (A) afin de mieux cerner les dérives qui en résultent (B).

    A. Une pratique bien encadrée

    L'encadrement juridique des fenêtres d'informations du Procureur de la république s'est opéré non seulement par l'affirmation d'un droit de communication au bénéfice des membres du parquet (1). Par ailleurs, le législateur a assorti les fenêtres d'informations de garanties visant à protéger les droits de personnes mises en cause (2)

    1. L'affirmation du droit de communication du parquet

    C'est l'article 11 du Code procédure pénale qui affirme le principe de communication du parquet. De façon générale, « les fenêtres d'information » peuvent se justifier par les nécessités de l'information du public. De longue date, et ce en France, le procureur de la République pouvait «s'il estimait nécessaire, fournir à la presse un communiqué écrit concernant les faits ayant motivé la poursuite 105(*)»

    Mais plus spécifiquement, l'article 11 du Code de procédure pénale français donne quelques explications des« fenêtres d'information». Selon ce texte, les fenêtres d'information visent à éviter «la propagation d'informations parcellaires ou inexactes» ou à « mettre fin à un trouble à l'ordre public ».

    Il s'agit pour le parquet de fournir des informations exactes sur la poursuite et de couper court à la rumeur106(*).

    2. Les garanties du droit de communication

    En principe, le droit d'information du parquet ne devrait pas aboutir à une violation de la présomption d'innocence. Le Code de procédure pénale français fournit, en son article 11 relatif au secret de l'instruction, des garanties visant à éviter les atteintes aux droits des personnes par la mise en oeuvre des fenêtres d'information.

    L'article 11 al 3 du CPP français, pour sa part, interdit à l'occasion des fenêtres d'information toute «appréciation sur le bien-fondé des charges retenues contre les personnes mise en cause».

    Bien plus, la liberté d'opinion des magistrats, même en dehors du procès pénal, ne saurait occasionner la méprise des droits des personnes poursuivies par la justice. En France, l'avis du Conseil supérieur de la Magistrature du 27 mai 1998 estime ainsi que les magistrats peuvent, «par voie de presse ou par tout autre moyen, à titre individuel ou syndical, exprimer leur opinion sur tous les sujets, y compris ceux qui concernent la justice», sous réserve de «la préservation de la dignité et de l'autorité de la fonction, du secret de l'instruction, et de la présomption d'innocence107(*)».

    Toutefois, la pratique est confrontée à quelques dérives attentatoires à la présomption d'innocence

    B. Les dérives constatées dans la pratique

    Dans l'exercice de leur doit de communication sur les affaires pénales, les chefs de parquet font parfois des communiqués écrits, et plus souvent oraux. Mais cette pratique est sources de dérives pouvant porter atteinte à la présomption d'innocence. Ces dérives se traduisent par la divulgation d'informations sur l'instruction (1) et la réplique des parties au procès pénal (2).

    1. La divulgation d'informations sur l'instruction

    Des fenêtres d'informations peuvent résulter une atteinte à la présomption d'innocence. En France, dans l'affaire dite Allenet de Ribemont, jugée par la Cour européenne des droits de l'homme, le Gouvernement a été condamnée au motif que le ministre de l'Intérieur a présenté une personne mise en examen comme auteur des faits108(*). Cette violation a eu lieu à l'occasion d'une fenêtre d'informations.

    Outre ces affirmations malencontreuses de la culpabilité dans l'exercice des fenêtres d'informations, comme ce fut le cas dans l'espèce ci-dessus évoquée, l'opération risque de provoquer une divulgation du secret de l'instruction. Ainsi, les magistrats peuvent voir en la divulgation des pièces d'un dossier un moyen de s'affranchir des pressions exercées par les milieux politique ou économique, en faisant établir dans l'opinion, via les médias, une version des faits ou une orientation de l'affaire sur laquelle il est difficile de revenir sans susciter la réprobation publique. «Certains juges d'instruction convoquent des journalistes dans leur cabinet, afin de leur donner directement des informations», a dit Me DANET, cité par Jean Pradel109(*). «La divulgation d'informations par les acteurs de la procédure peut être un moyen de pression110(*)», pense Stéphane Caro.

    Les avocats des parties au procès pénal pourraient se livrer à une divulgation des pièces du dossier, sous le couvert de leur droit de réplique reconnu par la loi.

    2. Le droit de réplique des parties au procès

    Le droit de communication du parquet entraîne une réponse de la défense. Les avocats, même s'ils sont tenus au respect du secret professionnel par leur code déontologique, pourront à l'occasion de la remise par le parquet d'un communiqué à la presse revendiquer un droit de réponse, au nom de leurs clients. Ils voudront «rétablir les faits selon leur optique propre111(*)».

    Le recours à la presse est devenu pour les acteurs de la justice, et notamment pour les avocats, une stratégie de défense. Dean SPIELMANN parlent de « campagne de presse » attentatoire à la présomption d'innocence.

    Les avocats croient influencer la décision judiciaire en orientant le cours du procès à travers les médias. L'avocate du Général Amadou SANOGO, Me Mariam Diawara, a appelé à la « médiatisation et à une retransmission en direct du procès de l'ancien président malien accusé de complicité d'enlèvement et d'assassinat de vingt-un (21) commandos parachutistes»112(*).

    L'histoire de la justice pénale a parfois été jalonnée d'atteintes à la présomption d'innocence favorisée par l'ouverture des acteurs de la justice à la communication. En France, l'Affaire du tueur en série, Patrice ALEGRE, a donné lieu à une «effarante machination», selon le terme de Dominique Baudis, ancien Président du Conseil supérieur de l'audiovisuel accusé de viol dans ce dossier. Les informations sur sa culpabilité et celle de nombreuses autres personnalités toulousaines tel le magistrat Jean VOLFFauraient été alimentées par des enquêteurs et des avocats113(*).

    Outre les fenêtres d'informations attentatoires au droit à la présomption d'innocence, le langage juridique porte des prémices de violation à ce droit à la personnalité.

    §2. Le langage juridique attentatoire à la présomption d'innocence

    La satisfaction du «droit du public d'être tenu au courant de l'actualité», pour emprunter l'expression de Jean RIVERO114(*), suppose l'usage du langage. Selon le professeur marocain de lettres, Fatih ABDELBASSET, «le langage a pour principale fonction la communication entre les membres de la société115(*)». Le langage utilisé par les acteurs du procès pénal pour traiter de la réalité judiciaire et repris par la presse peut porter les prémices d'une atteinte à la présomption d'innocence. Très souvent, les juges et les auxiliaires de justice sont tenus d'utiliser un vocabulaire imposé par le législateur.

    C'est dire que les atteintes langagières à la présomption d'innocence sont issues du vocabulaire législatif (A). Son usage peut déboucher sur une désignation tendancieuse de la personne poursuivie (B).

    A. Le poids du vocabulaire législatif sur la présomption d'innocence

    Le terme «inculpation» trouve son origine dans le verbe latin «inculpare». Littéralement, l'inculpation s'entend de « l'attribution d'une faute - culpa - à quelqu'un116(*) ». Au Burkina Faso, l'inculpation a lieu lors de la première comparution117(*). Mais la notion même d'inculpation est suggestive de culpabilité (1). Ce qui a conduit le législateur français à l'abandonner au profit de la mise en examen empreinte de neutralité (2).

    1. La notion d'inculpation suggestive de culpabilité

    En droit belge, l'article 61 bis du Code d'instruction criminelle définit «l'inculpé comme la personne à l'encontre de laquelle il existe des indices sérieux de culpabilité». Le dictionnaire Larousse définit l'inculpation comme «l'accusation officielle d'un crime ou d'un fait118(*)».

    Constatant que «dans l'esprit d'un public mal informé des subtilités procédurales, l'inculpation signifie non pas que la justice recherche le bien-fondé d'une accusation mais bien qu'elle fait sienne cette accusation», le sénateur français, Josselin de Rohan s'est résolu, en 1989, à attirer l'attention du Garde des sceaux de l'époque sur le terme d'inculpation. Il lui demandait s'il ne serait pas opportun de donner à la notion d'inculpation « une définition plus restrictive, moins ambiguë et plus ménagère de la dignité des justiciables présumés innocents tant qu'ils n'ont pas été jugés coupables». Pour le sénateur, «le terme de notification d'une charge ou d'une instruction serait sans doute préférable à celui d'inculpation synonyme de culpabilité119(*)».

    Cette proposition a quelque peu reçu un écho favorable, puisque le législateur français a opéré quatre ans plus tard, soit en 1993, une refonte « des mots qui maltraitent la présomption d'innocence120(*)» en substituant «l'inculpation» par «la mise en examen» considérée comme neutre.

    2. La neutralité de la notion de mise en examen

    La notion de mise en examen a été introduite en France depuis 1993. Elle s'applique à des personnes contre lesquelles il existe« des indices graves ou concordants rendant vraisemblable qu'elle ait pu participer, comme auteur ou complice, à la commission d'une infraction», d'après les termes de l'article 80-1 du Code de procédure pénal français.

    La loi du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d'innocence en France exige une audition préalable de la personne soupçonnée, en présence de son avocat, afin de lui permettre de répondre des reproches. Elle évite également aux justiciables de découvrir l'existence de poursuite engagées contre eux, par voie de presse.

    La notion de «mise en examen» a été préférée à celle d'«inculpation» parce qu'elle serait plus neutre. Pour ce faire, le législateur français l'a assortie de garanties profitables à la présomption d'innocence. En effet, conformément à l'article 80-1 du Code de procédure pénal français, le mis en cause peut, lorsqu'il n'existe pas d'indices graves ou concordants à son encontre, contester sa mise en examen par la voie d'une requête en nullité qui doit, à peine de forclusion, être introduite devant la chambre de l'instruction dans un délai maximal de six mois à compter de la date de l'interrogatoire de première comparution.

    Dans l'affaire de l'amiante, la défense de Martine Aubry a pu faire annuler sa mise en examen pour homicides et blessures involontaires en démontrant l'absence d'indices graves ou concordants121(*).

    Malgré cette qualité reconnue à la mise en examen, elle semble n'avoir pas réussi à éliminer le caractère tendancieux de la dénomination des actes de procédure et du langage judiciaire.

    B. L'échec de la révision du vocabulaire juridique tendancieux

    Si la notion de mise en examen a semblé protéger l'innocence en France, force est de reconnaître que par le langage juridique, la personne poursuivie continue à être désignée de façon tendancieuse (1). Dans les systèmes juridiques où la notion de mise en examen est inconnue, tout se passe comme si le présumé coupable a remplacé le présumé innocent (2).

    1. La permanence de la désignation tendancieuse des personnes poursuivies en droit français

    L'article 80-1 du Code de procédure pénal français parle «d'indices graves de culpabilité» pesant sur le mis en cause. Ici, c'est la culpabilité qui est avancée et non l'innocence présumée. « L'indices graves et concordants de culpabilité, puis les charges, sont de véritables présomptions de culpabilité, et celui qui est confronté à la justice [...] est un innocent de principe contre lequel pèsent de telles présomptions de culpabilité qu'il est déjà un semi-coupable qui devra, s'il veut échapper à la condamnation, détruire les indices accumulés contre lui 122(*)», écrit Arnaud Coche

    Au vrai, ces atteintes langagières à la présomption d'innocence traduisent la portée limitée de ce droit. En France, de nombreuses présomptions de culpabilité existent. Ces présomptions concernent entre autres les faits qualifiés de proxénétisme123(*), d'association de malfaiteurs124(*), de diffamation125(*), etc.

    Ces présomptions de culpabilité foisonnent au point où Jean Pradel relève «que certains esprits en tirent la conséquence qu'il n'existe pas de présomption d'innocence en France ».

    Pour mettre fin au caractère stigmatisant de la mise en accusation et des présomptions de culpabilité qu'elle évoque, Arnaud Coche propose de la remplacer par «l'ouverture de la procédure126(*)».

    Mais quid des systèmes juridiques comme les nôtres où la réforme n'a pas été amorcée?

    2. La réforme non amorcée en droit burkinabè

    On peut saluer la réforme du vocabulaire juridique attentatoire à la présomption d'innocence, opérée en droit français, même si certains auteurs et praticiens du droit estiment qu'elle n'est pas satisfaisante.

    En droit burkinabè, la notion de «mise en examen» est inconnue. C'est le règne de «l'inculpation» et de ses conséquences langagières sur le droit à la présomption d'innocence. Ainsi, on peut relever dans les articles 94 à 98 du Code de procédure pénale burkinabè relatifs aux transports, perquisitions et saisies, l'usage répété du mot «inculpé». Il en est de même aux articles 111 à 118 du CPP burkinabè concernant les interrogations et les confrontations. A titre illustratif, l'article 111 dispose: «Lors de la première comparution, le juge d'instruction constate l'identité de l'inculpé, lui fait connaître chacun des faits qui lui sont imputés et l'avertit qu'il est libre de ne faire aucune déclaration. Si l'inculpé désire faire des déclarations, celles-ci sont immédiatement reçues par le juge d'instruction».

    En France, si le débat porte sur la correction des avatars langagiers « de la mise en examen» et «des indices graves et concordants de culpabilité», au Burkina Faso, il faut espérer pour le moment l'extirpation de la notion primaire127(*) d'inculpation du droit positif national.

    Pour l'heure, les personnes mises en cause par la justice sont plutôt des présumés coupables (la culpabilité est mise en avant) que des présumés innocents (l'innocence est mise en exergue).

    Cette expression malencontreuse est diffusée à grande échelle par la presse, elle-même informée par les policiers, les juges d'instruction et les chefs de parquet dont ils rendent compte des conférences de presse de présentation de personnes arrêtées ou de rapport d'étape de procédure. On peut lire dans Sidwaya n°7 295 du 14 novembre 2012, à la page 35 : « Ce jour-là, on procédait à l'audition des présumés coupables de la crise dite de Passakongo 128(*)».

    CONCLUSION PARTIELLE

    Le droit à la présomption d'innocence et le droit à l'information se remettent mutuellement en cause. Si les journalistes sont autorisés à traiter de l'actualité judiciaire, ils doivent faire preuve de délicatesse afin de ne pas déclarer publiquement la culpabilité des personnes poursuivies. A ce devoir de prudence qui peut dégrader la qualité de l'information, s'ajoutent des interdictions de publier des actes et des images en rapport avec le procès pénal.

    Par ailleurs, les journalistes jouissent de prérogatives de nature à porter atteinte à la présomption d'innocence. Ils tentent de se soustraire du secret de l'instruction et revendiquent le droit à protéger leur source. Ils bénéficient d'immunités et de circonstances atténuantes qui minimisent leur responsabilité juridique relatives aux atteintes qu'ils portent au droit à la présomption d'innocence. L'influence des moyens de publicité sur l'opinion publique aggrave les atteintes commises par les journalistes. Les acteurs judiciaires se sont aussi ouverts à la communication, ébruitant parfois le secret de l'instruction et usant d'un vocabulaire tendancieux.

    DEUXIEME PARTIE: DROIT A LA PRESOMPTION D'INNOCENCE ET DROIT A L'INFORMATION :LA NECESSAIRE CONCILIATION

    Afin de protéger convenablement la personnalité, il semble impérieux d'établir nécessairement un équilibre entre ses deux attributs que sont le droit à la présomption d'innocence et le droit à l'information.

    Me Christian CHARRIERE-BOURNAZEL a affirmé: «Dans le face-à-face où s'opposent la liberté d'expression et la présomption d'innocence se mêlent des problèmes d'éthique à des relations de pouvoirs. Les pouvoirs ne peuvent être contenus et contrôlés que par la force, celle de la loi. L'éthique commande de protéger la personne aussi longtemps qu'elle le mérite contre la force des pouvoirs129(*)».

    De cette affirmation, il ressort que l'équilibre entre le droit à la présomption d'innocence et le droit à l'information peut être maintenu par le recours à la loi réprimant les atteintes à la présomption d'innocence d'une part, et à l'éthique invitant les journalistes à plus de sagesse d'autre part.

    Mais à l'analyse, les solutions contraignantes de conciliation ne semblent pas satisfaisantes dans la mesure où elles font prévaloir l'un ou l'autre des droits en conflit, maintenant un déséquilibre entre eux (Chapitre 1). Il reste à explorer les solutions de conciliation non contraignantes fondées sur la responsabilité sociale du journaliste pour une pleine expression du droit à l'information protecteur du droit à la présomption d'innocence (Chapitre 2).

    CHAPITRE 1 : LE DIFFICILE EQUILIBRE DES SOLUTIONS CONCILIANT LES DROITS A L'INFORMATION ET A LA PRESOMPTION D'INNOCENCE

    Les solutions de conciliation existantes sont beaucoup basées sur la responsabilité juridique du journaliste, que cette responsabilité soit civile ou pénale. Elles consistent à autoriser le journaliste à informer sur des matières où se joue la présomption d'innocence, à charge pour lui d'assumer la responsabilité de ces actes.

    Les solutions sont marquées par leur caractère contraignant et leur impossibilité à maintenir un véritable équilibre entre les droits en concurrence. En effet, le contentieux du droit à l'information et de la présomption d'innocence, a amené le juge a dégagé des critères de conciliation. Mais le résultat n'est pas satisfaisant.

    Il semble logique d'examiner successivement les solutions contraignantes (Section 1) avant d'aborder le déséquilibre qu'elles présentent (Section 2).

    Section 1 : Des solutions contraignantes

    Les solutions visant à contraindre les journalistes au respect de la présomption d'innocence consistent à réprimer et ou à réparer les atteintes à la présomption d'innocence. Parfois, il s'agit de prévenir ou d'interrompre les atteintes à la présomption d'innocence avant un véritable contentieux.

    Nous aborderons les règles régissant les solutions répressives et réparatrices (§1) avant de faire l'état du droit positif sur les solutions préventives et interruptives d'atteintes (§2).

    §1. Les solutions répressives et réparatrices des atteintes à la présomption d'innocence

    Lorsqu'une atteinte à la présomption d'innocence est commise, il y a à la fois un préjudice causé à la victime et un trouble à l'ordre social. Le même fait peut être poursuivi au pénal et ou au civil.Pour la Cour de cassation française, « les abus de la liberté d'expression prévus par la loi du 29 juillet 1881130(*) et portant atteinte au respect de la présomption d'innocence peuvent être réparés sur le fondement unique de l'article 9-1 du Code civil 131(*)».

    Les développements suivants portent sur les règles communes aux actions civiles et pénales en matière d'atteinte à la présomption d'innocence d'une part (A) et sur les règles propres à chacune de ses actions, d'autre part (B).

    A. Les règles communes aux actions civile et pénale

    Au plan pénal, l'atteinte à la présomption d'innocence peut être poursuivie sous la qualification de diffamation définie en droit burkinabè par articles 95 et 114 de la loi sur le régime de la presse écrite en ces termes : « Toute allégation ou imputation d'un fait qui porte atteinte à l'honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé est une diffamation132(*)». En France, la Cour de cassation a admis qu'une publication impliquant une personne mise en cause par la justice pouvait être à la fois constitutive de diffamation et d'atteinte à la présomption d'innocence133(*).

    Pour François TERRE et Dominique FENOUILLET, l'atteinte à la présomption d'innocence constitue un dommage moral semblable à l'atteinte à la vie privée134(*), considéréecomme «la matrice de tous les droits de la personnalité135(*)». Elle peut prendre aussi la forme d'injure136(*).

    Dans tous ces cas, la sanction pénale peut être alternative ou cumulative d'une réparation civile. Les actions pénales et civiles sont caractérisées par une responsabilité en cascade (1). Lorsque l'infraction est qualifiée de diffamation, la responsabilité juridique pourra être présumée (2).

    1. Une responsabilité en cascade

    Le régime de la responsabilité en cascade est posé aux articles 123 à 127 de la loi 057-2015/ CNT portant régime juridique de la presse écrite au Burkina Faso. Les articles 99 à 102 de la loi 058-2015/CNT sur la presse en ligne et les articles 143 à 145 de la loi 059-2015/CNT sur la radiodiffusion sonore et télévisuelle traitent de la responsabilité en cascade. Ce régime est commun à toutes les infractions commises par voie de presse

    En substance, ces textes considèrent comme auteurs principaux et passibles de peines:

    - les directeurs ou le cas échéant les co-directeurs de publication ou éditeurs de journaux ou périodiques ;

    - à défaut, les auteurs des articles incriminés;

    - à défaut des auteurs des articles incriminés, les imprimeurs;

    - à défaut des imprimeurs, les vendeurs et les distributeurs agréés.

    Concernant la presse en ligne, à défaut des auteurs des articles incriminés, ce sont les hébergeurs qui sont poursuivis.

    S'agissant de la responsabilité en cascade des délits de presse commis par le biais de la radiodiffusion sonore, le directeur de la station est poursuivi comme auteur principal lorsque le message incriminé a été préalablement fixé. A défaut du directeur de la station la responsabilité incombe au producteur. A défaut du producteur, le présentateur est mis en cause. Mais dans le cas d'une émission en direct, la responsabilité d'une atteinte à la présomption d'innocence pèsera sur la personne ayant tenu les propos incriminés.

    Dans tous les cas, lorsque le directeur de publication ou de la station est mis en cause, les auteurs des écrits ou propos litigieux sont considérés comme complices. Par ailleurs, si le directeur de publication ne peut pas se décharger de sa responsabilité, la jurisprudence admet que l'imprimeur peut se libérer en révélant le nom de l'auteur137(*).Tel devrait être le cas de l'hébergeur du service de presse en ligne.

    En France, la loi du 15 juin 2000 renforçant la présomption d'innocence a créé à l'article 35 ter I et II le délit d'atteinte à la présomption d'innocence auquel s'applique le régime de la responsabilité en cascade.

    La responsabilité en cascade vaut aussi bien pour l'action pénale que pour l'action civile. En effet, la Cour de cassation française a jugé que«doivent recevoir application devant la juridiction civile les articles 42 et 43 de la loi du 29 juillet 1881, qui énumèrent les personnes susceptibles d'engager leur responsabilité pénale en cas d'infractions commises par la voie de la presse, ainsi que l'article 44 de la même loi, aux termes duquel les propriétaires des journaux ou écrits périodiques sont responsables des condamnations pécuniaires prononcées au profit des tiers contre les personnes désignées dans les deux articles précédents, conformément aux dispositions des articles 1382, 1383, 1384 du code civil138(*) ».

    Les lois dispositions ci-dessus évoquées rendent l'entreprise de presse responsable des condamnations pécuniaires prononcées au profit de tiers contre le directeur ou le co-directeur de publication ou de stations. On comprend qu'il s'agit de garantir la solvabilité de la personne responsable et l'exécution des peines.

    2. Une responsabilité présumée

    Il pèse sur les auteurs d'atteintes à la présomption d'innocence pouvant être qualifiées de diffamation une responsabilité présumée. L'article 119 de la loi sur la presse écrite édicte: «Toute reproduction d'une imputation qui a été jugé diffamatoire est réputée faite de mauvaise foi, sauf preuve contraire par son auteur». Ainsi l'élément intentionnel de l'infraction est présumé.

    Au sens de l'article 119139(*) de la loi sur la presse écrite, la mauvaise foi du journaliste est présumée. Il lui revient la charge d'établir sa bonne foi. A défaut d'apporter la preuve de sa bonne foi, le journaliste peut, selon l'article 118 al 2140(*) de la loi sur la presse écrite se dégager de sa responsabilité s'il établit la vérité des faits diffamatoires.

    Alors que la présomption d'innocence implique au plan probatoire que la preuve des infractions incombe à la partie poursuivante, son atteinte entraîne un renversement de la charge de la preuve.

    Si les responsabilités civile et pénale sont communément régies par le système de désignation en cascades des auteurs d'atteinte à la présomption d'innocence, il existe des règles propres à chacune.

    B. Les règles propres aux actions civile et pénale

    L'action civile pour la réparation d'un préjudice causé par voie de presse présente une spécificité (1). La responsabilité pénale pour atteinte aux droits de la personnalité, y compris la présomption d'innocence, pourrait donner lieu à des sanctions au quantum élevé (2).

    1. Un régime de responsabilité civile spécifique

    Le débat s'est longtemps mené entre deux tendances, à savoir l'application de l'article 1382 du Code civil141(*) à la protection des droits des personnes dont la présomption d'innocence et la mise en oeuvre d'un mécanisme spécifique de protection.

    En France, il avait été considéré que les atteintes au droit à la présomption d'innocence pouvaient être réparées sur le fondement de l'article 1382 du Code civil à condition que cette violation ne soit pas constitutive de diffamation142(*).

    Mais de nos jours, l'article 9- 1 du Code civil français prévoit une action destinée à faire «cesser l'atteinte» et celle «en réparation du dommage subi» de sorte que le recours à l'article 1382 du Code civil devient inutile.

    La Cour de cassation française a déterminé l'indépendance de l'action civile relative à la vie privée en posant: «Selon l'article 9 du Code civil, la seule constatation de l'atteinte à la vie privée ouvre droit à réparation143(*)». Le non-recours à l'article 1382 du Code civil a été confirmé plus tard par la Cour de cassation française144(*).

    En droit burkinabè, l'article 103 al 2145(*) de la loi sur la presse écrite prévoit parmi les outils de protection de l'intimité de la vie privée, la réparation du dommage subi et toutes mesures propres à empêcher ou faire cesser l'atteinte. On a vu que l'atteinte à la présomption d'innocence peut prendre la forme d'une atteinte à la vie privée. En droit burkinabè, l'application du régime spécifique de protection de la présomption d'innocence et des autres droits de la personnalité reste à être confirmée. Le TGI de Ouahigouya avait fait application de l'article 1382 du Code civil dans une affaire de diffamation sur Facebook146(*). Mais la décision est en appel.

    Il revient au juge d'évaluer le préjudice qui en principe est moral. Mais il peut être matériel. Le juge peut décider de l'octroi d'un franc symbolique ou d'une somme plus importante, surtout lorsque le préjudice est matériel147(*).

    La responsabilité pénale en cas d'atteinte à la présomption d'innocence bénéficie des innovations du nouveau droit de la presse consacré en 2015.

    2. Des sanctions pénales au quantum élevé

    Contrairement au Code de l'information de 1993 qui punissait les délits de presse d'emprisonnement et d'amende, le nouveau droit de la presse se caractérise par la «déprisonnalisation». En clair, les peines privatives de liberté sont exclues des sanctions applicables aux journalistes en cas d'atteinte aux droits de la personnalité, y compris la présomption d'innocence. L'amende, facultative sous l'empire de l'ancienne loi148(*), s'applique nécessairement.

    Mais la dépénalisation des délits de presse s'est accompagnée d'une augmentation du quantum des amendes. A titre illustratif, la diffamation envers les particuliers était punie, conformément à l'article 112 du Code de l'information de 1993 d'un emprisonnement de quinze jours à trois mois et d'une amende de 10.000 à 300.000 FCFA ou de l'une de ces deux peines seulement. Dans les nouvelles lois sur la presse, la quasi-totalité des infractions commises par voie de presse sont punies d'une amende allant d'un million à cinq millions (5. 000 000) de francs CFA. Toutefois, la révélation du secret militaire, l'atteinte à la vie privée et la violation du droit à l'image par voie de presse en ligne sont punies d'amende de dix millions (10. 000 000) à quinze millions (15. 000 000) de francs CFA149(*).

    La grande influence des médias en ligne sur l'opinion et l'ampleur des dommages susceptibles d'y être causés pourraient justifier cette sévérité législative à l'endroit des web-journalistes.

    Le quantum élevé des amendes menace la survie des organes de presse qui risquent de mettre la clé sous le paillasson en cas de condamnation. Cette considération avait amené les journalistes à négocier une réduction des amendes avant l'adoption de la réforme.

    En sus des actions civile et pénale en vue de la réparation et de la répression des atteintes au droit à la présomption d'innocence, la victime peut profiter d'autres recours.

    §2. Les solutions préventives d'atteintes à la présomption d'innocence

    D'autres recours existent et visent à prévenir ou à interrompre les atteintes à la présomption d'innocence. En France, les recours offerts à la victime d'une atteinte à la présomption d'innocence sont contenus à l'article 9-1 du Code civil. Il s'agit de «toutes mesures telles que l'insertion d'une rectification ou l'insertion d'un communiqué» pouvant être décidées par la voie du référé.

    En droit burkinabè, les lois sur la presse prévoient de telles mesures, mais elles limitent leur domaine à la protection de l'intimité de la vie privée. Si l'on considère que l'atteinte à la présomption d'innocence peut être poursuivie sous le couvert de l'atteinte à la vie privée ou cumulativement avec elle, ou que la vie privée est la matrice fondamentale150(*) des autres droits de la personnalité, la victime d'une atteinte à la présomption d'innocence pourra bénéficier des mesures prévues aux articles 103 al 2, 80 al 2 et 123 al 2 des lois respectives sur la presse écrite, la presse en ligne et l'audiovisuel.

    Ces recours tels que séquestres, saisies, et autres, ont un caractère juridictionnel (A). A ces mesures, il faut ajouter les recours non juridictionnel tels que les droits de réponse et de rectification (B).

    A. Les recours juridictionnels

    Certaines mesures préventives ou interruptives d'instance doivent être ordonnées par le juge. La victime de l'atteinte à la présomption d'innocence aura un intérêt à ce que les séquestres et saisies soient prononcés en urgence, par la voie du référé (1). Au plan juridictionnel, il est possible que le juge condamne le journaliste irrespectueux de la présomption d'innocence à l'insertion d'un communiqué rectificatif, à ne pas confondre avec la réponse et la rectification (2).

    1. Les saisies

    En procédure civile, le référé désigne une procédure contradictoire grâce à laquelle une partie peut, dans certains cas, obtenir d'un magistrat unique une décision rapide qui ne se heurte à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend.

    Même en présence d'une contestation sérieuse, le juge des référés peut autoriser des mesures conservatoires ou ordonner des remises en état dans le but de prévenir un dommage imminent ou de faire cesser un trouble manifestement contraire à la loi.

    L'article 103 al 2 de la loi sur la presse écrite et ses équivalents précités posent que la séquestre, la saisie et autres peuvent, s'il y a urgence, être ordonnées en référé.

    L'article 142 prévoit qu'en cas de condamnation pour fait d'atteinte à l'honneur et à la considération, le juge peut ordonner la confiscation des écrits ou imprimés saisis, ou la destruction des exemplaires saisis. Cette mesure, entendue comme une peine complémentaire en cas de condamnation du journaliste, ne semble pas relever du pouvoir du juge des référés.

    Par ailleurs, il faut assimiler à ces mesures, «la confiscation de tout enregistrement ou document obtenu frauduleusement ou du support du montage» prévues dans le cadre de la protection du droit à l'image151(*).

    Outre les saisies et séquestres que peut ordonner le juge des référés, il est possible au juge des référés d'ordonner l'insertion d'un communiqué rectificatif.

    2. L'insertion d'un communiqué rectificatif

    Il existe en droit français un droit d'insertion d'un communiqué rectificatif des publications attentatoires à la présomption d'innocence. Conformément à l'article 9-1 du Code civil français, il peut être ordonné par le juge des référés. Charles DEBBASCH pense que ce droit d'insertion judiciaire «est, sans conteste, la mesure principale qui résulte de la loi de 1993. «[...] dès l'instant où un organe de presse a méconnu le droit au respect de la présomption d'innocence d'un individu en le présentant, avant toute condamnation, comme coupable, il s'expose à la condamnation judiciaire de la publication d'un communiqué rectificatif»152(*), souligne-t-il.

    Ce communiqué rectificatif n'est pas à confondre avec le droit de réponse et le droit de rectification. En effet, alors que la réponse et la rectification sont rédigées par la personne mise en cause, c'est le juge lui-même qui précise les termes du communiqué rectificatif ainsi que les conditions matérielles de diffusion telles que l'emplacement et les caractères typographiques. Le coût de l'insertion du communiqué rectificatif est supporté par la personne physique ou morale, auteur de la méconnaissance de la présomption d'innocence.

    Ce droit d'insertion d'un communiqué rectificatif ne semble pas clairement prévu en droit burkinabè. Mais l'article 103 al 2 et ses équivalents pour la presse en ligne et l'audiovisuel n'ont pas été exhaustifs dans l'énumération des mesures que le juge peut prescrire pour mettre fin aux atteintes aux droits de la personnalité. En indiquant que le juge peut prescrire «toutes mesures» et en tentant une énumération non exhaustive desdites mesures (saisies et autres), le législateur burkinabè ouvre une brèche dans laquelle le juge pourrait s'engouffrer et prescrire l'insertion d'un communiqué rectificatif si une victime d'une violation de la présomption d'innocence lui demandait une telle mesure.

    En plus de ces recours juridictionnels, il existe en doit burkinabè la possibilité pour la victime d'une atteinte à la présomption d'innocence de se prévaloir de ses droits de réponse ou de rectification.

    B. Les droits d'insertion non juridictionnels

    Les victimes d'atteinte à la présomption d'innocence peuvent user d'un droit d'insertion qui leur permet de réagir aux articles de presse bafouant leur honorabilité. Ces droits d'insertion sont propres à tous les délits de presse. Il n'est pas nécessaire que le juge les ordonne, sauf à obliger les directeurs de publication faisant montre de résistance à donner suite aux droits des personnes mises en cause dans les colonnes de leurs journaux. Il s'agit du droit de réponse (1) et du droit de rectification (2).

    1. Le droit de réponse

    Seydou DRAME définit «le droit de réponse comme la possibilité pour une personne mise en cause, sous un faux jour, dans un périodique ou dans l'audiovisuel de répondre dans le même organe d'information à l'auteur de l'article ou des propos la mettant en cause153(*)».

    Ainsi, une personne, dont l'honneur et la considération sont atteints du fait qu'elle a été présentée comme coupable d'une infraction, peut exercer le droit de réponse.

    Le droit de réponse est prévu aux articles 82 à 94 de la loi sur le régime de la presse écrite, aux articles 64 à 73 de la loi sur la presse en ligne et aux articles 87 à 96 de la loi sur la radiodiffusion sonore et télévisuelle.

    L'article 82 de la loi sur la presse écrite fait obligation au directeur de publication de toute publication périodique de publier gratuitement toute réponse qui lui aura été adressée par une personne physique ou morale, ayant fait l'objet d'une information contenant des faits erronés ou des assertions malveillantes de nature à lui causer un préjudice moral, matériel ou financier.

    Une fois transmise, la réponse doit être publiée, au plus tard dans les deux jours ouvrables suivant sa réception pour un quotidien et le numéro suivant la réception de la réponse pour les autres journaux ou périodiques154(*). En presse en ligne, la réponse doit être publiée dans les vingt-quatre (24) heures suivant sa réception155(*). S'agissant de la radiodiffusion sonore, le délai de publication de la réponse est de huit jours à compter de la date de la diffusion à laquelle elle se rapporte. Ce délai est prolongé à 15 jours lorsque le message contesté a été exclusivement mis à la disposition du public à l'étranger ou dans une localité autre que le domicile du demandeur156(*).

    La réponse est publiée dans les mêmes caractères que l'article qui l'a suscité, en presse écrite et en ligne. En radiodiffusion sonore et télévisuelle, la réponse est diffusée dans la même tranche horaire et dans les conditions techniques équivalentes à celles dans lesquelles a été diffusé le message, objet de la réponse157(*).

    Par ailleurs, le refus de la publication de la réponse n'est possible que si elle porte atteinte à la sécurité et aux intérêts de l'Etat, à l'ordre public, aux bonnes moeurs ou si une réponse a déjà été publiée pour le même article ou message. En cas de refus de publication non justifié, le juge peut contraindre l'organe de presse à l'insertion, à la demande du requérant. Ainsi si dans son principe, le droit de réponse s'exerce sans l'intervention du juge, il devient un recours juridictionnel en cas de refus de publier la réponse.

    Outre le droit de réponse, la victime d'une atteinte à la présomption d'innocence peut exercer un droit de rectification s'il remplit certaines conditions.

    2. Le droit de rectification

    Le droit de rectification a été garanti par les articles 74 et suivants de la loi sur le régime juridique de la presse écrite158(*). L'article 74 dispose : « Le directeur de publication de tout journal ou périodique est tenu de publier, gratuitement, toute rectification qui est adressée par un dépositaire de l'autorité publique au sujet des actes de sa fonction qui auront été inexactement rapportés par ladite publication.»

    Peuvent exercer ce droit des personnes agissant en raison de leur fonction et non en tant qu'individu. Il s'agit des autorités publiques, des fonctionnaires et autres agents publics. Le droit de rectification est ouvert lorsque les actes mis en cause relèvent de la fonction de l'autorité publique et non de ses activités privées. Dans ce dernier cas, la personne mise en cause bénéficie du droit de réponse.

    A titre d'exemple, un directeur d'une structure publique accusé de prévarication et que la presse présente déjà comme coupable peut exercer un droit de rectification.

    En presse écrite, les rectifications ne peuvent excéder le double de l'article et doivent être publiées dans les trois jours suivants la réception pour les quotidiens et dans le numéro suivant pour les autres périodiques. En audiovisuel, la rectification ne peut excéder cinq minutes et doit être diffusée dans les cinq jours suivants l'émission, sauf en période électorale où ce délai est réduit à deux jours159(*).

    En cas de refus de publication de la rectification, le demandeur peut saisir l'organe de régulation des médias conformément à l'article 87 de la loi régissant la presse écrite, ainsi que ses équivalents dans les lois sur la presse en ligne et l'audiovisuel.

    Par ailleurs, le législateur national a prévu un droit international de rectification en application des dispositions de la Convention des Nations unies de 1948 sur le droit international de rectification160(*).

    Les solutions contraignantes de conciliation entre le droit à l'information et le droit à la présomption d'innocence tiennent à la réparation civile ou à la répression pénale de l'atteinte au droit à la présomption d'innocence, à l'exercice d'un droit de réponse ou de rectification afin de rétablir les faits, ainsi qu'à des saisies, des séquestres et l'insertion d'un communiqué rectificatif, décidés par la voie du référé, avec pour objectif de faire cesser l'atteinte. Mais ces solutions ont maintenu le déséquilibre équilibre entre le droit à la présomption d'innocence et le droit à l'information.

    Section 2 : Le déséquilibre des solutions

    Les solutions de conciliation existantes ne parviennent pas à établir un équilibre satisfaisant entre le droit à la présomption d'innocence et le droit à l'information.

    Soit elles font naître des obstacles à la répression des atteintes à la présomption d'innocence, soit le juge fait recours à des critères de conciliation qui finissent toujours par privilégier l'un des droits en conflit.

    Il semble judicieux de traiter des obstacles procéduraux à la répression du droit à la présomption d'innocence (§1) et des limites de la conciliation jurisprudentielle des deux droits en présence (§2).

    §1. Les obstacles procéduraux à la répression des atteintes à la présomption d'innocence

    Il existe des obstacles procéduraux à la répression des atteintes à la présomption d'innocence, plaçant ainsi le droit à l'information sur un piédestal supérieur au droit à la présomption d'innocence. Ses obstacles ont trait aux délais de poursuites et de décisions qui se trouvent abrégés (A). On peut aussi mentionner les exigences de formalités préalables à la poursuite de l'atteinte à la présomption d'innocence (B).

    A. Des délais de poursuites et de décisions abrégés

    Les délais de poursuites et de décisions, en matière d'infractions de presse et donc applicables aux atteintes à la présomption d'innocence, sont abrégés. Nous examinerons successivement le délai de prescription des délits de presse, et applicables à la répression des atteintes à la présomption d'innocence (1) et les délais de décisions et de recours (2).

    1. La prescription trimestrielle des délits de presse

    Contrairement à la prescription de droit commun, « l'action publique résultant des délits prévus par la présente loi se prescrit après trois mois révolus, à compter du jour où ils ont été commis ou du jour du dernier acte de poursuite s'il en a été fait » : édictent l'article 144 de la loi sur la presse écrite et ses équivalents pour la presse en ligne et l'audiovisuel161(*).

    Si l'article 140 du Code de l'information de 1993162(*) rendait l'action civile solidaire de l'action publique, dans la rédaction de l'article 144 de la loi sur la presse écrite, le législateur n'a pas été explicite sur la question. Mais on peut retrouver l'affirmation de cette solidarité à l'article 144 de la loi n°059-2015/CNT du 4 septembre 2015 relative à la radiodiffusion sonore et télévisuelle: «L'action civile résultant des délits de diffamation, ne peut, sauf dans le cas de décès de l'auteur du fait incriminé ou d'amnistie, être poursuivie séparément de l'action publique». La tendance jurisprudentielle est à l'alignement du délai de prescription de l'action civile sur celui de l'action publique163(*). La différence entre la prescription de l'action publique et celle de l'action civile tient au caractère d'ordre public de l'exception de prescription relative à l'action publique164(*).

    L'abréviation du délai de prescription comporte un risque de perte de l'action pour les victimes d'atteinte à la présomption d'innocence si elles ne se montrent pas extrêmement rapides dans la formulation de la plainte.

    Les délais de décisions et de recours concernant les délits de presse, y compris l'atteinte à la présomption d'innocence ont été également abrégés.

    2. Les délais de décisions et de recours

    Alors que l'article 129 du Code de l'information de 1993 fixait le délai entre la citation et la comparution à vingt (20) jours, outre un délai de route d'un jour tous les deux cents (200) kilomètres, l'article 136 de la nouvelle loi sur la presse écrite réduit, de façon drastique, ce délai à sept (07) jours165(*). Lorsque l'atteinte à l'honneur ou à la considération a été commise en période électorale, ce délai est de 24 heures, en sus du délai de route.

    Tandis que l'article 132 du Code de l'information de 1993 imposait aux juges, pour statuer, un délai d'un mois à compter de la première audience, ce délai est ramené à sept (07) jours dans les lois sur la presse écrite et en ligne166(*). Curieusement, l'article 154 de la loi sur la radiodiffusion sonore et télévisuelle maintient le délai d'un mois.

    La brièveté des délais est parfois expliquée par l'urgence de réprimer et de mettre fin aux atteintes à la présomption d'innocence. Mais force est de reconnaître qu'elles font planer des risques de nullité sur la procédure.

    En matière de délits de presse, y compris d'atteinte à la présomption d'innocence, le délai pour se pourvoir en cassation est de deux (02) jours, conformément à l'article 141 de la nouvelle loi sur la presse écrite. Il est de trois jours en cas d'atteinte à la présomption d'innocence par voie de presse en ligne, selon l'article 116 de la loi applicable à cette catégorie de médias. Ce délai est de cinq jours pour les infractions commises par le biais des médias audiovisuels, conformément à l'article 156 de la loi sur la radiodiffusion sonore et télévisuelle. L'explication de ce défaut d'uniformité des délais de pourvoi n'est pas aisée. Il revient aux justiciables d'en cerner les nuances. Chose qui aggrave les risques de déperditions des recours en raison de la brièveté des délais d'actions.

    En plus de ces délais abrégés, la victime d'une atteinte à la présomption d'innocence devra se soumettre à des formalités bien précises si elle veut obtenir réparation.

    B. L'exigence de formalités préalables aux poursuites

    La poursuite des atteintes à la présomption d'innocence est conditionnée à des procédures de nature complexe. Il s'agit de la plainte préalable de la victime (1) ainsi que de la qualification des faits (2).

    1. La plainte préalable de la victime

    Lorsque l'atteinte à la présomption d'innocence prend la forme d'une diffamation ou d'une injure, le ministère ne peut pas la poursuivre d'office. La mise en oeuvre de l'action publique nécessite une plainte préalable de la victime. L'exigence d'une plainte préalable de la victime est posée à l'article 132 de la loi sur la presse écrite, à l'article 107 de la loi sur la presse en ligne et à l'article 147 de loi sur la radiodiffusion sonore et télévisuelle.

    Plus précisément, la plainte doit être formulée par le responsable de l'institution judiciaire en cas de délits commis envers les cours et tribunaux, les personnes intéressées, le juré ou le témoin, ou les particuliers dans le cas du délits de presse commis respectivement envers les membres de l'assemblée législative, le juré ou le témoin, ou les particuliers.

    Dans ces hypothèses, le désistement du plaignant ou de la partie poursuivante arrête la poursuite167(*).

    Par contre, la plainte préalable de la victime n'est pas requise dans l'hypothèse d'un délit de presse procédant d'une haine raciale, ethnique ou religieuse. Dans ce cas, le ministère public agit d'office168(*).

    Cette exigence peut faire sérieusement obstacle à la répression des atteintes à la présomption d'innocence en particulier et des délits de presse en général dans un contexte où le recours à la justice est loin d'être un réflexe chez les justiciables.

    La répression est mise à rude épreuve par l'exigence d'une qualification des faits.

    2. La qualification obligatoire des faits par la victime

    Pour utilement saisir la justice d'une atteinte à sa présomption d'innocence, la victime doit procéder à une qualification des faits dans l'acte de citation.

    L'article 135 de la loi n°057-2015 sur la presse écrite impose au plaignant de préciser et de qualifier le fait incriminé, puis d'indiquer le texte de la loi applicable à la poursuite169(*).

    Il est également requis au plaignant, en vertu des dispositions législatives ci-dessus évoquées, d'élire domicile dans la ville où siège la juridiction saisie et d'en informer le prévenu et le ministère public.

    L'obligation de qualification des faits vise à baliser le débat en évitant aux juges de fond des risques d'erreurs consistant à la désignation d'autres textes comme fondements de leur décision. Il a été soutenu que la violation de la présomption d'innocence peut prendre plusieurs qualifications. Les qualifications inexactes des faits, opérées par les parties ou leurs avocats, peuvent provoquer des vices entachant les formalités prévues à l'article 35 de la loi n°57-2015 sur la presse écrite et ses équivalents. Ces vices sont sanctionnés par la nullité de la poursuite.

    Outre les obstacles procéduraux, la conciliation jurisprudentielle des droits à l'information et à l'innocence présente des limites.

    §2. Les limites de la conciliation jurisprudentielle des droits en conflit

    Dans le conflit entre le droit à l'information et le droit à la présomption d'innocence, le juge joue un rôle de conciliateur. Il lui incombe de restaurer l'équilibre entre ces deux droits de la personnalité. « [...] Le plus souvent, il appartient au juge de procéder à la balance des intérêts contraires. Le rôle de la jurisprudence en ce domaine est donc capital, puisque c'est en grande partie d'elle que proviennent les lignes directrices d'une matière dont l'importance pratique et fondamentale ne cesse d'être exacerbée par les exigences croissantes de la société de l'information170(*)», peut-on lire dans le rapport 2010 de la Cour de cassation française, notamment dans l'étude sur «les droits de la personnalité et le droit de savoir du public».

    Mais au vrai, les critères dégagés par la jurisprudence pour concilier les deux droits en conflit font la part belle tantôt au droit à l'information, tantôt au droit à la présomption d'innocence. Au finish, le déséquilibre entre les deux droits va demeurer si l'on estime que le juge sera amené à utiliser ou à prioriser l'un ou l'autre des critères dégagés. Il paraît logique d'examiner les critères d'arbitrage dégagés par la jurisprudence et respectivement favorables au droit à l'information (A) et au droit à la présomption d'innocence (B).

    A. Les critères d'arbitrage favorables au droit à l'information

    Appelée à trancher le contentieux entre le droit à l'information et le droit à la présomption d'innocence, la jurisprudence s'est employée à dégager un certain nombre de critères. Mais à l'analyse, certains d'entre eux semblent établir la primauté du droit à l'information sur le droit à la présomption d'innocence.

    Il s'agit principalement de la légitimité de l'information (1) et de son lien direct avec l'actualité  (2).

    1. La légitimité de l'information

    On peut relever dans le contentieux de la diffamation, l'introduction jurisprudentielle de la notion de «la légitimité du but poursuivi» atténuant le devoir de prudence du journaliste. La légitimité du but poursuivi compose avec l'absence d'animosité personnelle, l'existence d'une enquête sérieuse et la prudence ou la mesure dans l'expression171(*), les conditions du fait justificatif de bonne foi. Il a été déjà dit que l'atteinte à la présomption d'innocence pouvait être qualifiée de délit de diffamation.

    D'autres contentieux des droits de la personnalité en général, et de la présomption d'innocence, la jurisprudence a fait prévaloir «la légitimité de l'information», tolérant ainsi les atteintes à la présomption d'innocence. La Cour de cassation avait déjà eu l'occasion de rappeler combien pouvait être légitime la publication d'images des victimes d'attentats ou d'images se rapportant à une procédure judiciaire d'intérêt public172(*).

    Il s'est également dégagé de l'arrêt de la Cour de cassation en date du 12 juillet 2001 que l'atteinte à la présomption d'innocence, via la publication de l'image d'une personne impliquée dans une affaire judiciaire, sans son consentement, était permise eu égard à la liberté de communication des informations173(*).

    A contrario, l'atteinte à la présomption d'innocence ou à la vie privée est seulement caractérisée lorsqu'«elle n'a pas été autorisée et qu'elle n'a pas été justifiée par un intérêt légitime à l'information tel que le droit à l'information du public corollaire de la liberté d'expression et de communication [...]174(*) »

    Comme on le voit, la violation des droits de la personnalité, y compris le droit à la présomption d'innocence, est admise chaque fois que cette méconnaissance est justifiée par la légitimité de l'information du public.

    La jurisprudence a dégagé un critère supplémentaire pouvant justifier la publication du droit à l'image de la personne poursuivie. Il s'agit, outre sa légitimité, de son lien direct avec l'actualité.

    2. Le critère du «lien direct» de l'image avec l'information

    Ce critère de lien direct concerne la publication d'images prohibées en principe. Cette diffusion sera tolérée si l'image, en plus d'être publiée dans un contexte informationnel légitime est en «lien direct» avec l'information.

    «En admettant ce principe, la Cour de cassation valide le raisonnement retenu depuis longtemps par les juges du fond exigeant un lien de pertinence, ou d'adéquation, entre l'image elle-même et l'information traitée175(*)», a écrit Christophe Bigot.

    En outre, la Cour de cassation française donne une interprétation large de la substance du lien direct qui peut être temporel ou intellectuel. Elle autorise non seulement que l'image publiée soit réalisée concomitamment aux faits qu'elle accompagne, mais aussi qu'elle soit simplement illustrative et fixée antérieurement aux faits évoqués176(*).

    Ainsi, le juge tolère les atteintes à la présomption d'innocence et aux droits de la personnalité par l'information légitime et l'image en lien direct avec l'information. Mais il a tenté de limiter cette influence du droit à l'information par la notion de «la dignité humaine» qui a montré ses insuffisances à produire l'effet escompté.

    B. Le critère de la dignité humaine favorable à la présomption d'innocence

    Le critère de la dignité humaine semble favoriser le droit à la présomption d'innocence au détriment du droit à la présomption d'innocence. On constate alors que le déséquilibre des solutions se poursuit.

    Nous tenterons de voir brièvement comment la notion de dignité humaine a émergé au sein des droits de la personnalité (1) avant d'évoquer les dangers qui peuvent résulter de son caractère imprécis (2).

    1. L'émergence de la notion de dignité humaine

    En France, il a fallu attendre 1994 pour voir le principe de dignité intégré le Code civil par l'une des lois dites "de bioéthique". Selon l'article 16, « la loi assure la primauté de la personne, interdit toute atteinte à la dignité de celle-ci et garantit le respect de l'être humain dès le commencement de sa vie ».

    Au plan jurisprudentiel, et corrélativement au droit de la personnalité, la notion de dignité humaine a émergé à l'occasion de la protection de l'image de la personne, y compris celle poursuivie par la justice, du moins sous le couvert du droit à la présomption d'innocence. Le principe est ainsi posé: « [...] La liberté de communication des informations justifie la publication de l'image d'une personne impliquée dans une affaire judiciaire, sous réserve du respect de la dignité de la personne humaine177(*)».

    En droit burkinabè, le droit à l'image est protégé par les articles 371 relatif à la vie privée et 372 du Code pénal. Le contenu de ce dernier article est identique à celui des articles 104, 81 et 124 des régimes juridiques respectivement applicables à la presse écrite, à la presse en ligne et à la radiodiffusion sonore et télévisuelle. L'atteinte au droit à l'image consiste en la publication du montage réalisé avec les paroles ou l'image d'une personne, sans le consentement de celle-ci s'il n'apparaît pas à l'évidence qu'il s'agit d'un montage ou s'il n'en est pas expressément fait mention.

    Le droit à l'image perd de son caractère absolu et sa protection renvoie au respect de la dignité humaine. Pour Christophe Bigot, le droit à l'image est devenu un droit à la dignité humaine.

    Lorsque que le juge trouve opportun de mettre en avant le droit à la dignité humaine d'une personne poursuivie par la justice afin de protéger sa présomption d'innocence, il fait échec au droit à l'information. Le danger d'une telle application de la dignité humaine comme critère de conciliation est d'autant plus grave pour le droit à l'information que cette notion est subjective, source d'arbitraire et semble bénéficier d'un caractère absolu.

    2. Une notion aux contours imprécis

    Le danger de la confrontation de la notion de dignité humaine avec celle de droit à l'information résulte de l'idée selon laquelle la première ne plie guère face à aucun attribut de la personne. «Il n'y a pas de dérogation possible à la dignité de la personne humaine. Et ce de façon absolue, ce qui fait du concept juridique de dignité un concept tout à fait à part en Droit, et qui doit fermement être maintenu comme tel178(*)», a soutenu le professeur Muriel Fabre Magnan.

    Par ailleurs, l'auteur relève les insuffisances de ce droit dit « indérogeable » selon ces propres termes. La première insuffisance tient à l'impossibilité de fixer le contenu de la notion de dignité humaine. « [...] une importante difficulté, tout à la fois pratique et épistémologique, à avoir juridicisé le principe de dignité de la personne humaine, résulte de ce que cette dignité ne se démontre pas179(*)», a-t-elle affirmé.

    L'avocat Christophe Bigot, pour sa part, exprime ses doutes sur le bien-fondé de ce concept marqué d'« une forte dose de subjectivité» et d'un « certain arbitraire 180(*)». Pour lui, la démarche est loin de donner satisfaction sur le plan conceptuel.

    Une autre insuffisance réside dans le fait que « le principe de dignité de la personne humaine, contrairement à toutes les hypothèses évoquées, n'a pas pour horizon la protection d'une personne particulière, ni même d'une catégorie de personnes, mais de l'humanité en général181(*) ».

    La tentative de restauration de l'équilibre entre le droit à la présomption d'innocence à travers des outils contraignants tels que la réparation civile, la répression pénale, les droits de réponse et de rectification, ainsi que les saisies, les séquestres et l'insertion de communiqué rectificatifs est loin de produire le résultat recherché.

    Aux obstacles processuels à la poursuite des atteintes à la présomption d'innocence tenant à la brièveté des délais d'actions et de décisions ainsi que des formalités particulières s'ajoutent des critères jurisprudentiels insatisfaisants de conciliation des deux droits en conflit. Ces critères vont prévaloir tantôt le droit à l'information, tantôt le droit à la présomption d'innocence. Il faut envisager autrement la restauration de l'équilibre entre les deux droits en conflit.

    CHAPITRE 2 : DES SOLUTIONS DEONTOLOGIQUES PLUS CONCILIANTES

    Face à l'inefficacité des outils de conciliation contraignants entre droit à la présomption d'innocence et droit à l'information, il s'impose la nécessité d'explorer d'autres voies de restauration de l'équilibre entre ces deux attributs de la personnalité.

    Pour ce faire, il est demandé aux journalistes de mettre en avant leur responsabilité sociale afin d'éviter les dégâts susceptibles d'être causés à la société et à ses membres par l'activité d'informer. C'est voir ainsi en la personne du journaliste un acteur social dont l'intégrité doit être hors de soupçon.

    Pour sauver le droit à la présomption d'innocence, il faut s'en remettre à la grandeur d'esprit des journalistes. «Une grande âme convient à une grande condition », a dit Sénèque.

    Dans les lignes suivantes, il semble convenable de montrer en quoi la responsabilité sociale du journaliste peut protéger la présomption d'innocence face à la puissance médiatique (Section 1). Il sera également question de l'impact des instances non juridictionnelles de contrôle des médias dans la sauvegarde de la présomption d'innocence (Section 2).

    Section 1 : La responsabilité sociale du journaliste protectrice de la présomption d'innocence

    «La responsabilité naît en dehors du sujet responsable. Elle vient sur lui, parce qu'il se trouve engagé dans des circonstances qui l'engendrent», a écrit Paul FAUCONNET, cité par François Borel-HÄNNI182(*). Vue sous cet angle, la responsabilité s'impose au sujet. Or, la responsabilité sociale du journaliste, comme nous le verrons, est doublée d'obligation et d'autodétermination.

    Mais de quoi le journaliste est-il responsable ? Du« [...] droit du public à une information de qualité, complète, libre, indépendante et pluraliste», nous dit la Charte d'éthique professionnelle du syndicat national des journalistes, en France. Ce texte précise qu'il s'agit «d'une responsabilité vis-à-vis du citoyen qui prime sur tout autre»183(*).

    Comme on le voit, la responsabilité sociale des journalistes est fondée sur des chartes d'éthique ou de déontologie (§1). Lesquelles consacrent des principes protecteurs de la présomption d'innocence (§2).

    §1. Une responsabilité sociale basée sur des chartes déontologiques

    Dans l'espace médiatique, on parle de charte d'éthique ou de déontologie. L'éthique184(*) se rapproche de la morale. La morale se définit comme un ensemble de normes et de règles qui doivent s'imposer à tous, elle dit le bien et le mal, c'est donc à la fois un référentiel et un impératif. L'éthique regroupe un ensemble de principes, de valeurs et de croyances qui dirigent la conduite des individus185(*). La déontologie est un ensemble des règles et des devoirs qui régissent une profession, la conduite de ceux qui l'exercent, les rapports entre ceux-ci et leurs clients et le public.

    Dans le domaine de la presse les termes «éthique» et «déontologie» sont indistinctement utilisés.

    Qu'est-ce qui justifie l'adoption de chartes déontologiques dans les milieux de la presse? Comment la responsabilité sociale résultant des chartes déontologiques des journalistes peut protéger l'individu, son innocence présumée y compris, de la puissance médiatique? Des tentatives de réponse seront fournies à travers l'analyse du bien-fondé des chartes (A) et l'examen du double sens de la responsabilité sociale des journalistes (B).

    A. Le bien-fondé des chartes déontologiques

    Les chartes déontologiques sont connues dans les professions dites libérales, organisées en ordre et d'accessibilité strictement encadrées. Transposées au journalisme, dépourvu d'ordre et d'admission ouverte, les chartes déontologiques de la presse doivent être justifiées. Leur bien-fondé résulte de l'indépendance des journalistes (1) et de leur volonté de s'auto-soumettre à des corps de règles, a priori, facultatives (2).

    1. L'indépendance des journalistes

    Pour, le professeur Bernard DELFORCE, «la presse est considérée comme devant apporter, à la façon d'un miroir, un reflet juste du réel, ou comme devant se faire l'écho du monde social qui nous entoure186(*)».Cette mission n'est possible que si les journalistes jouissent d'une indépendance à l'égard des pouvoirs politique, économique et judiciaire.Cette indépendance est considérée comme un baromètre de démocratie. L'ancien président américain, Thomas Jefferson, a qualifié les journalistes de «chiens de garde de la démocratie» devant contrôler les « élites gouvernementales à ne pas perdre de vues les préoccupations de l'immense majorité des citoyens187(*)».

    Au regard de leur fonction sociale188(*), les journalistes demandent à être affranchis de toute sujétion politique, judiciaire, voire législative. On peut lire à l'article 2 de la charte déontologique des journalistes burkinabè qu' «il (le journaliste) ne peut être l'objet de menace, de poursuite judiciaire et ou de sanction189(*)». Dans leur déclaration de droits et devoirs, adoptée à Munich en 1971, les journalistes européens réclament, de façon plus pondérée, leur autonomie en conditionnant le respect de leur devoir à l'effectivité de leur indépendance190(*).Dansla déclaration dite de Bordeaux de 1954, les journalistes rejettent « touteingérence gouvernementale ou autre191(*)» dans l'activité médiatique.

    Si les journalistes refusent toute intrusion dans leur activité, ils savent nécessaire l'existence de corps de règles régissant leur activité. Ces règles forment les chartes déontologiques dont ils s'auto-soumettent.

    2. L'auto-soumission à des règles non contraignantes

    Si ce n'est le souci d'assumer leur responsabilité sociale, rien, a priori, n'oblige les journalistes à respecter les règles déontologiques sans force contraignante, dans le traitement de l'information. Si les chartes journalistiques sont structurées en articles, formulent des prescriptions ou octroient des privilèges, et prennent ainsi la forme du droit, elles sont critiquées sur leur manque d'autorité et l'absence de sanction si elles sont violées.

    Malgré ce que Cornu a appelé la «vulnérabilité de la déontologie192(*)», il faut reconnaître à cette dernière une autorité, au moins morale. Les journalistes s'y soumettent par obligation morale. La charte de Munich dispose « La mission d'information comporte nécessairement des limites que les journalistes eux-mêmes s'imposent spontanément.»

    Parfois, la réprobation des confrères réagissant à la violation de la déontologie par l'un des leurs est aussi infamante ou dissuasive que la sanction pénale. Cette réprobation peut se traduire par une sanction. La Déclaration de Bordeaux considère comme fautes professionnelles graves « la calomnie, la diffamation, les accusations sans fondement» qui peuvent être sanctionnées par la juridiction des pairs. Les sanctions couramment appliquées varient entre la suspension, le retrait momentané ou définitif de la carte de presse ou encore l'exclusion de la profession.

    La responsabilité sociale des journalistes, issue des chartes déontologiques, constitue un paravent pour l'innocence présumée.

    B. Le double sens de la responsabilité sociale des journalistes

    La responsabilité sociale du journaliste s'entend de l'obligation pour le journaliste d'informer le public (1) et de préserver les individus des effets pervers de l'information (2).

    1. La satisfaction du droit à l'information du public

    L'obligation du journaliste de satisfaire au droit à l'information du public est affirmée par plusieurs chartes déontologiques. «Respecter la vérité et le droit que le public a de la connaître constitue le premier devoir du journaliste», dit la Déclaration de Bordeaux de 1954. La Charte des journalistes européens adoptée à Munich en 1971 ajoute: « Ce droit du public de connaître les faits et les opinions procède l'ensemble des devoirs et des droits des journalistes. La responsabilité des journalistes vis-à-vis du public prime toute autre responsabilité, en particulier à l'égard de leurs employeurs et des pouvoirs publics193(*)».

    Les journalistes burkinabè, quant à eux, ont proclamé leur foi en « la liberté de presse et au droit à l'information comme fondement de leur épanouissement professionnel 194(*)» et la nécessité de publier des informations justes satisfaisant l'intérêt général.

    Pour Bernard DELFORCE, l'activité d'informer consiste à « donner du sens au monde qui nous entoure 195(*)». Il faut comprendre par cette expression, la possibilité offerte au journaliste d'aller au-delà des faits bruts de l'actualité, en exprimant ses opinions et en procédant à des analyses afin de faciliter la compréhension des évènements au public.

    Mais la responsabilité sociale du journaliste n'autorise pas ce dernier à informer le public au mépris des droits de la personnalité, la présomption d'innocence comprise.

    2. La protection de l'individu face aux effets sociaux de l'information

    La responsabilité sociale du journaliste lui commande de protéger l'individu des effets pervers de l'information. Bernard DELFORCE estime que le journaliste, dans sa mission d'informer, doit tenir compte des effets sociaux de l'information publiée. La qualité de l'information est tributaire du caractère positif ou non des effets sociaux de l'information. S'il en est ainsi, le journaliste devrait se garder de publier une information préjudiciable à la société ou attentatoire à la présomption d'innocence ou à la réputation d'un membre de la société. Les règles déontologiques qu'il s'impose volontairement devraient garantir le respect des droits des individus ; ce que les solutions contraignantes ne réussissent pas.

    Les chartes contiennent des dispositions qui interdisent ou tendent à réparer la violation des droits de la personnalité, lesquelles peuvent profiter au droit à la présomption d'innocence. A titre illustratif, les journalistes burkinabè s'imposent «le respect du droit des personnes à la vie privée et à la dignité humaine, en conformité avec les dispositions nationales et internationales en matière de droit concernant la protection des individus et interdisant la diffamation, la calomnie, l'injure, l'insinuation malveillante196(*)». C'est également le cas des journalistes membres de la Fédération internationale des journalistes dont la déclaration de principe édicte : « Le journaliste s'efforcera au mieux de rectifier toute information publiée ayant causé du tort du fait de son inexactitude 197(*)».

    La protection des droits de la personnalité semble avoir guidé les journalistes à énoncer dans leur charte des principes et pratiques déontologiques qu'ils s'obligent à respecter.

    §2. Des principes et pratiques déontologiques protecteurs de la présomption d'innocence

    Des règles déontologiques issues de la volonté des journalistes leur imposent des principes salvateurs pour la présomption d'innocence. Il s'agit essentiellement des principes d'objectivité et d'honnêteté de l'information (A), et des pratiques journalistiques que sont la vérification et la distanciation des faits (B).

    A. Les principes déontologiques au service de la présomption d'innocence

    Si traditionnellement, l'objectivité de l'information s'est affirmée comme une vertu substantielle de l'activité de presse, elle est de plus en plus remise en cause (1) au profit de l'honnêteté du journaliste (2).

    1. L'objectivité rejetée par les journalistes

    L'objectivité de l'information s'entend de l'absence de parti pris et de préjugé. Pour Henri SCHULTE, «il ne s'agit pas de l'attitude subjective et partisane mais d'un journalisme qui allie l'exactitude et l'équité fondée sur une recherche exhaustive qui éclaire les évènements et les problèmes 198(*)».

    Au nom de l'objectivité, et pour fournir au public une information complète, précise, et la plus exacte possible, le journaliste s'efforce d'examiner tous les aspects d'un événement, de les situer dans leur contexte, de vérifier et de recouper les sources, de présenter de façon équilibrée et impartiale les points de vue des acteurs en présence. Dans la protection de la présomption d'innocence, le journaliste devrait aussi recueillir la version des faits fournie par la personne mise en cause.

    Mais au vrai, ce qu'Henri SCHULTE et Marcel Dufresne appellent «11e commandement du vrai journaliste» ne semble pas avoir les faveurs du monde de la presse. Dans la charte de la Fédération internationale des journalistes et celle des journalistes burkinabè, l'objectivité est évoquée dans des termes voilés. Dans ces chartes, elle semble renvoyer « au respect de la vérité199(*) », à l'inviolabilité « des informations essentielles200(*) » et à l'interdiction de «la partialité et de l'esprit partisan201(*) ». 

    Certains journalistes estiment que l'observation et la relation d'un évènement sont fortement tributaires de «la personnalité, de la culture, des convictions et des préoccupations individuelles202(*)» du reporter. Ils voient en l'information une dose de subjectivité, rejette la notion de l'objectivité et préfèrent parler de leur honnêteté. Mais l'objectivité devrait rester de mise et l'honnêteté des journalistes en constituer le moyen de réalisation. Comment l'honnêteté se manifeste au profit de l'objectivité ?

    2. L'honnêteté revendiquée par les journalistes

    L'honnêteté désigne un comportement moral impliquant la probité et l'intégrité, la droiture, la loyauté, le sens du devoir, le respect des règles de conduite. Le journaliste honnête respecte les règles déontologiques et recherche la vérité, l'équité et l'impartialité. L'honnêteté ne s'oppose pas à l'objectivité et les valeurs qui l'accompagnent se recoupent avec celles de l'objectivité telles que l'interdiction de parti pris ou d'esprit partisan.

    Dans leur charte, les journalistes burkinabè s'imposent «une honnêteté intellectuelle et professionnelle203(*)». L'honnêteté, revendiquée par les journalistes, a également eu les faveurs du législateur et de la jurisprudence. Au Burkina Faso, l'article 9 de la loi n°057-2016/CNT du 4 septembre 2015 relative à la presse écrite fait obligation aux entreprises de presse de garantir « l'honnêteté, l'indépendance et le pluralisme de l'information ». En France, le Conseil constitutionnel a affirmé le caractère impératif204(*) de l'honnêteté, mais aussi du pluralisme de l'information. Mais en matière de déontologie, la quête de l'honnêteté par les journalistes relève d'un impératif moral plutôt que législatif ou judiciaire, les journalistes refusant de se soumettre à d'autres pouvoirs. Mais on peut voir dans l'usage des notions déontologiques par le législateur et le juge une façon pour eux de replacer le journaliste dans leur giron en lui donnant l'impression qu'il lui est appliqué ses propres règles.

    En tout état de cause, l'honnêteté du journaliste s'oppose à la violation des droits des citoyens pour quelque intérêt que ce soit. En vertu de l'honnêteté, le goût de la sensation souvent reproché aux journalistes ne devrait pas conduire à déclarer sans vergogne la culpabilité d'autrui. C'est en ce sens qu'il faut voir en ce principe une soupape pour la présomption d'innocence.

    Les principes d'objectivité et d'honnêteté induisent des pratiques professionnelles à même de garantir le droit à la présomption d'innocence.

    B. Les pratiques professionnelles soucieuses de la présomption d'innocence

    Sur le terrain de la présomption d'innocence, la vérification de l'information évite aux journalistes d'affirmer la culpabilité sans en avoir les preuves (1). Par ailleurs, la distanciation réduit les erreurs dans la livraison de l'information (2).

    1. La vérification des faits respectueuse de la présomption d'innocence

    Le principe de la vérification de l'information constitue le socle même de son authenticité. La vérification porte sur les sources de l'information. Vérifier, c'est rechercher la preuve de l'information. A l'article 2 de leur charte, les journalistes burkinabè s'obligent «de publier des informations justes dont les sources sont vérifiables, dans le souci de l'intérêt général».

    Les juridictions justifient souvent la condamnation des journalistes par leur manque de prudence, laquelle renvoie à l'inobservance d'un devoir déontologique: le défaut de vérification des faits. On considère que le défaut de vérification des faits est une entrave à l'admission de la bonne foi205(*) libératoire du journaliste poursuivi en diffamation206(*). En s'appuyant sur une notion déontologique pour réprimer des atteintes aux droits de la personnalité dont la présomption d'innocence, les cours et tribunaux semblent oeuvrer ainsi à l'acceptabilité de leur autorité par les journalistes.

    Lorsque l'information est vérifiée, les risques de malmener la présomption d'innocence sont réduits. Ainsi, en matière de protection de la présomption d'innocence, la vérification des faits évite aux journalistes d'entériner dans ses productions les accusations de culpabilité non encore fondées portées à l'encontre des personnes mises en cause par la justice.

    Il en est également ainsi du principe de la distanciation des faits.

    2. La distanciation des faits réductrice d'erreurs

    La distanciation constitue le premier pas vers la vérification. Elle implique que le journaliste prend du recul vis-à-vis des faits, refuse de tenir les déclarations des sources pour paroles d'évangile et doute des données les plus plausibles. La déclaration des journalistes européens de 1971 reconnait aux journalistes soumis à cette charte le droit d'émettre dans leurs articles « si cela est nécessaire,  des réserves qui s'imposent 207(*)».

    L'une des techniques de distanciation consistent en l'utilisation de guillemets. Pour Jean Charron, «par les guillemets de distanciation, les journalistes marque une distance par rapport aux acteurs qu'ils citent [...]208(*)». En prenant du recul vis-à-vis des faits, le journaliste limite ses marges d'erreurs puisqu'il prend le temps de vérifier ses informations. En France, dans l'affaire «Alègre», il a été reproché aux journalistes d'avoir violé la présomption d'innocence de nombre d'accusés par manque de recul par rapport aux faits tels que présentés dès les premières heures de l'affaire.

    Le respect des principes et des pratiques déontologiques conduit les médias à la responsabilité. La déontologie n'est pas abandonnée à la seule bonne volonté des médias. Pour garantir son observance salutaire pour la présomption d'innocence et les autres droits de la personnalité, le contrôle s'impose.

    Section 2 : La responsabilité sociale contrôlée au profit de la présomption d'innocence

    Même si l'on présume la grande vertu des journalistes à se soumettre volontiers à la déontologie et à faire montre de responsabilité sociale, l'effectivité de celle-ci suppose un certain contrôle. Mais réfractaires à l'autorité de la justice, les professionnels des médias refusent aux cours et tribunaux le droit d'être juges de la déontologie.

    Cette situation a fait émerger des modes de contrôle diversement appréciés par les journalistes (§1) et des techniques variées de résolution des atteintes aux droits de la personne dont la présomption d'innocence (§2).

    §1. Des modes de contrôle diversement appréciés par la presse

    La régulation et l'autorégulation constituent les modes de contrôlede la responsabilité sociale du journaliste. Présentés comme des alternatives à la justice étatique désapprouvée par les journalistes, ces deux modes de contrôle visent le même but mais diffèrent du point de vue des acteurs. Leur mission est de s'assurer du respect par les journalistes de l'éthique et de la déontologie comprenant à la fois l'équilibre, le pluralisme et la protection des droits des personnes, dont la présomption d'innocence. Si l'autorégulation est effectuée par des journalistes mandatés par leurs pairs, les régulateurs, s'il arrive qu'ils soient de la profession, sont très souvent imposés par les pouvoirs publics. On comprend d'ores et déjà que la régulation soit critiquée par les journalistes (A) et l'autorégulation saluée par eux (B)

    A. La régulation critiquée par les journalistes

    Les journalistes voient en la régulation l'immixtion des pouvoirs publics dans la sphère médiatique. Mais la dépendance traditionnelle des organes de régulation (1) est de plus en plus tempérée (2).

    1. La dépendance des organes de régulation à l'égard des pouvoirs publics

    Les organes de régulation sont des structures organisées par la Constitution, par une loi ou par un décret. Au Burkina Faso, le Conseil supérieur de la communication (CSC) est l'organe de régulation, devenue une institution constitutionnelle, au terme de l'article 160.3 de la loi fondamentale209(*). La constitutionnalisation a été suivie de l'adoption de la loi organique n°015-2013/AN du 14 mai 2013 portant attributions, composition, organisation et fonctionnement du Conseil supérieur de la communication. Le contrôle de la responsabilité sociale des médias est particulièrement effectué par la Commission chargée de la liberté de la presse, de l'éthique, de la déontologie et du suivi des normes publicitaires.

    En Côte d'Ivoire, la régulation est assurée par le Conseil national de la presse pour la régulation de la presse écrite et la Haute Autorité de la Communication audiovisuelle pour la radiodiffusion. Au Mali, le Conseil supérieur de la communication est également une autorité constitutionnelle.

    Au Burkina Faso, le Conseil supérieur de la communication a estimé qu'un reportage télévisuel montrant des prévenus menottés à visage découvert est attentatoire à la présomption d'innocence210(*). Or le droit positif national ne comporte pas de dispositions interdisant cette pratique. Il a aussi considéré qu'un article titré: «Abandon d'un nouveau-né au secteur 22 de Bobo-Dioulasso: l'auteur retrouvée et arrêtée par la justice » méconnaissant le droit à l'image et à la dignité humaine. Mais il a omis de relever l'atteinte à la présomption d'innocence perceptible dans la terminologie employée. Dans ces cas d'espèce, il faut relever la grande sensibilité de l'organe de régulation à la protection du droit à la présomption d'innocence et aux autres droits de la personnalité.

    On ne peut pas nier le rôle de ces instances de régulation dans la préservation de la présomption d'innocence et des autres droits de la personnalité, même si leur réceptivité au sein des journalistes pose problème.

    En effet, ces structures sont nées de la volonté de l'Etat ou de ses organes et leurs moyens de fonctionnement proviennent des ressources publiques. Des journalistes y siègent souvent. Mais ils sont cooptés par les pouvoirs publics qui les nomment. Les hommes de médias s'en méfient parce qu'ils y voient des outils de censure et de musèlement. Conscient de ces critiques, les pouvoirs publics essayent de tempérer la dépendance des organes de régulation des médias à l'égard de l'Etat.

    2. La modération de cette dépendance

    Deux faits marquants de la constitutionnalisation du CSC au Burkina Faso permettent de caractériser une tentative de tempérance de la subordination des organes de régulation vis-à-vis de l'autorité publique: la définition de la nature juridique du CSC d'une part et les modalités de sa composition, d'autre part.

    D'abord, aux termes de l'article 160.3 de la Constitution burkinabè, le CSC est « une autorité administrative indépendante de régulation de la communication au public». Par ces termes, il faut comprendre que cette entité de l'Administration, créée et entretenue par elle, est autonome. La Constitution a tenté ainsi de modérer la dépendance du CSC à l'égard de l'administration. Mais les journalistes ne semblent pas convaincus par l'ambivalence (administrative et indépendante) de cette nature juridique de l'organe de régulation. L'ancien président du CSC, Luc Adolphe TIAO reconnaît: «Comme beaucoup d'autres instances de la sous-région, il [le CSC] a du mal à imposer son autorité «morale» aux médias publics211(*)».

    Ensuite, la loi organique ci-dessus évoquée veut que le collège des conseillers soit composé de neuf (09) membres dont trois issus des organisations professionnelles des médias212(*). Le président, est désigné par ses pairs, avant d'être nommé tout comme eux par décret pris en Conseil des ministres. Sous l'empire de la loi n°028-2005/AN du 14 juin 2005, portant création, composition, attribution, et fonctionnement du Conseil supérieur de la communication213(*), le président du CSC était choisi de façon discrétionnaire et nommé par le Chef de l'Etat. Mais cette tempérance est inachevée si l'on considère que des neufs conseillers, seulement trois sont désignés par les organisations professionnelles, tandis que des six autres, trois sont proposés par le Chef de l'Etat et les trois autres par chacun des présidents de l'Assemblée nationale, du Senat et du Conseil constitutionnel.

    Vu l'échec de cette modération qui a laissé subsister une forte implication des pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire dans la désignation des membres du CSC, les journalistes croient beaucoup plus à l'autorégulation.

    B. L'autorégulation saluée par les journalistes

    L'autorégulation, comme son nom l'indique, est effectuée par les journalistes choisis par leurs confrères. «La presse s'autorégule pour se protéger individuellement et collectivement de la loi, mais aussi du doute pouvant mener à un rejet de la société. La profession du journaliste obéit à des règles universelles qui rassurent et protègent le citoyen, la société. Ces règles balisent la pratique professionnelle, et leur maîtrise doit être obligatoire pour qui veut exercer ce métier »214(*), a écrit Eugénie R. AW.

    L'autorégulation est une oeuvre corporatiste (1), mais elle semble mal assumée par les journalistes (2).

    1. Une oeuvre corporatiste

    L'autorégulation est l'ouvre des conseils de presse ou des médiateurs ou ombudsmen. «La majorité des conseils de presse regroupe non seulement des représentants des journalistes mais aussi des représentants des propriétaires des médias et des représentants de la société civile215(*)», a dit Adeline HULIN.

    Au Burkina Faso, il existe un seul Conseil de presse, l'Observatoire burkinabè des médias (OBM), créé en 2012, à l'initiative de plusieurs organisations professionnelles des médias, sur les cendres de l'Observatoire national de presse (ONAP)216(*).

    Outre les conseils de presse, l'autorégulation est organisée par des médiateurs internes à chaque organe de presse. Ils jouent le rôle d'interface entre les journalistes et le public. Au Burkina Faso, à la date du 06 août 2015, 27 organes de presse avaient entrepris l'expérimentation de la fonction de médiateur, sous l'impulsion de l'OBM.

    Si les journalistes préfèrent aux organes de régulation ces structures corporatistes en ce qu'elles expriment leur indépendance vis-à-vis des pouvoirs politique, économique et judiciaire, ils assument mal cette indépendance.

    2. Un corporatisme mal assumé

    Du point de vue du financement des conseils de presse, on peut déplorer le fait que les journalistes assument mal leur indépendance. Selon le Guide pratique d'autorégulation des médias, «L'idéal serait qu'il [le Conseil de presse] soit financé au moyen de sources différentes ou provenant à parts égales des propriétaires des médias et des journalistes, ou uniquement par les journalistes 217(*)».

    Toutefois, sous nos cieux, les instances d'autorégulation peinent à assurer leur autofinancement. Au Burkina Faso, l'OBM éprouve des difficultés de financement. Il a dû accepter l'aide de l'organe de régulation, le CSC, avant que le ministère de la Communication ne consente, en 2016, une subvention de dix millions en sa faveur, au même titre que les organes de presse privée.

    Dans ces conditions, l'indépendance des conseils de presse est difficile à garantir et le rejet des organes de régulation par les journalistes est peu sincère.

    En tout état de cause, les mécanismes de contrôle de la responsabilité sociale du journaliste, qu'ils soient issus de la régulation ou de l'autorégulation, contribuent à protéger l'innocence présumée et à concilier le droit de la présomption d'innocence avec le droit à l'information.

    §2. Des mécanismes de contrôle protecteurs de la présomption d'innocence

    L'efficacité des organes de régulation et d'autorégulation réside dans les mécanismes extrajudiciaires mis en place pour rappeler à l'ordre ou sanctionner les journalistes qui méprisent les droits des individus. Une personne victime d'une violation de son droit à la présomption d'innocence peut bénéficier non seulement du caractère ouvert de la saisine des organes de régulation et d'autorégulation (A), mais aussi des décisions de protection des personnes issues des techniques de résolution des litiges (B).

    A. Un droit de saisine ouvert

    Le droit de saisine des organes de régulation et d'autorégulation est ouvert. En sus de l'auto-saisine (1), le public peut directement saisir les organes de régulation et d'autorégulation pour atteinte portée à leur droit (2).

    1. L'auto-saisine

    Voulant se soustraire de la justice étatique, les organes d'autorégulation constatant des manquements à la déontologie par des journalistes, s'autosaisissent pour réparer ou faire cesser ces atteintes. « Les tribunaux ont un rôle à jouer en matière de respect des lois, mais dans une démocratie la presse doit rester libre de toute ingérence politique et judiciaire excessive.Il vaut donc mieux que la presse accepte de se réguler elle-même [...]218(*) », peut-on lire dans le Guide de l'autorégulation.

    Au Burkina Faso, les statuts de l'Observatoire burkinabè des médias prévoient la possibilité d'auto-saisine. Tel est également le cas du Conseil supérieur de la Communication qui, au premier semestre de l'année 2014, s'est autosaisi suite à des publications de propos injurieux et diffamatoires, à des propagations de fausses nouvelles219(*), entre autres. Cette auto-saisine est profitable au droit à la présomption d'innocence.

    De plus, la saisine des structures de régulations et d'autorégulations est ouverte aux personnes victimes d'attaques dans la presse.

    2. Les saisines

    Les saisines s'opèrent par voie de plaintes de personnes qui s'estiment lésées par la presse.

    Au titre de l'autorégulation, les plaintes des victimes sont transmises aux conseils de presse et aux médiateurs.

    S'agissant de la régulation, les plaintes sont adressées à l'autorité de régulation. Selon l'article 10 de la loi n°015-2013/AN du 14 mai 2013 portant attribution, composition, organisation et fonctionnement du CSC, «  Le Conseil supérieur de la communication peut être saisi par tout citoyen et toute personne morale publique ou privée pour connaître des questions relatives à son champ de compétences ».

    Le CSC a enregistré, au premier semestre de l'année 2014, des plaintes pour diffamation contre les journaux « JJ », « Le Quotidien » et le « Lefaso.net », à la suite de la publication d'un rapport sur les détournements de fonds par le REN-LAC. Dans ces affaires, le CSC a invité le plaignant à saisir les juridictions compétentes pour obtenir réparation dans la mesure où la diffamation émanait d'un organisme situé hors de sa compétence. Mais il a exhorté le plaignant à exercer son droit de rectification dans les médias ayant relayé le rapport litigieux220(*).

    Dans l'affaire ci-dessus mentionnée, l'organe de régulation a préféré appliquer dans le conflit entre les journaux concernés et le plaignant, la rectification, un outil non juridictionnel de conciliation.

    Toutefois, il arrive que l'organe de régulation, statuant sur une plainte ou sur sa propre initiative, prononcent des décisions plus sévères qui tranchent avec la souplesse des mesures prises par les conseils de presse et les médiateurs.

    B. Le contraste entre les décisions protectrices de l'innocence

    L'autorégulation et la régulation n'ont de raison d'être que si elles aboutissent à des décisions qui protègent les droits de la personne, y compris la présomption d'innocence. Mais à l'analyse, les organes d'autorégulation procèdent par une médiation dont les décisions se caractérisent par leur souplesse (1) ; tandis que les organes de régulation, par-dessus la médiation, prennent des décisions plus extrêmes (2).

    1. La souplesse de la médiation

    Les conseils de presse et les médiateurs de la presse recherchent dans l'oeuvre d'autorégulation le juste milieu entre la liberté d'informer et la protection des droits de la personne. Contrairement aux décisions judiciaires qui visent à prononcer une peine, les décisions des conseils de presse visent à corriger, à faire respecter les normes journalistiques et à défendre les droits des personnes.

    Les décisions prononcées par les conseils de presse sont marquées par une grande souplesse. Elles varient entre des rappels à l'ordre, des mises en demeure, le retrait de la carte de presse. Au Burkina Faso, l'OBM privilégie une approche pédagogique. Il dit donner des conseils aux journalistes portant atteinte aux droits des personnes221(*).

    Les médiateurs, eux procèdent, à la publication d'extraits de lettres, de corrections et, surtout, de la chronique du médiateur, qui rend publiques d'éventuelles omissions ou erreurs - constitue son seul moyen d'action mais reste très efficace. Le médiateur dispose d'une gradation de sanction et peut : transmettre la correspondance et demander à l'auteur de l'article de répondre lui-même. Il peut exiger en sus que le journal publie une correction ou un extrait de la lettre critique dans le courrier des lecteurs. L'extrémité consistera à demander au journaliste fautif de citer l'erreur dans sa propre chronique.

    L'impact de ces sanctions, même souples, parviennent à protéger l'innocence présumée. Les journalistes s'y soumettent par obligation morale. Sans compter que le fait de susciter la réprobation des confrères est suffisamment infamant et dissuasif.

    La force dissuasive des décisions émises par les organes de régulation est plus marquée et contribue ainsi à une meilleure protection des personnes.

    2. La rigueur du monitoring

    Le dispositif de surveillance des médias par les organes de régulation est appelé monitoring. De ce monitoring, il résulte des sanctions allant de la mise en demeure au retrait définitif de la fréquence ou à l'interdiction de la publication, en passant par des mesures de suspension temporaire d'une durée maximale d'un mois ou de trois mois, le tout suivant la gravité du manquement222(*).

    Le texte fondateur de l'organe de régulation au Burkina Faso a même laissé survivre aux sanctions issues du monitoring la répression judiciaire des délits de presse.

    On aura constaté la grande rigueur des organes de régulations vis-à-vis des journalistes qui méprisent la déontologie et subséquemment les droits des personnes dont la présomption d'innocence. Cette rigueur des organes de régulation à l'endroit de la presse semblerait justifier la méfiance de celle-ci à l'égard de ceux-là considérés comme des appendices des pouvoirs publics.

    CONCLUSION PARTIELLE

    Comme on l'a vu, la responsabilité sociale du journaliste, fondée sur des chartes d'éthique et de déontologie constitue un véritable outil de conciliation entre le droit à l'information du public et la présomption d'innocence des individus. Mais on aura relevé que les journalistes ne se sont pas encore affranchis de la compétence des lois et de la justice étatique. Et conscients de la méfiance du monde de la presse envers eux et de la nécessité de créer un climat de confiance avec les journalistes, législateurs et juges s'efforcent de réprimer les délits de presse, en se référant aux règles déontologiques. Les journalistes, eux, pensent assumer pleinement leur indépendance et leur responsabilité à travers l'autorégulation.

    Au Burkina Faso, l'initiative de l'autorégulation date de 2012. Il lui faut encore atteindre une certaine maturité pour espérer remplacer totalement la justice étatique. Pour l'heure, les mécanismes existants de régulation et d'autorégulation permettent aux journalistes d'exercer pleinement leur droit à l'information, tout en préservant les droits des personnes dont la présomption d'innocence. La protection de ces droits sous le prisme de la déontologie s'opère par la simple volonté des journalistes. L'idée de volonté protectrice des droits de la personnalité tranche avec les solutions répressives qui donnent l'impression à la presse d'être dépouillée de son indépendance et mise sous la coupe de l'autorité judiciaire.

    CONCLUSION GENERALE

    Le droit à la présomption d'innocence et le droit à l'information se remettent mutuellement en cause. Si les journalistes sont autorisés à traiter de l'actualité judiciaire, ils doivent faire preuve de délicatesse afin de ne pas déclarer publiquement la culpabilité des personnes poursuivies. A ce devoir de prudence qui peut dégrader la qualité de l'information, s'ajoutent des interdictions de publier des actes et des images en rapport avec le procès pénal.

    Par ailleurs, les journalistes jouissent de prérogatives de nature à porter atteinte à la présomption d'innocence. Ils tentent de se soustraire du secret de l'instruction et revendiquent le droit à protéger leur source. Ils bénéficient d'immunité et de circonstances atténuantes qui minimisent les atteintes qu'ils portent au droit à la présomption d'innocence. L'influence des moyens de publicité sur l'opinion publique aggrave les atteintes commises les par journalistes. Les acteurs judiciaires se sont aussi ouverts à la communication, ébruitant parfois le secret de l'instruction et usant d'un vocabulaire tendancieux.

    La tentative de restauration de l'équilibre entre le droit à la présomption d'innocence à travers des outils contraignants tels que la réparation civile, la répression pénale, les droits de réponse et de rectification, ainsi que les saisies, les séquestres et l'insertion de communiqué rectificatif est loin de produire le résultat recherché.

    Aux obstacles processuels à la poursuite des atteintes à la présomption d'innocence tenant à la brièveté des délais d'actions et de décisions ainsi que des formalités particulières s'ajoutent des critères jurisprudentiels insatisfaisants de conciliation des deux droits en conflit. Ces critères font prévaloir tantôt le droit à l'information, tantôt le droit à la présomption d'innocence. Il faut envisager autrement la restauration de l'équilibre entre les deux droits.

    Vu l'inefficacité des outils contraignants de conciliation, il semble judicieux de restaurer l'équilibre entre le droit à la présomption d'innocence et le droit à l'information, en appelant à la responsabilité sociale du journaliste, fondée sur des chartes d'éthique et de déontologie. Malgré l'existence des règles éthiques et déontologiques, les journalistes restent assujettis à la compétence des lois et de la justice étatiques. En vue de favoriser un climat de confiance avec les journalistes, législateurs et juges s'efforcent de réprimer les délits de presse, en utilisant des règles déontologiques.

    Les journalistes, eux, pensent assumer pleinement leur indépendance et leur responsabilité à travers l'autorégulation.

    L'initiative de l'autorégulation au Burkina Faso date véritablement de 2012. Il lui faut encore atteindre une certaine maturité pour espérer remplacer à la fois les mécanismes de régulation existants et la justice étatique. L'ancien président du Conseil supérieur de la Communication, Beyon Luc Adolphe TIAO cite, le professeur Serge Théophile BALIMA pour qui « l'intervention d'une instance de régulation sur les questions déontologiques était nécessaire du fait que le niveau actuel des professionnels des médias ne leur permet pas d'appréhender tous les contours et les exigences d'éthique et de déontologie de leur métier223(*)»

    Pour l'heure, les mécanismes existants de régulation et d'autorégulation concilient tant bien que mal le droit à l'information et celui à la présomption d'innocence, les structures de régulation et d'autorégulation se saisissant des manquements causés par la presse ou recevant les plaintes des victimes, mettant en demeure les auteurs d'atteinte, suspendant des titres et des programmes, interdisant des publications ou retirant des autorisations d'émission, lorsque ce droit de la personnalité est bafoué par voie de presse.

    La mise en oeuvre responsable du droit à l'information, considéré comme l'oxygène de la démocratie224(*), commande aux journalistes de respecter et de faire respecter, par le biais des juridictions des pairs, l'éthique et la déontologie de leur métier. Au regard du développement exponentiel de la société de l'information, la responsabilité sociale des journalistes sera de plus en plus au centre des débats sur les rapports entre le droit à l'information et les autres droits de la personnalité. Les journalistes devront devenir eux-mêmes des protecteurs de la personne humaine. Leur rôle social s'en trouvera davantage anobli.

    BIBLIOGRAPHIE

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    17. TERRE François et FENOUILLET Dominique, Droit civil : Les personnes, personnalité, incapacité, protection, Paris, Dalloz, 8e éd., 2012, 934 p.

    B. THESES ET MEMOIRES

    1. BROCAL Frédérique, Le droit à l'information en France, Thèse pour l'obtention du grade de docteur en droit, Université Lumière-Lyon, décembre 2014, 418 p.

    2. TIAO Luc Adolphe, La régulation des médias d'Afrique de l'Ouest : cas du Burkina Faso, Thèse de doctorat en Communication, arts et spectacles, Université Bordeaux Montaigne, 2015, 217 p.

    3. BREGUEC Annelise et autres, « Qu'est-ce que l'actualité », Mémoire pour l'obtention du diplôme de Conservateur de bibliothèque, Ecole nationale supérieure des sciences de l'information et des bibliothèques, Université de Lyon, 2005, 91 p.

    4. SANKARA Roger, La présomption d'innocence dans la presse quotidienne burkinabè, Mémoire pour l'obtention du Diplôme de Conseiller en Sciences et Techniques de l'information et de la communication, option Journalisme, Ouagadougou, ISTIC, Mars 2013, 121 p.

    C. ARTICLES

    1. ABDELBASSET Fatih, « Le langage dans la société », disponible sur www.culture-cpge.com, consulté le 13 décembre 2016 à 9 h 15 mn

    2. ARENDT Thomas et autres, « Le droit et l'oubli », 1er juin 2011, consulté sur www.google.fr le 20 octobre 2016 à 15 heures.

    3. AW R. Eugénie, « La déontologie à l'épreuve des médias, de quelques cas en Afrique de l'ouest francophone », www.ethiquepupblique.org, consulté le 27 octobre 2016 à 18 h 30 mn 20 s

    4. BARROS Fabien Girard (de), Les relations entre la presse et la présomption d'innocence-- Compte rendu du colloque organisé par l'Association Versailles Québec et l'ODA de Versailles, le 18 octobre 2013, 4 p.

    5. BEM Anthony, « L'atteinte à la présomption d'innocence : définition, moyens de recours et sanctions », www.cabinetbem.com consulté le 15 juin 2016 à 17 heures 20 ln 20s

    6. BOREL-HÄNNI François, «Quelle responsabilité sociale pour les médias ? », www.google.fr, consulté le 15 octobre 2016 à 17 h 20s

    7. CARO Stéphane (de), « Le droit à l'information face au secret de l'enquête et de l'instruction : une meilleure alchimie est possible », www.google.fr , consulté le 15 octobre 2016 à 17 h 30m 25 s

    8. CHARRIERE-BOURNAZEL Christian :

    ü « L'oubli, l'histoire et le droit », 24 septembre 2005, consulté sur www.christian-charriere.com , le 30 octobre 2016 à 15 heures 40 mn 05 s

    ü « Présomption d'innocence et liberté d'expression », in Combat d'un bâtonnat, août 2006, consulté sur www.christian-charrière.com, le 25 octobre 2016 à 15 heures 30 mn 20 s

    9. CHARRON Jean, « Journalisme, politique et discours rapporté : Evolution des modalités de la citation dans la presse écrite au Québec : 1945- 1995», p. 161 consulté sur www.erudit.org, le 25 novembre 2016 à 15 heures 25 mn 30s

    10. CHEVALIER Jean « Constitution et communication », Dalloz 1991, Chron, p. 252

    11. COCHE Arnaud, « Rendre effective la présomption d'innocence : l'obsession de l'avocat, le devoir du juge », disponible sur www.avocats-poitiers.com, consulté le 13 décembre 2016 à 15 h 20 mn 30s

    12. DELFORCE Bernard, « Responsabilité sociale du journaliste : donner du sens », in Les Cahiers du journalisme n° 2, consulté sur www.google.fr, le 19 septembre 2016 à 10 heures 15 mn.

    13. HUYETTE Michel, « Condamnation d'un journaliste pour violation du secret de l'instruction : L'approbation nuancée de la CEDH, disponible sur www. www.huyette.net, consulté le 12 décembre 2016 à 22 h 12 mn 15s

    14. HULIN Adeline, « L'autorégulation des médias : glaive ou bouclier pour la liberté? », consulté sur www.google.fr, le 15 novembre 2016

    15. ISAAC Henri et autres « Ethique ou déontologie : quelles différences pour quelles conséquences managériales ? L'analyse comparative de 30 codes d'éthique et de déontologie », www.google.fr, consulté le 20 octobre 2016 à 18 h 24 mn 10s

    16. LECLERC Henri, « Feu le secret de l'instruction », disponible sur www.cabinet-leclerc.fr , consulté le 15 octobre 2016 à 9 heures 25 mn 10 s.

    17. MAGNAN Fabre Muriel, « Dignité en droit : un axiome », Revue interdisciplinaire d'études juridiques, disponible sur www.cairn.info, consulté le 20 novembre 2016 à 12 h 16 mn 20 s

    18. MARTEL Marie-Eve, «  Un danger de l'instantanéité de l'information », disponible sur www.marieeve-martel.net , consulté le 10 novembre 2016 à 17 heures 15 mn à 20 h 30 mn 10s

    19. PECHARD Antonin, « Police, justice, médiocre », disponible sur www.lepetijuriste.fr, consulté le 25 novembre 2016 à 10 heures 25 mn

    20. PIGEAT Henri et HUTEAU Jean,  « Ethique et qualité de l'information », Académies des sciences morales et politiques, Juin 2003, consulté sur www.asmp.fr le 26 octobre 2016 à 15 heures 3à mn 30s

    21. SAMAIN Vanessa « Médias et justice : un couple improbable », Institut Vandervelde, disponible sur www.ierv.be, consulté le 10 octobre 2016 à 9h 15 mn

    22. TAHITA Jean-Claude, « Diffamation et liberté de presse au Burkina Faso », RBD n°34-2e semestre 1998, 301 p.

    23. VANSILIETTE Fanny, « L'inculpation : de quoi s'agit-il, quels droits confère-t-elle ? », disponible sur www.justice-en-ligne.be, consulté le 13 décembre à 15 heures 15 mn 50s

    24. VOLFF Jean, « Un exemple de manipulation de l'opinion », www.constructif.fr, consulté le 08 novembre 2016 à 7 h 40 mn 10s

    D. RAPPORTS

    1. Conseil supérieur de la Communication (Burkina Faso), Rapport du premier semestre 2014, 10 p.

    2. Conseil supérieur de la Communication (Burkina Faso), Rapport public, 2011, 96 p.

    3. GABET, Ass. Plen., 13 mars 2009, 13 mars 2009, consulté sur www.courdecasssation.fr, le 15 juin 2000 à 16 heures 30 mn 20 s,

    4. Mission de recherche Droit et justice, Le(s) temps judiciaire(s), consulté sur www.gip-recherche-justice.fr , consulté le 11 novembre 2016 à 15 heures 19 mn 30s, 9 p.

    5. BUFFEL François-Noël, Rapport n° 636 sur la proposition de loi portant réforme de la prescription en matière pénale, 25 mai 2016, consulté sur www.senat.fr, le 30 octobre 2016 à 14 heures 05 mn 29s, 66 p.

    6. LARCHE Jacques, Rapport d'information sur le respect de la présomption d'innocence et le secret de l'enquête et de la présomption d'innocence, Sénat ( www.senat.fr, consulté le 02 décembre 2016 à 20 heures 05 mn, 20s), Paris, 1994, 227 p.

    7. Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), Guide de l'autorégulation. Les questions et les réponses, disponible sur www.osce.org, 112 p.

    E. NOTES ET OBSERVATIONS DE JURISPRUDENCE

    1. BIGOT Christophe, note sous Cass., 1re Civ, 12 juillet 2001, Dalloz, Jur, 2002, 1760 p.

    2. BIGOT Christophe et DUPEUX Jean-Yves, obs sous Trib. Rouen, 20 septembre 1993, JCP 1994-II, n°22 306

    3. DEKEUWER Alain, note sous Cons const. du 19-20 janv. 1981, n° 81-127 DC, D. 1982, p. 441

    4. LINDON Raymond, note sous CA, Paris, 14 octobre 1981, Recueil Dalloz Sirey, Jur, 1983, 648 p.

    5. SAINT-PAU Jean Christophe, note sous Cass., 1ere Civ, 16 juillet 1998, Le Dalloz, 1er cahier, Jur, 1999, 732 p.

    F. LEGISLATION
    1. La législation nationale

    1. Constitution du Burkina Faso du 02 juin 1991

    2. Loi n°057-2015 /CNT du 4 septembre 2015 portant régime juridique de la presse écrite au Burkina Faso (JO spécial n°11 du 22 décembre 2015)

    3. Loi n° 058-2015/CNT du 4 septembre 2015 portant régime juridique de la presse en ligne au Burkina Faso (JO spécial n°11 du 22 décembre 2015)

    4. Loi n°059-2015/CNT du 4 septembre portant régime juridique de la radiodiffusion sonore et télévisuelle au Burkina Faso (JO spécial n°11 du 22 décembre 2015)

    5. Loi n° 051- 2015/CNT du 30 août 2015 portant accès à l'information publique et aux documents administratifs, disponible sur www.freedominfo.org

    6. Loi n°033-2012/AN du 11 juin 2012 portant modification de la Constitution du Burkina Faso (JO spécial n°7 du 25 juillet 2012)

    7. Code civil applicable au Burkina Faso, disponible sur www.legiburkina.bf

    8. Loi n°010-2004/AN du 20 avril 2004 portant protection des données à caractère personnel, (JO n°26 du 24 juin 2004, p.830).

    9. Loi 22-99 AN du 18 mai 1999 portant Code de procédure civile (JO spécial n°3 du 15 juillet 1999, p. 2)

    10. Loi 10-93 ADP du 17 mai 1993 portant organisation judiciaire au Burkina (JO n° 05 1994)

    11. Zatu an VII du 16 novembre 1989 portant institution et application d'un Code des personnes et de la famille du Burkina Faso, disponible sur www.legiburkina.bf

    12. Ordonnance 68-7 du 21 février 1968 portant Code de procédure pénale (JO RHV du 13 mai 1968, p. 229)

    2. La législation étrangère

    1. Décret n° 2005-790 du 12 juillet 2005 relatif aux règles de déontologie de la profession d'avocat

    2. Code civil français, disponible sur www.legifrance.gouv.fr

    3. Loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse en France disponible sur www.legifrance.gouv.fr

    4. Loi n°84-610 du 16 juillet 1984 relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives, disponible sur www.legifrance.gouv.fr

    5. Code de procédure pénale français, disponible sur www.legifrance.gouv.fr

    6. Code pénal français (1992), disponible sur www.legifrance.gouv.fr

    7. Circulaire du 27 novembre 1959 (4), modifiant le Code de procédure pénale, Jo du 5 décembre 1959, et disponible sur www.legifrance.gouv.fr

    3. Les instruments juridiques internationaux

    1. Statut de Rome de la Cour pénale internationale, adopté le 17 juillet 1998 et entré en vigueur le 1er juillet 2002, disponible sur www.un.org

    2. Charte africaine des droits de l'homme et des peuples, adoptée le 18 juin 1981 et entrée en vigueur le 21 octobre 1986, disponible sur www.apt.ch

    3. Pacte international relatif aux droits civils et politiques adopté le 16 décembre 1966 et entré en vigueur le 23 mars 1976, disponible sur www.ohchr.org

    4. Déclaration Universelle des Droits de l'Homme adoptée le 10 décembre 1948, disponible sur www.un.org

    5. Déclaration des droits de l'homme et du citoyen français du 4 août 1789, disponible sur www.conseil-constitutionnel.fr

    G. CHARTES DEONTOLOGIQUES DES JOURNALISTES

    1. Charte déontologique des journalistes du Burkina Faso, adoptée en 1990, disponible sur www.faso-tic.net

    2. Déclaration des devoirs et droits des journalistes européens, adoptée à Munich en 1971, disponible sur www.snj.fr

    3. Déclaration de principe de la Fédération internationale des journalistes sur la conduite des journalistes, dite « Déclaration de Bordeaux » (1954), disponible sur www.ifj.org

    TABLE DES MATIERES

    AVERTISSEMENT

    REMERCIEMENTS

    TABLE DES SIGLES ET DES ABREVIATIONS 1

    SOMMAIRE 2

    INTRODUCTION 3

    PREMIERE PARTIE : DROIT A LA PRESOMPTION D'INNOCENCE ET DROIT A L'INFORMATION : DEUX DROITS DE LA PERSONNALITE EN CONFLIT 7

    CHAPITRE 1 : LA REMISE EN CAUSE DU DROIT A L'INFORMATION PAR LE DROIT A LA PRESOMPTION D'INNOCENCE 10

    Section 1 : La délicatesse d'informer sur les affaires pénales 10

    §1. L'interdiction d'annoncer la culpabilité des personnes poursuivies 11

    A. L'interdiction d'annoncer la culpabilité de façon prématurée 12

    1. L'exigence d'une condamnation définitive 12

    2. L'interdiction maintenue en l'absence d'actes de procédure 13

    B. L'interdiction d'annoncer la culpabilité de façon tardive 14

    1. L'oubli protecteur de l'innocence 15

    2. La tentative non aboutie de la levée de l'oubli 17

    §2. L'incidence de l'interdiction d'annoncer la culpabilité des personnes poursuivies sur le droit à l'information 19

    A. L'incidence sur le temps de l'information 20

    1. L'incertitude sur le temps d'attente idéale 20

    2. Le caractère actuel de l'information hypothéqué 21

    B. L'incidence sur la qualité de l'information 22

    1. Des précautions indispensables à la qualité de l'information 22

    2. La fiabilité de l'information menacée 23

    Section 2 : Les interdictions de publier imposées à la presse 25

    §1.Les interdictions de publier certains actes et écrits liés à la procédure pénale 25

    A. L'interdiction de publier des actes du procès pénal 25

    1. L'interdiction de publier des actes d'accusation 25

    2. L'interdiction de publier des actes d'instruction 26

    B. L'interdiction de publier des comptes rendus liés à l'audience 28

    1. L'interdiction stricte de publier certains comptes rendus de débats de juridiction 28

    2. L'interdiction de publier les comptes rendus de délibérations 29

    §2. L'interdiction de publier des images et sondages 29

    A. L'interdiction de diffuser des images de la personne entravée 30

    1. La pluralité des éléments constitutifs du délit 30

    2. La portée similaire des textes burkinabè sur le délit de diffusion 31

    B. L'interdiction de publier des sondages sur la culpabilité 32

    1. Une prohibition formelle en droit français 32

    2. L'éventualité de cette règle en droit burkinabè 33

    CHAPITRE 2 : LA REMISE EN CAUSE DU DROIT A LA PRESOMPTION D'INNOCENCE PAR LE DROIT A L'INFORMATION 34

    Section 1 : L'activité journalistique attentatoire à la présomption d'innocence 35

    §1. Les droits du journaliste attentatoires à la présomption d'innocence 36

    A. Les prérogatives journalistiques attentatoires à la présomption d'innocence 36

    1. La soustraction du journaliste au secret de l'instruction 36

    2. Le droit à la protection des sources journalistiques 37

    B. Des faveurs juridiques profitables à la presse 39

    1. Les immunités préjudiciables la présomption d'innocence 39

    2. Les circonstances atténuantes favorables aux journalistes 40

    §2. La portée des atteintes en rapport avec les moyens de publicité 41

    A. Des moyens traditionnels de publicité déjà influents 41

    1. Les mass médias traditionnels 41

    2. L'influence des mass médias attentatoire à l'innocence 42

    B. De nouveaux moyens de publicité à la portée universelle 42

    1. L'instantanéité attentatoire à la présomption d'innocence 43

    2. Les communautés attentatoires à la présomption d'innocence 44

    Section 2 : L'activité judiciaire attentatoire à la présomption d'innocence 45

    §1. Les fenêtres d'informations attentatoires à la présomption d'innocence 45

    A. Une pratique bien encadrée 45

    1. L'affirmation du droit de communication du parquet 45

    2. Les garanties du droit de communication 46

    B. Les dérives constatées dans la pratique 47

    1. La divulgation d'informations sur l'instruction 47

    2. Le droit de réplique des parties au procès 48

    §2. Le langage juridique attentatoire à la présomption d'innocence 48

    A. Le poids du vocabulaire législatif sur la présomption d'innocence 49

    1. La notion d'inculpation suggestive de culpabilité 49

    2. La neutralité de la notion de mise en examen 50

    B. L'échec de la révision du vocabulaire juridique tendancieux 51

    1. La permanence de la désignation tendancieuse des personnes poursuivies en droit français 51

    2. La réforme non amorcée en droit burkinabè 52

    CONCLUSION PARTIELLE 54

    DEUXIEME PARTIE: DROIT A LA PRESOMPTION D'INNOCENCE ET DROIT A L'INFORMATION : LA NECESSAIRE CONCILIATION 55

    CHAPITRE 1 : LE DIFFICILE EQUILIBRE DES SOLUTIONS CONCILIANT LES DROITS A L'INFORMATION ET A LA PRESOMPTION D'INNOCENCE 57

    Section 1 : Des solutions contraignantes 57

    §1. Les solutions répressives et réparatrices des atteintes à la présomption d'innocence 57

    A. Les règles communes aux actions civile et pénale 58

    1. Une responsabilité en cascade 59

    2. Une responsabilité présumée 60

    B. Les règles propres aux actions civile et pénale 61

    1. Un régime de responsabilité civile spécifique 61

    2. Des sanctions pénales au quantum élevé 62

    §2. Les solutions préventives d'atteintes à la présomption d'innocence 63

    A. Les recours juridictionnels 64

    1. Les saisies 64

    2. L'insertion d'un communiqué rectificatif 65

    B. Les droits d'insertion non juridictionnels 66

    1. Le droit de réponse 66

    2. Le droit de rectification 67

    Section 2 : Le déséquilibre des solutions 69

    §1. Les obstacles procéduraux à la répression des atteintes à la présomption d'innocence 69

    A. Des délais de poursuites et de décisions abrégés 69

    1. La prescription trimestrielle des délits de presse 69

    2. Les délais de décisions et de recours 70

    B. L'exigence de formalités préalables aux poursuites 71

    1. La plainte préalable de la victime 71

    2. La qualification obligatoire des faits par la victime 72

    §2. Les limites de la conciliation jurisprudentielle des droits en conflit 73

    A. Les critères d'arbitrage favorables au droit à l'information 73

    1. La légitimité de l'information 74

    2. Le critère du « lien direct » de l'image avec l'information 75

    B. Le critère de la dignité humaine favorable à la présomption d'innocence 75

    1. L'émergence de la notion de dignité humaine 76

    2. Une notion aux contours imprécis 77

    CHAPITRE 2 : DES SOLUTIONS DEONTOLOGIQUES PLUS CONCILIANTES 79

    Section 1 : La responsabilité sociale du journaliste protectrice de la présomption d'innocence 79

    §1. Une responsabilité sociale basée sur des chartes déontologiques 80

    A. Le bien-fondé des chartes déontologiques 80

    1. L'indépendance des journalistes 81

    2. L'auto-soumission à des règles non contraignantes 82

    B. Le double sens de la responsabilité sociale des journalistes 82

    1. La satisfaction du droit à l'information du public 83

    2. La protection de l'individu face aux effets sociaux de l'information 83

    §2. Des principes et pratiques déontologiques protecteurs de la présomption d'innocence 84

    A. Les principes déontologiques au service de la présomption d'innocence 84

    1. L'objectivité rejetée par les journalistes 85

    2. L'honnêteté revendiquée par les journalistes 86

    B. Les pratiques professionnelles soucieuses de la présomption d'innocence 87

    1. La vérification des faits respectueuse de la présomption d'innocence 87

    2. La distanciation des faits réductrice d'erreurs 88

    Section 2 : La responsabilité sociale contrôlée au profit de la présomption d'innocence 89

    §1. Des modes de contrôle diversement appréciés par la presse 89

    A. La régulation critiquée par les journalistes 89

    1. La dépendance des organes de régulation à l'égard des pouvoirs publics 89

    2. La modération de cette dépendance 91

    B. L'autorégulation saluée par les journalistes 92

    1. Une oeuvre corporatiste 92

    2. Un corporatisme mal assumé 93

    §2.Des mécanismes de contrôle protecteurs de la présomption d'innocence 93

    A. Un droit de saisine ouvert 94

    1. L'auto-saisine 94

    2. Les saisines 94

    B. Le contraste entre les décisions protectrices de l'innocence 95

    1. La souplesse de la médiation 95

    2. La rigueur du monitoring 96

    CONCLUSION PARTIELLE 98

    CONCLUSION GENERALE 99

    BIBLIOGRAPHIE 101

    A. OUVRAGES 101

    B. THESES ET MEMOIRES 102

    C. ARTICLES 102

    D. RAPPORTS 104

    E. NOTES ET OBSERVATIONS DE JURISPRUDENCE 105

    F. LEGISLATION 105

    1. La législation nationale 105

    2. La législation étrangère 106

    3. Les instruments juridiques internationaux 107

    G. CHARTES DEONTOLOGIQUES DES JOURNALISTES 107

    TABLE DES MATIERES 108

    * 1 Art. 1er du Code des personnes et de la famille de 1989 « Tout burkinabè jouit des droits civils. Les droits civils désignent l'ensemble des droits dont une personne jouit dans les relations civiles ».

    * 2C. DEBBASCH (Sous la direction de), Droit des médias, Paris, Dalloz, 2002, p. 1029

    * 3 Cass. Civ., 13 novembre 2003, disponible sur www.lexinter.net, consulté le 13 décembre 2016 à 9 h 30 mn 20

    * 4 J. RIVERO, Les libertés publiques, Paris, PUF, collection Thémis, 1977, p.179

    * 5 Loi n° 051- 2015/CNT portant accès à l'information publique et aux documents administratifs

    * 6 Art. 18-2 de la loi française du 16 juillet 1984, sur l'organisation des activités sportives, modifiée par la loi du 13 juillet 1992.

    * 7 F. Balle et autres, Lexique d'information communication, Paris, Dalloz 2006, P.151

    * 8 Sidwaya, organe de presse écrite créé en 1984 et la Radiodiffusion-télévision du Burkina Faso (RTB) créée en 1963 

    * 9 Art. 39 de la loi 057-2015/CNT du 4 septembre 2015 portant régime juridique de la presse écrite au Burkina Faso

    * 10 Il s'agit respectivement de la loi n°057-2015 /CNT portant régime juridique de la presse écrite au Burkina Faso, de la loi n° 058-2015/CNT du 4 septembre 2015 portant régime juridique de la presse en ligne au Burkina Faso et de la loi n°059-2015/CNT du 4 septembre portant régime juridique de la radiodiffusion sonore et télévisuelle au Burkina Faso

    * 11Art. 11-1 de la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948, art. 14§2 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques de 1966 et art. 7 de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples de 1981

    * 12 Le droit à la présomption d'innocence a été affirmé par des textes fondamentaux tels que la Constitution du Burkina Faso, la Déclaration Universelle des droits de l'homme, le Pacte international sur les droits civils et politiques, la Charte africaine des droits de l'homme.

    * 13 A. BATTEUR, Droit des personnes, de la famille et des incapacités, Paris, LGDJ, 3e éd., 2007, p. 62

    * 14 « [...] Toute personne suspectée ou poursuivie est présumée innocente tant que sa culpabilité n'a pas été établie. Les atteintes à sa présomption d'innocence sont prévenues, réparées et réprimées dans les conditions prévues par la loi »

    * 15 C. CHARRIERE-BOURNAZEL, « Présomption d'innocence et liberté d'expression », in Combat d'un bâtonnat, août 2006,

    * 16A. DEKEUWER, Note sous Décis. Du 19-20 janv. 1981, n° 81-127 DC, D. 1982, p. 441

    * 17La rédaction de cette règle s'inspire de l'article 9 alinéa 1er du Code civil français ainsi libellé : « Chacun a droit au respect de sa vie privée ».

    * 18Il s'agit de la loi française sur la liberté de la presse.

    * 19Cass. Civ., 2e, 8 juillet 2004, Bull. n° 387, disponible sur sur www.cassation.fr, consulté le 25 mai 2016 à 16h 30 mn

    * 20Ibid.

    * 21Article XIX, « Liberté d'information », disponible sur www.article19.org, consulté le 20 juin 2016 à 12 heures 15 mn 15s

    * 22 Ibid.

    * 23 Ibid.

    * 24 V. SAMAIN, « Médias et justice : un couple improbable », Institut Emile Vandervelde, 2011, disponible sur www.iev.be, consulté le 10 octobre 2016 à 9 heures 15 mn.

    * 25A. PECHARD, « Police, justice, médias », consulté sur www.lepetitjuriste.fr, le 25 novembre 2016 à 10 heures 25 mn 10s

    * 26 Voy. « L'affaire Gregory », consulté sur www.police_scientifique.com , le 10 août 2016 à 17 h 33 mn 10 s

    * 27 Tel est le titre de l'ouvrage du journaliste Laurence LACOUR, reporter en 1984, de l'affaire Gregory

    * 28 La version de l'article 9-1 du Code civil introduit en 1993 disposait : « Chacun a droit au respect de la présomption d'innocence. Lorsqu'une personne placée en garde à vue, mise en examen ou faisant l'objet d'une citation à comparaître en justice, d'un réquisitoire du procureur de la république ou d'une atteinte avec constitution de partie civile est, avant toute condamnation, présentée publiquement comme étant coupable de faits faisant l'objet de l'enquête ou de l'instruction judiciaire, le juge peut, même en référé, ordonner l'insertion dans la publication concernée d'un communiqué aux fins de faire cesser l'atteinte à la présomption d'innocence, sans préjudice d'une action en réparation des dommages subis et des autres mesures qui peuvent être prescrites en application du nouveau Code de procédure civile et ce, aux frais de la personne physique ou morale, responsable de l'atteinte à la présomption d'innocence ».

    * 29 J. PRADEL, Procédure pénale, Paris, Editions CUJAS, 17e édition, 2013, p. 326

    * 30 A. SPEILMANN, note sous C.E.D.H, 10 février 1995, Allenet de Ribemont, RTDH 1995. La France a été condamnée dans l'affaire soumise à l'examen de la Cour. Celle-ci a retenu que certains des plus hauts responsables de la police française désignèrent M. Allenet de Ribemont, sans nuance ni réserve, comme l'un des instigateurs, et donc de complice d'un assassinat.

    * 31Ibid.

    * 32 Dans cette affaire, des journalistes français Eric LAURENT et Catherine GRACIET sont poursuivis pour « chantage et extorsion » sur la personne du roi Mohammed VI.

    * 33 TGI, 17e Chambre civile, Paris, 17 février 2016, disponible sur www.yabiladi.com, consulté le 16 octobre 2016 à 17 heures 20 mn 10 s

    * 34 Cass. Civ., 2e, 8 juillet 2004, Bull. n° 387, disponible sur www.cassation.fr. , consulté l le 25 novembre 2016 à 19h 25 mn 15 s

    * 35 C. CHARRIERE-BOURNAZEL, « L'oubli, l'histoire et le droit », 24 sept 2005, disponible sur www.christian-charriere.com , consulté le 30 octobre 2016 à 15 heures 40 mn 05 s

    * 36 TGI, Paris, 20 avril 1983, JCP, 1985, II, 20434 : « Toute personne qui s'est trouvée associée à un évènement public, même si elle en a été le protagoniste, est fondée à revendiquer un droit à l'oubli et à s'opposer au rappel d'un épisode de son existence. », cité par ARENDT Thomas et autres

    * 37 T. ARENDT et autres, « Le droit et l'oubli », 1er juin 2011, disponible sur www.google.fr, consulté le 20 octobre 2016 à 15 heures.

    * 38 La réhabilitation est régie en droit burkinabè par les articles 738 à 755 CPP.

    * 39 Art. 725 à 733 du Code de procédure pénale burkinabè.

    * 40 L'article 616 du Code de procédure pénale burkinabè dispose : «  La révision peut être demandée, quelle que soit la juridiction qui a statué, au bénéfice de toute personne condamnée pour crime ou délit : 1° lorsque, après une condamnation pour homicide, des pièces sont représentées propres à faire naître de suffisants indices sur l'existence de la prétendue victime de l'homicide ; 2° lorsque, après une condamnation pour crime ou délit, un nouvel arrêt ou jugement a condamné pour le même fait un autre accusé ou prévenu et que, les deux condamnations ne pouvant se concilier, leur contradiction est la preuve de l'innocence de l'un ou l'autre condamné; 3° lorsqu'un des témoins entendus a été postérieurement à la condamnation, poursuivi et condamné pour faux témoignage contre l'accusé ou le prévenu ; le témoin ainsi condamné ne peut pas être entendu dans les nouveaux débats ; 4° lorsque, après une condamnation, un fait vient à se produire ou à se révéler, ou lorsque des pièces inconnues lors des débats sont représentées, de nature à établir l'innocence du condamné ».

    * 41 L'article 177 du Code de procédure pénale donne les cas dans le juge d'instruction prononce un non-lieu : les faits ne constituent ni crime, ni délit, ni contravention ; l'auteur est resté inconnu ; les charges ne sont pas suffisantes contre l'inculpé.

    * 42 Cette formulation est issue de l'article 118 de la loi 057-2015/CNT portant régime juridique de la presse écrite au Burkina Faso. Les lois 058- 2015/CNT et 059-2015/CNT portant respectivement régime juridique de la presse en ligne et de la radiodiffusion sonore et télévisuelle au Burkina Faso comporte en leur article 94 et 138 des formulations identiques.

    * 43 L'article 115 du Code de l'information de 1993 abrogé par les nouvelles lois de 2015 excluait la possibilité pour le journaliste de désengager sa responsabilité en apportant la preuve du fait diffamatoire lorsque celui-ci remontait à plus de dix ans.

    * 44 Articles 7, 8 et 9 du Code de procédure pénale burkinabè fixe la prescription à 10 ans, 3 ans et 1 an selon que l'infraction est un crime, un délit ou une contravention.

    * 45 Les articles 717 et suivants du Code de procédure pénale burkinabè fixe le délai de prescription des peines à 20 ans pour les crimes, 5 ans pour les délits et deux ans pour les contraventions.

    * 46 Adopté le 17 juillet 1998, le texte est entré en vigueur le 1er juillet 2002.

    * 47 Selon la loi n° 64- 1326 du 26 décembre 1964 tendant à constater leur imprescriptibilité, « les crimes contre l'humanité, tels qu'ils sont définis par la résolution des Nations Unies du 13 février 1946, prenant acte de la définition des crimes contre l'humanité, telle qu'elle figure dans la charte du Tribunal international du 8 août 1945, sont imprescriptibles par nature »

    * 48 Les crimes contre l'humanité sont punis aux articles 313 à 316 du Code pénal de 1996. L'article 317 du même texte pose le principe de l'imprescriptibilité.

    * 49 A. LAQUIEZE, « Le débat de 1964 sur l'imprescriptibilité des crimes contre l'humanité », Droits, 31, 2000, p. 19, cité par ARENDT et autres

    * 50 F-N. BUFFEL, Rapport n° 636 sur la proposition de loi portant réforme de la prescription en matière pénale, 25 mai 2016, consulté sur www.senat.fr, le 30 octobre 2016 à 14 heures 05 mn 29s.

    * 51 C. DEBBASCH et autres, Droit des médias, Dalloz, Paris, 2000, p. 1031

    * 52 C. DEBBASCH et autres, Op. cit., p. 1032

    * 53 F. TERRE et D. FENOUILLET,Droit civil : Les personnes, Paris, 8e édit, Dalloz, 2012, p. 113

    * 54 Cf. Rapport de Mme GABET, Ass. Plen., 13 mars 2009, disponible sur www.courdecasssation.fr, consulté le 15 juin 2000 à 16 heures 30 mn 20 s

    * 55 Mission de recherche Droit et justice, Les temps judiciaires, www.gip-recherche-justice.fr , consulté le 11 novembre 2016 à 15 heures 19 mn 30s

    * 56 Art. 66 de la loi n°057-2015/CNT du 04 septembre 2015 sur le régime juridique applicable à la presse écrite

    * 57 A. BREGUEC et autres, « Qu'est-ce que l'actualité », Mémoire pour l'obtention du diplôme de conservateur de bibliothèque, Ecole nationale supérieure des sciences de l'information et des bibliothèques, 2005, p. 13

    * 58 Cass. Civ., 1ère, 25 janvier 2000, Bull. n 27, p. 17, disponible sur www.courdecassation.fr, consulté le 25 décembre 2016 à 16 h 20mn 30 s

    * 59 Ch. Bigot, « Protection des droits de la personnalité et liberté de l'information », D. 1998. Chron. 235, n° 17, consulté sur www.dalloz-étudiant.fr, le 11 20 octobre 2016 à 15 h 18 mn 25s

    * 60Cass. Civ., 1ère, 6 mars 1993, disponible sur www.cassation.fr, consulté le 15 décembre 2016 à 17 h 20 mn18 s

    * 61 M. MARTEL, « Un danger de l'instantanéité de l'information », disponible www.marie-evemartel.net, consulté le 12 décembre 2016 à 20 h 30 mn

    * 62 J. PRADEL, Op. ci.t, p. 325

    * 63 Dans sa décision du 17 février 2016, le TGI de Paris a reproché le JDD de l'absence de réserve dans l'affirmation de la culpabilité

    * 64 Cass. Crim., 17 novembre 2005, disponible sur www.bouzemoun-avocat.com, consulté le 11 décembre 2016 à 18 h 32 mn 25 s

    * 65 J. PRADEL, Op. cit., p. 326

    * 66 J-M. AUBY et autres, « Le droit à l'information », Dalloz 1982, n°1, P.1

    * 67 H. PIGEAT et J. HUTEAU,  Ethique et qualité de l'information, Académies des sciences morales et politiques, Juin 2003, disponible sur www.asmp.fr, consulté le 26 octobre 2016 à 15 heures 30 mn 30s

    * 68 J. Pradel, Op. cit., p.326

    * 69 E. DREYER, Droit de l'information : Responsabilité des médias, Paris, Litec, 2002, p. 105

    * 70 Cass. Civ., 1ère, 29 mai 2013, disponible sur www.cassation.fr , consulté le 11 décembre 2016 à 23 à 08 mn 35 s

    * 71 Art. 105 de la loi 057-2015/CNT portant régime juridique de la presse écrite au Burkina Faso ; art. 82 de la loi 058-2015/CNT portant régime juridique de la presse en ligne au Burkina Faso et art. 126 de la loi 059-2015/CNT portant régime juridique de la radiodiffusion sonore et télévisuelle au Burkina Faso.

    * 72 Art. 38 de la loi française du 29 juillet 1881 sur la liberté de presse : « Il est interdit de publier les actes d'accusation et tous autres actes de procédure criminelle ou correctionnelle avant qu'ils aient été lus en audience publique et ce, sous peine d'une amende de 3 750 euros».

    * 73Cass. Crim, 12 juin 2007, disponible sur www.legifrance.gouv.fr, consulté le 2 novembre 2016 à 12 h 30mn 5s

    * 74 A. BEM, Condamnation de la publication d'extraits d'actes de procédure d'enquête pénale en cours, www.caninetbem.com , consulté le 11 décembre 2016 à 23 heures 02 mn 5 s

    * 75Art. 5 de la loi 10-93 ADP du 17 mai 1993 portant organisation judiciaire au Burkina Faso : « Les audiences de toutes les juridictions sont publiques, à moins que la publicité ne soit dangereuse pour l'ordre public ou les bonnes moeurs ou interdites par la loi ; dans ce cas la juridiction saisie ordonne le huis clos ».

    * 76 Art. 83 de la loi sur la presse en ligne et article 127 de la loi sur la radiodiffusion sonore et télévisuelle

    * 77 Art. 85 de la loi sur la presse en ligne et art. 129 de la loi sur la radiodiffusion sonore et télévisuelle

    * 78 E. DREYER, Op. cit., p.104.

    * 79Art. 35 ter de la loi sur la liberté de presse en France : « I. - Lorsqu'elle est réalisée sans l'accord de l'intéressé, la diffusion, par quelque moyen que ce soit et quel qu'en soit le support, de l'image d'une personne identifiée ou identifiable mise en cause à l'occasion d'une procédure pénale mais n'ayant pas fait l'objet d'un jugement de condamnation et faisant apparaître, soit que cette personne porte des menottes ou entraves, soit qu'elle est placée en détention provisoire, est punie de 15 000 euros d'amende. II. - Est puni de la même peine le fait :- soit de réaliser, de publier ou de commenter un sondage d'opinion, ou toute autre consultation, portant sur la culpabilité d'une personne mise en cause à l'occasion d'une procédure pénale ou sur la peine susceptible d'être prononcée à son encontre ;- soit de publier des indications permettant d'avoir accès à des sondages ou consultations visés à l'alinéa précédent.

    * 80 Cf. art. 39 bis à 39 ter

    * 81 Conseil supérieur de la communication, Rapport public, 2011, p. 46

    * 82 Depuis 2010, l'institut de recherche et de sondage APIDON effectue des sondages politiques et non politiques.

    * 83 F. G. BARROS (de), Les relations entre la presse et la présomption d'innocence -- Compte rendu du colloque organisé par l'Association Versailles Québec et l'ODA de Versailles, le 18 octobre 2013, p. 2

    * 84 J. CHEVALIER, « Constitution et communication », Dalloz 1991, Chron, P. 252

    * 85 F. BROCAL, Thèse pour l'obtention du grade de docteur en droit, Université Lumière-Lyon, décembre 2014, P. 116

    * 86 Cass., Civ. 1ere, 6 février 1996, consulté sur www.google.fr, le 15 septembre 2016 à 10 heures 20 mn

    * 87 B. RAVAZ et S. RETTERER, Droit de l'information et de la communication, Paris, Ellipse, 2006 p. 54

    * 88 En France, le respect du secret de l'instruction est une obligation déontologique pour l'avocat conformément à l'article 5 du décret du 12 juillet 2005.

    * 89 H. LECLERC, « Feu le secret de l'instruction », disponible sur www.cabinet-leclerc.fr , consulté le 15 octobre 2016 à 9 heures 25 mn 10 s.

    * 90 Cass. Crim. , 12 juin 2007, www.legifrance.gouv.fr , consulté le 27 octobre 2016 à 15 h 10 mn 50s

    * 91 H. LECLERC, Op. cit, « Feu le secret de l'instruction », disponible sur www.cabinet-leclerc.fr , consulté le 15 octobre 2016 à 9 heures 25 mn 10 s.

    * 92 Cass. Crim, 12 juin 2007, Op. cit., Cass. Crim. , 12 juin 2007, www.legifrance.gouv.fr , consulté le 27 octobre 2016 à 15 h 10 mn 50s

    * 93 M. SARAZIN et S. MASSIEUR, Les journalistes, responsables, pas coupables?, Bruxelles Mango Document, 2001, p. 52

    * 94 Idem de l'article 47 de la loi sur le régime juridique de la presse en ligne et l'article 77 sur le régime juridique de la radiodiffusion sonore et audiovisuelle.

    * 95 L'article 52 du Code de l'information de 1993 aujourd'hui abrogéposait : « Le journaliste est astreint au secret professionnel et ne peut être, dans ce cas, inquiété par l'autorité publique »

    * 96 M. JACQUEMIN, La protection des sources des journalistes », Paris, éd. CFPJ, Paris, 2000, p. 16

    * 97 A. BEM, « Violation du secret de l'instruction pénale : Conditions et sanctions », disponible sur www.legavox.fr, consulté le 15 novembre 2016 à 17 heures 15 mn 20 s

    * 98 Cass. Crim., 13 mai 1933, Dalloz, 1891, p. 420

    * 99 Les articles 78 à 80 du Code pénal traitent des circonstances atténuantes.

    * 100 Art. 118 et 159 des lois respectives sur la presse en ligne et l'audiovisuel

    * 101 Lorsqu'il est fait application des circonstances atténuantes, la peine prononcée ne pourra excéder la moitié de celle édictée.

    * 102 C. A., Paris, 7 avril 1997, Légipresse, Mars 1998, n°149, 1 , p. 220

    * 103 Loi n°010-2004/AN du 20 avril 2004 portant protection des données à caractère personnel

    * 104 TGI de Ouahigouya, 10 septembre 2014, inédit.

    * 105 Cf. Circulaire du 27 novembre 1959 (4).

    * 106 Une circulaire du garde des sceaux du 19 juin 2007 invite le premier président des Cours d'appel à organiser des conférences de presse trimestrielles.

    * 107 Voy. www.conseil-supérieur-magistrature.fr consulté le 20 juin 2016 à 17 heures 30 mn 10 s

    * 108 D. SPIELMANN, Note sous Cour eur. D.H., arrêt Allenet de Ribemont du 10 février 1995, Revue trimestrielle des droits de l'homme, 1995, p. 657

    * 109 J. PRADEL, Op. cit, p. 465

    * 110 S. CARO (de), «Le droit à l'information face au secret de l'enquête et de l'instruction: une meilleure alchimie est possible», disponible sur www.google.fr , consulté le 15 octobre 2016 à 17 h 30m 25 s, p. 14

    * 111 J. LARCHE, Op. cit., p. 37

    * 112 Voy. l'article de presse paru sous l'intitulé «Amadou Haya SANOGO: Le jugement premier», dans Jeune Afrique n° 2916 du 27 novembre au 03 décembre 2016, p. 25

    * 113 J. VOLFF, «Un exemple de manipulation de l'opinion», disponible sur www.constructif.fr , consulté le 08 novembre 2016 à 7 h 40 mn 10s

    * 114 J. RIVERO, Les libertés publiques, Paris, PUF, Collection Thémis, 1997, p. 179

    * 115 F. ABDELBASSET, «Le langage dans la société», disponible sur www.culture-cpge.com, consulté le 13 décembre 2016 à 9 heures 15 mn

    * 116 F. VANSILIETTE, «L'inculpation: de quoi s'agit-il, quels droits confère-t-elle?», disponible sur www.justice-en-ligen.be, consulté le 16 mars 2016

    * 117 Art. 111 CPP : «  Lors de la première comparution, le juge d'instruction constate l'identité de l'inculpé, lui fait connaître chacun des faits qui lui sont imputés et l'avertit qu'il est libre de ne faire aucune déclaration ».

    Si l'inculpé désire faire des déclarations, celles-ci sont immédiatement reçues par le juge d'instruction.

    Le magistrat donne avis à l'inculpé de son droit de choisir un conseil parmi les avocats défenseurs admis à exercer leur profession au [Burkina Faso].

    Si le juge décerne un mandat de dépôt, il le notifie à l'inculpé.

    * 118 Voy. Larousse 1972, p. 470

    * 119Question écrite n° 06456 de M. Josselin de Rohan, publiée dans le JO Sénat du 28/09/1989 - p.1568

    * 120 A. COCHE, « Rendre effective la présomption d'innocence : L'obsession de l'avocat, le devoir du juge », disponible sur www.avocats-poitiers.com, consulté le 13 décembre 2016 à 17 h 20 mn 30 s

    * 121 Cass. Crim., 14 avril 2015, disponible sur www.courdecassation.fr, consulté le 12 décembre 2016 à 12 h 14 mn 40 s

    * 122 A. COCHE, « Rendre effective la présomption d'innocence : l'obsession de l'avocat, le devoir du juge », p.2 disponible sur www.avocats-poitiers.com, consulté le 11 décembre 2016 à 17 heures 20 mn 17 s.

    * 123 Art. 225-6 du Code pénal français

    * 124 Art. 450-1 du Code pénal français

    * 125 Art 35 bis de la loi du 29 juillet 1881 sur la presse

    * 126 A. COCHE, Op. cit., p. 2, disponible sur www.avocats-poitiers.com, consulté le 11 décembre 2016 à 17 heures 20 mn 17 s.

    * 127 Cette notion n'existe plus en France il y a deux décennies.

    * 128 Voy. L'Observateur Paalga n°8275 du lundi 17 décembre 2012, à la page 23, le journal parle de « présumé assassin » d'un conseiller municipal froidement abattu et Sidwayan° 716 du jeudi 21 juin 2012, à la page 13, dans lequel il est question, dans la légende de la photo d'illustration, « de quatre présumés coupables ».

    * 129 C. CHARRIERE-BOURNAZEL, Op .cit, p. 14

    * 130 Il s'agit de la loi française sur la liberté de la presse.

    * 131Cass. Civ. 2e, 8 juillet 2004, Bull. n° 387, disponible sur www.cassation.fr, consulté sur le 25 mai 2016 à 16h 30 mn

    * 132 Voy. art. 74 et 12 des lois respectives sur le régime juridique de la presse écrite et de la radiodiffusion sonore et télévisuelle, et l'article 361 du Code pénal burkinabè

    * 133Cass. Civ.,2e, 8 juillet 2004, Bull. n° 387, disponible sur www.courdecassationfrançaise.fr , consulté le 8 novembre 2016 à 17 h 05 mn.

    * 134F. TERRE et D. FENOUILLET, Op.cit., p. 114

    * 135 J. C. SAINT- PAU, Note sous Cass, Civ., 1ère, 5 novembre.1996, Dalloz, Jur. P. 541

    * 136 Art. 120, 96 et 141 des lois sur la presse écrite, la presse en ligne, la radiodiffusion sonore et télévisuelle et 362 du Code pénal burkinabè

    * 137 J-C TAHITA, «Diffamation et liberté de presse au Burkina Faso», RBD n°34-2e semestre 1998, p. 237

    * 138Cass. civ., 17 juin 2015, disponible sur www.cassation.fr, consulté le 13 décembre 2016 à 17 h 14 mn 30 s

    * 139 Art. 95 et 139 des lois respectives sur la presse en ligne et la radiodiffusion sonore et télévisuelle

    * 140 Art. 139 al. 2 et art. 138 al. 2 des lois sur la presse écrite et la radiodiffusion sonore et télévisuelle.

    * 141Art. 1382 : «  Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ».

    * 142 C. DEBBASCH, Op Cit., p. 1027

    * 143J. Ravanas, Obs sous Cass. Civ., 1èr, 5 novembre 1996, JCP 1997-II, n° 22805

    * 144Cass. Civ., 2e, 8 juillet 2004, consulté sur www.cassation.fr, le 13 novembre 2016, à 7 heures 20 mn 10s

    * 145 Art. 80 al 2 de la loi sur la presse écrite et art. 123 al 2 de la loi sur la radiodiffusion sonore et télévisuelle.

    * 146 TGI de Ouahigouya, 10 septembre 2014, inédit.

    * 147 Le fait de jeter le discrédit sur un commerçant en le présentant comme coupable d'infraction peut lui présenter un préjudice matériel important.

    * 148 Le juge pouvait prononcer soit l'amende, soit l'emprisonnement ou les deux à la fois.

    * 149 Articles 79 à 81 de la loi n°058-2015/CNT du 4 septembre 2015 portant régime juridique de la presse en ligne au Burkina Faso

    * 150 J.- C. SAINT PAU, Note sous Cassation, Civ.,1ère, 16 juillet 1998, Dalloz, Jur, 1999, p. 541

    * 151 Art. 104 de la loi sur la presse écrite relatif au droit à l'image et complétant art. 103 de la même loi relative au droit à la vie privée.

    * 152 C. DEBBASCH et autres, Droits des médias, Dalloz, Paris, 2002, p. 1034

    * 153S. DRAME, Droit de la communication, Ouagadougou, 2011, p. 51, inédit

    * 154 Art. 85 de la loi n°057-2015/CNT du 4 septembre 2015 portant régime juridique de la presse écrite au Burkina Faso.

    * 155 Art. 67 de la loi n°058-2015/ CNT du 4 septembre 2015 portant régime juridique applicable à la presse en ligne au Burkina Faso.

    * 156 Art. 91 de la loi n°059-2015/CNT du 4 septembre 2015 portant régime juridique de la radiodiffusion sonore et télévisuelle au Burkina Faso

    * 157 Art. 90 de la loi n°059-2015/CNT du 4 septembre 2015 portant régime juridique de la radiodiffusion sonore et télévisuelle au Burkina Faso

    * 158 Art. 57 et suivants de la loi sur la presse en ligne et art. 97 et suivants de la loi sur la radiodiffusion sonore et télévisuelle.

    * 159 Art. 97 et 98 de la loi n°059-2015 /CNT du 4 septembre 2015 sur le régime de la radiodiffusion sonore et télévisuelle.

    * 160 Art. 102 de la loi sur le régime de la radiodiffusion sonore et télévisuelle.

    * 161 Art. 119 de la loi sur la presse en ligne et article 160 de la loi sur la radiodiffusion sonore et télévisuelle.

    * 162 «L'action publique et l'action civile résultant des crimes, délits et contraventions prévus par la présente loi se prescrivent après trois mois révolus, à compter du jour où ils auront été commis ou du jour du dernier acte de poursuite s'il en a été fait».

    * 163 Cass. Civ., 1ère, 8 juillet 2004, consulté sur www.cassation.fr, le 12 octobre 2016 à 15 h 30 mn 10 s

    * 164 J-C. TAHITA, « Diffamation et liberté de presse au Burkina Faso», RBD n°34-2e semestre, p. 243

    * 165 Idem de l'article 111 de la 058-2015/CNT du 4 septembre 2015 sur la presse en ligne et de l'article 151 de la loi sur la radiodiffusion sonore et télévisuelle.

    * 166 Art. 139 de la loi sur la presse écrite ci-dessus citée et art. 114 de la loi sur la presse en ligne.

    * 167 Art. 133, 108 et 148 des lois respectives sur la presse écrite, la presse en ligne et la radiodiffusion sonore et télévisuelle

    * 168 Art. 132 al. 2 de la loi sur la presse écrite.

    * 169 Art. 110 et 150 des lois sur la presse en ligne et la radiodiffusion sonore et télévisuelle

    * 170 Cour de Cassation, Rapport 2010, disponible sur www.cassation.fr, consulté le 10 décembre 2016.

    * 171 Cass. Civ., 17 mars 2011, disponible www.cassation.fr, consulté le 16 novembre 2016 à 17 heures 26 mn 23 s

    * 172 Cass. Civ.,1ère, 12 juillet 2001, D. 2002, Jur. p. 1380

    * 173 C. BIGOT, Note sous Cass, Civ,1ère, 12 juillet 2001, Dalloz, Jur, 2001, p. 1382

    * 174 J.- C. SAINT-PAU, Note sous Cass. Civ., 1ère , 16 juillet 1998, Dalloz, Jur, 1999, p. 542

    * 175 C. BIGOT, «Le nouveau régime du droit à l'image : le test en deux étapes», Paris, Dalloz, 2004, p. 2596, disponible sur www.dalloz-étudiant.fr, consulté le 25 novembre 2016 à 17 heures 17 mn 20 s

    * 176 Cass. Civ. 1ère, 13 novembre 2003, disponible sur www.cassation.fr, consulté le 20 novembre 2016 à 17 heures 20 mn 30 s

    * 177 Ibid.

    * 178 M. MAGNAN, «Dignité en droit: un axiome», Revue interdisciplinaire d'études juridiques, disponible sur www.carn.info, consulté le 20 novembre 2016 à 12 heures 16 mn 20 s

    * 179 Ibid.

    * 180 C. BIGOT, Note sous Cass. Civ., 1ère , 12 juillet 2001, Dalloz 2002, Jur. p. 1383

    * 181 M. MAGNAN, Op. cit., disponible sur www.carninfo, consulté le 20 novembre 2016 à 12 heures 16 mn 20 s

    * 182 F. BOREL-HÄNNI, «Quelle responsabilité sociale pour les médias », disponible sur www.google.fr, consulté le 15 octobre 2016 à 17 h 20s

    * 183 Ces bouts de phrase sont issus du préambule de la Charte d'éthique professionnelle du syndicat national des journalistes de France. Celle-ci se réfère à la Déclaration française des droits de l'homme et du citoyen d'août 1789.

    * 184 Etymologiquement, ces termes sont équivalents: Le terme éthique vient de «êthos» (moeurs). Le terme « morale » a pour origine mores (moeurs).

    * 185 I. Henri et autres « Ethique ou déontologie : quelles différences pour quelles conséquences managériales ? L'analyse comparative de 30 codes d'éthique et de déontologie », disponible sur www.google.fr, consulté le 20 octobre 2016 à 18 h 24 mn 10s

    * 186 B. DELFORCE, «Responsabilité sociale du journaliste: donner du sens», in Les Cahiers de journalisme n° 2, disponible sur www.google.fr, consulté le 19 septembre 2016 à 10 heures 15 mn.

    * 187 M. SCHUDSON, Le pouvoir des médias, Nouveaux horizons, Paris, 2001, p. 227

    * 188 S. BALIMA et autres, Médias et démocratie, CODESRIA, 2012, P. 1

    * 189 La Charte des journalistes du Burkina a été adoptée en 1990, sous la houlette de l'Association des journalistes du Burkina (AJB).

    * 190 Déclaration des devoirs et droits des journalistes européens, adoptée à Munich en 1971

    * 191La Déclaration de principe de la Fédération internationale des journalistes sur la conduite des journalistes, dite « Déclaration de Bordeaux » (1954).

    * 192 D. CORNU, Journalisme et vérité, Genève, Labor et Fides, coll. Le Champ éthique, 2009, pp.111-136

    * 193 Voy. préambule de la Charte de 1971

    * 194 Préambule de la Charte des journalistes burkinabè de 1990

    * 195 B. DELFORCE, Op. cit.,disponible sur www.google.fr, consulté le 19 septembre 2016 à 10 heures 15 mn.

    * 196 Art. 12 de la Charte des journalistes burkinabè, 1990

    * 197 5e règle de conduite de la Charte de Bordeaux, 1954

    * 198 H. SCHULTE et M. DUFRESNE, Pratique du journalisme, Paris, Nouveaux Horizons, 1999, p. 11

    * 199 1er principe de la Déclaration de Bordeaux de 1954 et article 7 de la Charte des journalistes burkinabè

    * 200 3e principe de la Déclaration de Bordeaux

    * 201 Art. 8 de la Charte des journalistes burkinabè

    * 202 Observatoire de la déontologie de l'information, « Objectivité de l'information, honnêteté des journalistes. Retour sur un débat toujours d'actualité », 17 mars 2015, disponible sur www.odi.medias, consulté le 17 septembre 2016 à 15 heures 15

    * 203 Art. 7 de la Charte de 1990

    * 204 Conseil constitutionnel français, 21 janvier 1994, consulté sur www.conseil-constitutionnel.fr , le 15 juin 2016 à 19 heures 20 mn 10 s.

    * 205 La bonne foi du journaliste est libératoire à quatre conditions : la légitimité de l'information, l'absence d'animosité personnelle, la prudence et l'objectivité des propos et le sérieux de l'enquête, la vérification des faits.

    * 206 Cass. Crim, 8 septembre 2015, disponible sur www.legifrance.gouv.fr , consulté le mardi 15 novembre 2016

    * 207 3e droit de la Charte de Munich de 1971.

    * 208 J. CHARRON, « Journalisme, politique et discours rapporté : Evolution des modalités de la citation dans la presse écrite au Québec : 1945- 1995», p. 161, disponible sur www.erudit.org, consulté le 25 novembre 2016 à 15 heures 25 mn 30s

    * 209 Il s'agit d'une innovation introduite par la loi n°033-2012/AN du 11 juin 2012 constitutionnalisant le Conseil supérieur de la communication (CSC).

    * 210 Conseil supérieur de la Communication, Rapport public, 2011, p. 46

    * 211 A. L TIAO, La régulation des médias d'Afrique de l'Ouest: cas du Burkina Faso, Thèse de doctorat en Communication, arts et spectacles, Université Bordeaux Montaigne, 2015, p. 128

    * 212Art. 17 de la loi organique n°015-2013/AN du 14 mai 2013 portant attribution, composition, organisation et fonctionnement du CSC

    * 213Avant cette loi, le CSC était régi par le décret n°95-304/PRES/PM/MCC du 1er août 1996

    * 214E. AW, «La déontologie à l'épreuve des médias, de quelques cas en Afrique de l'ouest francophone », disponible sur www.ethiquepupblique.org, consulté le 27 octobre 2016 à 18 h 30 mn 20 s

    * 215 A. HULIN, «L'autorégulation des médias : glaive ou bouclier pour la liberté ?», disponible sur www.google.fr, consulté le 15 novembre 2016

    * 216Créé en 2000, l'Observatoire national de presse a disparu quelque mois après, suite à un défaut de consensus entre les journalistes

    * 217 Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), Guide de l'autorégulation. Les questions et les réponses, p.69

    * 218 Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, Op. cit., p. 38

    * 219 Conseil supérieur de la Communication, Rapport du premier semestre 2014, p. 9

    * 220Conseil supérieur de la communication, Op.cit., p.10

    * 221 Entretien avec Abdoulaye TAO, Directeur de publication de l'Economiste du Faso, membre de l'OBM.

    * 222 Art. 46 de la loi n°015-2013/AN du 14 mai 2013 portant attribution, composition, organisation et fonctionnement du CSC:

    « Tout manquement aux dispositions législatives et réglementaires régissant les activités de communication fait l'objet d'une mise en demeure du Conseil supérieur de la communication. Le Conseil supérieur de la communication prononce, en fonction de la gravité du manquement, une des sanctions suivantes :

    - la suspension de la publication, de l'édition, de la diffusion ou de la distribution du ou des services d'une catégorie de programme, d'une partie du programme ou d'une ou plusieurs séquences publicitaires pour un mois au plus ;

    - la suspension de la publication, de l'édition, de la diffusion ou de la distribution du ou des services d'une catégorie de programme, d'une partie du programme ou d'une ou plusieurs séquences publicitaires pour trois mois au plus ;

    - une sanction pécuniaire dont le montant est fixé dans les différents cahiers des charges et des missions ;

    - le retrait de l'autorisation d'exploitation ou l'interdiction de la publication.

    - Ces sanctions sont prononcées sans préjudices de l'application des dispositions pénales contenues dans les textes en vigueur ».

    * 223A. L. TIAO, Régulation des médias d'Afrique francophone : cas du Burkina Faso, Thèse de Doctorat en Communication, arts et spectacles, Université Bordeaux Montaigne, 2015, p. 96

    * 224 A. PUDDEPHAT, « Droit du public à l'information. Principes relatifs à la législation sur la liberté de l'information », Article XIX, p.3






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