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La protection d'un bien naturel inscrit au patrimoine mondial de l'Unesco face à  la nécessité de l'exploitation des ressources naturelles en RDC. Cas du parc national des Virunga.

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par LIONNEL Aron MPOZI
Université de Goma - LINCENCE  2015
  

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Section II : LA DECONSTRUCTION DES DISCOURS DES EVIDENCES SUR

L'EXPLOITATION DE L'OR NOIR DANS LE PNVI186

§1. La fascination exercée par le mythe du développement187 grâce à l'or noir du PNVI

Le concept développement est empreint de subtilités de langage toujours délicates à manier. Son analyse nous plonge dans un registre où l'on ne sait pas exactement ce que le mot veut dire. A tout le moins, il s'agit de l'une de plus veilles et de plus puissantes idées de l'occident188. Pourtant, au vu de l'impact du pétrole sur l'économie et le développement des pays producteurs, notamment le plus anciens (Angola, Nigéria, Congo), des questions se

183 Article 215 de la constitution du 18 février tel que modifiée en ce jour

184 CREDDHO, Op.cit., p.2.

185 Idem.

186 Le terme déconstruction des discours des évidences nous a été inspiré par les enseignants du Professeur Ivan MINGASHANG lors de ses enseignants sur les relations internationales africaines, UNIGOM, L2 droit, 20142015.

187 Idem

188 I. MINGASHANG, op.cit., p. 34.

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posent : le pétrole est-il une bénédiction, c'est-à-dire une opportunité de développement durable et d'amélioration des conditions de vie des populations, ou plutôt une source de malédiction, de corruption et d'instabilité ? A ce sujet, au moment où le Ghana entrait dans le club des pays producteurs de pétrole en Afrique, la ministre Ghanéenne des finances posait cette problématique de manière claire, en ces termes : « le défi majeur sera de savoir comment faire pour que les revenus du pétrole servent à transformer l'économie, doper la croissance sans sacrifier la stabilité macro-économique et accentuer les inégalité189 ».

Cette phrase condense les expériences observées dans quelques pays producteurs de pétrole. D'une part, la rente pétrolière peut être effectivement un atout pour le développement durable, mais d'autre part elle peut être une source d'instabilité politique et économique. La découverte de l'or noir dans un pays est souvent perçue ou présentée de façon idyllique en rapport avec ses retombées économiques et sur la transformation des conditions de vie des populations et le développement.190

Au mois d'août 2010, l'Honorable Célestin VUNABANDI, accompagnant une délégation de SOCO, a invité, à l'hôtel Ihisu des journalistes, des députés provinciaux et des membres de la société civile dont nous faisions partie pour leur parler de l'exploitation du pétrole au Nord-Kivu dans le Parc national des Virunga. Selon le dire de l'Honorable : « cette activité pourra procurer de l'emploi à plusieurs personnes et donnera du bonheur à la population locale, permettre le développement des entités envoisinant le PNVI et même, le développement de la province en générale ».191

Lors de cette réunion, nous avions eu l'impression que l'intervenant principal cherchait, avant tout, à convaincre plutôt qu'à informer. Il ailleurs déplorable de noter que la chaine de télévision Digital Congo n'avait pas hésiter à dire à cette époque, que la population acceptait le projet alors qu'elle venait juste d'être informée de celui-ci sans y avoir été associé à aucun moment.

De son côté en 2012, SOCO intensifie une campagne de soutien en sollicitant les faveurs de certains députés provinciaux et nationaux originaires de la région ainsi que certains

189 Propos de la ministre Ghanéenne des finances KWABENA Duffuor, voir l'article : pétrole en Afrique : or noir : misère noire, de René Dassué, Disponible sur http://www.afrik.com/article21841.html, consulté le 28 mai 2015.

190 J. DOMINIC, E. NDIMUBANZI, op.cit., p. 69.

191 Extrait de la pétition des organisations de la société civile environnementale du Nord-Kivu face à l'exploitation du pétrole du Bloc V du PNVI, adressée au 1èr Ministre chef du gouvernement et au Ministre des Hydrocarbures à Kinshasa, 25. Septembre. 2010.

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militaires en poste sur terrain192. Nous avons constaté lors de notre entretien avec les notables hutu de Rutshuru le 2 mai 2012, que SOCO promet des merveilles aux populations locales, notamment une embauche massive, alors qu'avec la technologie moderne, même la main d'oeuvre qualifiée employée n'est pas énorme193. Un ancien ministre de l'énergie originaire de la région leur a dit séance tenante « qu'il a visité les installations offshore à Matadi et qu'à sa grande surprise pas plus de 30 Congolais qualifiés travaillaient sur la plateforme ». Nous avons constaté lors de notre entretien, que la campagne démagogique de SOCO bénéficie d'un déficit d'information. Bien que plusieurs contrats portant sur les mines et les hydrocarbures soient sur le site du ministère des mines, les populations vivant dans le Nord-Kivu profond n'ont pas accès à ces informations et un effort de communication serait nécessaire194. La volonté du gouvernement de s'enquérir des estimations exactes des réserves pétrolières du Graben albertine est somme toute légitime et souveraine195. Cependant, il n'a ni les moyens ni les compétences pour le faire et compte sur le savoir-faire et les moyens financiers des compagnies pétrolières étrangères qui ne peuvent le faire de façon désintéressée. Elles travaillent pour le profit et non pour la charité. Si les réserves importantes sont découvertes, la tentation pour les compagnies pétrolières de jouer le tout pour le tout pour exploiter ces gisements sera d'autant plus forte196. Et face aux autorités congolaises qui se succèdent en signant des contrats léonins moyennant des commissions juteuses, la bataille pour la conservation du Parc National des Virunga s'annonce longue et difficile. D'autant plus que certains députés originaires du Nord-Kivu remettaient déjà en cause l'ordonnance-loi n° 69-041 du 22 août 1969 abrogée par la loi n° 14/003 du 11 février 2014 relative à la conservation de la nature, interdisant l'exploitation minière et pétrolière dans les aires protégées197. Ils estiment que la résolution 1514 de l'ONU autorise les peuples à disposer de leurs ressources naturelles et proposent de trouver une façon de concilier la protection de l'environnement et l'exploitation des ressources.198 Un combat inégal entre les compagnies pétrolières aux ressources financières énormes et la conservation de la nature est déjà engagé. Il est impératif

192 Lettre de l'ONG Innovation pour le développement et la protection de l'environnement (IDPE) au gouverneur de la province du Nord-Kivu, Goma, 17 janvier 2012.

193 Idem

194 OVG, op.cit., 2010, p.3, inédit.

195 A. TOGERA, op.cit., p.28.

196 Idem

197 Ordonnance-loi n° 69-041 du 22 août 1969 abrogée par la loi n° 14/003 du 11 février 2014 relative à la conservation de la nature

198 A. TOGERA, op.cit., p.28.

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d'informer les populations concernées quant aux enjeux en compétition pour qu'elles puissent exprimer leur avis.

Dans le cas de figure des gisements pétroliers dans le Graben albertine dans les blocs
3, 4, et 5 couvrant plus de 85 % de la superficie du PNV, nombre d'observateurs

reconnaissent la légitimité du gouvernement congolais d'avoir une idée exacte des

réserves pétrolières estimées du Graben albertine. Mais le risque que les grandes
compagnies pétrolières y mettent la main une fois les acquisitions sismiques confirmées

est grand. Face aux autorités congolaises réputées pour conclure de contrats léonins moyennant de commissions juteuses, comment s'assurer qu'une expertise indépendante fasse l'estimation199 ?

Certes, le pétrole peut être effectivement un moteur pour le développement durable. C'est d'abord une source importante de devises. C'est aussi un moyen de mettre fin à la

dépendance et au déficit énergétique qui caractérise beaucoup de pays africains. L'exploitation du pétrole peut aussi entraîner le développement des infrastructures, de l'industrie pétrochimique, voire de l'agriculture. Elle peut également aider au contrôle de l'espace en stimulant le développement des villes200.

A contrario, le pétrole crée une économie de rente et constitue par conséquent facteur de déstabilisation économique. Dans beaucoup de situations, la manne pétrolière conduits les

Etats à se détourner des secteurs productifs durables et engendre ce qu'on appelle le « syndrome Hollandais201 ». Profitant à une petite oligarchie au pouvoir, c'est une source importante de corruption, de mauvaise gouvernance, et par conséquent d'instabilité politique202.

Les études transversales semblent indiquer que l'impact des ressources naturelles dépend de la situation initiale et donc que les pays exportateurs dotés d'institutions solides et

d'un capital humain conséquent auront tendance à moins souffrir de la « malédiction des ressources »203. Les leçons tirées de la plupart des pays pétroliers africains montrent que la grande faiblesse de la gouvernance est liée à l'opacité qui caractérise la signature des contrats.

199 Selon Transparency International dans son rapport de 2011, la RD Congo est 182ème sur 183 pays sur l'indice de perception de la corruption.

200 J. DOMINIC, E. NDIMUBANZI, op.cit., p. 69.

201 J-P KOUTASSILA, Le syndrome Hollandais : théorie et vérification empirique au Congo et au Cameroun, Centre d'économie du développement Université Montesquieu-Bordeaux IV - France, 2008, p.1-3.

202 J. DOMINIC, E. NDIMUBANZI, op.cit., p. 69.

203 G. ALAN et G. Sina, Déjouer la malédiction pétrolière, De Boeck Supérieur, Afrique contemporaine, 2009/1, N°229, p.87. Disponible sur http://www.cairn.info/revue-afrique-contemporaine-2009-1-page-87.htm consulté le 31 mai 2015,

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"Entre deux mots il faut choisir le moindre"   Paul Valery