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La blockchain et l'offre au public de titres financiers


par Lise Wantier
Université Paris Nanterre - Master 2 Droit des affaires 2017
  

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Section II. Les règles relatives au marché secondaire

Il convient ensuite d'analyser les règles applicables au marché secondaire où l'utilisation de la technologie de la chaîne de blocs pourrait connaître de nombreuses applications et analyser si les règles en vigueur sont suffisamment larges pour sécuriser cette utilisation ( 1) ou si un nouveau cadre législatif doit voir le jour pour prendre en compte les spécificités qui découleraient de l'utilisation de cette technologie (§2).

76 Robert OPHELE, intervention devant la Mission d'information sur les « Monnaies virtuelles », p.5

77 Ibid

§1. 22

Une mise en lumière du flou juridique

L'AEMF s'est interrogée sur l'application potentielle de la technologie de registre distribués aux marchés financiers78. Après avoir démontré les potentialités de son utilisation, l'autorité a envisagé la possibilité de son utilisation d'un point de vue réglementaire.

L'AEMF prévient dans un premier temps les utilisateurs que la législation actuelle peut s'appliquer à la technologie des registres distribués. Elle analyse les principales législations en vigueur. A savoir, le règlement du 4 juillet 2012 sur les produits dérivés de gré à gré, les contreparties centrales et les référentiels centraux79, la directive du 19 mai 1998 concernant le caractère définitif du règlement dans les systèmes de paiement et de règlement des opérations sur titres80, le règlement du 23 juillet 2014, concernant l'amélioration du règlement de titres dans l'Union européenne et les dépositaires centraux de titres81, ainsi que la directive du 21 avril 2004 concernant les marchés d'instruments financiers82.

Concernant les activités de compensation, elles sont régulées par le règlement du 4 juillet 2012 et la directive du 21 avril 2004, modifiée depuis83 sans changer les règles étudiées ci-dessous. L'article 29 1) de la directive de 2004 pose une obligation de compensation concernant les marchés réglementés pour les produits dérivés négociés en bourse. Ces entités sont soumises à des autorisations et ont des obligations. Ainsi une contrepartie centrale est nécessaire mais différentes solutions sont envisageables pour remplir cette condition.

Ensuite, concernant les activités de règlement, elles sont régulées par le règlement du 23 juillet 2014 et la directive du 19 mai 1998. L'AEMF rappelle les exigences du règlement, notamment que « tout émetteur établi dans l'Union qui émet ou a émis des valeurs mobilières admises à la négociation ou négociées sur des plates-formes de négociation veille à ce que ces valeurs mobilières soient inscrites en compte en tant qu'immobilisation ou après l'émission directe sous forme dématérialisée84. » Et pose ensuite deux hypothèses.

Soit le réseau DLT n'est pas désigné comme système de règlement-livraison : la directive de 1998 n'est alors pas applicable et dès lors le réseau DLT ne peut pas etre qualifié dépositaire central de titres.

Soit, au contraire, le réseau DLT est désigné comme système de règlement-livraison, la directive de 1998 est alors applicable et le réseau a besoin d'un dépositaire central soumis aux exigences du règlement de 2014. L'article 18.2 dudit règlement précise que « les systèmes de règlement de titres ne peuvent etre exploités que par des DCT agréés ». Les exigences et conditions relatives à un dépositaire central devront dès lors etre remplies. Cette hypothèse est partagée par le rapport de la Place de Paris, « dans la mesure où le CSDR est d'application directe, l'utilisation de DLT pour les activités de post-marché et de tenue de compte sur titres cotés requiert donc pour l'opérateur de la DLT, dans l'état actuel de la réglementation, l'obtention d'une licence de Central Securities Depository85

§2. Une législation adaptée nécessaire

Comme nous venons de le voir l'utilisation de cette technologie est soumise à la législation actuelle, or selon l'AEMF, « la capacité de la DLT à s'ajuster à la législation actuelle peut limiter

78 ESMA, « The Distributed Ledger Technology applied to securities markets »

79 Règl. (UE) 648/2012 du 4 juil 2012

80 Dir. 98/26/CE du 19 mai 1998

81 Règl. (UE) 909/2014 du 23 juil 2014, modifiant les dir. 98/26/CE et 2014/65/UE ainsi que le règl. (UE) 236/2012

82 Dir. 2004/39/CE du 21 av 2004

83 Dir. 2014/65 /UE du 15 mai 2014 modifiant la dir. 2002/92/CE et la dir. 2011/61/UE.

84 Art. 3(2) Règl. du 23 juillet 2014, 909/2014

85 PARIS EUROPLACE, p°35

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son déploiement86.» La législation n'est en effet pas adaptée à la technologie blockchain, elle est ajustée à un système centralisé. À travers cette analyse, on comprend également que l'application des directives et règlements en matière de règlement-livraison est floue, c'est pourquoi une intervention semble bienvenue, ne serait-ce que pour éclaircir l'application ou non de la législation actuelle à la technologie de la chaîne de blocs.

Mais la régulation apparaît nécessaire également pour des questions de sécurité. En effet, selon l'AEMF en l'absence de contrôle adéquat, la technologie de registre distribuée est notamment exposée au risque de blanchiment d'argent et de financement des activités terroristes. L'usage de clefs publiques et privées rendent plus simple la dissimulation d'identité et l'historique des transactions. Le problème est que les entités responsables de la mise en oeuvre des procédures de précaution sont listées, nous y reviendrons plus tard. La technologie blockchain peut également contribuer à augmenter l'interconnexion entre les acteurs du marché, ce qui pourrait augmenter la diffusion d'une crise financière en augmentant les risques de propagation dû à la forte interconnexion des marchés. De plus, le fait d'avoir un unique système de référence, plus automatisé et plus harmonisé contribue à unifier les comportements et donc augmenter la volatilité des marchés en temps de tension. Des règles propres à ce type de risque devraient donc être mises en oeuvre selon l'AEMF. Il faudrait également mettre en place des contrôles pour que certains participants du réseau n'utilisent pas de manière indue les informations enregistrées dans le réseau (par exemple, les transactions récentes faites par des concurrents87).

Il existe des zones d'insécurité dans le déploiement de cette technologie à droit constant. Une intervention semble donc nécessaire, notamment, comme l'indique l'AFG, pour reconnaître les effets juridiques, en termes de transfert de propriété et d'inscription d'une transaction dans une chaîne de blocs. Une intervention semble également nécessaire en termes de partage de responsabilité et enfin des processus de back up et de remédiation seraient à prévoir en cas de défaillance systémique, de fonctionnement contraire à l'intention des parties ou de cybercriminalité88.

La France a déjà montré son interêt à figurer parmi les pays leaders de la technologie blockchain, et cela passe par une régulation. Le ministre de l'économie et des finances, Bruno Lemaire, a en effet expliqué dans une tribune vouloir « clarifier le droit pour attirer l'innovation, identifier les risques sans entraver notre écosystème ».89 C'est également l'avis de Guy Canivet « un cadre juridique pourrait d'ailleurs être un important facteur d'attractivité, dans un contexte où la maîtrise des règles du jeu, un niveau européen et international, est intimement liée à la capacité à accueillir des projets concrets de DLT90. »

Concernant les ICOs le ministre a précisé dans cette même tribune que « la France a tout intérêt à devenir le premier grand centre financier à proposer un cadre législatif ad hoc qui permettra aux entreprises initiant une ICO de démontrer leur sérieux aux investisseurs potentiels ». C'est dans cette visée que le projet de loi PACTE fut rédigée, la réglementation qui devrait être mise en oeuvre concernant les ICOs, que nous analyserons par la suite « permettrait de développer

86 ESMA « The Distributed Ledger Technology applied to securities markets, European Securities and Markets Authority », p.42

87 Ibid, p.17

88 AFG, « Réponse de l'AFG à la consultation publique sur le projet de réformes législative et réglementaire relatif à la Blockchain », 19 mai 2017, p.3

89 B. LE MAIRE, « Tribune : Cryptoactifs, blockchain & ICO : comment la France veut rester à la pointe», 19 mars 2018

90 G.Canivet, premier président honoraire de la Cour de cassation, ancien membre du Conseil constitutionnel, président du Haut Comité juridique de la place financière de Paris « Blockchain et régulation », La Semaine Juridique Entreprise et Affaires n° 367, sept 2017

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en France les projets les plus sérieux91 » selon l'AMF. Une mission d'information a également été constituée à l'assemblée nationale92 démontrant encore une fois l'interêt que représente la question blockchain.

Comme nous l'avons vu une intervention est nécessaire sur le marché primaire, afin de conférer aux ICOs un cadre juridique plus adapté et résoudre les problèmes posés par la qualification des jetons en biens divers, mais l'est tout autant concernant le marché secondaire. Sans aucune intervention législative, ne serait-ce que pour reconnaître l'utilisation de la technologie de la chaîne de blocs, cette technologie risque d'être étouffée par la législation ou par l'insécurité juridique. En effet, les différentes normes et agréments ont été mis en place pour réguler un système centralisé, l'introduction de la technologie de registre décentralisée pose donc de nombreux problèmes. Dès lors dans quelle mesure intervenir ? Que réguler exactement et comment ?

91 Robert OPHELE, intervention devant la Mission d'information sur les « Monnaies virtuelles », p. 9

92 ASSEMBLÉE NATIONALE, Mission d'information commune sur les usages des bloc-chaînes (blockchains) et autres technologies de certification de registres

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"Des chercheurs qui cherchent on en trouve, des chercheurs qui trouvent, on en cherche !"   Charles de Gaulle