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L'émission d'obligations vertes: entre liberté et contrainte


par Lise Wantier
Université Paris 1 Panthéon Sorbonne - Master 2 Droit bancaire et financier 2018
  

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Titre II : La transparence de l'information comme contrainte

Toutefois, si le volontariat et l'absence d'obligations légales ressortent de ces initiatives privées, est-ce à dire que les engagements pris par les acteurs sont dénués de tout caractère contraignant ?

Chapitre 1 : Un effet incitatif et une auto-régulation par la pratique commerciale

Comme nous avons pu le comprendre, le soft law est un outil essentiel lorsqu'il s'agit des entreprises que l'on envisage dans un cadre international. Le recours au soft law n'est pas dénué d'efficacité, notamment de par son caractère fortement incitatif. Cependant, cela est-il suffisant ?

53 SYNVET Hervé, « Le soft law en matière bancaire et financière », Revue de droit bancaire et financier n°1, janvier 2012, dossier 8

54 DILLER Janelle, « Responsabilité sociale et mondialisation: qu'attendre des codes de conduite, des labels sociaux et des pratiques d' investissement? » Revue internationale du Travail, vol. 138, 1999 http://www.ilo.org/public/french/revue/download/pdf/diller.pdf

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Section 1 : Un contrôle par le marché

Les pratiques commerciales et le fort pouvoir incitatif de certaines entités, ainsi que la crainte du risque réputationnel, font de la transparence de l'information une arme redoutable.

$1. La pratique commerciale comme incitation

Une prise de conscience et un changement des comportements est en cours. Les entreprises considèrent de plus en plus le risque réputationnel lié aux droits de l'homme et au climat. La société civile est, plus qu'hier, sensible aux questions de réchauffement climatique, et a surtout davantage les moyens, notamment avec le développement d'associations, d'avoir connaissance des violations aux droits de l'Homme pratiqués à l'autre bout de la planète. Pour Sandrine Maljean-Dubois « Le droit qui incite en arrive à véritablement enserrer et contraindre l'entreprise, en complément des règles et instruments plus classiques, et sous la pression des citoyens-consommateurs-syndicats-actionnaires-investisseurs55». Par exemple, Total s'est récemment engagé à inclure le changement climatique dans son prochain plan de vigilance sous la pression d'un collectif d'associations et d'élus56. Le risque réputationnel est d'ailleurs pris en considération par le juge lui-même57.

Il n'est pas exclu que le secteur privé puisse connaitre une forme de régulation interne, notamment par le jeu du choix des partenaires commerciaux. Peter Herbel plaide en faveur de la soft law qui selon lui aurait un réel impact sur les entreprises. Il cite ainsi les Principes d'Equateur auxquels ont adhérés la Banque Mondiale et les banques privées. Ces dernières demanderaient aux entreprises avec qui elles traitent, la preuve qu'elles se conforment à ces principes. Si l'entreprise ne le prouve pas, aucun financement ne lui sera accordé. Cela constitue pour cet auteur une menace plus efficace que celle constituée par l'approche judiciaire classique.

55 MALJEAN-DUBOIS Sandrine, La portée des normes du droit international de l'environnement à l'égard des entreprises, 4 octobre 2012

56 HERAUD Béatrice, « Devoir de vigilance : le cas de Total, attaqué sur le changement climatique, fera-t-il jurisprudence ? », Novethic, 19 février 2019, https://www.novethic.fr/actualite/ entreprise-responsable/isr-rse/devoir-de-vigilance-le-changement-climatique-doit-il-etre-integre-dans-le-plan-des-entreprises-146931.html

57 Cour d'appel, Paris, Pôle 1, chambre 2, 8 Novembre 2012 - n° 12/13430

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A titre d'exemple la Banque européenne d'investissement est d'ores et déjà impliquée dans le développement durable. Elle s'est dotée de normes relatives aux performances sociales et environnementales58. Et cela a un impact non négligeable, car elle requiert également de ses partenaires, un respect des normes environnementales et sociales auxquelles elle a souscrit59. L'IFC conditionne, elle aussi, son aide au financement à des exigences renforcées en matière de risques environnementaux et sociaux. Cet élan est de plus en plus partagé par les entreprises privées. Par exemple, l'utilisation de la norme ISO 14001 permet aux entreprises d'augmenter leur attractivité. En effet, certaines entreprises ne souhaitent désormais contracter qu'avec d'autres entreprises certifiées ISO 1400160. Une étude a par ailleurs démontré que les entreprises certifiées ISO 14001 ont pu gagner en compétitivité et parts de marché à la suite de leur certification61. Cela peut donc constituer une incitation non négligeable pour les entreprises. Ou encore, l'approche « Best-in-class » qui consiste à privilégier les émetteurs qui présentent le meilleur profil selon les critères ESG dans chaque secteur d'activité62. Des entreprises excluent de leurs investissements les entreprises ayant les moins bonnes notes ESG, et vont même jusqu'à prôner une forme d'activisme envers leurs partenaires, en les incitant à corriger leurs comportements négatifs d'un point de vue ESG63.

58 TRÉBULLE François-Guy, « La prise en compte de la RSE par les banques », Environnement n° 2, Février 2014, étude 2

59 BERD (Banque Européenne pour la Reconstruction et le développement), « La BERD Investir pour des vies meilleures », mars 2014, https://www.ebrd.com/downloads/research/factsheets/ aboutf.pdf?

60FOURNIER Clément, « Les entreprises certifiées ISO14001 sont plus compétitives et plus performantes », E-RSE, 5 septembre 2016, https://e-rse.net/certification-iso14001-performance-competitivite-benefices-21413/#gs.7cdzp9

61 British Assessment Bureau, « ISO 14001 Environmental Management » https://www.british-assessment.co.uk/services/iso-certification/iso-14001-certification/

62CM-CIC Asset Management, « De l'intégration ESG au « Best-in-class » : les différentes approches de gestion » https://www.cmcic-am.fr/fr/institutionnels/nos-expertises-et-services/finance-responsable/isr-et-integration-esg/les-differentes-approches.html

63 Gestion d'actifs /Table ronde, ISR : de la gestion à la distribution, les défis à venir, option finance, 1 avril 2019 - N°54 - Edition Hors Série

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$ 2 : Le risque réputationnel lié au greenwashing considéré par le juge

Cette vision de l'auto-régulation et de l'impact réputationnel n'est pas uniquement doctrinal64. La Cour d'Appel de Paris a pu reconnaitre que des accusations de greenwashing

65

étaient susceptibles de porter atteinte à l'honneur et à la réputation d'une banque.

Dans cet arrêt, étaient en cause les allégations faites par l'émission Cash investigation à l'encontre du Crédit Agricole. Il était affirmé dans l'émission que « le grand gagnant dans la catégorie greenwashing est le Crédit Agricole ». Était également indiqué que la banque était impliquée dans plusieurs financements polluants à divers endroits sur la planète.

La cour d'appel considère ainsi que:

«L'émission accrédite manifestement la thèse que le Crédit Agricole, qui fait croire qu'il est attaché au financement d'entreprises concourant au développement durable, dissimule, en réalité, des financements qui en font l'un des plus grands pollueurs de la planète, ce qui manifestement caractérise des imputations susceptibles de porter atteinte à son honneur et à sa réputation au sens de l'article 6 de la loi du 29 juillet 1982 ; que M. Z et la société France Télévisions ne peuvent valablement invoquer la nécessité d'informer le public et le fait que les propos incriminés ne portant pas sur des faits précis pouvant faire l'objet d'une preuve ou d'un débat contradictoire relève des juges du fond.»

Le juge lui-même prend donc en considération le risque réputationnel lié au greenwashing. Cet arrêt relève également le rôle des médias dans les dénonciations qui relaient souvent les enquêtes réalisées par les associations (on peut par exemple citer le « prix Pinocchio » qui a pour but de dénoncer les impacts environnementaux négatifs des entreprises multinationales, et le greenwashing).

64 Cette conception n'est pas à l'abris de critiques. Par exemple, cette analyse fonctionne parfaitement pour les entreprises pour lesquelles l'image et la réputation sont des composantes intégrées dans leurs stratégies et politiques. Mais il peut paraitre utopique, sans avancer de preuve, que toutes les entreprises agissent de la sorte. Car bon nombre de drames viennent contredire cette analyse (par exemple le Rana Plazza en 2013 : https://www.lexpress.fr/actualite/monde/asie/ drame-de-dacca-au-bangladesh-les-forcats-du-textile_1248230.html https://www.francetvinfo.fr/ monde/asie/sous-payes-les-ouvriers-du-textile-du-bangladesh-laissent-exploser-leur-

colere 3070979.html

65 CA Paris, 1, 2, 08-11-2012, n° 12/13430

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Section 2 : Un auto-contrôle insuffisant

Ces initiatives privées correspondent aux attentes des émetteurs quant à leur flexibilité, et nous venons de comprendre qu'elles ont une réelle influence sur le marché. Toutefois, ces dernières posent certains problèmes pour des investisseurs mais également pour le marché à un niveau macro-économique.

$1. Une absence de définition unanime et de contrôle efficace

Deux problèmes peuvent être relevés quant à l'application de ces initiatives.

Premièrement, il n'y a aucune définition unanime de ce qu'est une émission d'obligations vertes, ou du moins ce que « vert » représente exactement.

On ne peut trouver aucune définition légale d'une « obligation verte ». Dès lors comment savoir qu'une obligation l'est ? Est-ce une obligation qui finance un projet qui ne pollue pas ? Dans ce cas comment qualifier de manière exacte la pollution ? Est-ce une obligation qui finance un projet à retombées positives sur l'environnement ? Dès lors quelles sont-elles ?

Ce flou laisse une très grande marge de manoeuvre pour les émetteurs. La qualification est laissée à leur appréciation66. D'ailleurs, dans une position, l'AMF et l'AFM relèvent que certains émetteurs n'expliquent pas dans le prospectus en quoi l'obligation émise peut être qualifiée de verte67. Dès lors on perçoit aisément le risque d'une utilisation abusive de la qualification « green », car celle-ci relève d'une auto déclaration. Cette opacité peut mener à une méfiance des investisseurs68, nuisant au marché dans sa globalité.

Ce flou législatif peut être intentionnel, par exemple en matière d'investissement socialement responsable, la Commission a indiqué en 2011 qu'elle ne souhaitait pas donner une définition normative qui déboucherait sur un corset réglementaire. Qu'au contraire, elle préférait proposer une description ouverte, reposant sur des principes communs à la plupart

66AMF, Recommandation - DOC-2016-13 « Responsabilité sociale, sociétale et environnementale », 28 novembre 2016, p°4

67

68

AMF and AFM, Position Paper, «Green bond Prospectus», avril 2019

MOULIN Jean-Marc, « Obligations vertes - Green bonds - Principes des Obligations Vertes (Green

Loan Principles) » Revue de Droit bancaire et financier n° 3, Mai 2018, comm. 83

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des Etats membres afin de respecter la diversité des choix politiques, économiques et sociaux, ainsi que la capacité d'innovation des entrepreneurs sociaux69.

Est lié à ce problème la profusion de normes/labels et possibilités de contrôle, qui peut être source de confusion pour les investisseurs. D'autant que tous ne se valent pas, ou n'analysent pas les mêmes données. Par exemple, les agences de notations extra-financières établissent leurs notations à partir de documents publics, de questionnaires, d'informations fournies par les entreprises, ou de rencontres avec les dirigeants. Chaque agence a sa propre méthodologie, ce qui ne simplifie pas la comparaison des notations70. Certaines évaluations et contrôles restent très opaques, or cette opacité constitue un risque voire un indice71 de l'absence d'examen impartial.

Il peut également exister un certain flou du fait de la prise en compte des projets qui polluent mais polluent moins que leurs analogues, et qui pourront être certifiés comme étant verts au même titre que des projets ne polluant pas du tout.

La volonté de la Commission européenne de développer un label européen pour les obligations vertes, plus précisément « développer une labellisation fiable72 » fait écho au manque de fiabilité des labels existants.

Deuxièmement, cette absence de définition a pour corollaire une absence de contrôle. Actuellement aucun contrôle n'est par exemple assuré par L'AMF, qui ne garantit que la transparence de l'information et le suivi de la cotation, elle ne peut pas effectuer de contrôle sur le fond du caractère vert et sur l'usage des fonds. C'est d'ailleurs pourquoi l'autorité « recommande aux émetteurs de veiller à la transparence de l'information donnée aux

69 Communication de la Commission au parlement européen, au conseil, au comité économique et social européen et au comité des régions, « Initiative pour l'entrepreneuriat social Construire un écosystème pour promouvoir les entreprises sociales au coeur de l'économie et de l'innovation sociales » /* COM/2011/0682 final https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=CELEX: 52011DC0682

70 ROUX Michel, La Finance responsable, Broché, 18 avril 2018, p°113

71 MARRET (J-L.), « Acteurs privés et questions sociales transnationales, l'exemple des initiatives et enjeux en matière de codes de conduite, de labels sociaux et d'investissement », Annuaire Français de Relations Internationales, 2001, vol. 2, p. 997

72Communication de la Commission, « Initiative pour l'entrepreneuriat social Construire un écosystème pour promouvoir les entreprises sociales au coeur de l'économie et de l'innovation sociales » /* COM/2011/0682 final, p°6

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investisseurs tant à l'occasion de l'émission des obligations (É) que pendant leur durée de vie73». L'AMF et l'AFM relèvent que si certains émetteurs souscrivent volontairement aux standards des associations telles que les Green Bond Principles, les informations se situent en dehors du prospectus, donc rien ne permet de s'assurer que l'émetteur continue de se soumettre à ces obligations durant toute la maturité de l'obligation. Ainsi l'absence d'information obligatoire dans le prospectus augmente le risque de greenwashing car rien n'empêcherait l'émetteur de d'arrêter le reporting périodique ou la vérification par un tiers à tout moment74.

$2. L'exemple de ces dérives illustré par le greenwashing

Les problèmes que nous avons relevés s'illustrent notamment par la pratique dénommée « greenwashing ».

Le « Greenwashing » ou l'écoblanchiment peut être défini comme « la pratique consistant à commercialiser comme respectueux de l'environnement un produit financier qui en réalité, ne satisfait pas à des normes environnementales de base, afin d'obtenir un avantage concurrentiel indu75».

Dans rapport publié en 2017, l'OCDE rappelle ce risque et requiert une plus grande transparence pour l'éviter. WWF fait également état de la réalité du greenwashing76.

Les obligations vertes certifiées ne représentent qu'une petite part des obligations vertes émises 77 . « Dans le cas de la Chine, seulement 10 % des obligations vertes vendues l'an dernier ont fait l'objet d'une vérification indépendante de l'utilisation du produit78

73 AMF, Recommandation Responsabilité sociale, sociétale et environnementale - DOC-2016-13, p°4

74 AMF and AFM, Position Paper, «Green bond Prospectus», avril 2019

75Proposition de règlement du parlement européen et du conseil sur l'établissement d'un cadre pour favoriser les investissements durables, COM/2018/353 final, https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/?uri=CELEX%3A52018PC0353

76

WWF, Rapport « Les obligations vertes doivent tenir leurs promesses ! », p°8, 2016 https://

www.wwf.fr/sites/default/files/doc-2017-07/160610 rapport les obligations vertes.pdf

77ATTAC, La «finance verte» est-elle vraiment verte ? » Décembre 2017, https://france.attac.org/ IMG/pdf/rapportfinancevertevf.pdf?pk campaign=Infolettre-1183&pk kwd=france-attac-org-img-pdf

78 MILHENCH Claire, REUTERS, «Emerging climate bonds boom, but are they really green?» 18 aout 2017 https://www.reuters.com/article/us-emerging-bonds-green/emerging-climate-bonds-boom-but-are-they-really-green-idUSKCN1AY1F4

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L'émission obligataire de la Chine fût par ailleurs critiquée car elle autorisait le financement de centrales électriques au charbon, même si les nouvelles installations sont plus propres que les précédentes. La perception de ce qui est vert diffère79. De telles disparités peuvent étouffer les flux transfrontaliers de capitaux verts.

Même lorsque les obligations sont certifiées, le doute peut subsister. En témoigne en 2012 le label ISR de Novethic fustigé après un reportage révélant la présence de compagnies pétrolières au sein de fonds labellisés ISR80.

Les dénonciations opérées par les associations mettent également en lumière la véracité de cette pratique. Comme on a déjà pu le citer, le « prix Pinocchio » a pour but de dénoncer les impacts négatifs des entreprises multinationales, notamment celles qui pratiquent le Greenwashing81. Par exemple, l'émission obligataire lancée par GDF Suez de 2,5 milliards d'euros a été vivement critiquée car des soupçons portent sur l'utilisation des fonds levés qui auraient servis à financer des barrages en Amazonie ayant des conséquences désastreuses pour les populations et les écosystèmes locaux82. Les critiques portent notamment sur les critères d'éligibilité que GDF Suez a mis au point en collaboration avec l'agence de notation sociale Vigeo, lesquels couvrent cinq domaines formulés de manière générale et peu précise 83, l'agence de notation ne s'appuie par ailleurs que sur les informations fournies par GDF Suez et ses actionnaires84.

79 PRONINA Lyubov, «What Are Green Bonds and How `Green' Is Green?» Bloomberg Businessweek https://www.bloomberg.com/news/articles/2019-03-24/what-are-green-bonds-and-how-green-is-green-quicktake

80

81

ROUX Michel, La Finance responsable, p°115

« Qui sommes-nous? » Prix-pinocchio.org, http://www.prix-pinocchio.org/qui-sommes-nous/

82ATTAC, La «finance verte» est-elle vraiment verte ? » Décembre 2017, p°13, et, OBSERVATOIRE DES MULTINATIONALES, « Quand la finance verte détruit l'Amazonie », 12 novembre 2014, http:// multinationales.org/Quand-la-finance-verte-detruit-l-Amazonie

83 A savoir, la protection de l'environnement, la contribution au développement local et au bien-être des communautés locales, le respect des principes éthiques et d'équité envers les fournisseurs et sous-traitants, la gestion des ressources humaines et la gouvernance des projets sélectionnés.

84 VIGEO EIRIS, «Second party opinion on the sustainability of engie's green bond issued in September 2017», p°10, http://www.engie.com/wp-content/uploads/ 2017/09/20170917 engie green-bond second-opinion vf.pdf

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Ces doutes mettent en péril la crédibilité du marché obligataire vert, et les pratiques de greenwashing sont autant dénoncés par les associations environnementales que les émetteurs d'obligations vertes, soucieux de ne pas perdre la confiance des investisseurs.

Chapitre 2 : Contraindre les acteurs à respecter les engagements auxquels ils ont volontairement souscrit

Face aux risques de greenwashing, pourrait-on utiliser les outils juridiques déjà existants afin de contraindre les émetteurs à respecter les obligations auxquelles ils ont volontairement souscrit ?

Section 1 : La responsabilité pour manquement aux engagements contractuels

Serait-il envisageable d'invoquer la responsabilité pour faute, et plus précisément le non-respect de la condition pour la levée de fonds afin de sanctionner l'émetteur indélicat ?

$1. La responsabilité pour faute

La responsabilité pour faute pourrait permettre d'engager la responsabilité d'un émetteur en cas d'utilisation frauduleuse des fonds. Le préjudice serait ainsi caractérisé par la tromperie et l'abus de confiance.

En cas de tromperie intentionnelle de l'émetteur, l'escroquerie pourrait même être caractérisée si l'investisseur parvenait à prouver cette intention85.

En théorie le souscripteur pourrait intenter une action en nullité contre l'émetteur de l'émission pour vice du consentement, notamment pour absence de cause. Philippe Thomas86 relève toutefois qu'établir la preuve du vice de consentement pourrait être très difficile, tout comme la démonstration d'un préjudice.

Il ne ressort pas de la jurisprudence que ces griefs fondés sur une responsabilité pour faute aient déjà été invoqués dans le cadre d'une émission d'obligations vertes.

85

THOMAS Philippe « Nature juridique des green bonds », Revue de Droit bancaire et financier n° 6,

86

Ibid

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$2. Levée de fonds sous condition d'utilisation

La raison de s'engager des obligataires repose sur la promesse de l'émetteur d'utiliser ces fonds en faveur d'une cause climatique. Ainsi ces promesses peuvent s'analyser comme des levées de fonds sous condition d'utilisation.

Selon Philippe Thomas « en pratique, c'est parce que l'émetteur a pris ces engagements qu'il obtient les capitaux, ce qui correspond bien à une levée de fonds sous condition d'utilisation». Selon cet auteur, le consentement des investisseurs est fondé sur le caractère vert de l'émission. C'est ce caractère qui fut décisif lors de la décision d'investissement, ainsi si l'émission n'était pas verte, ils auraient investi dans d'autres titres. C'est donc une condition à l'investissement. Il évoque également le reporting spécifique auquel l'émetteur peut se conformer ou l'intervention d'auditeurs jusqu'à la maturité comme des points qui renforcent cette idée d'engagement pris par l'émetteur87.

Un rapport de WWF évoque une « promesse » verte. Selon ce rapport, « la crédibilité de ces promesses vertes est l'un des éléments les plus importants d'une obligation verte, au même titre que le degré de solvabilité de l'émetteur pour titre de créance. Les obligations vertes doivent posséder ces deux caractéristiques88».

Cette vision est partagée par d'autres auteurs qui relèvent l'importance des valeurs lors de l'investissement de la clientèle privée, de l'impact de celles-ci sur le choix entre plusieurs investissements89.

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"Il ne faut pas de tout pour faire un monde. Il faut du bonheur et rien d'autre"   Paul Eluard