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La responsabilité de l'état en matiàƒÂ¨re de protection du patrimoine mondial : cas du Burkina Faso et des ruines de Loropéni


par Ada Rudolph AZIKIBA
Université de Limoges - Master2 2015
  

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PARAGRAPHE II : LES PROCÉDÉS DE RÉPARATION

Des formes de réparation des infractions à l'égard de l'environnement existent, en témoigne le contenu de certains traités régionaux ou internationaux. Mais ces instruments internationaux renvoient dans bien des cas aux ordres juridiques internes lorsque ceux-ci ne contreviennent pas au droit international63(*).  Dans une approche classique, la responsabilité internationale se limite donc aux obligations civile (A) et pénale (B) de réparer le préjudice résultant du manquement à l'obligation de conserver l'héritage commun. Ces obligations ressortissent de fait de la compétence de la Cour Internationale de Justice ainsi que des juridictions civiles et pénales dans les ordres juridiques internes.64(*)

A- Au civil

L'obligation civile en matière de répression des atteintes à l'égard des éléments du patrimoine mondial vise surtout la restitution du bien à valeur universelle exceptionnelle en l'état. Elle ne concerne pas directement l'État en tant que personne morale mais il convient d'en déterminer les contours à raison du regard que celui-ci doit avoir à l'égard de la nécessité pour ses citoyens de participer à cette protection et d'une manière conforme à la loi. L'obligation civile peut trouver sa justification au niveau international ou communautaire dans la Déclaration de Rio sur l'environnement et le développement de 1992, de même que la Convention sur la responsabilité civile des dommages résultant d'activités dangereuses pour l'environnement ou Convention de Luganode 199365(*).

L'application de cette obligation parait cependant curieuse d'autant plus que ce qui fait toute la valeur de certains biens, c'est leur aspect antique et ésotérique quasiment irremplaçables. Dans le fond, la mise en oeuvre de cette responsabilité est l'objet d'une action possessoire. Elle consiste en un compromis prévu au BURKINA FASO par le Décret N°2006-232/PRES/PM/MECV/MFB/MJ/MATD du 30 mai 2006 portant définition des procédures et barèmes des transactions applicables aux infractions au Code de l'environnement. L'article 2 stipule en effet qu'« Au sens du présent décret, la transaction désigne le règlement à l'amiable par lequel l'administration de l'environnement propose aux auteurs des infractions l'abandon des poursuites pénales ou renonce à l'exécution d'une décision de justice en contrepartie du paiement d'une somme d'argent dont elle fixe elle-même le montant. ». La transaction n'est cependant pas admise dans les cas d'infractions commises en violation du Code de l'environnement et qualifiées crimes conformément au Code pénal. Selon les cas, le montant de la transaction va de dix mille francs CFA à dix millions de francs CFA.66(*)Mais si ces sanctions relèvent apparemment de l'ordre civil uniquement, c'est bien au regard des mesures prises par l'administration environnementale qui reçoit également pleine compétence puisqu'elle n'est pas tenue de s'adresser au juge si elle estime cela nécessaire. Ces sanctions consistent souvent à la suspension ou au retrait de permis de chasse, du permis de construire, à la fermeture des établissements dangereux, etc. Ces mesures justifient en partie l'inexistence au niveau national d'une responsabilité pour crime contre l'environnement.67(*)

B- Au pénal

En l'absence de règles internationales gouvernant la responsabilité pénale en matière environnementale, il faut se référer au droit interne tel que précisé par la majeure partie des conventions internationales en la matière. Ainsi en est-il de la Convention de Bâle sur le contrôle des mouvements transfrontières de déchets dangereux et de leur élimination (1989), de la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction (CITES) de 1973 ou de la Convention sur la protection de l'environnement par le droit pénal de 1988.68(*)C'est ainsi qu'en droit interne burkinabè, nonobstant les dispositions du Code de l'environnement69(*), les articles 194 et 195 du Code pénal prévoient des peines privatives de liberté assorties éventuellement d'une amende s'agissant des délits d'atteinte à l'environnement ou de dégradation des monuments. L'article 195 stipule en effet que : « Est puni d'un emprisonnement de deux mois à deux ans et d'une amende de 50.000 à 600.000 francs, quiconque volontairement détruit, abat, mutile ou dégrade :

- soit des monuments, statues, tableaux ou autres objets destinés à l'utilité ou à la décoration publique et élevés ou placés par l'autorité publique ou avec son autorisation ;

- soit des monuments, statues, tableaux ou autres objets d'art quelconques placés dans des musées, lieux réservés aux cultes ou autres édifices ouverts au public ;

- soit des monuments, sites, tableaux ou autres objets naturels inscrits ou classés comme patrimoine national. ».

La mise en oeuvre de ces actes de répression est définie par ailleurs à travers l'article 65 du Code de l'environnement, qui identifie les autorités en charge des poursuites. On retiendra :

- les officiers de police judiciaire ;

- les agents de police judiciaire ;

- les agents assermentés des Eaux et Forêts ;

- les agents assermentés des services de l'Hygiène et de l'Assainissement, de l'Agriculture et de l'Élevage, de l'Inspection du Travail ;

- les agents municipaux assermentés, chargés de la protection de l'Environnement et/ou de la Sécurité ;

- les agents assermentés de l'inspection économique ;

- tous autres agents assermentés, mandatés par le Ministre chargé de l'Environnement.

À ces catégories de personnes, il convient d'ajouter le Ministère public près la juridiction compétente en dépit du défaut de saisine en la matière. Cet ensemble de moyens est supposé assurer l'effectivité de la répression des actes pouvant porter atteinte à l'héritage commun. Dans la jurisprudence nationale cependant, on constate une absence de décisions orientées spécifiquement dans ce domaine ; il n'y a que le cadre plus général de l'environnement qui offre quelques cas au juge répressif. Mais là aussi, il s'agit d'affaires liées aux conflits agriculteurs-éleveurs, aux cas de braconnages et plus récemment encore à l'exploitation minière. Ces cas donnent rarement lieu à des peines privatives de liberté sauf s'ils sont accompagnés d'homicide, auquel cas c'est ce dernier aspect qui est le plus réprimé. Un autre facteur est celui du caractère restreint des actes pouvant faire l'objet de sanction par le juge pénal. Il s'agit en effet du non-respect de l'autorisation préalable, des mesures d'interdiction et des actes faisant obstacle au personnel assermenté chargé des fonctions de contrôle70(*). De tels cas ne réservent pas une place de choix aux éléments fondamentaux en matière de préservation de l'environnement si bien que dans la pratique, lorsque la procédure judiciaire est actionnée, elle vise finalement à déclencher le compromis, c'est-à-dire la compensation. Celle-ci doit être entendue comme un acte palliatif qui sert de dédommagement pour le préjudice environnemental, ainsi qu'une sorte d'éviction du juge pénal dans ses prérogatives à prononcer des peines privatives de liberté. Cette forme de compétence n'exclut pas les acteurs spécifiques que sont les ONG, puisqu'ils exercent des activités de puissance publique qui ressortissent en principe de la compétence de l'État. À ce propos, la société civile burkinabè, en termes d'association, ne comporte pas assez d'acteurs dont les activités sont spécifiques à la protection du patrimoine de l'humanitéen dehors de l'Association Yaay I Sire (AYIS) ainsi que l'Association des Jeunes Burkinabè pour l'Environnement/Tinga Nayi Yilemdé, en abrégé AJBE/TNY. Cependant, le cadre général de l'environnement offre aux associations nationales une possibilité de saisine quidissipe quelques réserves sur la capacité de ces acteurs à agir en matière pénale. En effet, l'article 111 du nouveau Code de l'environnement71(*) ne pose pratiquement pas de conditionnalité quant à la saisine des juridictions pénales par les associations de défense pour l'environnement sous réserve que cette action entre dans l'objet social de l'association. En principe donc, le législateur national prévoit que l'action d'une association pour la protection du patrimoine mondial n'est recevable que dans le cadre d'infractions commises contre la préservation de ce patrimoine tel qu'il est défini par la Convention du patrimoine mondial.72(*)

Dans l'ensemble, le droit international n'entend pas porter préjudice à l'autorité de l'État par des conventions particulières,essentiellement parce que les sujets de ce droit en sont aussi les acteurs, mais aussi parce que c'est la sphère nationale qui permet véritablement de contrôler les mécanismes de sa mise en oeuvre.Aussi, le développement du droit international de l'environnement tant dans la variété que dans la quantité contraste avec l'avantage que les États pourraient directement tirer suite à l'adhésion à une convention internationale en matière environnementale. La spécificité des États est donc un facteur déterminant dans l'application du droit international en droit interne.

PARTIE II:

LA PORTÉE DE LA COMPÉTENCE ÉTATIQUE À L'ÉGARD DES ÉLÉMENTS DU PATRIMOINE MONDIAL

La protection du patrimoine mondial a des effets dans l'ordre juridique interne ; et même si traditionnellementle respect du droit international par l'État relève d'une présomption, on ne peut s'interdire d'interroger les « institutions » afin de passer en revue les modalités pratiques d'application du droit international. Ces développements laisseront apparaitre de façon tacite l'importance du juge nationaldans son rôle d'exécution ou d'interprétation de ce droit. D'une manière pratique,nous examinerons ces aspects à la lumière de la protection faite à l'égard des Ruines de Loropéni au BURKINA FASO (Chapitre I). Nous envisagerons également des perspectives pour une meilleure efficacité dans la protection de ces ruines (Chapitre II) en tant qu'élément de l'ensemble de l'héritage de l'humanité.

* 63 Le Traité européen pour la protection de l'environnement par le droit pénal adoptée à Strasbourg en 1998 dispose d'ailleurs en son article 6 que : «Chaque Partie adopte, conformément aux textes internationaux pertinents, les mesures appropriées qui pourraient être nécessaires pour rendre les infractions, établies conformément aux articles 2 et 3, passibles de sanctions pénales qui tiennent compte de leur degré de gravité. Ces sanctions doivent permettre l'emprisonnement et les sanctions pécuniaires, et peuvent inclure la remise en l'état de l'environnement. » 

* 64 Articles 34 à 38 du Statut de Rome. Voir aussi D. Anzilotti, La responsabilité internationale des États à raison des dommages soufferts par des étrangers, Pedone, Paris, 1906. Au BURKINA FASO, La procédure civile et pénale est régie par la Loi 10-93/AN du 17 mai 1993 portant Organisation judiciaire. Cette loi a été modifiée par les Lois N°44-94//AN du 24 novembre 1994, N°28-2004/AN du 08 septembre 2004 et N°22-2009/AN du 12 mai 2009. Elle détermine les juridictions civiles et pénales de droit commun et d'exception capables de connaitre des affaires lies concernant.

* 65 Exemple avec le Principe 13 de la Déclaration de Rio.

* 66Rapport de la Cour de cassation du Burkina-Faso sur le droit pénal de l'environnement, Noaga Barthélemy SININI.

* 67 Vincent ZAKANE, Problématique de l'effectivité du droit de l'environnement en Afrique : l'exemple du BURKINA FASO.

* 68 Séverine NADAUD, Cours de Master 2 DICE sur la responsabilité internationale en matière d'environnement.

* 69 Les articles 79 et ss. du Code de l'environnement burkinabè prévoient en effet des sanctions aux infractions en matière de préservation de l'environnement. Ces sanctions, tout comme celles prévues par le Code pénal consistent en des peines privatives de liberté et/ou d'une amende calculée au prorata de l'infraction commise.

* 70 Amidou GARANÉ, Le cadre juridique de la protection de l'environnement au BURKINA FASO, Annuaire Africain de Droit International (AADI), Vol.4, 1996, 153-193.

* 71« Les associations de protection de l'environnement sont habilitées à demander en justice la poursuite des faits prévus et punis par la loi pénale à condition que l'infraction remette en cause les intérêts pour la défense desquels elles ont été constituées. »

* 72 Bilgho T. Rodrigue, Le droit de saisine des juridictions pénales par les associations de protection de l'environnement : une innovation majeure en droit pénal de l'environnement au Burkina.

L'analyste pense en effet que «  L'absence de conditionnalité dans l'article 111 pour la saisine des juridictions pénales constitue une lacune du législateur parce que l'on ne peut permettre à n'importe quelle association d'introduire une action en justice pour la protection de l'environnement ».

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"Aux âmes bien nées, la valeur n'attend point le nombre des années"   Corneille