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Le caractère supranational de la banque centrale européenne au sein du mécanisme de surveillance unique.


par Thibault Fava
Université Paris-Dauphine - Master 2 droit des affaires 2015
  

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B) L'importance cruciale des autorités nationales des États membres participants dont la monnaie n'est pas l'Euro dans le cadre d'une coopération rapprochée avec la BCE

Conformément à l'article 139 du TFUE, certains Etats membres de l'Union européenne ne figurent

143 Article 4(2) du Règlement (UE) n° 468/2014 de la Banque centrale européenne du 16 avril 2014

144 Jl rapporto tra BCE e autorità nazionali nell'esercizio della vigilanza-Intervento di Carmelo Barbagallo, 26 février 2014

145 Article 12(4) du Règlement (UE) n°1024/2013 du Conseil du 15 octobre 2013

146 The single supervisory mechanism or «SSM«, part one of the Banking Union by Eddy Wymeersch

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pas dans la zone euro. Cependant, il n'est pas exclu qu'ils puissent participer au Mécanisme de surveillance unique par le biais d'une coopération rapprochée. Le régime de la coopération rapprochée se terminerait logiquement dans le cas où un Etat membre antérieurement en dehors de la zone euro venait à intégrer cette dernière conformément à l'article 140 du TFUE. Mais évidemment, la coopération peut se terminer pour d'autres raisons. Cette coopération comporte néanmoins des différences de régime substantielles.

La raison qui peut pousser un Etat membre hors de la zone euro à rejoindre le Mécanisme unique pourrait être l'influence des marchés de capitaux pour lesquels une réglementation, ainsi qu'une surveillance unique, sont un gage de qualité. Cela pourrait aider les banques des pays en coopération rapprochée à faire parvenir des capitaux à des conditions préférables.

Dans le cadre de la coopération rapprochée, la Banque centrale européenne n'a pas le pouvoir d'agir directement auprès des établissements de crédit, fussent-ils importants147. Elle doit donc passer par les autorités nationales des États membres participants hors de la zone euro (1). Ces dernières n'ont, de plus, pas de contraintes réelles quant à la bonne application des instructions qui leur seront données par la BCE (2).

1) L'impossibilité pour la banque centrale européenne d'agir directement auprès des établissements de crédit importants situés dans des États membres participants au MSU dont la monnaie n'est pas l'Euro

D'après le règlement cadre, lorsque la Banque centrale souhaite adopter une mesure liée à ses missions, elle doit, dans le cas d'une entité importante, adresser une instruction « générale ou spécifique, une demande ou une orientation » demandant la prise d'une décision de surveillance prudentielle à l'égard de cette entité importante. Lorsqu'est en cause une entité moins importante, la BCE ne peut adresser qu'une instruction générale ou une orientation148.

L'autorité compétente doit ensuite prendre toutes les mesures nécessaires pour se conformer aux instructions de la Banque centrale et l'informer des mesures qu'elle a prises149.

La Banque centrale européenne n'a donc pas de prise directe sur les établissements de crédit importants hors de la zone euro. Elle doit passer par les autorités nationales qui ont alors un rôle primordial.

147 Article 107(2) du Règlement (UE) n° 468/2014 de la Banque centrale européenne du 16 avril 2014

148 Article 108(2) du Règlement (UE) n° 468/2014 de la Banque centrale européenne du 16 avril 2014

149 Article 108(5) du Règlement (UE) n° 468/2014 de la Banque centrale européenne du 16 avril 2014

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Ce même schéma se vérifie également lorsque la BCE est censée adresser une décision à une entité importante. Elle ne peut le faire directement dans le cadre de la coopération rapprochée et doit pareillement adresser des « instructions à l'autorité compétente nationale ». Cette dernière transmet une décision à l'établissement conformément aux instructions150.

L'importance des autorités nationales prend encore plus d'ampleur lorsqu'il s'agit d'effectuer des enquêtes dans des établissements importants hors de la zone euro. En effet, la BCE ne pourra procéder à ces enquêtes et ne fera qu'adresser des instructions aux autorités nationales qui en seront chargées. Cependant, il est prévu que des membres du personnel de la BCE soient désignés en tant qu'observateurs de toute enquête151.

Quelle conséquence aura le non respect, par l'autorité nationale, des diverses instructions qui lui sont adressées par la BCE ?

2) L'absence de conséquences coercitives réelles en cas de manquement par une autorité nationale en coopération rapprochée à une instruction de la BCE

Selon le règlement MSU, lorsque l'autorité nationale ne respecte par les instructions de la BCE, cette dernière lui adresse un avertissement et, au bout de quinze jours, elle peut décider de suspendre ou de résilier la coopération rapprochée152. La BCE n'a donc aucun moyen d'agir auprès des entités hors de la zone euro et n'a, comme seul moyen de pression, que la résiliation. Il ne devrait pas être fait souvent application de cette mesure en raison du fait que la Banque centrale n'a pas intérêt à faire sortir les États membres de la zone MSU. Il est préférable, pour la BCE, que les autorités n'appliquent ses instructions que partiellement plutôt que nullement. De plus, cette disposition n'est pas reprise dans le règlement cadre censé donner des précisions de l'application du règlement MSU concernant les rôles respectifs des autorités nationales et de la Banque centrale.

L'autorité nationale peut, à tout moment « dès l'expiration d'une période de trois ans après la date de publication » de la décision concernant la coopération rapprochée, demander à la BCE de résilier la coopération rapprochée153. Cependant, cette configuration est exclusive du cas où il y aurait un désaccord entre la BCE et l'autorité nationale.

150 Article 110(3) du Règlement (UE) n° 468/2014 de la Banque centrale européenne du 16 avril 2014

151 Article 114 du Règlement (UE) n° 468/2014 de la Banque centrale européenne du 16 avril 2014

152 Article 7(5) du Règlement (UE) n°1024/2013 du Conseil du 15 octobre 2013

153 Article 7(6) du Règlement (UE) n°1024/2013 du Conseil du 15 octobre 2013

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D'après le règlement cadre, lorsque l'autorité compétente nationale n'est pas en accord avec le projet de décision du conseil de surveillance prudentielle de la BCE qu'elle est censée appliquer, elle peut notifier au Conseil des gouverneurs le motif de son désaccord. Ce dernier se prononce sur la question et informe l'autorité des motifs de sa décision. Ensuite, L'État membre participant en coopération rapprochée « peut demander à la BCE de mettre un terme avec effet immédiat à la coopération rapprochée »154. L'État n'est alors plus lié par aucune décision ultérieure et n'a pas besoin d'attendre le délai de trois ans sus-cité.

Il en va de même lorsque le désaccord porte sur une objection du Conseil des gouverneurs à un projet de décision du conseil de surveillance prudentielle. Dans ce cas, si le conseil des gouverneurs décide de confirmer son objection, l'autorité nationale peut, « dans un délai de cinq jours » décider qu'elle ne sera plus liée par aucune décision « prise à la suite de la modification du projet complet de décision initial ayant donné lieu à l'objection du conseil des gouverneurs ». Dans ce dernier cas, la BCE semble également pouvoir envisager l'éventuelle suspension ou fin de coopération rapprochée155.

Il n'existe donc pas de réelle sanction du non-respect, par l'autorité nationale en coopération rapprochée, des instructions de la BCE. En effet, en cas de désaccord, la seule conséquence est la fin de la coopération rapprochée. Il est néanmoins possible d'avoir diverses interprétations de ces dispositions. Dans le premier cas l'autorité nationale semble pouvoir se retirer immédiatement de la coopération rapprochée sans même devoir exécuter la décision avec laquelle elle n'est pas en accord. Malgré tout, le règlement parle de décisions ultérieures ; faut il alors en conclure que la fin de la coopération rapprochée ne prendra effet qu'à la suite de la mise en oeuvre de la dernière décision ? Cette interprétation est peu plausible puisque la BCE n'a pas de compétence directe sur les entités situées hors de la zone euro et ne peut donc pas contraindre l'autorité nationale. Dans la seconde situation, le schéma est plus clair puisque le règlement dispose que la coopération rapprochée prendra fin à la suite de l'application de la décision ayant donné lieu au désaccord, bien qu'il soit difficile de comprendre comment la BCE pourra obtenir l'application effective de la décision modifiée à la suite de l'opposition du Conseil des gouverneurs.

Il sera intéressant d'analyser le comportement des acteurs dans le cadre de la coopération rapprochée. La Banque centrale devra sans doute se contenter d'une application partielle de ses instructions par les autorités nationales. Il est probable qu'elle ne sanctionne pas leur non respect par des ruptures

154 Article 118 du Règlement (UE) n° 468/2014 de la Banque centrale européenne du 16 avril 2014

155 Article 119 du Règlement (UE) n° 468/2014 de la Banque centrale européenne du 16 avril 2014

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systématiques de la coopération. Les autorités nationales, quant à elles, n'ont pas particulièrement intérêt à se retirer de la coopération si elles souhaitent attirer davantage de capitaux. Il en résulte donc que tant la BCE que les autorités nationales auront intérêt à rester dans le cadre de la coopération rapprochée.

Les autorités nationales ont donc beaucoup plus de poids lorsqu'elles sont en dehors de la zone euro puisqu'elles agissent directement auprès des établissements importants sur instruction de la BCE. De plus le non respect de ces instructions ne semble pas avoir de conséquences coercitives pour les autorités qui, en cas de désaccord, sont libres de se retirer sans forcément craindre une remise en cause de la coopération par la BCE. Ces schémas se justifient en fait car les États membres en dehors de la zone euro ne sont pas représentés au sein du Conseil des gouverneurs et n'ont donc pas de force réelle sur les diverses prises de décision156. Il est normal qu'ils puissent sortir à tout moment de la coopération.

Le fonctionnement du MSU semble également accorder une place principale aux autorités nationales lorsqu'elles agissent auprès d'entités moins importantes. Dans quelle mesure conserveront-elle un pouvoir de surveillance directe ?

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"Il ne faut pas de tout pour faire un monde. Il faut du bonheur et rien d'autre"   Paul Eluard