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Les réfugiés politiques et les demandeurs d'asile à Dijon

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par Nassiri ATTAR, Thomas ROBERT et Rémi SANTIARD
Faculté de Médecine, université de Bourgogne - D.U Action Humanitaire 2008
  

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2) DEVENIR ou la naturalisation : la solution ?

« devenir : du latin devenire :arriver à ; traduit le passage d'un état à un autre ; mouvement progressif par lequel les choses se font ou se transforment ; avenir ou futur de quelqu'un ; évolution dans l'histoire de la réalité des choses, du monde. »

Grand Larousse Universel, Tome 5, Edition Larousse 1997, page 3196

Les principales conditions à remplir pour demander la naturalisation en tant que réfugié sont d'avoir son statut en règle, « d'être assimilé à la société française » (avoir une pratique suffisante du français) et « d'être de bonne vie et de bonnes moeurs » (ne pas avoir subi certaines condamnations). Cette demande se fait personnellement à la préfecture, qui est transmise au Ministère des Affaires Etrangères, celui-ci, en cas de décision favorable, établira un état-civil français (acte de naissance français). Lors de la remise officielle d'un livret de nationalité, la naturalisation est rendue officielle, en présence du préfet ou de son représentant, par la délivrance d'une lettre en tant que citoyen français du Président de la République, une ampliation du décret signé par le Premier Ministre et le Ministre chargé de la naturalisation.

Dico dû passer deux entretiens et un test de capacité à l'expression française pour obtenir sa carte d'identité nationale; ces examens se sont déroulés dans les bureaux du Commissariat de Police de Dijon.

En 2006, 40.28% des nouveaux français étaient auparavant des réfugiés politiques.

Une simple finalité administrative ?

Cette idée est généralement confuse dans l'esprit des réfugiés. Pour eux, c'est d'abord une nécessité administrative, une suite logique au long cheminement accompli. Sans cette procédure de naturalisation, les personnes interrogées ressentent un manque de reconnaissance. Un logement, une adresse, un travail ou une petite retraite, n'ont pas la même valeur officielle que la nationalité française. Ils sentent le besoin d'obtenir aux yeux de leur pays d'accueil une identité véritablement légitime.

Une protection ?

Il ne faut pas oublier qu'avant de venir en France, les personnes interrogées dans le cadre du mémoire, ont souvent fuit leur pays pour des régions limitrophes. Ils ont déjà subi un passé de réfugié : pour Cyprien ce fut le Mozambique, pour Omar la Libye, pour Hélène la Russie, et pour Dico la Russie. Certains réfugiés vécurent ainsi des périodes répétées où l'idée d'égalité avec les autres nationaux n'était que de façade. Un sentiment de racisme, de méfiance permanent règne souvent à l'encontre des minorités ethniques dans les différents Etats que les demandeurs d'asile peuvent être amenés à traverser. De 1994 à 1999, la famille de Dico avait l'obligation de montrer en permanence ses papiers1, subissant parfois les brimades de la milice et des autorités russes. Les personnes étrangères de couleur devaient souvent montrer leur autorisation de séjour aux immigrés ou alors leur donner de l'argent pour pouvoir circuler librement. Après 1999, sa famille ne reçut plus d'autorisation de séjour (ce fut le cas pour les réfugiés établis en Russie); commença alors une période de clandestinité.

« Depuis la guerre des tchétchènes tout le temps la police demande les papiers ...elle regarde les personnes noires ... ou t 'as autorisation ou alors tu payes quelque chose... »

Paroles de Dico

1 L'autorisation de séjour est renouvelable tous les 6 mois

Pour les russes, les personnes noires représentent les immigrés, ceux qui se sont réfugiés dans les régions frontalières du Caucase, ceux qui ne sont pas russes. Beaucoup de régions ont obtenu leurs indépendances depuis la création de la CEI. L'effondrement de l'empire soviétique, et depuis 1999, avec la guerre entre la Russie et la Tchétchénie, les pays caucasiens ont vu fuir les minorités de leur pays vers d'autres régions notamment la Russie. Cette période charnière a engendré beaucoup de conflits internes sur certaines régions litigieuses, sur les différentes ethnies ou confessions religieuses. Cela a eu comme conséquence la montée d'un racisme nationaliste russe envers cette immigration. Ce fut le conflit entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan qui obligea la famille de Dico à fuir son pays d'origine pour se réfugier en Russie1.

Hélène, de mère russe, et de père allemand, vivait en Géorgie avant de fuir vers la Russie2. Cyprien, lui, dût fuir le conflit rwandais, passant du Congo au Mozambique, poursuivi par des bandes organisées continuant à traquer les hutus hors de leurs frontières.

Toutes ces expériences traumatisantes expliquent que les refugiés voient souvent l'obtention de la nationalité française comme une protection contre le fantôme passé de la répression politique.

Par ailleurs, l'obtention de la nationalité française permet aussi aux personnes récemment naturalisées de pouvoir se projeter sur le long terme, de pouvoir renouer de véritables contacts avec la famille restée au pays. Installés en France, ils pensent souvent à faire venir leurs parents ou leur famille. Cette volonté de retrouver les siens naît d'un sentiment de solitude ou de culpabilité. Dico dut partir avec sa femme et sa fille, ils étaient alors âgés d'une vingtaine d'année. C'est son père qui a décidé que lui seul partirait, le passage coûtant trop cher, environ 10 000$, laissant derrière lui sa famille et celle de sa femme. Lorsqu'il eut la nationalité en 2005, il voulut repartir en Russie. Son père étant mort, il se sentit responsable de la sécurité de son frère, de sa propre mère et de la mère de sa femme restés en Russie. Son frère refusa de venir en France : il est de tradition chez les Arméniens qu'un homme ne doive pas laisser des femmes seules dans le besoin et il ne pouvait donc pas venir en France et laisser notamment sa mère, qui elle était trop âgée et refusait de venir en France construire une nouvelle vie.

Certes, ils ont acquis leur carte d'identité française, obtenu un logement, et pour certain un travail, mais ils ont un passé enraciné dans des conflits ethniques et géopolitiques que le système administratif ne peut résoudre par un simple tampon et une signature.

1 Conflit entre 1988 et 1994, sur l'occupation arménienne du territoire du Haut-Karabagh situé en Azerbaïdjan, conflit qui ne s'est toujours pas apaisé et qui a provoqué la répression et le déplacement de population arménienne

2 conflit en Abkhazie, région séparatiste de Géorgie, qui dès 1992 demanda son indépendance

Quelle identité pour ces nouveaux français ?

« ...

- Vous vous sentez de quel pays ? France, Russie, Géorgie ?

- Je ne sais pas ... c'est trop dur...

- Dans le coeur ?

- C'est les enfants...

- C'est le pays de vos enfants ?

- Voir les enfants ... moi habite en France... c'est fini pour moi Georgia.... »

Entretien avec Hélène

Pour les nouveaux Français, la question de leur état d'esprit et de leur possible projection dans l'avenir se pose. Pour Hélène, même si elle attend toujours sa naturalisation, elle se sent française, ou plutôt, elle ne se sent plus géorgienne, voulant finir sa vie en France avec son petit jardin, sa retraite. Son fils, a lui obtenu la nationalité française, s'est marié avec une française, et est rentré dans l'armée. Etant plus jeune, et s'étant intégré par le travail, il se sent plus Français que sa mère.

Quant à Omar, il se sent Soudanais et français, mais c'est très flou ; son projet n'est pas de s'installer en France, en raison de sa formation, il a plutôt le désir de travailler dans les stations off-shore, à l'étranger.

Une famille, sa fille à l'école, un CDI, Dico est le plus inséré socialement ; mais là encore, il se sent Français, Arménien et Russe. Il ne pense pas repartir dans son pays mais plutôt s'installer définitivement ici, en France.

Entre les demandeurs d'asile, les réfugiés politiques et ceux devenus français, il y'a dans le cadre de cette étude un point commun qui les relie: le pays d'accueil. Leurs destins sont différents, leurs vies ne sont pas les mêmes et leurs ambitions divergent. La France devient pour eux une escale, une étape dans leurs vies. La constatation est que parmi les personnes intervenues dans les entretiens, personnes n'a dans le passé vraiment rêvé de vivre en France et certains prévoient même de retourner dans leur pays dés que cela leur sera possible. Ainsi, Venantia prévoit sérieusement de retourner au Congo si elle est naturalisé pour développer là bas un projet de développement d'établissements scolaires et contribuer au développement de son pays d'origine. Sous cet angle, Dijon semble aux yeux des demandeurs d'asile comme un quai d'une gare ou un hall d'aéroport : beaucoup se croisent, certains s'arrêtent, d'autres repartent, tout cela dans l'espoir d'arriver à un point ou le bonheur puisse être enfin trouvé et le quotidien en mesure de bénéficier d'un peu d'enchantement.

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"Ceux qui rêvent de jour ont conscience de bien des choses qui échappent à ceux qui rêvent de nuit"   Edgar Allan Poe